Pierre Bellemare comme vous ne l’avez jamais entendu ! C’est la promesse de ce nouveau podcast imaginé à partir des archives exceptionnelles du Service Patrimoine Sonore d’Europe 1.
Affaires criminelles, true crime, crimes, enquêtes, crimes historiques ou plus récents, crimes crapuleux, crimes familiaux, crimes inexpliqués surtout : Pierre Bellemare est le pionnier des grands conteurs de récits radiophoniques. Dans les années 70, cette voix culte d’Europe 1 a tenu en haleine les auditeurs avec ses histoires extraordinaires. Des histoires vraies de crimes en tout genre qui mettent en scène des personnages effrayants, bizarres ou fous. Des phrases à couper le souffle, des silences lourds de suspense, un univers de polar saisissant et puissant.
Avec un son remasterisé et un habillage modernisé, plongez ou replongez dans les grands récits extraordinaires de Pierre Bellemare.
Au début du XXème siècle, à Copenhague au Danemark, une secte religieuse basée sur le spiritisme voit le jour. En 1926, Karl, 17 ans, est introduit dans cette communauté. On dit que le jeune homme peut entrer en contact avec les esprits. En effet, Karl prétend d’abord pouvoir communiquer avec des artistes décédés comme Beethoven. Si ses prestations étaient à l’origine gratuites, elles sont maintenant rémunérées par les membres dans le but de passer du temps avec leurs proches décédés.
Grâce à son pouvoir de médium, Karl parvient à soutirer des sommes d'argent importantes à ces adeptes, au point de mener une vie aisée. Pire encore, en prétendant être possédé par l’âme d’un défunt dans son propre corps, le jeune Karl finit même par abuser intimement de ses proies.
Cela fait maintenant 13 ans que cela dure… Jusqu'où ira-t-il dans la supercherie ? La police parviendra-t-elle à mettre fin à ses escroqueries ? Pierre Bellemare raconte cette invraisemblable histoire dans cet épisode du podcast "Les récits extraordinaires de Pierre Bellemare", issu des archives d’Europe 1 et produit par Europe 1 Studio.
Retrouvez "Les Récits extraordinaires de Pierre Bellemare" sur : http://www.europe1.fr/emissions/les-recits-extraordinaires-de-pierre-bellemare
Affaires criminelles, true crime, crimes, enquêtes, crimes historiques ou plus récents, crimes crapuleux, crimes familiaux, crimes inexpliqués surtout : Pierre Bellemare est le pionnier des grands conteurs de récits radiophoniques. Dans les années 70, cette voix culte d’Europe 1 a tenu en haleine les auditeurs avec ses histoires extraordinaires. Des histoires vraies de crimes en tout genre qui mettent en scène des personnages effrayants, bizarres ou fous. Des phrases à couper le souffle, des silences lourds de suspense, un univers de polar saisissant et puissant.
Avec un son remasterisé et un habillage modernisé, plongez ou replongez dans les grands récits extraordinaires de Pierre Bellemare.
Au début du XXème siècle, à Copenhague au Danemark, une secte religieuse basée sur le spiritisme voit le jour. En 1926, Karl, 17 ans, est introduit dans cette communauté. On dit que le jeune homme peut entrer en contact avec les esprits. En effet, Karl prétend d’abord pouvoir communiquer avec des artistes décédés comme Beethoven. Si ses prestations étaient à l’origine gratuites, elles sont maintenant rémunérées par les membres dans le but de passer du temps avec leurs proches décédés.
Grâce à son pouvoir de médium, Karl parvient à soutirer des sommes d'argent importantes à ces adeptes, au point de mener une vie aisée. Pire encore, en prétendant être possédé par l’âme d’un défunt dans son propre corps, le jeune Karl finit même par abuser intimement de ses proies.
Cela fait maintenant 13 ans que cela dure… Jusqu'où ira-t-il dans la supercherie ? La police parviendra-t-elle à mettre fin à ses escroqueries ? Pierre Bellemare raconte cette invraisemblable histoire dans cet épisode du podcast "Les récits extraordinaires de Pierre Bellemare", issu des archives d’Europe 1 et produit par Europe 1 Studio.
