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00:00 Salut à tous et bienvenue dans cette émission dans laquelle on va parler estimation. Parce
00:15 que je pense que vous le savez, en investissement, on essaye souvent d'estimer les choses. Par
00:20 exemple, on essaye d'estimer quel va être le rendement de notre portefeuille boursier
00:24 sur les 10 prochaines années ou bien on essaie d'estimer quel est le risque maximal de notre
00:29 portefeuille. Est-ce que c'est plutôt 20% de perte, 30% de perte, 50% de perte ? Ce sont
00:34 des chiffres qui sont très difficiles à estimer. Alors pour démarrer cette émission,
00:38 on va bien sûr revenir, ne vous inquiétez pas, sur l'investissement un peu plus tard,
00:41 mais on va démarrer par des exemples beaucoup plus simples. Par exemple, quelle est la probabilité
00:45 d'obtenir un 6 avec un D en un seul lancé ? Ça, ça paraît plutôt facile. Un peu plus
00:50 compliqué, quelle est la distance de freinage d'un véhicule lancé, d'une voiture en l'occurrence
00:55 lancée à 90 km/h ? En général, il y a trois manières de faire. La première manière,
00:59 c'est la manière physique, c'est-à-dire pour reprendre l'exemple du D, on va le regarder
01:04 et puis basé sur sa construction, sur ses caractéristiques physiques, on va se dire
01:07 bon c'est un cube, il a 6 faces, il est symétrique, tout a l'air parfaitement symétrique, etc.
01:15 Et donc, sans même lancer le D, on peut estimer que le 6 a une chance sur 6 de tomber. Donc
01:21 la face 6, vous m'avez compris. Et l'avantage, c'est qu'on n'a pas besoin pour trouver ce
01:26 chiffre de lancer le D. Parce que lancer un D, bon ça coûte rien, c'est très rapide,
01:30 etc. Donc dans notre cas, ce n'est pas vraiment un avantage. Mais si la modélisation a pour
01:33 but de tester par exemple la distance de freinage d'un véhicule, c'est un petit peu plus compliqué.
01:37 Il faut une voiture, il faut une piste, il faut tester, etc. Mais pire que ça, pour
01:42 les crash test de voitures, par exemple, qui vont avoir un coût assez évident, si on
01:47 peut le faire déjà en modélisation mathématique, basée sur les caractéristiques physiques
01:52 de la voiture, du mur dans lequel elle va taper ou de la route sur laquelle elle va
01:57 freiner, on voit que ça fait gagner énormément de temps et d'argent. Donc oui, c'est une
02:01 méthode qui est pratique, mais l'inconvénient, c'est que c'est une modélisation qui est
02:04 théorique. C'est-à-dire qu'on va se baser sur des hypothèses, on va rentrer des paramètres,
02:09 mais ces paramètres peuvent être faux. Même sur le D, qui paraissait un exemple assez
02:12 évident de dire "ben voilà, j'ai regardé sa forme et on a une chance sur 6 en un seul
02:16 lancer d'obtenir un 6", il se peut qu'éventuellement le centre de gravité soit un peu déplacé.
02:22 Ça peut être juste un problème de fabrication, parce qu'il y a par exemple une bulle quelque
02:25 part dans le D, mais ça peut être aussi un D qui est truqué, tout simplement, et
02:29 vous pouvez ne pas l'avoir vu, vous l'avez juste pesé, observé, etc. Et donc vous n'avez
02:34 pas mis ça comme paramètre. Ou bien, pour reprendre l'exemple de la distance de freinage,
02:39 ça peut être un conducteur qui aura gardé des pneus de voiture au-delà de la limite,
02:45 donc il aura des pneus beaucoup trop usés, et donc la distance de freinage dans la vraie
02:49 vie va être complètement différente de la distance de freinage calculée en modélisation.
