Pour parler de l'hommage aux victimes du Hamas présidé par Emmanuel Macron aux Invalides , RTL reçoit Patrick Klugman, avocat, représentant de familles de victimes du Hamas et d'ex-otages franco-israéliens.
Regardez L'invité de RTL du 07 février 2024 avec Amandine Bégot.
Regardez L'invité de RTL du 07 février 2024 avec Amandine Bégot.
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00:02 RTL matin
00:06 RTL 7h42 en cette journée d'hommage aux victimes de l'attaque du 7 octobre.
00:10 Amandine Bégaud, vous recevez ce matin l'avocat Patrick Lugmann.
00:13 Patrick Lugmann, vous êtes l'avocat de six familles de victimes françaises du Hamas, des victimes qui pour certaines ont été
00:19 assassinées lors de ces attaques du 7 octobre.
00:21 D'autres ont été otages ou sont toujours portées disparues. 42 français, on le rappelle,
00:26 sont morts dans ces attaques et quatre mois, jour pour jour après, vous assisterez tout à l'heure à cet hommage qui est organisé aux invalides.
00:33 C'est, j'imagine, un moment que les familles attendent et redoutent à la fois.
00:37 Oui, même si, vous le savez, quand on a perdu quelqu'un, quand on a perdu un fils,
00:43 une mère, un père, on n'attend plus rien. Un hommage,
00:47 c'est quelque chose qui vous est offert et que vous venez recevoir. Ces familles viennent recevoir l'hommage de la nation française.
00:55 Donc moi, ce que j'attends et ce qu'ils attendent de ce moment, c'est quoi ?
01:00 C'est que depuis la cour des Invalides, une fenêtre s'ouvre sur notre mémoire collective française,
01:06 sur notre conscience nationale, qu'il s'est passé quelque chose le 7 octobre qui nous regarde directement.
01:13 42 parmi les victimes, les 1242 étaient des français, on a tué 42 français. Ça veut dire quoi ?
01:21 C'est plus de victimes, par exemple, que lors de l'attentat de Nice.
01:25 42 français, vous n'avez jamais eu, par exemple, autant de militaires qui sont morts en une année en opération extérieure,
01:34 alors qu'on a eu le Mali, l'Afghanistan, la Syrie.
01:37 42 français qui sont morts, pourquoi ? Parce qu'ils étaient juifs en Israël.
01:43 C'est, on attend que la conscience nationale dise "il s'est passé quelque chose qui nous regarde tous et directement".
01:50 Mais ça veut dire aussi des mots forts du président de la République ?
01:53 Oui, nous les attendons, j'espère, et je suis assez rassuré sur le fait qu'il saura les trouver,
02:03 mais ces mots sont effectivement extrêmement importants.
02:07 C'est une manière, à mon avis, ce qu'il doit dire, c'est qu'on reste français,
02:13 ou que l'on vive dans le monde, et que la France reconnaisse ses enfants, tous ses enfants,
02:18 que nous soyons vivants ou morts, et que nous soyons en France ou n'importe où dans le monde.
02:22 Et c'est important pour moi, parce que la justice française est saisie.
02:25 Elle est saisie pourquoi ? Parce que ces personnes étaient des personnes de nationalité française.
02:30 C'était indispensable que cet hommage ait lieu de façon solennelle, comme ça.
02:36 Et là, je parle d'un point de vue, j'allais dire, peut-être plus personnel.
02:39 Vous disiez quand on a perdu un fils, un frère, une grand-mère, il n'y a rien qui peut combler ça, bien sûr.
02:46 Mais ça participe aussi.
02:48 Indispensable, je n'en sais rien, important, bienvenu, oui certainement.
02:55 Mais encore une fois, je crois que cet hommage est important pour nous, français.
02:59 Je crois qu'il est important, dans un moment où nous sommes en proie à une montée en flamme de l'antisémitisme,
03:06 il est important que la nation sache dire que lorsque l'on tue des personnes en raison de leur origine,
03:13 qu'on les assassine parce qu'elles ont été ciblées pour cela,
03:16 et bien la France, 42 des nôtres, ne peut pas rester taisante, ne peut pas regarder ailleurs.
03:22 Alors où, comment et par qui cet hommage, ce moment devait être créé ?
03:27 Effectivement, c'est l'hommage national et c'est le président de la République qui devait le rendre.
03:31 Vous parlez de ces actes antisémites, je voulais qu'on rappelle les chiffres.
03:34 Près de 1700 recensés en 2023, c'est presque quatre fois plus qu'en 2022.