Retrouvez "Les Récits extraordinaires de Pierre Bellemare" sur : http://www.europe1.fr/emissions/les-recits-extraordinaires-de-pierre-bellemare
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NewsTranscription
00:00 Bienvenue dans les récits extraordinaires de Pierre Belmar.
00:07 Un podcast issu des archives d'Europe 1.
00:11 Dans la vie d'un policier Robert, il ne se présente pas souvent une affaire comme celle que Jacques-Antoine a pu nous résumer aujourd'hui avec le concours de M. Aslan, chef du CID de Copenhague.
00:23 M. Aslan, au début de sa carrière, eut en effet l'occasion de s'occuper d'une affaire singulière qui éclaire un problème ancien et très délicat.
00:33 Dans quelle mesure une police a-t-elle le droit d'empêcher les citoyens d'être bernés ou de se faire extorquer de l'argent parce qu'on abuse de leur croyance et de leur sentiment religieux ?
00:47 Et jusqu'où, dans une affaire semblable, doit aller l'intervention de la police ?
00:53 Un examen des annales de l'histoire permet de s'apercevoir qu'au nom de la religion, un nombre incroyable de biens a été acquis d'une façon qui de nos jours tomberait sous le coup de la loi.
01:04 Cependant, dans ce domaine où se mêlent la foi et le sacrifice, il y aura toujours des controverses pour déterminer la limite entre le bien et le mal.
01:14 Le dossier que nous allons traiter montre clairement comment cette limite peut être fixée.
01:20 C'est aussi parce que les occasions de sourire sont trop rares pour qu'on les laisse passer que Jacques-Antoine a choisi de vous raconter cette histoire qui autrement se situe en marge de la grande délinquance.
01:32 Vous allez voir, chers amis, comment la stupidité de certaines victimes peut pousser au crime un être, au départ, innocent.
01:40 C'est assez étonnant.
01:42 [Générique]
02:01 De la Première Guerre mondiale au début de la Deuxième, les phénomènes du spiritisme et autres formes de l'aventure métapsychique intéressèrent un large public au Danemark.
02:13 À Copenhague en particulier voient le jour de petites sociétés qui ne s'occupent pas de recherches scientifiques mais sont plus ou moins des sectes pseudo-religieuses constituées autour d'une personne qui se prétend médium et se fait l'orateur du club et de ses adeptes.
02:30 Un jour de 1926, un homme sérieux avec des favoris entre dans le somptueux salon Rococo d'un vieil immeuble de Copenhague.
02:40 Il pousse devant lui un jeune homme de 16 ans, un peu gringalé, dont le visage encore enfantin est cependant intelligent et sympathique.
02:48 Il s'appelle Karl et c'est le héros de notre histoire.
02:53 Devant lui, une trentaine de personnes de tous âges assez ordinaires appartenant à la petite bourgeoisie des environs de la capitale danoise, réunies par un même intérêt pour le spiritisme et un même enthousiasme pour les phénomènes occultes.
03:09 Elles trouvent une consolation à la monotonie de la vie quotidienne ou à l'insatisfaction d'un besoin d'amitié dans leurs aventures au pays des esprits.
03:19 La plupart sont des femmes d'un certain âge qui ont eu une vie de tristesse ou ont perdu un proche qui leur était cher et qui cherchent à obtenir des messages de l'au-delà et pouvoir ainsi remédier au vide de leur vie.
03:32 La société qu'elles ont créée porte le nom assez prétentieux de Psychical Society, puis plus tard celui de The Order of Salomo, d'après le nom du premier esprit qui est apparu devant la société et lui dicta ses lois.
03:48 C'est parce qu'il croit Carl, son beau-fils, doué de la faculté d'être médium, que le grave monsieur au favori le présente au membre de la Psychical Society.
04:00 Les expériences qui suivent démontrent en effet que Carl peut tomber en trance et il devient le centre des activités spirites du club.