02:54 Évidemment, il y a la surface de la route, il y a énormément de choses qu'il faut prendre
02:58 en compte dans ce type de modélisation, et donc la théorie n'est jamais parfaitement
03:01 exacte. Ensuite, la deuxième méthode, c'est la méthode empirique. Dans l'exemple du D,
03:05 c'est simple, on va lancer le D 100 fois, 500 fois, 1000 fois, et on va regarder quel
03:11 est le pourcentage de fois où on tombe sur un 6. Donc normalement, on devrait trouver
03:14 un pourcentage qui est aux alentours de 1/6, aux alentours de 16,7%. Et le gros avantage
03:20 de ce système, c'est qu'il est basé sur la réalité. C'est-à-dire que déjà, c'est
03:24 simple, on n'a pas besoin de connaissances en physique, on n'a pas besoin de faire des
03:26 modélisations mathématiques, on n'a pas besoin non plus de chercher si le D est truqué,
03:31 on le saura directement en regardant les résultats. Si on trouve 30% de chances d'obtenir un
03:36 6 basé sur 1000 lancés, on peut très fortement se douter que le D est truqué, et on n'a
03:41 pas besoin de savoir si le centre de gravité a été déplacé ou pour la manière dont
03:45 il a été truqué. En fait, juste en observant, donc c'est pour ça que je parle de manière
03:48 empirique, juste en observant les 1000 lancés, on va savoir qu'on a 30% de chances de tomber
03:52 sur un 6. Alors, pour revenir à la première méthode, qui était la méthode de modélisation,
03:56 si vous voulez, basée sur des caractéristiques physiques, on aurait pu clairement passer
03:59 à côté du fait que c'est un D truqué. Si maintenant, je reviens à mon deuxième
04:04 exemple qui était les distances de freinage, c'est la même chose. On n'a pas besoin d'être
04:08 docteur en physique, de savoir de quelle matière exactement sont faits les pneus, d'étudier
04:14 la route en détail pour savoir, pour tester la distance de freinage. On fait le test un
04:19 certain nombre de fois, peut-être avec plusieurs voitures sur différentes surfaces, peu importe.
04:24 Et donc, on aura une distance, peut-être une distance moyenne. Mais parmi les inconvénients
04:30 qu'on a, c'est le fait que ça reste basé uniquement sur un nombre limité d'observations.
04:36 Par exemple, si on lance un D mille fois, on va obtenir un résultat qui va être valable
04:41 pour ce D. Donc si c'est un D qui n'est pas truqué, on va tomber sur 16,7, on va lancer
04:46 sur un tapis vert de casino, on va obtenir 16,7, ou bien on va obtenir dans mon exemple
04:51 de D truqué, 30% de chance de tomber sur un 6, mais ce sera valable uniquement dans
04:56 ce contexte-là, avec ce D-là. Peut-être qu'avec un autre D qui lui sera truqué ou
05:00 non truqué, on va trouver autre chose. Peut-être, même si on connaît la réponse, mais peut-être
05:05 que sur un autre tapis qui va avoir une matière différente, le 6 va tomber plus ou moins
05:10 souvent. D'ailleurs, je dis que c'est peu probable, mais oui et non, parce que vous
05:13 savez, sur le 6, sur le D, il y a malgré tout 6 trous, et il y a un seul trou sur le
05:18 1 et 2 sur le... Donc peut-être que si le tapis est un peu plus rugueux, peut-être
05:22 que ça va changer le résultat qu'on va trouver, et peut-être qu'il n'y aura pas 16,7% de
05:28 chance de tomber sur un 6, mais 15,8, etc. Et ça, c'est le gros problème. Évidemment,
05:33 sur la distance de freinage, ça, on le voit clairement. On va tester une voiture, peut-être
05:37 deux ou trois voitures, pareil pour les pneus, etc., peut-être sur deux routes différentes,
05:41 mais on ne pourra jamais tout tester. On ne pourra jamais tester quand il fait -10°,
05:45 quand il fait +20°, quand c'est sur du sable, de la neige, une route un petit peu usée,
05:49 les quatre pneus usés de la même manière, un qui est un peu plus usé que les autres,
05:53 etc. Donc même si ces tests ont été effectués de la meilleure manière possible, il se peut
05:58 qu'on vous trouvie un chiffre, mais que finalement, ce chiffre ne pourra pas être utilisé par
06:03 quelqu'un qui va rouler quatre mois de l'année sur des routes enneigées. C'est de plus en
06:06 plus rare, on est d'accord, de rouler quatre mois de l'année sur des routes enneigées.
