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Anne Fulda reçoit Marc Dugain pour son livre «Tsunami» dans #HDLivres

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Transcription
00:00 - Bienvenue à l'Heure des Livres, Marc Nugent. - Merci.
00:02 - Alors, tout le monde vous connaît, vous êtes essayiste,
00:04 vous êtes surtout un romancier bien connu avec des livres assez différents,
00:08 comme La Chambre des Officiers, La Malediction d'Edgar.
00:11 Et là, vous venez de publier un nouveau roman qui s'appelle tout simplement
00:15 Tsunami et c'est paru chez Albain Michel.
00:18 Alors, c'est à se demander si vous n'êtes pas un peu devant, en tout cas,
00:22 vous, le contexte du livre.
00:26 C'est nous sommes dans une France où est présenté un projet de loi
00:32 très impopulaire avec un pouvoir qui craint le risque d'émeute.
00:37 Alors, première question, quand avez vous écrit ce livre
00:42 et est ce que vous aviez déjà pressenti,
00:45 même si la réalité que vous décrivez après n'est pas ça,
00:49 ce climat très particulier qui règne en ce moment en France?
00:53 - Oui, je l'ai écrit il n'y a pas loin d'un an.
00:59 Je ne pensais pas être prémonitoire.
01:03 Je ne pensais pas qu'on en arriverait là, peut être aussi vite.
01:08 Mais c'est vrai que quand j'étais gosse, on faisait des exercices de composition française.
01:15 Là, c'est un exercice de décomposition française, c'est à dire que c'est vraiment
01:21 un état des lieux à un moment donné d'un fonctionnement démocratique.
01:26 Et ce que j'ai voulu faire, c'était de le faire au plus près du personnage,
01:30 c'est à dire... - Qui est le président de la République.
01:32 - Qui est le président de la République, qui est le personnage, qui est le narrateur.
01:36 Et donc, je me suis mis dans sa peau.
01:38 Ce n'est pas facile tous les jours.
01:40 Et je m'y suis mis sans l'idée de défoncer la fonction, si je peux me permettre.
01:46 C'est vraiment d'une façon empathique, au sens de, on se met à la place d'eux.
01:53 On a oublié que c'était un peu, ça veut dire ça, l'empathie au départ.
01:56 Ce n'est pas seulement la commisération.
02:00 Est-ce qu'on est capable de comprendre ce que vit l'autre ?
02:03 Et là, c'est très intéressant comme exercice.
02:05 Je l'avais déjà fait pour un tueur en série.
02:06 Je l'avais, évidemment, ça n'a pas de rapport.
02:10 Mais je l'avais fait aussi pour le patron du FBI dans la médicine des gars.
02:14 Mais là, je me suis dit, qu'est-ce que c'est d'être président de la République
02:16 pendant trois semaines, puisque le livre se passe pendant trois semaines ?
02:19 Aujourd'hui, c'est un présent parallèle.
02:21 Ce n'est pas demain, ce n'est pas hier.
02:23 C'est vraiment aujourd'hui.
02:26 Et qu'est-ce qui se passe dans sa tête pendant trois semaines de crise intense
02:30 suite à une proposition de loi qui n'est pas ridicule au départ,
02:35 mais qui prend des proportions...
02:37 - Et qui ne passe pas.
02:38 - Qui ne passe pas, non, qui ne passe pas, parce que,
02:41 parce qu'elle est dans l'air du temps.
02:43 C'est-à-dire, c'est une fusion à la fois de ce qui se passe au niveau du climat
02:50 et de ce qui se passe au niveau du numérique.
02:52 Et ça, c'est assez...
02:54 Et comme il vient du numérique, c'est un personnage un peu hors sol
02:57 qui a fait fortune dans le numérique, il pense que c'est tout à fait...
03:01 Et donc, il crée cette espèce d'instrument
03:09 qui permet d'analyser à tout moment l'empreinte carbone de chacun.
03:17 Et ensuite, de récompenser ou de sévir.
03:19 Non, évidemment, ça ne passe pas, ça.
