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Interview confession de personnalités politiques et médiatiques sur des sujets environnementaux

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Transcription
00:00 [Musique]
00:25 [Bruit de porte]
00:30 - Bonjour Patrick. - Bonjour !
00:32 - Merci d'être venu. - Santé.
00:34 - Santé.
00:35 - Je me dis même avec la musique.
00:36 Patrick Roger, journaliste de renom et directeur général de Sud Radio,
00:39 est un écologiste avant l'heure.
00:41 Son livre des années 2000 a décodé les enjeux environnementaux
00:44 et anticipé les conséquences de l'action humaine.
00:47 Son expérience radio, largement saluée par la profession,
00:50 l'a propulsée à la tête de Sud Radio depuis 2017,
00:53 il a revitalisé la station, incarnant un journalisme audacieux,
00:57 libre, pluriel et engagé.
00:59 Bienvenue dans le Déclic.
01:00 - Merci à vous Patrick.
01:02 Quel a été votre déclic à vous en matière d'écologie ?
01:05 - Je crois que je l'ai eu dès l'enfance.
01:08 Moi je suis un enfant de la campagne, j'ai vécu en fait dans une ferme pendant des années.
01:12 Donc l'écologie ça me parlait en fait dès le début.
01:15 J'avais 6 mois, 1 an que je me baladais en fait dans les champs, dans la nature,
01:19 en Bretagne, en Normandie.
01:21 Donc j'ai eu ce déclic et ensuite il m'a suivi tout au long de ma vie.
01:25 - Tout au long de votre vie ?
01:26 - Y compris quand je suis venu travailler dans les médias ou à Paris.
01:29 J'avais ça en moi quoi.
01:31 Et donc je ne suis pas comme certains qui découvrent en fait au fil du temps.
01:35 Moi j'ai toujours vécu avec et j'en ai eu conscience quoi.
01:41 J'ai essayé d'imposer ce thème il y a 30 ans dans les médias,
01:45 où on me disait en fait à l'époque oui mais c'était pas que l'écologie.
01:49 Moi j'y vois beaucoup plus le développement soutenable, le développement durable.
01:54 Et c'était difficile à faire passer parce qu'on était dans un phénomène de croissance,
02:01 de société qui évoluait de plus en plus, qui avait de plus en plus de besoins.
02:06 On créait en fait des besoins.
02:08 Et évidemment moi aussi j'en ai bénéficié.
02:10 Mais j'avais quand même ce souci en tête de préserver un peu notre planète.
02:15 - Qu'est-ce que vous rêviez de devenir en étant enfant ?
02:18 - En étant enfant, j'avais plusieurs rêves.
02:21 Le premier c'était quand on est un enfant de la campagne et qu'on vit beaucoup avec les animaux,
02:25 c'était d'être vétérinaire.
02:27 C'était de s'occuper justement de l'ensemble des animaux,
02:32 mais en même temps d'avoir le souci de ce que je ne connaissais pas,
02:34 mais qui était la biodiversité, de vivre à la campagne.
02:37 Après j'ai eu très vite un virus pour le journalisme et donc ça m'a un peu évidemment quitté.
02:43 - Est-ce que vous vous souvenez justement de votre tout premier geste écolo ?
02:47 - Mon tout premier geste écolo, alors là c'est peut-être difficile,
02:51 sinon de ce que l'on me disait en fait à l'époque, c'est de gaspiller pas l'eau,
02:54 donc ferme l'eau du robinet.
02:56 - Est-ce que vous avez un petit péché en écologie ?
02:59 - Petit péché en écologie...
03:03 C'est pas de l'écologie, mais j'aime beaucoup cultiver moi-même mes propres plantes,
03:09 y compris mes légumes.
03:11 Alors c'est difficile vous allez me dire quand on est en région parisienne,
03:13 j'ai un petit jardin et ça effectivement c'est quelque chose que j'entretiens.
03:19 - Si vous deviez être le père d'une invention, d'une loi,
03:23 qui existe déjà, qu'est-ce que ce serait ?
03:25 - Qui existe déjà ? Je préférerais finalement inventer quelque chose.
