• il y a 8 mois
Retrouvez Nouvelles têtes présenté par Mathilde Serrell sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/nouvelles-tetes

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00:009h51, les Nouvelles Têtes avec vous, Mathilde Serrel.
00:04Ce matin, une néo-maraîchère, Lola Périer, est dans notre studio.
00:09Portrait sonore.
00:20Longtemps, elle ne s'est pas couchée de bonheur.
00:23Entre Tel Aviv, Barcelone et Berlin, elle mène une première vie de bouqueuse.
00:27Dans les boîtes de nuit et les festivals du monde entier, c'est elle qui fait venir les DJ stars et qui s'en occupe.
00:32Puis, ce sera les stars de cinéma.
00:34Agent, vous savez ce que c'est, vraiment ?
00:36C'est 10% sur le salaire des stars.
00:38Ben voilà, ces 10%, c'est notre malédiction.
00:41Ça nous fait une réputation de vautour, alors qu'on serait plutôt...
00:44Une poteau des poutilles, les anges de l'amour dans les églises italiennes.
00:48Eh oui, on envoie des petites flèches, on crée des mariages.
00:52L'acteur qu'on adore voir s'énerver, le jeune météor en scène énervant qu'on admire.
00:57Comme le personnage de Camille Cotin dans 10%, elle devient agent d'acteur.
01:02Et pas n'importe qui.
01:04Et j'sais pas n'importe où.
01:06Chez Elisabeth Tanner, celle qui représente Béatrice Dalle, Didier Bourdon ou encore Swan Harlow.
01:11Mais au bout de deux ans, elle quitte ce monde, pourtant très proche de son ADN.
01:15Je travaillais un peu pour Match quand j'avais 17 ans.
01:17Ils m'ont fait suivre Brigitte Bardot pendant 3 mois.
01:20Il faut une photo où elle pleure.
01:23Je l'attendais pendant 10 jours en bas de chez elle.
01:25J'avais honte.
01:26Et un jour dans la forêt de Louvciennes, je suis derrière elle.
01:30Elle était de dos, elle se retourne en larmes.
01:33Moi je suis parti en courant.
01:35Celui qui refuse de tirer le portrait de la biche Bardot en larmes, c'est son père, le célèbre photographe Jean-Marie Perrier.
01:43De lui, elle a hérité une seule religion, le bien manger.
01:46Jusqu'ici, pratiquante occasionnelle, elle va consacrer sa vie au fondement du bien manger, le bien planter.
01:53Avec un modèle.
01:54L'idée, c'est de multiplier le nombre de petites fermes.
01:57Ce qu'on veut, c'est remplacer l'agriculture de masse par une masse d'agriculteurs.
02:02C'est un acte politique de prendre les fourches, de mettre ses bottes de caoutchouc.
02:06Je suis un acteur de changement et je contribue à un monde meilleur.
02:11L'agriculteur québécois Jean-Martin Fortier lui donne envie d'enfiler ses bottes de caoutchouc.
02:16Après avoir étudié la théorie dans les livres de botanique et de permaculture,
02:20elle se met à cultiver sa propre surface.
02:22Aujourd'hui, elle en vit et fournit des restaurants.
02:25Lola Perrier, bonjour.
02:26Bonjour.
02:27On va casser un stéréotype tout de suite.
02:29Ce n'est pas parce que vous êtes passionnée par les végétaux que vous êtes végétarienne, c'est ça ?
02:33Non, loin de là.
02:35Non, je n'appelle pas du tout au végétarisme.
02:37Au contraire, j'appelle à équilibrer mieux son panier.
02:42Quitte à choisir de la viande, si on pouvait choisir des petits éleveurs plutôt que de l'acheter au supermarché.
02:49C'est vrai que j'inciterais plutôt les gens à manger plus de légumes, plus de végétaux.
02:53Alors, vous aimez aussi tout ce qui est carnet, la bonne bouffe, l'hédonisme gastronomique
02:58dont vous avez hérité par votre père.
03:01Célèbre photographe, c'est lui qui a fait la photo du siècle avec toutes les stars
03:04qui vont marquer la chanson française.
03:06Johnny Hallyday, François Zardy, Michel Berger.
03:09Et il vous emmenait, vous n'étiez pas près des champs, mais vous étiez près des restaurants.
03:13Et ça, c'est votre école, c'est votre formation.
03:15Vous dites, aller au restaurant avec lui, ce n'était pas juste commander un steak frites et repartir.
03:19Non, on y discutait avec les cuisiniers et propriétaires.
03:22Un échange toujours stimulant.
03:24Quel conseil, quelle philosophie vous en avez gardé de ces années au restaurant avec Jean-Marie Perrier ?
03:28En fait, je dois avouer que ce n'est pas vraiment les contacts que j'ai eus avec mon père
03:31qui m'ont permis d'accéder aujourd'hui au restaurant.
03:34J'y suis un peu allée avec ma petite cagette.
03:36J'ai été tapée aux portes et finalement, ils m'ont ouvert leurs portes
03:40parce que je crois que les produits étaient plutôt bons.
03:42Et de leur philosophie, j'ai appris une certaine rigueur.
03:45Cette recherche du goût permanente, cette recherche de la variété, de la rareté.
03:49J'aime bien approcher ce métier un peu comme un travail d'orfèvre.
