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Aujourd'hui à 8h20, nous recevons Jean Jouzel, climatologue, directeur émérite de recherches au CEA, médaille d’Or du CNRS en 2002, co-auteur de “Les orphelins de la planète” (Grasset, 14/05/25), Président de “Météo et Climat” qui ouvrira son colloque le 15 mai. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20/l-invite-de-8h20-du-week-end-du-dimanche-11-mai-2025-4726220

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Transcription
00:00Et dans le grand entretien ce matin, j'ai l'honneur de recevoir l'un de nos grands climatologues,
00:05membres du GIEC, médaille d'or du CNRS.
00:08Il copublie « Les orphelins de la planète », le livre de scientifiques sur l'urgence,
00:14l'urgence d'agir pour préserver la planète, les conséquences du dérèglement déjà à l'œuvre et à venir
00:21si nous n'agissons pas de manière urgente.
00:24Un livre nécessaire, documenté, sans appel et qui paraît chez Grasset.
00:29Chers auditeurs, vos questions, interventions au 01 45 24 7000 ou sur l'application Radio France.
00:37Bonjour Jean Jouzel.
00:38Bonjour Ali Badou.
00:39Et bienvenue. Votre nom est synonyme de la lutte contre le réchauffement climatique.
00:43Il est également synonyme d'une approche scientifique de la question écologique et climatique.
00:49Pronostics vital engagés, c'est par ces mots que s'ouvre votre livre Jean Jouzel.
00:54Nous sommes les enfants d'une planète, une planète, vous faites la comparaison avec le vocabulaire médical,
01:02une planète dont le pronostic vital est engagé et dont nous risquons de devenir les orphelins tant elle est en danger extrême.
01:10Ce sont vos mots.
01:12Qui sont donc ces orphelins ?
01:14Ces orphelins, ce sont les jeunes.
01:15Mais permettez-moi d'avoir, donc ce livre a été co-écrit avec Alain Grandjean et Claude Henry.
01:20Permettez-moi vraiment de rendre hommage à Claude Henry qui nous a quittés il y a quelques semaines.
01:24Physicien, économiste, qui était professeur à l'école polytechnique et à Columbia à New York.
01:29Ce livre lui doit vraiment beaucoup.
01:31Et c'est un grand monsieur.
01:32C'est la première phrase que vous avez citée.
01:34Donc c'est vrai, oui, disons, je crois que nous nous tournons quand même vers les jeunes.
01:41Je crois que le titre est très explicite parce que nous sommes au bord du gouffre.
01:44C'est très clair.
01:45Cette urgence climatique, elle est là, pour ce qui me concerne.
01:48Et aussi, c'est vrai pour Alain Grandjean et Claude Henry, nous le répétons depuis quelques décennies.
01:53Mais vraiment, je vous remercie de nous avoir invités à un moment où je crois que nous sommes au creux de la vague en termes de tous ceux qui, comme nous, comme vous, j'imagine, portaient de l'intérêt à notre environnement, à tout ce qui nous entoure.
02:06On voit bien les difficultés.
02:07Et par rapport à la science également, par rapport à la remise en cause de la vérité scientifique, vous m'avez présenté comme scientifique, c'est effectivement, j'ai consacré toute ma carrière à la recherche.
02:17Et vraiment, ça me marque.
02:19Et on va en parler, évidemment, mais c'était aussi le besoin et l'envie de reprendre ce sujet qui est passé au deuxième plan de l'actualité.
02:30C'est assez sidérant de voir que le problème ou l'un des grands enjeux du siècle n'est plus aujourd'hui une préoccupation majeure.
02:40Mais avant d'en parler, vous n'en avez pas ras-le-bol, Jean Jouzel.
02:44Vous êtes un grand chercheur.
02:45Vous êtes également un lanceur d'alerte.
02:47Votre nom est connu partout dans le monde.
02:50Vous faites partie d'une communauté de scientifiques dont les travaux font autorité.
02:55Et à chaque fois, vous devez reprendre votre bâton de pèlerin.
03:00Qu'est-ce qu'il n'imprime pas ?
03:02Qu'est-ce qu'il n'imprime pas ?