03:39 Et la plupart ont eu lieu après ce 7 octobre.
03:41 En trois mois, on a répertorié autant d'actes antisémites qu'au cours des trois dernières années.
03:46 Patrick Luclemann, plusieurs élus de la France Insoumise ont indiqué qu'ils seraient présents
03:51 à cette cérémonie tout à l'heure, malgré le refus de certaines familles.
03:55 Que leur dites-vous ce matin à ces élus et les filles ? Ne venez pas !
03:58 Moi, je les ai sur le réseau X conjuré de ne pas venir.
04:04 Après, c'est un problème de conscience.
04:07 Je comprends tout à fait qu'ils soient invités, ils sont parlementaires.
04:10 C'est la règle protocole.
04:12 C'est la règle protocole.
04:13 Mais ce n'est pas un peu facile de se cacher derrière ça, pardon.
04:16 Est-ce qu'Emmanuel Macron n'aurait pas pu franchir du protocole ?
04:19 Encore une fois, je crois que chacun ici doit se respecter.
04:23 Et les élus et les filles doivent respecter tant leur parole publique
04:27 qui consistait à dire que le Hamas est un mouvement de résistance,
04:30 que ce n'était pas du terrorisme, que la douleur de ces familles.
04:33 Vous êtes proto-clairement invité quelque part.
04:36 Est-ce que ça veut dire que vous y êtes à votre place ?
04:38 Est-ce que ça veut dire que vous êtes les bienvenus ?
04:40 Non, évidemment.
04:42 Et c'est donc un problème de conscience.
04:45 Il y a quelque chose dans leur attitude et dans leurs déclarations.
04:48 Après, que les familles leur aient demandé de ne pas venir,
04:51 il y a quelque chose qui relève de l'indécence.
04:53 À l'extrême opposée d'un hommage national, vous avez quoi ?
04:56 Vous avez l'outrage.
04:58 Qu'est-ce qui est le plus opposé au recueillement ?
05:01 Ces déclarations publiques.
05:03 Donc, quelque part, je comprends ces familles et je porte leur parole
05:08 quand ils ont le sentiment que ces élus viennent cracher sur la tombe de leurs proches.
05:15 Et je demande que ça n'ait pas lieu.
05:16 Je demande que ce moment ne soit pas volé.
05:19 Volé à ces familles d'abord et volé à la nation.
05:22 Et donc, effectivement, et encore une fois,
05:24 je vois que tout le monde n'est pas ni aveugle ni sourd.
05:27 Tout le monde n'est pas inconscient.
05:28 Tout le monde n'est pas indécent.
05:30 Regardez Ruffin.
05:32 Il y a un moment donné où l'on doit savoir s'arrêter.
05:35 Mais encore une fois, c'est un problème de conscience.
05:37 Et c'est encore mieux qu'ils soient invités.
05:39 Et ça serait encore mieux qu'ils n'y viennent pas.
05:42 C'est ça la conscience.
05:44 L'Elysée n'écarte pas par ailleurs l'idée d'un hommage aux victimes françaises de Gaza.
05:49 Est-ce que ça, ça vous choque ?
05:51 Je pense que particulièrement dans la séquence qui a suivi le 7 octobre,
05:55 le "en même temps" qui a parfois conduit certaines déclarations publiques du président
06:01 a été funeste.
06:03 Moi, je suis ici avocat de personnes,
06:05 de familles de personnes qui ont perdu quelqu'un.
06:08 Et je m'y dis pourquoi ?
06:11 La singularité.
06:12 On ne rend justice à personne quand on confond tout et tout le monde.
06:16 Là, vous avez des personnes qui ont été assassinées parce qu'elles étaient juives,
06:20 qui sont 42 français.
06:21 Il faut que ce moment soit dédié à cela.
06:25 Ce n'est voler la mémoire de personne.
06:28 Et si on commence à faire du "et on va faire ça en même temps"
06:32 et on va mettre tout le reste à la fois, on ne dira plus rien du tout.
06:36 La singularité, c'est respecter ces 42 qui sont morts le 7 octobre
06:40 parce qu'ils étaient juifs et parce qu'ils étaient français.
06:43 Patrick Klugmann, je le disais, trois français sont par ailleurs
06:45 toujours officiellement portés disparus.
06:47 Est-ce qu'on a de leurs nouvelles ?
06:48 Est-ce qu'on sait s'ils sont otages ? Est-ce qu'il y a des preuves de vie ?