03:52Travailler spécifiquement pour eux, chercher des goûts, chercher des choses un petit peu rares.
03:56Le point de départ, d'ailleurs, vous vous dites, on est dans le pays de la gastronomie et tout a le même goût.
04:01Tout est devenu banal, les tomates n'ont plus de goût.
04:04C'était ça le début de la bifurcation.
04:06Il y avait aussi peut-être les artistes, vous en aviez marre de vous occuper d'eux ?
04:10En fait, c'est vrai que mon père m'a toujours emmenée au marché depuis que je suis toute petite.
04:13Et en grandissant, j'ai un peu vu l'évolution et je constate qu'on nous vend un peu toujours les mêmes produits.
04:19Il y a une sorte d'uniformisation de ce qu'on mange et contre laquelle j'essaie de combattre
04:24en produisant une quantité de variété absolument phénoménale.
04:28Alors, on ne quitte pas son agence d'Elizabeth Tanner pour devenir maraîchère comme ça.
04:35Il ne faut pas vendre la bifurcation comme un truc facile.
04:38Ça a été quoi les étapes ?
04:40D'abord, il a fallu savoir si j'en étais physiquement capable.
04:43Moi, en tant que Parisienne, il a fallu que j'aille en immersion totale là-dedans.
04:48Et je me suis aperçue qu'en fait, j'adorais ça.
04:50Et c'est vrai que par rapport à mon métier précédent,
04:53on peut dire une chose, c'est que les carottes ne m'envoient pas d'email la nuit.
04:56Je dors mieux, je dors beaucoup mieux.
04:58Elles ont moins d'égo aussi, même si j'ai toute mon admiration pour les comédiennes, les comédiens et tous ces métiers-là.
05:04Mais j'en avais marre d'avoir un téléphone greffé sur l'oreille et d'avoir une main plugée à mon ordinateur.
05:09Je me suis réveillée un jour et je me suis dit mais je ne veux pas du tout de cette vie en fait.
05:13Donc j'ai choisi un autre métier tout aussi éreintant, j'allais dire.
05:18Je suis agricultrice, mais j'y trouve beaucoup plus de sérénité, beaucoup plus de calme néanmoins.
05:24Donc vous ne dormez pas plus, mais vous vous sentez mieux ?
05:28Je dors plus parce qu'on ne me dérange pas la nuit.
05:31Donc je dors un tout petit peu plus quand même.
05:33Vous avez vendu pour la première fois votre récolte, vous vous souvenez de ce jour ?
05:36Je l'ai vendu la première fois, c'était début juin.
05:39Je l'ai vendu aux Enfants du marché, qui est un restaurant qui est à Paris, au marché des enfants rouges.
05:45C'était un petit moment d'émotion pour moi.
05:47Vraiment, c'était il y a maintenant trois ans.
05:49Et maintenant vous fournissez des restaurants.
05:51Ça c'était le but, donc finalement vous avez atteint vos objectifs en peu de temps.
05:55Oui, il y en a 14 aujourd'hui, en tout cas 14 de clients vraiment fixes.
06:00Il y en a de plus en plus, j'espère pas trop parce que je suis seule en fait sur mes 2000 m².
06:05Donc je vais imploser au bout d'un moment.
06:09Et vous êtes une jardineuse de bouffe.
06:11Vous n'aimez pas le titre de Néo Maraîchère, vous aimez le food gardener anglais.
06:16Donc jardineuse de bouffe, dites-vous dans votre livre, je n'ai pas meilleure traduction.
06:19Oui c'est vrai, il faut avouer que le terme de Maraîchère évoque plutôt un plat dégueulasse à la cantine.
06:25Donc moi je préfère le terme de food gardener parce que je trouve ça plus poétique, plus joli.
06:30Puis le terme de jardin c'est plus joli que potager je trouve.
06:32Alors vous êtes venue avec un cadeau de l'appareiller.
06:35Est-ce que vous pouvez nous dire ce que c'est ? Surtout le raconter.
06:39Oui, alors en fait j'ai dans ma main un plant de tomate qui a un mois et demi, qui a un nom un petit peu particulier.
06:45C'est une tomate cerise qui s'appelle Dancing with the Smurf.
06:48Donc je vais traduire, danser avec les schtroumpfs.
06:50Ah, c'est hallucinogène.
06:52Alors non, je vous rassure, vous n'aurez pas d'hallucination, tout va bien.
06:55Mais par contre vous aurez de très très jolies tomates cerises rouges avec une très jolie petite corolle qui va se dessiner blanche.
06:59C'est une variété un petit peu rare.
07:01Merci beaucoup.
07:02Alors je n'ose pas la planter au bureau du 7-10 parce que j'ai peur de son espérance de vie très courte.
07:06Un balcon peut-être.
07:07Un balcon.
07:08Merci infiniment.
07:09Je rappelle qu'on vous croise aussi à la télé où vous co-animez sur France 3 l'émission Les Potagers de Julie.
07:13Avec Julie Andrieux, donc votre ex-belle-mère.
07:15Tout ça en famille.
07:18Et le livre Un potager, eau en couleurs est sorti aux éditions Marabou.
07:21Bonne route à vous et merci à l'équipe de Nouvelle Tête.
07:23Lucie Lemarchand à la réalisation,
07:25Marius Sayès à la préparation.
07:27Merci beaucoup.