• il y a 8 mois
Anne Fulda reçoit Nicolas Bouzou pour son livre «La civilisation de la peur» dans #HDLivres

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Transcription
00:00 -Bienvenue à l'heure des livres, Nicolas Bouzou.
00:02 On vous connaît, vous êtes consultant en économie,
00:05 vous avez écrit de nombreux essais, vous êtes essayiste,
00:08 éditorialiste, et vous venez de publier
00:11 "La civilisation de la peur,
00:12 pourquoi et comment garder confiance en l'avenir",
00:15 un livre paru chez Ixo. Le sous-titre est important,
00:18 car on pourrait croire, en voyant le titre,
00:20 que c'est un livre qui ajoute de la peur à la peur.
00:23 Ce n'est pas le cas.
00:25 Alors, vous n'êtes pas non plus un optimiste B.A.
00:28 Vous reconnaissez qu'il y a de nombreuses raisons
00:30 de s'inquiéter, on ne va peut-être pas les universer,
00:34 tout le monde les connaît, mais il y en a aussi beaucoup
00:37 d'être optimiste, de voir l'avenir,
00:39 si ce n'est en rose, en tout cas pas en noir.
00:42 Alors, donnez-nous comme ça quelques raisons
00:44 qui font que, finalement, aujourd'hui,
00:47 on n'a pas besoin de désespérer.
00:48 -Dans le domaine de la santé, par exemple,
00:51 vous avez une révolution thérapeutique extraordinaire
00:54 sur un sujet qui concerne de près ou de loin tout le monde,
00:57 celui du cancer, maladie très développée
01:00 dans les pays riches, avec une prévalence très importante,
01:03 qu'on soigne de mieux en mieux, qu'on guérit de plus en plus,
01:06 et on voit qu'on a une accélération
01:08 dans les traitements, c'est extraordinaire.
01:11 Dans le domaine de l'écologie, deuxième exemple,
01:14 on entend que c'est pas possible,
01:15 on va vers un effondrement climatique,
01:18 il faut plus faire d'enfants, en réalité,
01:20 en matière de décarbonation, au moment où on se parle,
01:23 le monde connaît une accélération fantastique
01:26 dans le domaine des transports, du chauffage,
01:28 des évolutions extraordinaires dans l'isolation des bâtiments.
01:32 Et puis, troisième sujet, qui, là aussi, c'est intéressant,
01:35 parce que c'est souvent présenté sous un prisme négatif,
01:38 tout ce que permet de faire l'intelligence artificielle
01:41 et la façon dont ça va permettre de rendre le travail moins pénible.
01:45 Vous voyez, je pense que si on regarde le monde
01:48 de façon objective, pas optimiste, mais objective,
01:51 c'est-à-dire en regardant les problèmes
01:53 et ce qui s'améliore, on a une image différente de la réalité.
01:57 -Est-ce qu'aussi, c'est parce qu'il y a
02:00 cette manière de voir les choses,
02:03 c'est pas lié à des disparités géographiques assez fortes ?
02:06 Parce que l'alphabétisation, ça augmente,
02:10 l'espérance de vie aussi,
02:12 mais c'est plus visible dans certains pays
02:14 qui ne sont pas des pays occidentaux.
02:16 -Vous avez raison. Ce que vous dites est très juste.
02:19 Quand on regarde les évolutions positives au niveau mondial,
02:23 la diminution de la malnutrition,
02:25 la diminution de la pauvreté extrême,
02:27 c'est quelque chose qui concerne...
02:29 L'augmentation d'espérance de vie,
02:31 ça concerne plutôt les pays pauvres.
02:33 Mais la révolution thérapeutique dont j'ai parlé,
02:36 tout le monde va en profiter,
02:38 en tout cas, il faut faire en sorte qu'il en profite
02:41 dans un pays comme la France.
02:43 L'écologie, aujourd'hui, est prise à bras le corps
02:46 par les pays riches.
02:47 Ce que permet de faire l'intelligence artificielle,
02:51 d'accès à la culture,
02:52 de faciliter l'accès à la culture,
02:54 c'est aussi quelque chose qu'on retrouve dans les pays riches.
02:58 Ce que vous dites est intéressant.
03:00 Si je regarde le débat public dans les pays occidentaux,
03:03 je trouve qu'on se met des claques en permanence.
03:06 En France, bien sûr, on le fait en permanence.
03:09 Les Jeux olympiques, ça va être une catastrophe.
03:11 Tout fout le camp, la civilisation s'effondre.