04:08 Les activités de ces sociétés sont, plus ou moins et de très loin même, contrôlées par la police qui juge que Carl est de bonne foi et pendant des années, elle va laisser ses facultés de spirites à la libre disposition de la Psychical Society.
04:26 Tout d'abord, la participation de Carl est gratuite.
04:30 À travers lui, les membres du club invoquent les esprits et les esprits répondent par la voix de Carl.
04:34 Carl ne touche aucune rémunération et peut-être est-il réellement médium et peut-être les esprits ont-ils réellement choisi de s'exprimer à travers lui, on ne le saura jamais.
04:44 Peut-être enfin, les choses seraient-elles restées innocentes si Madame, appelons-la Madame Hache, n'avait décidé un jour de changer tout ça.
04:54 Madame Hache est un professeur de 40 ans.
04:58 Oh, ce n'est pas n'importe qui, c'est une femme honnête, résolue, active, mais qui croit fermement aux esprits.
05:04 De plus, elle possède quelque argent.
05:06 Madame Hache déclare qu'il est scandaleux que Carl travaille pour la société sans être rétribué et elle lui fait obtenir un salaire mensuel qu'elle et les autres membres de la société vont bien entendu verser.
05:19 Les esprits, qui se manifestent toujours par la tablière de Carl, expriment à Madame Hache leur reconnaissance et demandent par la même occasion à ce que l'ancien comité directeur du club soit remplacé par un autre comité dont Madame Hache serait la présidente.
05:38 Bien entendu, la police est plus ou moins avertie de ces modifications dans les structures de la Psychical Society.
05:46 Elle sait que toutes les activités humaines, y compris les plus inoffensives, peuvent constituer un terrain favorable pour la délinquance et stimuler l'imagination perverse d'un sujet particulièrement épris de fantaisie et de fargne-nté.
06:00 Mais que faire?
06:02 Après tout, les gens ont le droit pour se distraire de dépenser leur argent comme ils veulent et le jeune homme a bien le droit de se faire payer pour les distraire.
06:11 En réalité, le jeune Carl vient de découvrir le pouvoir dont il dispose sur les membres de la Psychical Society.
06:21 Il utilise pour la première fois cette confiance en faisant paraître l'esprit du professeur Herrstrang.
06:29 Le professeur Herrstrang portait de son vivant des lunettes aussi pour mieux influencer les membres de la Psychical Society.
06:37 Lorsque Carl se sent soudain envahi par l'esprit du professeur Herrstrang, il sort des lunettes de la poche de son gilet pour les chausser.
06:46 Mais Carl n'a que 17 ans et des distractions encore enfantines. C'est pourquoi, sans doute, le spectre du professeur Herrstrang s'intéresse particulièrement aux montagnes russes, aux autotamponneuses et aux tirs à la carabine de la foire de Tivoli, sorte de foire du Trône, de la banlieue de Copenhague.
07:05 Notez bien, chers amis, que Carl a une carte d'abonnement pour la foire de Tivoli, mais il faut en plus payer à chaque stand.
07:14 Aussi, lorsque le professeur Herrstrang désire aller à la foire de Tivoli, comme il ne peut y aller qu'en s'incarnant dans le corps de Carl, c'est bien sûr Carl qui y va à sa place, donc les membres du club lui remboursent ce qu'il a payé à chaque stand.
07:29 Par contre, comme il faut être honnête vis-à-vis de la foire, lorsque c'est le professeur qui va à la foire, Carl n'utilise pas sa carte d'abonnement. Il paie le plein tarif d'une entrée ordinaire.
07:41 Vous comprenez la nuance ? Bon, continuons.
07:45 Plusieurs esprits d'hommes célèbres vont s'exprimer par l'intermédiaire de Carl, par exemple Beethoven.
07:50 "Maître, pourriez-vous nous jouer du piano ?" demande l'un des adeptes de la Psychical Society.
07:56 "Mais certainement !" répond Beethoven par la bouche de jeune Carl.
08:00 Et voilà, Beethoven, qui à travers le corps de Carl, s'installe devant le piano, lève le couvercle, se recueille un instant et commence à jouer.