06:09 Mais vous voyez là où je veux en venir. Il faut vraiment, pour qu'on puisse utiliser
06:14 ce chiffre, que les conditions dans lesquelles on veut obtenir ce chiffre soient exactement
06:19 les mêmes que la personne qui va regarder ce chiffre plus tard. Si on vous dit "pour
06:24 freiner c'est X mètres", il faut que ça serve à quelqu'un pour peut-être des observations
06:29 concrètes, respecter des distances de sécurité, etc. On n'a pas les moyens vraiment d'être
06:34 sûr que nos utilisateurs vont utiliser exactement les mêmes voitures, pneus, routes, etc.
06:39 Donc voilà pour les deux premières méthodes. La méthode physique modélisation, la méthode
06:45 empirique, où on va tester sur le terrain. La troisième méthode, c'est la méthode
06:50 subjective. Je pourrais appeler ça la méthode du doigt mouillé, le pifomètre, etc. En fait,
06:54 c'est un petit peu plus que ça. C'est pas du hasard, c'est vraiment basé sur les connaissances
06:59 qu'on a, sans faire trop de recherches. On peut arriver à estimer quelque chose, ce
07:05 que les anglo-saxons appelleraient "guesstimate". Vous savez, ce côté un peu... Alors, on
07:10 peut traduire ça par pifomètre, mais à nouveau, c'est pas le bon terme. On estime
07:14 ça un petit peu au jugé. Donc, je prends le D, par exemple, sans faire de modèle mathématique,
07:18 sans observer de près le D, etc. Vous allez me dire que ça va être à peu près, ou
07:23 exactement, d'ailleurs, une chance sur six. Pareil pour la distance de freinage d'une voiture. Alors,
07:28 là, c'est un petit peu plus complexe. Et vous n'êtes pas docteur en physique, moi non plus,
07:33 on n'est pas des pilotes, on n'est pas... On est juste quelqu'un de lambda qui essaye de répondre
07:37 à une question. Donc, la partie modélisation, on ne l'a pas. On n'est pas des scientifiques
07:43 entraînés là-dessus. Après, sur la méthode empirique, je pense que vous n'avez jamais eu
07:47 à piler à 90 km/h sur une route. Et même si ça vous est arrivé parce qu'il y a un sanglier qui
07:54 traversait devant vous, j'imagine que vous n'allez pas retourner sur la route mesurer la distance de
07:58 freinage. Donc, on est d'accord qu'a priori, vous et moi, on n'a ni la partie modélisation pour nous
08:04 aider, ni la partie empirique. On n'est pas allé piler et mesurer derrière la distance de freinage.
08:09 Et pourtant, si je vous demande quelle est la distance de freinage d'une voiture qui est lancée
08:14 à 90 km/h, il est très probable que vous allez trouver une distance qui n'est pas délirante.