03:30 Peut-être une loi pour encadrer, mais ça ça existe déjà avec la protection du littoral,
03:36 mais pour préserver des espaces, des espaces qui restent,
03:41 ce que j'avais écrit en fait dans mon livre,
03:43 je rêve d'avoir des espaces où finalement l'homme n'a pas d'interaction,
03:47 où il peut simplement y passer pour voir ce qu'est véritablement la nature.
03:51 - Est-ce que vous avez un sentiment d'inachevé dans votre vie,
03:55 quelque chose que vous n'avez pas mené jusqu'au bout ?
03:57 - Bah ça, oui, ça, c'est-à-dire que j'ai écrit en fait ce premier livre en 99-2000,
04:03 parce que moi j'avais fait des études parallèlement justement autour du développement durable,
04:09 du développement soutenable, et je voulais mener des projets à bien autour de ça.
04:14 Et il faut savoir qu'il y a une vingtaine d'années,
04:16 quand j'ai présenté ces projets pour les faire en télé,
04:19 on m'a dit "non mais c'est trop anxiogène, ça fait peur", etc.
04:22 Oui, parce qu'il y avait des scénarios plutôt cauchemardesques,
04:25 Paris sous les eaux avec la fonte des glaciers, l'eau qui gonfle,
04:30 ou alors les ports bretons qui sont envahis par les algues,
04:33 ça ce sont des scénarios de cauchemars,
04:35 il y en avait d'autres qui sont davantage sur du rêve, etc.
04:39 La Concorde avec des séquoias et des pelouses et des arbres et plus de voitures,
04:44 vous voyez, ça c'est quelque chose que j'avais poussé,
04:48 alors que je ne suis pas quelqu'un qui est contre la mobilité et contre les voitures.
04:52 - Et parallèlement à ça, est-ce qu'il y a un accomplissement dont vous êtes particulièrement fier ?
04:56 - Bah d'avoir beaucoup travaillé sur toutes ces idées,
05:00 et de les avoir tout au long de mon parcours médiatique
05:03 et essayer de les initier ici et là, quand je suis passé dans différents médias,
05:07 à France Info pendant des années, à France Inter aussi, à Europe 1 aujourd'hui,
05:12 à Sud Radio, d'essayer d'avoir un soufflet, quelques questions autour du développement durable.
05:19 - Vous êtes aujourd'hui dirigeant de Sud Radio,
05:22 comment on fait pour que cette radio soit autant pertinente,
05:26 autant toujours en amont, intéressante, dans ce paysage ultra concurrentiel ?
05:31 - Oui, nous on a développé et on a mis ce thème en avant qui est le parlons vrai.
05:36 Aujourd'hui c'est assez développé ce parlais vrai dans la société,
05:41 mais il y a 5-6 ans quand on a mis ce slogan sur la chaîne,
05:45 ce n'était pas gagné, parce qu'on avait tendance à mettre
05:50 beaucoup de sujets sous la table, sous le tapis, la poussière sous le tapis,
05:54 pour ne pas aborder les sujets frontalement.
05:57 - Ça veut dire que c'est le parlons vrai ?
05:59 - Que ce soit sur l'écologie, mais sur d'autres sujets,
06:01 en se posant aussi les questions, sans tomber dans des dogmes,
06:04 parce qu'aujourd'hui, et notamment sur l'écologie, on est devenu dogmatique.
06:09 Vous avez des gens d'un côté qui sont pour la décroissance,
06:13 en arrêtant tout, qui voient la destruction et la fin de la planète,
06:18 et puis d'autres qui sont à l'inverse, qui ont tendance à remettre tout en cause.
06:23 Je pense que le chemin est entre la vérité et entre les deux, bien sûr,
06:27 mais il faut se dire les choses, clairement, pour pouvoir évoluer
06:30 et trouver des chemins qui vont nous permettre de continuer.
06:35 - Mais vous avez travaillé pour beaucoup de médias, publics et privés,
06:38 quelles sont les différences les plus marquantes entre les deux ?
06:41 - À ce niveau-là, il n'y en a pas beaucoup.