08:10 Chose curieuse, Beethoven paraît hésitant et timide. Il ne joue que sur les touches blanches.
08:15 De deux choses l'une, ou bien Beethoven a perdu tout son génie là où il est, ou bien il ne peut manier comme il le voudrait les doigts de son intermédiaire, car le concert est pitoyable.
08:25 Ça ne fait rien. Quelques jours plus tard, Beethoven raconte toujours par la bouche de Carl à Mme D, une veuve de 39 ans, assez prude, d'un naturel doux et tendre,
08:35 comment il l'avait connue dans une vie antérieure, comment il s'était aimé et d'après Beethoven, toujours par la voix de Carl, elle faisait merveilleusement l'amour.
08:44 Mais il avait beaucoup regretté à l'époque qu'elle ne comprit pas sa musique.
08:49 De ce jour, Mme D va vouer à Beethoven un culte particulier.
08:55 Elle aura chez elle des bustes et des portraits du génial musicien qu'elle considère comme un de ses anciens amants.
09:02 Pendant une trance, paraît le spectre du poète norvégien Jordson.
09:07 Malheureusement, Jordson a sans doute la mémoire troublée par les visions célestes, car en parlant de ses œuvres, il y mélange certains ouvrages qui ont été écrits par le célèbre Henrik Ibsen.
09:20 Bien que certains membres se demandent comment l'esprit de Jordson peut commettre de pareilles erreurs et que d'autres trouvent honteux qu'un poète surtout mort s'attribue les œuvres d'autrui, ils avalent l'énormité.
09:34 Évidemment, les mois, puis les années passent, Carl va être porté à profiter de son pouvoir de façon plus substantielle.
09:45 Carl, qui entre-temps s'est marié et a divorcé d'ailleurs, s'étant abstenu de verser à son ex-femme la pension alimentaire qu'il lui doit, est menacé de prison.
09:54 Aussitôt, les esprits mettent les membres du cercle au courant des difficultés de Carl.
10:00 Ils déclarent que s'il va en prison et tant qu'il y sera, ils ne reparaîtront pas et que par conséquent, il est préférable de payer pour lui.
10:08 Les membres du cercle crédule organisent une souscription et remettent à Carl la somme demandée.
10:14 Au cours de la séance suivante, les esprits expriment par la bouche de Carl leur gratitude pour une telle générosité et un tel désintéressement.
10:21 À partir de ce moment, les esprits commencent toujours par l'intermédiaire de Carl à montrer de plus en plus d'intérêt pour les questions matérielles et demandent souvent aux membres du cercle de soutenir Carl de leur denier.
10:33 La Psychical Society, notamment Mme H., avance donc, sur une période de deux ou trois ans, quelques 5 400 couronnes (270 000 francs français) à Carl pour différentes raisons.
10:48 Pendant ce temps, les esprits qui apparaissent par l'intermédiaire de Carl réussissent à convaincre une autre fidèle de la bande, une veuve de 50 ans, de se séparer d'une somme de 15 000 couronnes (750 000 francs français).
11:03 Carl, qui a appris le métier de mécanicien, n'a pas travaillé depuis plusieurs années et mène une vie très aisée grâce à la société spirituelle et à la crédulité de ses adeptes.
11:14 Il se rend compte toutefois que tout cela n'aura qu'un temps et, sur les conseils de Mme H., qui lui répète que ses dons de médium peuvent se tarir, il fait des études de masse.
11:26 Une partie de l'argent obtenu par l'entremise des esprits lui permet d'acheter un appartement et de le faire transformer en mini-clinique.
11:34 Évidemment, la police qui voit Carl s'enrichir ne se fait aucune illusion. Carl, le charmant jeune homme, qu'il soit ou non un vrai médium, est devenu un escroc.
11:45 Mais la police ne peut intervenir puisqu'aucune plate n'est déposée.
11:50 M. H. fait bien effectuer une enquête auprès des membres de la société, devenus entre-temps la « The Order of Salomo ».