03:03Je crois que c'est parce que, peut-être, la difficulté de l'action, parce que chacun d'entre nous, nous sommes concernés, finalement.
03:10Ça interroge complètement le mode de fonctionnement de nos sociétés.
03:14Ça va au-delà du réchauffement climatique.
03:15C'est tout le problème de la biodiversité, de notre environnement, de l'organisation de nos sociétés qui est interrogée dans cette transition qui est absolument nécessaire.
03:23C'est peut-être la raison pour laquelle ça n'imprime pas.
03:25C'est difficile de la mettre en œuvre, mais il faut absolument aller de l'avant.
03:29Par moment, je continue à témoigner parce que, justement, et c'est, je crois, le message clé de notre ouvrage, la situation est vraiment très grave.
03:38Nous sommes au bord du gouffre, mais il y a toujours des moyens d'agir.
03:41Et c'est cela, c'est un encouragement à l'action également qu'il faut mettre.
03:44Et c'est pour cela que, je crois, je continue à témoigner.
03:47Nous continuons à essayer de dire les choses de façon, en essayant d'être trop catastrophistes.
03:53Il faut quand même se rendre compte que ce que nous vivons aujourd'hui...
03:56Oui, parce que vous n'êtes pas un prophète de malheur.
03:58Et contrairement à d'autres, vous essayez de ne pas l'être.
04:01Mais si je vous présente comme scientifique, c'est que votre parole est rigoureuse et fondée en science.
04:08Elle n'est pas celle de quelqu'un qui dirait qu'il y a des signes d'une accélération, du réchauffement climatique.
04:15Vous parlez de faits.
04:16Les faits sont là, ils sont établis.
04:18Et ils sont établis par les scientifiques partout sur la planète.
04:22On n'en est plus à l'état d'imaginer, de deviner ce que pourrait devenir la planète demain.
04:30On sait.
04:31On sait, oui.
04:32On sait, Jean-Gerl.
04:32On sait que le réchauffement climatique que nous vivons aujourd'hui, qui est très bien marqué,
04:37y compris ce dernier mois d'avril qui a encore été de nouveau très chaud,
04:40ce réchauffement climatique est lié de façon certaine aux activités humaines.
04:44Nous avons des arguments.
04:45Ça ne veut pas dire que nous pouvons en discuter.
04:48Ce n'est pas le problème.
04:48Mais les arguments sont là, les faits sont là.
04:51Et ce réchauffement climatique va se poursuivre avec, si nous ne le maîtrisons pas, je reprends les termes du GIEC,
04:57le réchauffement climatique est une menace pour notre humanité et la santé de notre planète.
05:02C'est très clair.
05:03Nous mettons, par notre action d'aujourd'hui, des prochaines années, nous mettons vraiment en danger les jeunes d'aujourd'hui,
05:12disons qu'ils auront du mal à s'adapter, sinon une impossibilité dans certaines régions,
05:16au réchauffement climatique qu'ils connaîtront dans la deuxième partie de ce siècle.
05:19C'est vraiment une alerte très forte que nous souhaitons donner.
05:22Ceux à qui nous laisserons la planète en héritage, les enfants, des petits-enfants,
05:26et puis ceux qui ne sont même pas encore nés.
05:29Oui.
05:29C'est ça qui est paradoxal, Jean Jouzel.
05:32Comment est-ce que vous pouvez expliquer la responsabilité vis-à-vis de personnes qui n'existent pas encore sur cette terre ?
05:39Oui, d'autres existent.
05:41C'est une question quasiment philosophique.
05:42J'ai moi-même sept petits-enfants et c'est vrai qu'ils seront là.
05:45Et voilà tous ces jeunes qui nous entourent et certains qui nous écoutent.
05:50Voilà, donc oui, c'est important.
05:53Bien sûr, c'est aussi vrai, nous mettons en danger les jeunes qui seront là au siècle prochain,
05:59et qui ne sont pas encore sur terre.
06:00Nous les mettons également encore plus en danger que les jeunes d'aujourd'hui.
06:03Avant de parler des raisons d'espérer, s'il y en a, on voit revenir aujourd'hui des débats qu'on croyait derrière nous.
06:09On va vous rappeler les fondamentaux, tout simplement.