06:43 Bien souvent, on dit que dans le service public...
06:45 - Sur tous les niveaux, pas forcément que l'écologie,
06:47 mais sur tous les niveaux, quelles différences vous observez
06:50 entre médias publics, privés, peut-être dans le traitement de l'information ?
06:53 - Dans le traitement de l'information et puis dans le fonctionnement d'une chaîne,
06:56 il est évident que dans le public, vous n'avez pas le souci de la rentabilité
07:01 parce que vous touchez des subventions, c'est les impôts qui financent vos programmes
07:08 et vos contenus, et vous avez une relative indépendance dans ces conditions,
07:12 alors que dans le privé, il faut faire adhérer un public
07:15 et il faut évidemment trouver des financements pour pouvoir exister.
07:19 Et tout ça, vous l'avez en tête, en tout cas, quand vous êtes dirigeant,
07:22 un peu moins journaliste.
07:24 Les journalistes ne doivent pas avoir cela comme préoccupation,
07:27 mais quand vous dirigez, vous devez avoir cela en tête,
07:30 d'autant que la presse traverse d'énormes secousses depuis 20-25 ans
07:35 avec l'arrivée du numérique, le tout gratuit qui s'est développé,
07:40 une abondance aujourd'hui, une profusion de médias,
07:46 que ce soit sur le numérique digital, la télévision, la radio, etc.,
07:50 la presse écrite qui souffre.
07:52 Et là, on a vécu un véritable séisme depuis une vingtaine d'années,
07:56 et donc il faut être capable aussi de se ré-générer.
07:59 – Il faut être capable de s'adapter aussi. – Et de s'adapter.
08:01 – Et justement, pour revenir à l'écologie,
08:03 quelle place aujourd'hui ce sujet, cette thématique,
08:06 est occupée sur Sud Radio ? Est-ce que c'est une priorité ?
08:11 Est-ce que c'est quelque chose pour vous aujourd'hui
08:13 qui est encore égal avec d'autres sujets ?
08:15 Est-ce que vous sentez une demande aussi des autres ?
08:17 – Ça fait partie des sujets que l'on développe beaucoup,
08:20 que l'on traite beaucoup, sans tabou, c'est-à-dire en se disant les choses
08:24 et sans être forcément dans une forme de doxa.
08:28 On aborde tous les sujets.
08:30 – Tous les sujets ?
08:31 – Il y a des personnes qui remettent en cause le réchauffement climatique.
08:36 Il faut donner la parole à ces gens-là,
08:41 afin de comprendre pourquoi ils leur mettent en cause
08:44 et leur expliquer les choses.
08:46 Et peut-être ne pas tomber de façon béate sur une remise en cause totale
08:54 de notre société telle qu'elle existe aujourd'hui,
08:56 comme certains le font, en voulant tout arrêter.
09:01 – Vous prônez de la décroissance par exemple ?
09:03 – Non mais il y a les modes de production, de croissance qui sont à revoir.
09:07 Bien sûr, il y a l'économie du recyclage
09:10 qui est quand même aujourd'hui extrêmement favorisée,
09:13 et le recyclage qui doit être mis en avant en permanence.
09:17 – En parlant de régulation, la charte du journalisme bas carbone,
09:20 est-ce que vous êtes signataire et qu'est-ce que vous en pensez ?
09:24 – Moi je trouve que c'est une bonne initiative
09:27 qui permet à chacun d'essayer d'adapter aussi sa façon de travailler,
09:33 ses modes de production, et puis dans le traitement de l'actualité bien sûr.
09:38 – Mais est-ce qu'au quotidien ce n'est pas un poids, c'est réalisable ?
09:42 – Moi je me méfie quand même beaucoup de certaines chartes qui sont signées,
09:45 où il y a des engagements et de belles paroles,
09:50 et puis dans les actes ça ne suit pas nécessairement.
09:54 Mais moi j'en suis profondément persuadé.
09:58 – Et du coup vous allez privilégier plutôt les correspondants locaux,
10:01 ou vous allez continuer à envoyer des reporters ?