08:19 Par exemple, si on me pose la question, je vais me dire "bon, 90 km/h, je pile, je ne sais rien,
08:26 je ne vais pas m'arrêter en 20 ou 30 mètres". Et à l'inverse, je me doute bien que je ne vais pas
08:30 dépasser les 100 mètres. Donc déjà, on va être entre 20-30 mètres et 100 mètres en valeur extrême,
08:36 et on peut essayer de se dire "le milieu de ça, ça doit être peut-être la bonne distance". Donc,
08:43 on fait 20+100/2, ça fait 60. Donc, on va dire à nouveau au pifomètre, on va dire "ouais, peut-être
08:49 qu'à 60 mètres, on aurait à peu près 60 mètres pour s'arrêter". Et il se trouve que vraiment,
08:54 de manière un peu ou même totalement subjective, on va tomber sur un chiffre qui n'est pas si loin
09:01 que ça de la vérité. Et d'ailleurs, en cherchant des infos sur le net pour savoir la durée de la
09:07 distance de freinage, alors souvent c'est temps de réflexe inclus, je suis tombé sur des chiffres
09:12 qui vont de 40 m à 81 m. Et c'est là où on se dit "ouais, finalement, entre des tests où on va
09:18 tester des centaines de freinages ou bien des modélisations mathématiques hyper compliquées,
09:22 tout ça pour trouver entre 40 et 81 mètres, je pense qu'un peu aux doigts mouillés, j'aurais
09:28 pu trouver à peu près ce type de distance". Et si on passe maintenant à l'investissement,
09:31 c'est exactement la même chose. En fait, on a aussi ces trois méthodes. Il y a aussi la méthode
09:35 de modélisation, il y a aussi la méthode empirique de regarder dans la réalité ce qui se passe,
09:41 et puis la méthode très subjective qui est, on est d'accord, la méthode employée par la plupart des
09:47 gens en investissement. Et là, je parle de méthodes qui sont utilisées pour estimer des rendements de
09:51 portefeuille, pour estimer le prix d'une action, bien le risque d'un portefeuille. Commençons par
09:55 la première méthode, évidemment les modèles physiques, les modèles mathématiques, qui sont
09:59 très utilisés, vous le savez, en finance, surtout chez les professionnels. Ils sont utilisés sur les
10:03 produits dérivés, ils sont utilisés sur les produits de taux principalement, mais aussi sur
10:07 les actions, sur les produits de taux, les produits dérivés, vous savez, on a Black and Shoals,
10:11 on a toutes ces formules-là. Sur la partie d'une obligation, on voit bien qu'une obligation qui
10:16 nous paye un coupon de 5% tous les ans, mais avec un risque de défaut qu'on estime à 2%,
10:22 on peut calculer le prix théorique de cette obligation et donc le rendement qu'on va obtenir
10:26 dans la durée. Et puis sur les actions, il y a aussi des modèles mathématiques qui sont utilisés,
10:31 dont le fameux DCF, discounted cash flow, vous savez où on actualise les flux futurs,
10:36 qui est un modèle mathématique qui est très beau en théorie, très intéressant, et puis en pratique,
10:42 c'est beaucoup moins valide, tout simplement parce que j'en ai déjà parlé dans mes exemples
10:46 précédents, il y a ce problème d'hypothèses, de paramètres, etc. La deuxième méthode, la méthode
10:52 empirique, alors il se trouve qu'en finance, la plupart du temps, on va utiliser les données
10:56 passées. Voilà, tout simplement, c'est-à-dire qu'on va se dire, si je vous dis quel est le
11:00 rendement de votre portefeuille pour les dix prochaines années, vous pouvez me dire "vu que
11:03 mon portefeuille suit l'indice américain S&P 500, que la S&P 500 a fait du 9% de rendement annuel
11:10 depuis X années, etc. donc mon estimation pour les dix prochaines années, c'est 9% de rendement".