06:51 Bien sûr, le gouvernement français est très prudent autour de ça.
06:54 Et d'abord pour leur sécurité, et donc on le respecte.
06:57 Mais est-ce que les familles, par exemple, y croient encore ?
07:01 Là, on a très peu d'informations, mais hier soir, le New York Times
07:04 et quelques journaux israéliens disaient que sur les 136 qui restent otages,
07:09 ils étaient en train d'informer les familles de 32 décès, à peu près 20%.
07:15 On ne connaît pas encore les identités.
07:17 Ça, c'était ce qui était annoncé hier soir.
07:19 Moi, je n'ai pas d'informations plus précises que celles que je viens de vous donner.
07:22 On parle d'un éventuel nouvel accord entre le Hamas et les autorités israéliennes
07:28 pour justement une libération.
07:29 C'est ce que veulent les familles, où finalement, elles comprennent
07:31 qu'Israël continue ses opérations.
07:36 Pour une famille, il n'y a pas de valeur plus importante
07:40 que de voir quelqu'un qui est proche revenir.
07:44 Et sinon, si on n'était pas comme ça, ces gens seraient des intégristes.
07:48 Donc, évidemment que tout doit être fait
07:50 pour permettre la libération de personnes qui sont retenues otages.
07:53 Il n'y a pas de valeur supérieure à la vie.
07:55 Il n'y a pas de valeur supérieure à la liberté.
07:57 Et tout ce qui peut conduire à ramener quelqu'un de captivité
08:01 aux mains d'un groupe terroriste chez lui et auprès des siens,
08:04 doit être fait, doit être conduit.
08:05 Évidemment.
08:07 - Vous défendez, vous assistez plusieurs familles dont les enfants ont été otages.
08:12 Je pense notamment à Miachem.
08:13 Comment vont-ils, ces otages français qui ont été libérés ?
08:17 - Ils sont tous dans une période de reconstruction post-traumatique.
08:22 Et Miachem, dont j'ai encore pris des nouvelles pas plus tard qu'hier,
08:27 c'est un exemple parfait.
08:28 Elle a voulu...
08:30 - Miachem, je le redis pour les auditeurs, pardon,
08:31 c'est cette jeune fille qu'on avait vue sur un lit d'hôpital,
08:35 vidéo diffusée par le Hamas alors qu'elle était retenue.
08:38 - Miachem, c'est une toute jeune femme.
08:40 - En tant qu'homme, oui.
08:40 - Et elle a 21 ans.
08:41 Elle était au Festival Nova et elle a voulu avant tout remercier
08:45 tous ceux qui s'étaient mobilisés pour elle.
08:46 Elle a fait
08:48 un slogan qui est devenu assez mondial, notamment sur les réseaux Instagram.
08:53 Elle a dit, puisqu'elle était à un festival de musique,
08:55 "We will dance again".
08:56 "On dansera à nouveau".
08:57 Mais la crainte, et comme tous ses proches,
09:00 qu'elle ait tellement voulu remercier ceux qui s'étaient mobilisés pour elle,
09:03 que parfois, ce soit à son détriment.
09:06 Et c'est encore quelqu'un qui doit recouvrir des forces, se reposer.
09:09 Et comme tous les autres, surtout les plus jeunes,
09:11 qui n'est pas apte à reprendre une vie comme s'il ne s'était rien passé dans sa vie.
09:15 - Se reconstruire, c'est impossible.
09:17 - Je ne sais pas si c'est impossible, mais c'est l'enjeu de tout cela.
09:21 Et ça prendra du temps.
09:22 - Et ça passe par la justice aussi.
09:24 - Et ça passe par la justice.
09:25 Aujourd'hui, nous sommes dans le temps de l'hommage.
09:27 Mais nous, les avocats, nous attendons le temps de la justice.
09:31 Parce que, à la fin, il se sera passé quelque chose
09:34 quand vous aurez eu des réponses judiciaires.
09:37 Ces attentats ne sont pas venus, ces attaques ne sont pas venues par hasard.
09:40 Elles ont été préparées, elles ont été financées, elles ont été perpétrées.
09:44 Et la France doit aussi prendre sa part.
09:47 Il y a une enquête qui est en cours au Parquet national terroriste.
09:50 Eh bien, nous, nous attendons après le temps de l'hommage.
09:54 C'est bienvenu le temps de la justice qui, je l'espère, viendra.
09:57 - Et cet hommage, ce sera tout à l'heure à 11h45.
09:59 Un grand merci.
09:59 [SILENCE]