10:04 – Non, nous on travaille beaucoup avec les correspondants et les pigistes locaux.
10:08 – Pour justement limiter ces déplacements.
10:10 – Et comme nous sommes une radio des territoires,
10:12 on défend cette idée du circuit court, de la production locale.
10:18 On a mis beaucoup en avant ce qui était un gros mot il y a quelques années,
10:22 c'est un certain souverainisme.
10:24 Le souverainisme c'est d'être capable, pas de vivre en autarcie bien sûr,
10:32 mais d'essayer de favoriser les éléments de production proches
10:37 afin d'une part d'assurer toujours une économie qui fonctionne,
10:43 et puis d'éviter les transferts qui vont être trop conséquents,
10:46 qui vont peser beaucoup bien sûr.
10:48 – Dans votre livre, qui est ici, vous parlez de situations environnementales préoccupantes.
10:56 Est-ce que depuis la rédaction de ce livre,
10:59 vous avez vous-même observé déjà des changements dans ce qui a été dit,
11:02 et est-ce qu'il y a des changements qui pour vous sont positifs, négatifs ?
11:06 – Il n'y a pas eu beaucoup de prise en compte des éléments
11:10 qui étaient des signaux d'alerte il y a une trentaine d'années.
11:15 – Parce qu'il a été écrit en 2000.
11:17 – Il a été écrit fin des années 90 et il a été publié en 2000.
11:21 Par exemple, à l'époque, même si on a pris en compte ce qui s'est passé,
11:27 mais connaissant la Bretagne, j'avais imaginé qu'un port breton
11:32 serait complètement embourbé dans des algues,
11:35 avec des algues qui vont proliférer à cause justement de cette pollution.
11:39 Ce qui s'est produit, quelques années, c'était en 99,
11:43 ça s'est produit dans le milieu des années 2000, 2005, 2006,
11:48 où il y a eu quelques ports bretons qui ont été effectivement embourbés dans ces algues,
11:54 et du coup on est intervenu sur beaucoup de choses.
11:57 – Sur beaucoup de choses.
11:58 – Oui, bien sûr, et puis il y a une préoccupation.
12:00 À Lille, on m'avait dit…
12:02 – C'est des préconisations avant-gardistes.
12:04 – On m'avait dit "tu mets des panneaux solaires sur les toits de la grand-place à Lille,
12:07 mais à Lille il n'y a pas suffisamment de soleil,
12:09 il va y avoir une évolution, le climat".
12:12 On faisait de la prospective, les meilleurs spécialistes,
12:14 je les avais interrogés, je connaissais un peu le sujet.
12:17 – Oui, il y a eu effectivement une évolution.
12:18 – Et aujourd'hui, nous y sommes quasiment.
12:21 – Mais pour reprendre le titre de votre livre, justement,
12:24 comment voyez-vous l'avenir de nos enfants demain ?
12:27 – Moi je suis un éternel optimiste,
12:29 sauf qu'il y a quand même des motifs d'inquiétude qui sont assez forts.
12:33 Que ce soit d'un point de vue, bien sûr, écolo,
12:39 pour notre environnement, mais aussi social.
12:42 Là où j'ai quelques craintes, bien souvent,
12:44 c'est que d'un côté vous avez des mouvements dogmatiques et radicaux,
12:48 ils ont raison de parfois de pousser un petit peu les choses
12:51 pour qu'il y ait une prise de conscience.
12:53 – C'est un sort d'alerte.
12:54 – Il y a une prise de conscience, sauf que parfois on va un petit peu loin.
12:56 Et puis de l'autre, on a des raisonnements assez technocratiques
13:01 pour faire appliquer des lois, où j'ai l'impression
13:04 qu'on manque de perception de ce qui se fait sur le terrain.