11:59 Ceci déclare que Carl, servant de médium, différents esprits leur étaient apparus et les avaient pressés de procurer une aide financière à Carl.
12:09 Mais bien que cela représente pour eux un effort pénible, aucun n'exprime le moindre regret.
12:14 C'est même avec une certaine hostilité qu'ils acceptent de répondre aux questions de la police.
12:18 Celle-ci, totalement impuissante, remet donc le dossier dans un tiroir en attendant qu'un incident, une illégalité quelconque ou même une plainte lui permettent d'intervenir.
12:30 Or, jamais, semble-t-il, la police n'aurait pu intervenir si, parallèlement aux avantages pécuniaires que Carl tire de ses facultés, ne s'ajoutaient d'autres avantages, d'un ordre tout différent.
12:45 Et c'est par là que l'affaire devient vraiment comique.
12:59 Je vous disais, chers amis, que les avantages pécuniaires que Carl, le médium de la Psychical Society de Copenhague, tirait de ses prodigieuses facultés, se doublaient d'autres avantages.
13:08 Un exemple.
13:10 Au cours d'une séance de spiritisme, et à la surprise générale, un esprit déclare brusquement par la bouche de Carl, très bien connaître, "Madame H."
13:22 "Mon Dieu, que savez-vous de moi?" s'exclame Madame H.
13:26 Tout.
13:29 Et l'esprit laissait entendre qu'il connaissait de Madame H non seulement ce que ses amis pouvaient reconnaître, mais qu'il en savait plus que son mari lui-même.
13:38 Si la décence le permettait, il pourrait décrire sa nudité dans ses moindres détails.
13:43 Imaginez la stupeur des membres de la Psychical Society et leur regard insidieux envers cette femme de quarante ans, grande, blonde, aux yeux bleus, bien faite et bien conservée, mais mariée.
13:56 "C'est impossible!" s'exclame Madame H.
13:59 "Invoquez-moi en particulier et je vous le prouverai!" répond l'esprit.
14:04 "Et comment vous appelez-vous?" demande Madame H.
14:07 "Je m'appelle Johannes," répond l'esprit.
14:10 "Non seulement je connais vos levées, vos couchers, vos nuits et vos jours, mais je connais aussi toutes vos pensées en un mot. Je suis votre ange gardien."
14:20 Ouf! Avec quelle satisfaction Madame H et les membres de l'honorable Psychical Society reçoivent cette explication.
14:29 Au cours des séances suivantes, Madame H appellera souvent Johannes, son ange gardien, pour lui demander toutes sortes de conseils.
14:35 Et puis, un jour, Johannes lui réitère sa proposition de l'invoquer en particulier afin de lui communiquer certains conseils qui ne doivent pas être formulés en public.
14:46 Il sera donc fait ainsi.
14:48 Un matin, Karl se rend chez Madame H, qui, je vous le rappelle, est une grande femme très énergique et très active, apparemment vertueuse, mais sans doute peut-on déceler dans cet excès de dynamisme les conséquences, justement, d'un excès de vertu.
15:02 Madame H va donc invoquer Johannes, son ange gardien, par l'intermédiaire de Karl et Johannes, toujours par l'intermédiaire de Karl, va se matérialiser pour lui apprendre que son mari souffre du manque de tendresse dont Madame H fait preuve à son égard.
15:20 Notamment, elle dédaigne par trop de satisfaire des désirs cependant légitimes.
15:26 De fil en aiguille, si l'on ose toutefois employer cette expression, l'ange gardien Johannes va enseigner à Madame H quelques façons nouvelles dont elle pourrait user pour satisfaire son mari.
15:37 Ce n'est que plus tard, bien sûr, qu'on connaîtra l'étonnement du mari de voir une épouse jusque-là impavide transformée subitement en une amoureuse déchaînée.
15:47 Cette transformation n'aura d'ailleurs qu'un temps car les cours particuliers que continue de prodiguer l'ange gardien ne laissent pas à Madame H suffisamment d'énergie pour qu'elle pût en faire profiter son mari.