03:14 Mais si vous regardez le débat public dans beaucoup de pays,
03:18 vous retrouvez un peu ça.
03:19 L'Occident et les démocraties libérales,
03:22 en règle générale, ont une vision d'elles-mêmes
03:24 beaucoup plus négative que la réalité
03:27 et qui, parfois, et trop souvent, à mon sens,
03:29 rejoint le discours négatif des pays
03:32 qui ont une hostilité plus ou moins grande.
03:35 C'est le cas de la Russie, mais vis-à-vis de nous.
03:38 -Oui. D'ailleurs, vous dites même
03:40 que sur ce que vous appelez le marché de l'information,
03:43 il y a comme ça un biais en faveur de la négativité,
03:46 qui est très clair, notamment en France,
03:49 mais comment aller contre ce mouvement assez naturel, finalement ?
03:52 -Alors là, là encore, je suis tout à fait d'accord.
03:55 La France a une spécificité, c'est la figure de l'intellectuel.
03:58 Pour qui ça va jamais ?
04:00 Non, mais grosso modo, les intellectuels...
04:02 -Le heureux, ça n'intéresse pas.
04:04 -Non, ça n'intéresse pas, mais de toute façon, il l'est pas,
04:08 parce que ça va pas,
04:09 parce que la société en elle-même, de toute façon, ne va pas.
04:12 Je ne fais rien d'autre dans le livre sur ce sujet-là
04:15 qu'actualiser ce qu'écrivait Raymond Haron
04:18 dans "Le système des intellectuels",
04:20 où il expliquait que la figure de l'intellectuel
04:22 est révolutionnaire, contre le système,
04:25 mais quel que soit le système, au fond,
04:27 tout va mal, puisque le système est mauvais.
04:29 En France, la figure de l'intellectuel,
04:32 c'est une remarque de Raymond Haron que je trouve profonde,
04:35 qui choque un peu quand on le dit,
04:37 mais la France est le pays où l'intellectuel
04:40 a la plus haute estime de lui,
04:41 mais sans doute les conditions matérielles les plus basses,
04:45 si vous prenez un professeur d'université,
04:47 c'est les Etats-Unis.
04:49 Donc cet écart crée un ressentiment
04:51 qui l'amène, quand vous l'invitez sur vos plateaux,
04:54 à critiquer en permanence la société dans laquelle on vit
04:57 et le pays dans lequel on vit.
04:59 Mais quand vous regardez les choses,
05:01 je dirais, de façon lucide, la plus objective possible,
05:04 il me semble que ce pessimiste est très excessif.
05:07 -Et ce regard négatif, on le trouve chez les intellectuels,
05:10 on le trouve dans l'information, et on le trouve aussi
05:13 chez les politiques, logiquement.
05:15 -Oui, comme la politique BA, c'est pareil, on se dira.
05:18 C'est pas crédible.
05:20 -Sauf que ça a pu exister par le passé,
05:22 je cite des discours parlementaires.
05:24 Si on remonte un peu loin,
05:26 les discours de Lamartine, de Tocqueville...
05:29 -Les discours de Cursaut aussi.
05:31 -Mais le 18 juin... -Le 18 juin, par exemple.
05:34 -Pour moi, quand on...
05:36 Je l'analyse dans le livre,
05:38 c'est un discours de confiance dans l'avenir,
05:40 plus proche de nous, sur un mode plus libéral,
05:43 je me sens très à l'aise avec ça.
05:45 Jacques Chabandelmas, "La nouvelle société",
05:48 en 1969, c'était son discours de politique générale.
05:51 C'est pour ça, le discours était tellement excellent
05:54 qu'il s'est fait virer.
05:55 Mais pour revenir à votre question,
05:57 la France était un pays très clivé politiquement,
06:00 on le voit bien tous les jours,
06:02 on n'a pas cette culture du compromis,
06:04 et donc l'opposition critique toujours le gouvernement,
06:08 c'est vrai aujourd'hui.
06:09 François Hollande, tout le monde le détestait,
06:12 mais le président de la République,
06:14 au bout de trois mois, sera aussi critiqué
06:16 que ne l'est l'actuel.
06:17 Après, on pourrait dire que ça fait le charme
06:20 de notre débat public.
06:21 -Je vous conseille de lire "La civilisation de la peur",
06:25 je répète le sous-titre,
06:26 "Pourquoi et comment garder confiance à l'avenir ?"
06:29 C'est un livre de Nicolas Bouzeau.
06:31 Merci d'être venu. -C'est moi qui vous remercie.
06:34 ...
06:38 [SILENCE]

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