06:13Vous refaites ce travail de pédagogie que vous avez fait de nombreuses fois.
06:19Vous faites l'histoire de ces moments décisifs où des scientifiques,
06:21et non pas des prophètes, je le répète, ont lancé l'alerte.
06:26Mais où est la mobilisation nécessaire pour éviter le pire aujourd'hui, Jean Jouzel ?
06:31La mobilisation, elle est encore dans certaines associations.
06:34Elle est, contrairement à ce que certains pensent,
06:38il y a encore un intérêt très fort pour l'environnement.
06:43J'ai participé récemment à une émission ici sur France Inter,
06:48et on parlait du balcac écologique,
06:51et on voit bien que ce balcac écologique, c'est une construction politique,
06:56c'est-à-dire le fait que l'écologie...
06:58Traduction en français ?
06:59Oui, disons le retournement par rapport à l'écologie,
07:02c'est une construction, disons, politique.
07:05Le grand public continue à s'intéresser à son environnement,
07:09parce que c'est là où nous vivons, c'est très clair,
07:11dans les villes qui sont mises à mal par le réchauffement climatique,
07:15et je crois que cet intérêt demeure, et c'est là la force.
07:18Oui, c'est chacun d'entre nous, c'est entraîner la population,
07:21entraîner ses jeunes dans des actions qui restent possibles.
07:24Oui, mais ils sont où les jeunes ?
07:25Avant le Covid, on voyait des mobilisations qui réunissaient
07:28parfois des centaines de milliers de jeunes
07:30dans quelques très grandes villes d'Europe et d'Amérique du Nord.
07:34Où sont-ils passés ?
07:35Non, oui, c'est vrai, il reste toujours certains actifs,
07:38mais c'est comme chaque génération,
07:40c'est une partie de la génération.
07:42Et notre problème, c'est comment entraînons-nous
07:44vers cette transition absolument indispensable,
07:47l'ensemble d'une génération ?
07:49C'est vrai aussi d'ailleurs pour ma génération,
07:51mais comment entraînons-nous les populations,
07:53plutôt que de les forcer ?
07:55Alors que le message est clair,
07:56si nous ne faisons rien,
07:57c'est vraiment un monde désastreux que nous préparons.
08:01Vous avez le sentiment, malgré tout,
08:02qu'on est dans le film Don't Look Up,
08:04ce film qui a eu énormément de succès
08:06et qui est dans le déni parfait
08:09d'une météorite qui va frapper la Terre
08:12et des scientifiques qui disent
08:14« ça va arriver »
08:16et la formule Don't Look Up ne regarde pas,
08:19ferme les yeux.
08:20Oui, en toile de fond, Don't Look Up,
08:22c'est aussi le réchauffement climatique
08:23qui est interrogé.
08:24C'est une métaphore.
08:25C'est très clair,
08:26c'est une métaphore du réchauffement climatique
08:27et oui, bien sûr,
08:29c'est là où nous en sommes
08:30et c'est tout à fait regrettable
08:31alors que les faits s'accumulent,
08:33alors que les engagements sont pris.
08:35L'accord de Paris est là,
08:36il est ambitieux,
08:37mais nous ne tenons pas nos engagements collectivement.
08:40Il y a eu Kyoto,
08:41il y a eu Copenhague,
08:43il y a eu Paris en 2015,
08:46ce sont des objectifs importants,
08:48c'est des COP emblématiques
08:51sur lesquels vous revenez.
08:52Il y a un fossé entre ces objectifs
08:54et la réalité de leur mise en œuvre.
08:57Pourquoi est-ce qu'on n'agit pas suffisamment,
08:59Jean Jouzel ?
09:00Je vous pose la question de manière tout à fait naïve
09:02avant d'aller au standard,
09:03retrouver les élus de la terre.
09:03Oui, parce que nous sommes accrochés
09:05peut-être vous-même, moi-même d'ailleurs,
09:07à la consommation de biens
09:08et disons sans peut-être,
09:10bon j'espère d'avoir une certaine sobriété dans ma vie,
09:12mais voilà,
09:13donc nous sommes collectivement,
09:15disons poussés également par la publicité
09:17à consommer
09:18et plus nous consommons de biens,
09:20et bien plus nous émettons de gaz à effet de serre,
09:22c'est très clair.