15:59 Toutefois, nous nous devons d'affirmer pour la défense de Madame H et selon ses propres déclarations qu'elle n'éprouve aucun sentiment affectueux envers Karl.
16:07 Elle se défendra absolument de tirer une quelconque jouissance de l'enseignement que lui prodigue son ange gardien.
16:13 Mais si un ange gardien suffit à Madame H, Madame H ne suffit pas à Karl.
16:21 Aussi, au cours d'une séance, l'esprit du mari défunt de Madame C s'exprime subitement toujours à travers Karl, bien entendu.
16:33 Chers amis, imaginez le dialogue entre Madame C et l'esprit du mari défunt. Un dialogue émouvant.
16:41 « C'est Gustave C qui vous parle, dans le cercle des adeptes et de femmes pâlies.
16:48 « Comment ? Gustave ? s'exclame la femme. Est-ce que ce serait…
16:52 « Eh oui, c'est moi, Gustave, ton mari.
16:55 « Mon chéri, murmure la femme.
16:57 « Mon amour, répond l'esprit par la bouche de Karl, et la femme de s'évanouir.
17:01 « C'est une jolie veuve, une brunette de 36 ans qui possède, elle aussi, quelques économies.
17:06 « Sa vertu dépasse encore celle de Madame H, puisque depuis la mort de son mari, survenu il y a quatre ans, on ne lui connaît aucune liaison.
17:14 « Lorsqu'elle reprend ses esprits, les membres de la Psychical Society, se sentant indiscrets, s'en vont furtivement pour laisser Madame C seule avec l'ectoplasme de son mari incarné, est-il besoin de le rappeler, dans le corps, bien sûr, de Karl.
17:30 « C'est donc le corps de Karl qui, télécommandé par l'esprit de Gustave, va prendre tendrement Madame C dans ses bras pour la consoler de ce long veuvage.
17:40 « Avec quelle joie, vous pensez bien, Madame C retrouve son mari.
17:43 « De ce jour, elle sera transfigurée, car, bien entendu, elle l'invoquera fréquemment, en particulier, et sans aucune fausse honte.
17:51 « On l'entend dire, « Hier, j'ai invoqué Gustave, et il a pu venir », ou bien, « Demain, est-ce que vous pouvez venir, Karl ? C'est notre anniversaire de mariage, et je voudrais invoquer Gustave. »
18:02 « Bien entendu, Karl.
18:04 « Au cours de ses invocations intimes, cesse complètement d'être Karl.
18:07 « Madame C l'appelle Gustave.
18:09 « C'est Gustave qui l'embrasse, c'est Gustave qui s'allonge avec elle dans le lit matrimonial.
18:12 « C'est à Gustave qu'elle apporte le plateau du breakfast.
18:15 « Et notez bien ce détail, lorsqu'elle fait transférer le corps, le vrai, qui repose sous la terre, d'un cimetière dans l'autre, au passage, elle y reprend l'alliance que portait en mourant son mari, afin qu'il l'ait à son doigt lorsqu'il répond à ses invocations. »
18:30 On n'en finirait pas de numérer les innombrables supercheries tragiquomiques auxquelles se livrent, de 1926 à 1939, donc pendant treize ans, le médium de la Psychical Society.
18:43 Mais cette comédie a un brusque dénouement.
18:48 En janvier 1939, le mari de Madame H se présente à la police et lui demande comment il pourrait bien éloigner sa femme du cercle spirite et particulièrement de l'influence de Karl qui, prétend-il, lui aurait fait dépenser toutes ses économies.
19:03 Enfin ! Enfin, c'est l'incident que la police attendait depuis des années.
19:08 La démarche de M. H ne justifie pas, évidemment, que des mesures autoritaires soient prises à l'égard du médium de la Psychical Society, mais elle permet au moins une enquête.
19:18 Ce que la police espère, c'est qu'en interrogeant les membres de la société, elle pourra, petit à petit, semer le doute dans leurs esprits et les amener, sinon à porter plainte, au moins à mettre fin aux activités de leur médium.