11:15 Voilà, si vous avez ce type de raisonnement basé sur des données passées, alors vous tombez plutôt
11:19 dans la deuxième méthode, qui est la méthode empirique basée sur des données qui viennent
11:24 de la réalité. Et puis comme je vous le disais, il y a la troisième méthode, la méthode subjective,
11:27 qui est effectivement la plus employée en finance, en tout cas chez les particuliers,
11:32 ça revient à mon estimation de 60 mètres de distance de freinage pour une voiture tout à
11:37 l'heure. C'est que si on demande à quelqu'un qui a juste un petit portefeuille boursier,
11:41 voilà, quel est le rendement qu'il imagine pour son portefeuille dans les dix prochaines années,
11:45 ou bien quel est le risque de son portefeuille, c'est pas a priori un quant hyper, voilà,
11:53 qui va modéliser un portefeuille pour connaître exactement tous les chiffres ou le risque basé
11:57 sur des modèles de VAR, peu importe. Donc ça va ni être ce type de personne, ni quelqu'un,
12:02 souvent, qui a étudié tous les types d'actifs dans le passé, qui connaît parfaitement les
12:06 rendements, les corrélations entre actifs, etc. et qui va pouvoir nous dire, basé sur des données
12:11 historiques, mon rendement va être exactement de tant. Et la personne, quand on lui pose la question,
12:16 en tout cas l'investisseur particulier, très souvent va nous répondre "moi j'estime, voilà,
12:21 peut-être gagner entre 5 et 10%". À nouveau ce chiffre, voilà, on a obtenu une fourchette entre
12:27 5 et 10%. Pareil sur le risque. Sans modèle de risque, sans connaître exactement, avoir étudié
12:33 les crises principales des années 2000-2008, etc., il va dire "je pense que je peux perdre 30-40% sur
12:40 mon portefeuille pendant une crise, je sais pas, je connais pas trop, mais ça devrait être dans
12:43 ces eaux-là". Et ce qui est marrant, c'est qu'on se rend compte que sans être vraiment un docteur
12:48 en mathématiques, sans être quelqu'un qui a étudié tous les cours boursiers du passé, on n'est
12:52 finalement pas si loin. Et le gros avantage de cette méthode subjective, donc celle qui est
12:56 appliquée par beaucoup de particuliers, c'est que quand on applique ce type de méthode, un peu comme
13:01 je le disais aux doigts mouillés, on sait qu'on a une méthode qui est très loin d'être parfaite.
13:04 Et comme on sait qu'on a une méthode qui est très loin d'être parfaite, parce qu'on dit "je sais
13:07 pas, mon portefeuille peut perdre entre 20 et 40%, mon rendement il sera entre 5 et 10% par an, etc.",
13:12 on sait qu'on est très imparfait, notre méthode est très imparfaite, donc on prend des pincettes,
13:20 en fait, on prend une marge de sécurité. Par exemple, quelqu'un qui va vouloir calculer le
13:25 montant qu'il aura à la retraite, il va peut-être se dire "bon, vu que j'estime que c'est entre 5
13:30 et 10%, je vais plutôt prendre 5% pour être conservateur". Là où nos deux premiers modèles,
13:35 qui étaient des modèles avec une apparente exactitude due à leur côté scientifique,
13:41 que ce soit la modélisation ou bien les données passées, on va avoir tendance, et ça vous voyez
13:45 passer ce genre de postes partout, on va avoir tendance à nous dire "si vous gardez votre ETF
13:50 pendant x années, pendant 30 ans, bla bla bla, à la fin vous aurez 1 million d'euros pour votre
13:54 retraite". Et ça c'est 100% basé sur des données passées, empiriques si vous voulez, mais je n'ai
14:00 jamais vu personne qui disait "ben en fait, comme c'est effectivement 9% de rendement dans le passé,
14:05 mais comme le futur ne représente pas exactement le... enfin le passé plutôt ne représente pas
14:09 exactement le futur, on va prendre une marge de sécurité de 2%, donc faites plutôt votre
14:13 calcul de retraite sur 7%". On voit pas trop ce genre de choses, on voit plutôt des gens qui sont
14:17 persuadés que les 9% vont exactement se répercuter dans le futur. Et ça c'est l'avantage de cette
14:22 fameuse méthode subjective, c'est que comme on sait qu'elle est mauvaise, comme on sait qu'elle
14:27 est hyper approximative, qu'elle est fausse, tout ce que vous voulez, elle n'est pas si fausse au
14:31 final, c'est pas si mal, mais on sait qu'il y a une énorme marge d'incertitude, alors on va prendre
14:35 des pincettes. Et ce qu'il faut garder en tête, c'est que les deux autres méthodes, donc la méthode
14:39 vraiment de modélisation mathématique ou la méthode empirique, elles ont elles aussi de gros
14:44 défauts, et j'en ai déjà parlé, mais leur apparence de science, de formule, de vérité gravée dans le
14:51 marbre si vous voulez, ou même de données passées, statistiques, etc., nous font croire qu'elles sont
14:55 parfaites, et donc on a tendance à ne jamais prendre de marge de sécurité, ou alors des marges
14:59 de sécurité qui sont beaucoup trop faibles. Revenons sur le modèle de modélisation mathématique.