03:21 C'est une sorte de passe sanitaire, mais écologique.
03:25 - Oui, c'est-à-dire que j'avais l'impression que vous grossissez des traits
03:29 qui pourraient exister chez le président actuel ou certains de ses prédécesseurs.
03:34 Alors, il y a notamment...
03:36 Vous dites que ce président, dans la peau duquel vous entrez,
03:41 est dans la main des géants du numérique, liés à la dictature douce du numérique,
03:46 plutôt que celle infiniment plus violente de l'autoritarisme identitaire
03:49 soutenu en sous-main par les Russes.
03:51 Donc, il y a un contexte qui pourrait être tout à fait celui
03:56 d'une certaine façon, de façon outrée, celui d'aujourd'hui.
03:59 Ce qui est amusant, c'est que vous vous semblez assez fascinés
04:02 par, finalement, le fonctionnement de l'intérieur, des arcanes du pouvoir.
04:05 C'était un peu le cas dans la malédiction d'Edgar aussi,
04:08 qui n'était pas que ça, mais c'est quelque chose qui vous a toujours intéressé ?
04:12 - Le pouvoir m'a toujours intéressé, parce que ce qui est propre,
04:16 je pense, à l'humanité, c'est que tout est rapport de pouvoir.
04:21 Il y a des rapports de pouvoir dans les entreprises,
04:22 il y a des rapports de pouvoir en politique,
04:25 il y a des rapports de pouvoir dans le couple,
04:26 il y a des rapports de pouvoir même entre un père et ses enfants.
04:29 Et je connais la question.
04:31 Et donc, il y a toujours matière à pouvoir chez l'être humain,
04:35 il y a toujours ce positionnement.
04:37 Et là, on est quand même dans quelque chose qui est assez extraordinaire,
04:41 c'est-à-dire on a 70 millions de personnes qui élisent un homme.
04:45 C'est-à-dire, on passe de 70 millions à un, comme ça, sur une pyramide.
04:50 Et donc, évidemment, pour cet individu, c'est une responsabilité énorme,
04:54 mais c'est aussi, il faut une compréhension de la société, de chacun.
04:59 Et très souvent, on a des personnalités qui sont un peu hors sol
05:02 parce qu'elles ont tellement été dans l'idée d'arriver au pouvoir,
05:05 qu'on l'a vu quand même assez souvent,
05:08 que la conquête, finalement, c'est cette chose extraordinaire,
05:12 cette aspiration à être l'élu.
05:14 Et puis ensuite, il y a la réalité et la réalité des gens dans les campagnes,
05:19 avec des présidents, en tout cas le dernier,
05:21 qui ne connaît pas bien la réalité du terrain
05:23 parce qu'il n'a pas eu de mandat électif en province.
05:26 Et donc, il a une vision très hyper moderniste, finalement,
05:31 d'une société qui a ses archaïsmes aussi.
05:34 Et tout ça s'affronte, et je trouve ça très intéressant, ce plan romanesque.
05:38 C'est un peu en moins bien ce qu'essayait de faire Balzac à son époque.
05:42 – Je terminerai sur ces…
05:46 En tout cas, c'est un roman qui se lit vraiment très facilement.
05:52 On est pris dans l'intrigue, ce président a peut-être des traits communs avec l'actuel,
05:55 mais il y a quand même aussi des choses différentes.
05:57 – Oui, sa vie privée en particulier.
05:59 – Notamment sa vie privée, il est aussi menacé par une sombre affaire
06:03 de consommation de drogue.
06:06 Juste dernière question, vous l'avez envoyé à Emmanuel Macron ?
06:08 – Non, à aucun des anciens ni des actuels présidents.
06:14 – Bon, ils le liront sûrement.
06:15 En tout cas, ça s'appelle "Tsunami",
06:17 vous vous y mettez dans la peau d'un président face à une crise assez aiguë,
06:21 et c'est paru chez Albain Michel.
06:23 Merci beaucoup, Marc Dugas.
06:24 – Merci beaucoup.
06:26 [Musique]
06:30 [SILENCE]