09:23Donc c'est ce monde de consommation,
09:26de consommateurs qui est interrogé.
09:28Il faut réfléchir à un monde plus,
09:31disons plus apaisé d'ailleurs,
09:33plus solidaire,
09:34aussi où l'équité est au rendez-vous,
09:36disons,
09:37où les inégalités,
09:38le premier risque du réchauffement climatique,
09:40c'est l'accroissement des inégalités.
09:41C'est bien ça le problème aussi.
09:42Ça questionne notre civilisation,
09:48disons,
09:48le développement harmonieux de notre civilisation
09:51ne peut pas se faire dans un contexte de réchauffement climatique.
09:53C'est très clair pour moi.
09:54Et vous revenez d'ailleurs régulièrement sur ces questions
09:57qui sont d'ordre économique
09:58et qui relèvent aussi de la justice sociale,
10:02non pas à l'échelle des États-nations seulement,
10:04mais à l'échelle de la planète.
10:06Ce qui est intéressant,
10:07c'est que vous n'avez jamais hésité à débattre
10:10et même à débattre avec des personnes puissantes
10:13qui étaient dans un déni de réalité assez fascinant.
10:17L'été 2003,
10:18vous participez à une table ronde
10:20qui est organisée par le MEDEF
10:22et donc avec les grands acteurs
10:24des plus grandes entreprises françaises
10:26qui pourraient agir.
10:28Et il y a cette scène avec le PDG de Total Energy,
10:31Patrick Pouyanné.
10:33Et vous rappeliez l'urgence absolue
10:35à agir.
10:36Et lui, il vous dit
10:37« J'entends l'appel de Jean,
10:40mais le problème, c'est qu'il y a la vie réelle.
10:43Je suis un producteur d'énergie fossile
10:45parce que c'est de l'énergie
10:47que vous utilisez tous les jours. »
10:49Et ce livre, en quelque sorte,
10:51c'est votre réponse.
10:52Vous démontrez chiffre à l'appui.
10:54En fait, la vie réelle,
10:56c'est celle d'un dérèglement
10:57qui est déjà à l'œuvre.
10:59Et aussi cette idée que la demande,
11:00on ne peut pas maîtriser la demande.
11:02Si, au contraire,
11:02il faut maîtriser la demande.
11:04Il y a beaucoup de moyens
11:04de maîtriser la demande.
11:05Y compris le développement
11:06des énergies renouvelables.
11:08Et c'est vrai que,
11:09pour poursuivre son Patrick Pouyanné,
11:10je suis vraiment extrêmement choqué
11:12par son attitude actuelle
11:13d'aller dans la roue de Donald Trump
11:15dans ce soi-disant
11:16« Golfe d'Amérique forée ».
11:18Disons que ça m'interroge vraiment,
11:19quand même.
11:20Justement, j'allais y venir.
11:21C'est-à-dire que ce...
11:21C'est vraiment une servilité incroyable,
11:23je le dis franchement.
11:23Ce golfe du Mexique que Donald Trump
11:26a voulu rebaptiser
11:27« Golfe des Amériques »,
11:29c'est un endroit où il se trouve
11:31beaucoup d'hydrocarbures,
11:33où il y a des plateformes offshore.
11:36Et Total y est présent.
11:37Il est présent et disons,
11:39envisage de continuer à forer
11:41dans des régions où c'est très dangereux.
11:43On a déjà vu cela il y a quelques années.
11:45Donc oui, c'est vraiment...
11:46Ça m'interroge beaucoup,
11:48une attitude de Total
11:50dans cette...
11:51Vraiment, c'est incroyable.
11:53Alors que tout devrait être mis en oeuvre
11:54pour justement diminuer
11:56nos émissions de gaz à effet de serre.
11:57Disons, essayer de maîtriser
11:58la production des combustibles fossiles.
12:01Ce n'est pas le cas.
12:02Mais pourquoi est-ce qu'un Français,
12:02un Français comme Patrick Pouyanné,
12:05suit le slogan de Donald Trump
12:07qu'on a tous en tête ?