15:04 Le problème, on en a parlé, c'est qu'on fait des hypothèses, on rentre des paramètres qui peuvent
15:09 être faux, donc j'ai parlé des pneus usés pour la distance de freinage ou des truqués, et c'est
15:14 exactement ce qui s'est passé en 2008. En 2008, les modèles des agences de notation, donc les modèles
15:20 qui donnaient "est-ce que tel actif c'est plutôt très peu risqué, donc on va lui donner une note
15:24 de triple A, ou est-ce que c'est un peu plus risqué avec une note de A, B, double B, etc., jusqu'au
15:31 produit totalement pourri", ces modèles mathématiques des agences de notation ont été à côté de la
15:36 plaque, et ça a été une des raisons de la crise de 2008. Et pourquoi est-ce que ces modèles étaient
15:41 à côté de la plaque ? Pourquoi est-ce qu'ils ont réussi à donner des notations triple A sur
15:46 des produits pourris ? C'est parce que leurs paramètres et leurs hypothèses étaient mauvais.
15:51 Il s'est avéré que les prêts les moins bons, donc les fameux subprimes, avaient un taux de défaut de
15:57 5 à 6 % dans le passé. Donc ils ont mis comme paramètre "les taux de défaut sur les subprimes
16:02 seront de 6 %, pas de bol, on est tombé dans une ère totalement nouvelle en fait, où le taux de
16:08 défaut est monté à 40 % sur les prêts variables en 2008, et personne n'avait mis ça comme paramètre.
16:13 Ensuite, il s'était dit "bah c'est pas grave si les gens ne peuvent pas rembourser, en tout cas
16:19 c'est pas si grave, ils n'ont qu'à vendre leurs biens immobiliers, de toute manière le marché ne
16:23 fait que monter". Le problème c'est que là aussi l'hypothèse était fausse, puisque le marché
16:28 immobilier américain a baissé de 30 % entre 2006 et 2008. Et ce genre de choses, il s'en est passé
16:34 de tous les côtés. On prend dans les paramètres, on a un niveau de taux d'intérêt de temps, et il
16:38 se trouve que les taux d'intérêt ont augmenté peu après, etc. Donc on le voit, les modèles
16:42 mathématiques, même s'ils sont très jolis, ils ont l'air parfaits, en fait un modèle ne vaut que
16:47 ce que valent ses hypothèses et ses paramètres. Donc si les hypothèses que vous avez mis ne sont
16:51 pas correctes, le modèle va vous donner quelque chose qui n'est pas correct. Et c'est exactement
16:54 ce qui s'est passé en 2008. Donc voilà, modélisation mathématique, ça paraît très
16:58 beau. Et là je ne parle pas seulement de la finance, mais à nouveau des distances de freinage
17:02 de voiture. On le voit bien avec les tests qui ont été faits sur les consommations des véhicules,
17:07 vous le savez très bien, le scandale Volkswagen, etc. Il y a un monde entre la théorie et la
17:14 pratique. Et sur les distances de freinage, c'est très beau de prendre des pneus tout neufs par
17:19 exemple et de modéliser des pneus tout neufs sur une route parfaite. Et puis dans la réalité,
17:22 il y a une tâche d'huile qui n'avait pas été mise dans le modèle. Et il se trouve que peut-être
17:26 que quelqu'un va freiner en 120 mètres, tout simplement parce que c'est une route où il y a
17:30 beaucoup de poids lourds qui ont des fuites d'huile. Et que voilà, sur cet endroit là,
17:33 c'est 120 mètres la distance de freinage et ce n'est pas 60. Ensuite la méthode empirique. Elle
17:37 aussi a de gros défauts, et notamment le fait que les manières dont on fait le test ne correspondent
17:44 peut-être pas à l'environnement dans lequel la voiture, le D.O.O. devait être utilisé.