13:08 Quand je vois qu'on continue de densifier les villes aujourd'hui,
13:12 et qu'on veut stopper les constructions dans les campagnes
13:18 ou aux abords des villes, je comprends l'idée de base,
13:21 c'est de se dire, oui, il faut qu'il y ait moins de déplacements
13:24 avec la voiture pour qu'on soit plus près des centres de travail,
13:27 pour moins polluer, sauf que si on construit trop dans les villes,
13:30 il y a de la promiscuité, ça veut dire qu'on va supprimer les zones vertes,
13:35 or on voit qu'avec le réchauffement aujourd'hui, on a besoin d'arbres,
13:39 on n'a pas besoin de bâtiments, on n'a pas besoin de dalles,
13:42 mais c'est une aberration totale quand on voit ça aujourd'hui.
13:45 – Si vous deviez réécrire ce livre aujourd'hui,
13:48 quels seraient les scénarios anticipés, prévus, catastrophes,
13:52 qu'est-ce que vous écririez aujourd'hui ?
13:55 – Écoutez, c'est une bonne question parce qu'à plusieurs reprises,
13:59 j'ai réfléchi pour le faire évoluer.
14:02 Je pense que j'utiliserais les signaux d'alerte d'aujourd'hui
14:07 sur des scénarios catastrophiques et puis d'autres, un peu de rêve,
14:11 en disant voilà, on y arrive parce qu'on a la science qui est à disposition
14:15 et si on l'utilise bien, elle peut nous permettre de bien évoluer.
14:19 Mais déjà, ce livre était quand même un peu chaud.
14:25 – Il était avant-gardiste.
14:27 – Surtout un peu chaud sur les scénarios quand vous voyez celui-ci
14:32 avec Paris sous les eaux, parce qu'il y a eu la fonte des glaciers,
14:38 la montée des eaux et qu'il y a de l'eau jusqu'au 4ème étage de chaque immeuble.
14:44 – Déjà, ça interpelle.
14:46 – Ça interpelle.
14:48 – Sud Radio est une radio qui est plutôt écoutée en zone rurale.
14:53 – Dans les territoires, disons.
14:55 – Associée au territoire et à la ruralité.
14:57 Pourquoi avoir fait ce choix ?
14:59 – Alors, ce n'est pas un choix de s'adresser uniquement aux zones rurales,
15:04 c'est de s'adresser au territoire et d'être surtout une radio
15:08 qui ne soit pas une radio parisienne, qui se veut parisienne
15:12 et où la parole descend de là-haut pour irriguer l'ensemble du territoire.
15:17 Tel que nous prenons la parole sur Sud Radio,
15:21 je veux qu'il y ait un sentiment de préoccupation de la vie des gens,
15:26 un petit peu partout où ils vivent, bien sûr,
15:28 et qu'ils aient l'impression, les auditeurs aient l'impression
15:31 qu'on est à côté d'eux et qu'on vit la même chose.
15:34 – Mais est-ce qu'on leur parle de la même chose ?
15:36 – Et on leur parle beaucoup plus.
15:37 – Est-ce que quand on parle d'écologie à des auditeurs de Sud Radio,
15:40 est-ce qu'on parle pour vous d'écologie de la même façon ?
15:43 – Bien sûr, et notamment toutes les populations en milieu rural
15:47 qui travaillent autour de l'agriculture, ils en ont cette conscience
15:51 et eux-mêmes sont pris dans une forme d'étreinte,
15:55 ils sont un peu coincés eux-mêmes entre faire évoluer leur manière d'exploiter,
16:01 de transformer, de fonctionner et puis cette préoccupation écolo
16:06 parce que quand on est en campagne, on l'a nécessairement,
16:08 on voit la nature qui évolue, on est les premiers même si évidemment…
16:12 – On l'a de façon différente, entre un urbain et une personne en zone rurale,
16:17 ce n'est pas du tout les mêmes problématiques et les mêmes contraintes aussi.
16:19 – Oui, parce que bien souvent l'urbain il vit en fait dans des immeubles
16:23 où lui ne se rend même pas compte, il dit évidemment qu'il doit avoir
16:26 une préoccupation, que nous devons avoir une préoccupation
16:29 de la planète, de notre avenir, mais lui-même vit avec des modes
16:33 de consommation très très fort d'une façon générale
16:37 alors qu'à la campagne beaucoup moins, même si pour l'exploitation des terres
16:41 bien évidemment l'agriculture intensive est là, mais moi je le dis
16:45 pour avoir travaillé à un moment donné à la campagne, je sais ce que c'est,
16:49 il y a 40 ans, 50 ans en arrière, la préoccupation c'était d'être capable
16:55 de nourrir la population et même de nourrir la planète.