12:07« Drill, baby, drill ».
12:10Je m'interroge.
12:10Fort, bébé, fort !
12:12J'aurais aimé que ce ne soit pas le cas,
12:14je le dis.
12:14« Bonjour Françoise et bienvenue sur France Inter. »
12:18« Oui, bonjour Ali et bonjour à votre... »
12:23« À Jean-Joselle. »
12:25« Oui, voilà.
12:27Nous, les citoyens,
12:28nous sommes aussi en état de désespérance.
12:33Voilà.
12:34Nous, les citoyens,
12:35totalement conscients
12:36de ce réchauffement climatique
12:39au quotidien,
12:40nous mangeons local,
12:42nous utilisons
12:43les produits locaux
12:45de saison.
12:46Nous n'allons pas
12:47dans les fêtes fashion,
12:49fêtes décorations.
12:51Mais là,
12:52on ne voit rien venir.
12:54La loi,
12:55aucune initiative politique
12:58et tout est dans la com'.
12:59En définitive,
13:01à Bordeaux,
13:02on a vu Paul Watson
13:03serrer la main
13:04de Pierre Urnick
13:06et serrer la main
13:07de Nathalie Delattre,
13:09des candidats politiques
13:10bordelais.
13:11Paul Watson,
13:12il faut le rappeler,
13:12qui est le fondateur
13:13de Sea Shepherd
13:15qui a pour vocation
13:16cette ONG
13:16de sauver les cétacés.
13:19Tout à fait.
13:20Mais nous,
13:20qu'est-ce qu'on peut faire,
13:21nous,
13:22à notre niveau,
13:23autre que cette
13:24sobriété heureuse ?
13:27Et voilà.
13:27Merci.
13:28En tout cas, merci.
13:29à des pistes,
13:31s'il vous plaît.
13:31Parce que nous sommes
13:32désespérés.
13:34Eh bien,
13:34on va y venir,
13:35justement.
13:35Merci, Françoise,
13:36pour votre question.
13:37Merci de votre engagement.
13:39D'ailleurs,
13:39oui, on peut faire beaucoup.
13:40Et d'ailleurs,
13:41vous avez évoqué
13:41le terme citoyen
13:43et j'ai participé
13:44à la Convention citoyenne
13:45sur le climat.
13:46Et justement,
13:47si vous allez voir,
13:48les propositions faites
13:49par ces 150 citoyens
13:50sont remarquables
13:51dans tout ce qui concerne
13:53notre vie tous les jours.
13:54Se loger,
13:55se nourrir,
13:55se débrouiller.
13:56C'est un moment extraordinaire,
13:57absolument.
13:57De délibération,
13:58de prise de décision.
13:59J'ai eu la chance
13:59d'y participer.
14:00Enfin,
14:00j'étais membre
14:01du comité de gouvernance
14:02pour les citoyens.
14:03c'est le mot qu'on puisse dire.
14:04Vous dirigez les travaux.
14:05Mais malgré tout,
14:06qu'est-ce qui en est sorti ?
14:07Justement,
14:08les propositions sont très riches
14:09par rapport à ce que dit
14:11François.
14:11Mais pourquoi ne pas les appliquer,
14:13Jean-Joselle ?
14:13C'est le problème.
14:14On estime qu'il n'y a que 20%
14:16de ces recommandations
14:18qui ont été mises en œuvre.
14:19Et je suis convaincu
14:20que si l'ensemble des...
14:21Enfin, disons,
14:22si on les avait prises
14:23plus au sérieux,
14:23eh bien nous serions
14:24sur une meilleure trajectoire
14:25par rapport à ce que
14:26nous affichons
14:27dans notre pays.
14:28Donc oui,
14:28on sait ce qu'il faut faire.
14:29C'est ce que je veux dire.
14:30Bonjour Vera.
14:33Bonjour Vera.
14:34Vous nous appelez de Grenoble.
14:35Bienvenue sur France Inter
14:36ce matin
14:37avec Jean-Joselle.
14:39Oui, je suis Sarah de Grenoble.
14:40Voilà.
14:41Je me faisais une réflexion
14:42depuis longtemps
14:43en sachant que les mots,
14:44les expressions
14:45sont super importantes.