17:49 Et c'est exactement pour ça que j'avais fait une émission qui critiquait un petit peu le D.C.A. sur
17:56 ETF. C'était en fait ce que je critiquais, c'était le fait de partir du principe que forcément les
18:02 rendements passés allaient être exactement les mêmes dans le futur. Pour moi, ça revient exactement
18:07 au même que de dire quand on freine sur une route française, je sais pas qui est à tel endroit,
18:12 on a fait des tests sur telle route avec telle voiture, c'est tant la distance de freinage.
18:16 Mais ça ne veut absolument pas dire que sur toutes les routes françaises avec toutes les
18:19 voitures on va avoir le même temps de freinage. L'environnement peut changer, il peut faire plus
18:23 chaud, plus froid, etc. Et pour moi en bourse c'est la même chose, l'environnement peut changer. On a
18:28 effectivement un taux de rendement du S&P 500 qui est historiquement entre 9 et 10% sans prendre en
18:34 compte l'inflation. En prenant en compte l'inflation on est plutôt en dessous de 7%, mais ça veut pas
18:38 dire que ça va continuer pour le futur. On sait qu'on a le changement climatique qui va venir,
18:43 enfin ça c'est ce que j'avais déjà cité dans mon émission. On a le changement climatique,
18:46 on a la démographie, etc. Donc peut-être que ça va changer. Alors on se doute qu'on va pas passer
18:51 de 9% de rendement à -10% de rendement sur 20 ans, mais peut-être que le rendement va décroître ou
18:57 augmenter, je ne sais pas. Peut-être que la transition énergétique va faire augmenter les
19:01 rendements parce qu'il y aura énormément d'investissements à faire dans plein de domaines
19:03 qui vont être géniaux, ou peut-être que l'intelligence artificielle va permettre de booster
19:08 les rendements parce qu'il y aura plein d'applications qu'on va trouver qui vont permettre
19:12 aux entreprises d'augmenter leurs marges, je ne sais pas du tout, ou de baisser leur coût,
19:15 peu importe. Donc on sait pas, mais l'environnement peut changer et il se peut que les données
19:19 passées, enfin les données futures plutôt, divergent par rapport aux données passées.
19:23 Et c'est pour ça que ce modèle empirique, sous des apparences, je me répète beaucoup désolé,
19:29 mais sous des apparences scientifiques, ça peut nous surprendre. Autre problème avec cette méthode
19:33 empirique, c'est le fait qu'il est très difficile d'éliminer le bien du survivant. C'est-à-dire
19:38 qu'aujourd'hui, on va nous dire de manière très classique, si vous mettez votre investissement
19:45 dans un ETF S&P 500, alors je me répète, vous allez avoir 9% de rendement par an. Mais le fait
19:50 d'utiliser le S&P 500 ou le Nasdaq, peu importe, c'est aussi très probablement parce que c'est le
19:55 marché qui a le mieux performé, ou quasiment le mieux performé dans le monde. Si c'était l'Europe
20:00 qui avait super bien performé et qui avait ce type de rendement, et pas les Etats-Unis,
20:04 on serait en train de nous dire, mettez votre retraite dans un ETF S&P 600, un ETF européen,
20:09 et vous allez avoir 9% de rendement. On ne nous dit pas ça, on ne nous dit pas dans un ETF
20:13 européen, on nous dit dans un ETF américain, parce que c'est ceux qui ont le meilleur rendement.