16:58 – Est-ce que c'est votre ambition justement de faire parler,
17:02 de faire dialoguer les villes et les campagnes entre eux ?
17:05 – Oui, totalement, c'est que les gens se comprennent, se parlent
17:09 et échangent et ne soient pas nécessairement… qu'il y ait du débat, il le faut,
17:13 nous sommes dans une société où la liberté d'expression,
17:16 et nous y tenons beaucoup à Sud Radio, quitte à donner la parole
17:20 à des gens avec qui on n'est pas d'accord, mais si on ne fait que parler
17:24 des gens avec qui on est d'accord… – Est-ce que vous comprenez justement
17:27 que ces problématiques sont totalement éloignées entre des gens
17:31 qui sont en zone rurale et très éloignés des problématiques de… ?
17:35 – Oui, mais après il ne faut pas caricaturer, vous avez des gens en zone rurale
17:39 qui peuvent avoir des discours eux aussi très écologues, dogmatiques,
17:43 et puis d'autres qui sont anti-écolo, et en ville c'est la même chose.
17:47 Après c'est vrai qu'on ne vit pas de la même manière,
17:50 même si on reçoit la télé, la radio, on a internet,
17:54 et aujourd'hui on a tendance à être uniformisés bien sûr,
17:57 mais on a des modes de réflexion différents.
18:00 Et notamment par rapport à l'évolution de l'environnement,
18:04 quand on est en ville on ne voit pas cette évolution.
18:07 – Mais justement, qui dit campagne et territoire,
18:10 on est donc de facto plus sensibilisés à l'écologie non ?
18:13 – Bien sûr, on vit totalement avec, bien sûr,
18:16 donc on voit les changements, les bouleversements,
18:19 la disparition de certaines espèces, des oiseaux, etc.
18:23 Donc moi je ne veux pas opposer par exemple les chasseurs et les non-chasseurs.
18:27 Moi je ne suis pas un anti-chasse, je ne suis pas un pro-chasse non plus,
18:31 mais je comprends les… – Les positions des indigènes.
18:35 – Non mais évidemment il y a d'un côté ceux qui dénoncent des viandards,
18:38 parce qu'il y a des chasseurs qui étaient, entre guillemets, ces fameux viandards,
18:43 et puis il y a les autres qui sont là parce qu'ils le pratiquent
18:47 comme un sort de loisir et qu'ils vont réguler aussi
18:50 les espèces animales qui sont en liberté.
18:54 – Mais est-ce que vous pensez justement qu'on met suffisamment en avant
18:58 les initiatives écologiques issues du monde rural ?
19:01 – Peut-être pas, non, peut-être pas, non. Ce n'est pas suffisamment porté.
19:05 – On a l'impression que tout est centralisé aujourd'hui sur Paris,
19:08 et on a l'impression que cette écologie rurale quelque part
19:11 n'est pas suffisamment mise en avant.
19:13 – Non, non, non, au contraire, on a tendance à pointer du doigt
19:17 bien souvent les gens qui vivent avec la nature, avec la campagne,
19:21 qui sont bien souvent dans l'agriculture, parce qu'il y a eu aussi des abus,
19:25 il faut le dire, bien sûr, il y avait cette volonté de rentabilité,
19:29 et toujours aujourd'hui, parce qu'il faut toujours se poser ces questions.
19:34 Si on n'a pas une agriculture qui est indépendante,
19:38 qui nous permet de vivre, on va produire ailleurs sans contrôler.
19:43 – Quand on parle justement de polémiques, Sud Radio,
19:47 c'est notamment la radio du "Parlons vrai",
19:49 comment on trie l'information quand on donne la parole à des auditeurs ?
19:53 Comment on fait la part des choses ?
19:55 Comment on essaie d'avoir un traitement juste sur un sujet comme l'écologie ?