14:46Oui.
14:46Pour moi,
14:47l'homme,
14:48il est égoïste.
14:49L'homme avec un grand H,
14:50il est égoïste.
14:51On dit sauver la planète.
14:52La planète,
14:53on n'a pas à la sauver en fait.
14:54Elle est très très forte.
14:55Elle s'est prise
14:55par la tronche.
14:57Il y a des centaines
14:57de millions de météorites
14:58qui a tué tous les dinosaures.
15:00Pourquoi on n'utilise pas
15:00l'expression
15:01« Sauvons l'humanité » ?
15:03Et je pense que ça
15:03percuterait beaucoup,
15:05beaucoup plus
15:06que de dire
15:06sauver la planète.
15:07Eh bien justement,
15:08merci pour votre question.
15:09Jean-Joselle va vous répondre.
15:10Je suis d'accord avec vous.
15:11Vous êtes d'accord ?
15:16Les orphelins de la planète.
15:18Ce n'est pas du tout.
15:19Voilà, c'est bien.
15:20Je suis d'accord.
15:22C'est quand même
15:22sauver l'humanité
15:24à l'échelle de la vie
15:25de notre planète.
15:26Les 4,5 milliards d'années,
15:28c'est vrai,
15:28ce que vit notre humanité
15:30est peut-être
15:31un petit moment,
15:31une petite fenêtre.
15:33Mais c'est quand même
15:34nous qui sommes concernés.
15:35Nous, nos enfants,
15:36vos petits-enfants,
15:37les nôtres
15:38et toutes les générations futures
15:40à échéance
15:41de quelques milliers
15:42ou peut-être
15:43un peu plus
15:43de millions d'années.
15:44Mais voilà,
15:44c'est quand même
15:45ce moment-là
15:46que nous vivons aussi,
15:47effectivement.
15:48Mais quand on parle
15:49de l'humanité
15:50mais aussi de la nature
15:51qui nous entoure,
15:52on ne peut pas simplement,
15:53disons,
15:53la nature qui nous entoure
15:55elle doit nous aider.
15:55C'est une alliée
15:56dans cette lutte
15:57contre le réchauffement climatique
15:58et il faut aussi,
15:59disons,
15:59c'est l'ensemble du vivant,
16:01c'est l'ensemble du vivant,
16:02de la biodiversité, oui.
16:03Comme un monde habitable.
16:05Voilà, exactement.
16:06Mais habitable,
16:07notamment par les humains.
16:09Il y a de très nombreuses questions
16:11parce que,
16:12par exemple,
16:13sur l'application
16:14de France Inter,
16:15on vous interroge
16:16sur les seuils
16:17et sur les degrés,
16:20à quel niveau
16:21d'augmentation
16:21ou d'accélération
16:23du réchauffement climatique
16:24la planète
16:25sera encore viable.
16:27Un mot avant de répondre
16:28à cette question
16:29et de rejoindre Jocelyn
16:31sur le standard d'Inter.
16:34Vous dites que,
16:34bon,
16:35il y a évidemment
16:36des pays qui sont
16:37plus exposés que d'autres,
16:38plus vulnérables que d'autres,
16:40mais la crise climatique,
16:41elle touche tout le monde.
16:42La France est vulnérable.
16:44En quelques années,
16:45les quantités absorbées
16:46par nos forêts
16:47ont été divisées par deux.
16:49Elles ne représentent plus
16:50que 7% de nos émissions,
16:52alors que notre pays
16:53affiche pour objectif
16:54d'augmenter ce puits de carbone
16:57de 50% en 2050.
17:00Cet objectif paraît inaccessible.
17:02Expliquez-nous ça
17:03de manière très simple.
17:04Dans la loi des gens
17:05pour atteindre neutralité carbone
17:06en France,
17:07nous espérions vraiment
17:08augmenter le puits de carbone,
17:09l'absorption du carbone
17:10par les forêts
17:11et éventuellement par les sols.
17:13Et en fait,
17:13c'est le contraire qui se passe
17:14parce que les forêts
17:15sont mises à mal
17:15par le réchauffement climatique.
17:17D'abord,
17:17il y a vraiment des maladies
17:19qui se propagent
17:20beaucoup plus rapidement qu'avant.