20:17 Mais peut-être que ça va s'inverser, peut-être que dans les 20 prochaines années, ça va être
20:21 l'Europe qui va avoir 9% de rendement et les Etats-Unis qui auront 4% de rendement. C'est ça
20:25 le bien du survivant. Ou peut-être que les Etats-Unis vont fléchir, etc. Alors attention,
20:31 c'est pas du tout ce que je dis, moi je reste un fan des actions américaines, c'est la plus grosse
20:35 partie de mon portefeuille. Je dis pas du tout que c'est ce qui va se passer, mais c'est un risque.
20:39 Peut-être qu'on utilise, par exemple, pas du tout la Chine, parce que la Chine elle a mal,
20:43 elle performe mal depuis des années et des années. Mais si la Chine avait super bien performé,
20:48 on nous dirait aujourd'hui, un portefeuille standard, il doit avoir peut-être 30% ou 40%
20:53 de Chine. Aujourd'hui, on ne nous le dit pas du tout. Pourquoi ? Parce que la Chine a mal
20:56 performé. Mais peut-être que dans le futur, il faudra réellement avoir 20, 30, 40% de son
21:00 portefeuille sur la Chine si on veut vraiment très bien performer. Vous voyez, ce biais du
21:03 survivant c'est aussi un gros gros problème quand on utilise des données empiriques.
21:07 L'idée ici, et c'est pour ça que je fais cette émission, c'est que quelle que soit votre méthode,
21:11 surtout si vous avez les deux méthodes qui se rapprochent le plus de méthodes scientifiques,
21:16 soyez prudent et doutez de vos modèles. C'est pas parce qu'un modèle vous donne un chiffre
21:21 précis, que ce soit un chiffre basé sur le passé ou un chiffre basé sur une modélisation
21:25 mathématique, qu'il est juste. C'est pas parce qu'on vous donne un chiffre avec quatre chiffres
21:29 après la virgule qu'il est plus juste qu'un chiffre qui va être une estimation entre 6 et 8%
21:35 par exemple. C'est pas parce qu'on vous dit 7,2698 que c'est plus juste. Et pourtant,
21:40 on a tendance à confondre justesse et précision. Je vous le rappelle, j'adore cette image-là,
21:46 c'est comme une cible si vous voulez. Vous pouvez avoir quelqu'un qui va viser au centre,
21:50 mais de manière assez peu précise. Vous allez avoir les points qui vont être autour du centre,
21:55 mais éloignés peut-être de 1 ou à 2 cm. Et puis vous pouvez avoir quelqu'un qui a un fusil
22:00 extrêmement juste, c'est-à-dire qu'il dire toujours à peu près au même endroit, mais très loin du
22:04 centre. Donc vous allez avoir toutes vos balles qui vont être à 10 cm du centre de la cible,
22:09 mais très regroupées les unes entre les autres. Les modèles mathématiques ont souvent ça. Les
22:13 modèles mathématiques vont vous donner une apparence de précision, parce qu'ils vont vous
22:18 donner des chiffres qui paraissent très précis, mais au final vous serez loin du centre de la
22:21 cible. Essayez de toujours garder du bon sens. Le bon sens, ou plutôt le manque de bon sens,
22:26 c'est ce qui a expliqué la plupart des crises boursières. C'est vrai pour toutes les bulles,
22:32 dont l'éclatement de la bulle internet. C'est vrai pour la plupart des crises,
22:35 comme en 2008, etc. De se baser à 100% sur des modèles mathématiques pour nous dire si un
22:41 produit est risqué ou non, sans vraiment fouiller ce qu'il y a au fond de ce produit, comme toutes
22:46 les CDO, MBS, etc. Tous ces produits exotiques autour des subprimes. Donc voilà, le bon sens,
22:51 garder du bon sens. Et finalement, parfois la méthode subjective n'est pas si mauvaise que ça.
22:56 Voilà, merci à tous d'avoir écouté. N'oubliez pas de laisser un like si ça vous a plu. Si vous
23:02 m'écoutez en podcast, c'est toujours sympa de mettre un petit commentaire, c'est toujours
23:07 super sympa. Et moi je vous dis à bientôt pour d'autres émissions.