19:32 Mais pas du tout. Certaines personnes ou certains groupes sont tellement enclins à la crédulité qu'on pourrait presque les tenir pour coupables de favoriser les escroqueries.
19:43 On pourrait presque dire que certaines victimes sont les complices de leurs escrocs.
19:47 Tel est le cas car les membres de la Psychical Society refusent obstinément, soit par conviction intime, soit peut-être par orgueil, d'admettre qu'ils ont été bernés.
19:58 Mme H, par exemple, continue d'affirmer que c'est bien son ange gardien qui s'incarnait dans le médium.
20:05 « Sinon, dit-elle au policier, comment voulez-vous que j'ai des rapports quelconques avec ce garçon, beaucoup plus jeune que moi et qui pourrait être mon fils ?
20:12 Quant à Mme C, je reconnaissais bien les manières de mon mari. Vous n'allez tout de même pas prétendre le connaître mieux que moi. »
20:20 Il y a vraiment de quoi décourager un policier.
20:24 Et M. Asloun s'est plusieurs fois retenu de leur dire « Bon, eh bien, puisque vous aimez vous faire escroquer, faites-vous escroquer. »
20:31 Car, encore une fois, tant que les agissements d'une personne ne nuisent ni aux intérêts de la société, ni à la morale publique, ni à aucune personne en particulier, la police ne peut pas intervenir sans motif légal.
20:44 Heureusement, il existait tout de même une personne qui avait à se plaindre de ces agissements.
20:50 Voyant l'impuissance de la police, M. H se décida à porter plainte.
20:55 On n'ose pas imaginer le conflit qui en résulta dans son foyer, mais M. Asloun fut enfin fondé à intervenir et, à la veille de la guerre, Karl, le médium, est arrêté.
21:06 Quand on le fouille, on trouve sur lui une liste d'esprits qu'il devait faire apparaître lors d'une réunion spéciale de la société deux ou trois semaines plus tard.
21:17 Au début, Karl nie avoir obtenu de l'argent à l'aide d'escroqueries, mais après un long et minutieux interrogatoire, il finit par reconnaître devant le tribunal que toutes les trances au cours desquelles les esprits avaient demandé aux membres de la société de lui donner de l'argent ou avaient fait allusion à ses difficultés financières personnelles étaient frauduleuses.
21:36 Il avoue qu'il avait persuadé les esprits de faire allusion à ces sujets. Il essaie de s'excuser en disant que c'est en partie l'influence dominatrice de Mme H qu'il a poussé à ses mensonges et à ses escroqueries et qu'ensuite il s'est senti obligé de continuer, sans quoi, prétend-il, les membres de la société n'auraient plus rien compris au silence des esprits.
21:56 Certains membres, en effet, sont tellement convaincus de la sincérité de Karl que même après avoir entendu celui-ci reconnaître devant le tribunal la plupart de ses supercheries, il continue à croire en lui.
22:08 Peu de temps avant que le tribunal ait à prononcer sa sentence, Karl se rétracte et soutient qu'il a toujours été de bonne foi et qu'il a réellement cru que les esprits se manifestaient par son intermédiaire.
22:23 Ses déclarations ne lui sont d'aucun secours. Le tribunal le déclare coupable et le condamne à deux ans et demi de prison, peine qui sera ensuite ramenée à deux ans.
22:34 Quand il prononce sa sentence, le tribunal déclare qu'une telle escroquerie constitue une exploitation grossière des croyances religieuses des membres de la société.
22:48 [Musique]
23:06 Vous venez d'écouter les récits extraordinaires de Pierre Belmar, un podcast issu des archives d'Europe 1 et produit par Europe 1 Studio.
23:15 Réalisation et composition musicale, Julien Taro.
23:19 Production, Sébastien Guyot.
23:22 Patrimoine sonore, Sylvaine Denis, Laetitia Casanova, Antoine Reclus.
23:27 Remerciements à Roselyne Belmar.
23:30 Les récits extraordinaires sont disponibles sur le site et l'appli Europe 1.
23:35 Écoutez aussi le prochain épisode en vous abonnant gratuitement sur votre plateforme d'écoute préférée.