19:58 – Alors c'est extrêmement difficile, mais on voit que ça s'autorégule,
20:04 c'est-à-dire qu'il y a des auditeurs qui sont pros écologie,
20:10 qui maîtrisent parfaitement ces sujets,
20:14 et puis d'autres qui ont peut-être une saturation aussi
20:19 d'un certain bashing des campagnes et de l'agriculture,
20:23 comme les gens de l'automobile par exemple,
20:25 où il y a eu la voiture bashing ces dernières années.
20:28 Or, on ne peut pas totalement se passer de la voiture aujourd'hui,
20:31 ce serait ridicule.
20:32 – Et justement, vous, à titre personnel,
20:34 comment vous placez le curseur ?
20:36 Plutôt à droite ou plutôt à gauche d'André Bercoff ?
20:39 – Sur un plan personnel ?
20:41 – Sur une analyse écologique,
20:43 comment vous mesurez le curseur en tant que dirigeant de Sud Radio ?
20:48 – Écoutez, moi je donne la parole à tout le monde pour que les gens s'expriment,
20:53 et qu'on entende d'autres voix que celles que l'on veut bien entendre
20:56 d'une façon générale dans des médias qu'on dit "mainstream",
21:00 où il n'y a qu'une seule façon de voir les choses.
21:03 On essaie d'avoir des espaces de liberté d'expression, et ça en fait partie.
21:08 – Et en parlant de liberté d'expression, d'après vous,
21:10 quels sont les principaux défis auxquels vous faites face sur les sujets d'écologie ?
21:15 Est-ce que c'est la radicalité ?
21:17 – Ce qui est très difficile, c'est que quand on aborde ces sujets,
21:20 et bien souvent avec quelques personnalités,
21:24 très vite on va dans du dogmatisme.
21:27 – Parfois du sectarisme.
21:28 – Et du sectarisme, c'est ce qui est un peu difficile à comprendre.
21:33 Et résultat, il y a les clivages qui se créent,
21:36 et puis les gens qui se braquent beaucoup plus.
21:38 Alors que je pense qu'on a tous intérêt à aller progressivement dans le même sens.
21:43 – C'est comment un journaliste arrive à un jambe baissée ?
21:46 – En essayant d'expliquer les choses.
21:48 Moi c'est ce que j'essaie de faire à mon propre petit niveau,
21:51 c'est essayer de comprendre les mécanismes.
21:53 Quand on dit "oui, aujourd'hui, il faut éviter qu'il y ait des passoires thermiques",
21:57 ben oui, il faut éviter qu'il y ait des passoires thermiques.
22:00 Mais elles sont quand même très relatives, ces passoires thermiques,
22:03 par rapport à des personnes qui n'ont pas de toit ou qui ont du mal à se loger.
22:08 Et donc si on va très vite, on se dit "on ne peut pas exploiter ces logements",
22:14 non, il faut accompagner pour qu'il y ait une transformation progressive.
22:19 Mais ne pas se fermer la porte.
22:23 – Est-ce que vous avez le souvenir justement d'une interview sur ce sujet,
22:27 très clash, très tendu, où vous aviez des oppositions justement sur un sujet écologique ?
22:35 – Parfois c'est plus avec les écolos que je peux avoir, connaissant bien le sujet,
22:42 où quelque part j'essaie d'aller les challenger justement.
22:45 – Comme Sandrine Rousseau par exemple ?
22:47 – Oui, voilà, comme Sandrine Rousseau, oui bien sûr,
22:50 qui justifiait par exemple l'attaque à un moment donné d'un train où il y avait des céréales.
22:56 Oui, ça peut se comprendre selon son point de vue, mais il ne faut pas oublier
23:01 que c'est pour nourrir une population qu'on utilise ces céréales.
23:08 Oui, certes, ça passe par des industriels, mais c'est le fonctionnement un peu du monde.
23:12 – On vous retrouve tous les jours de la semaine, du lundi au vendredi,
23:15 dans la matinale de Sud Radio.
23:17 Merci beaucoup Patrick Roger d'être venu dans notre émission du Déclic.
23:21 – C'était un plaisir.
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