17:22Même le squelite,
17:23par exemple.
17:23Ensuite,
17:24il y a des feux de forêt
17:25et puis les sécheresses
17:26à répétition
17:26ont mis vraiment
17:27nos forêts à mal.
17:29Il y a eu des sécheresses
17:30pendant 4 ou 5 ans
17:30à répétition.
17:32Et tout cela fait que
17:33les forêts se portent très mal
17:34et absorbent beaucoup moins
17:35de casques carboniques
17:36que nous n'espérions.
17:37Deux fois moins
17:37qu'il y a une vingtaine d'années,
17:39par exemple.
17:40Et c'est le contraire
17:40que nous avons inscrit
17:42dans la loi.
17:42C'est ça le problème.
17:43C'est le problème majeur.
17:45Et vous parlez des forêts,
17:46vous parlez également
17:47des villes
17:48et des conséquences
17:49de la bétonisation
17:50sur la question climatique.
17:54Bonjour Jocelyn.
17:56Bonjour.
17:57Et merci d'être sur France Inter
17:59avec Jean Jouzel ce matin.
18:01Oui, mais...
18:03Vous avez une question ?
18:05Oui, j'ai une question.
18:06Je suis effrayé, effaré
18:08par les déclarations
18:09des hommes politiques
18:11qui nous disent
18:12qu'on devra s'adapter
18:13à une augmentation
18:14de plus 4 degrés.
18:16Mais ça, c'est invivable.
18:18C'est infernal.
18:19Une augmentation
18:20de plus 4 degrés.
18:21Merci Jocelyn.
18:22Parce que justement,
18:23c'est la question
18:23que je l'ai vous posée,
18:24Jean Jouzel.
18:25Plus 4 degrés,
18:26juste pour qu'on puisse mesurer
18:27à quoi ça ressemblerait.
18:29Parce que ça ne semble pas énorme.
18:31C'est un monde qui change.
18:33Oui, par rapport à aujourd'hui,
18:34c'est un peu plus de 2 degrés et demi.
18:36On a déjà pris
18:36presque 2 degrés en France.
18:38Mais ce sera un monde différent
18:40du monde d'aujourd'hui
18:41en termes d'événements extrêmes
18:42qui seront beaucoup plus intenses.
18:43Par exemple,
18:44les vagues de chaleur
18:45dans les villes
18:47seront beaucoup plus...
18:49On parle de températures
18:52qui pourraient atteindre
18:5250 degrés à Paris
18:53avec les problèmes
18:54d'îlots de chaleur.
18:55D'ailleurs, je profite
18:56de cette question
18:57pour dire que nous organisons
18:59avec le forum international
19:00de la météo
19:02et du climat
19:02une journée consacrée
19:04aux villes
19:04et changements climatiques
19:05parce que les villes
19:06sont au cœur des problèmes.
19:08Donc, oui,
19:09ce seront les villes
19:10où il sera peut-être
19:10plus difficile
19:11les événements extrêmes.
19:13L'élévation du niveau
19:14de la mer
19:14se poursuivra
19:15et en France,
19:16ne serait-ce que
19:1750 à 80 centimètres
19:18supplémentaires,
19:19c'est quelque chose
19:20auquel il sera difficile
19:22de faire face
19:23dans d'autres pays.
19:24Évidemment,
19:24encore plus.
19:25Oui, plus 4 degrés en France
19:26par rapport à la période
19:27industrielle,
19:28c'est un climat
19:29complètement différent,
19:30différent de celui
19:30que nous connaissons,
19:31des sécheresses
19:32à répétition.
19:34J'étais à Grenoble hier,
19:35donc diminution
19:36de l'enneigement
19:37dans les Alpes,
19:38voilà les glaciers
19:39qui reculent.
19:41Tout ce qu'on connaît
19:42va s'accélérer
19:43très rapidement.
19:44Il y a ce qui est visible
19:45et vous décrivez aussi
19:46ce qui est invisible,
19:47en l'occurrence,
19:47les courants marins.
19:49Il y a aussi
19:49des conséquences majeures
19:50dans le monde invisible.
19:53Oui, il y a ces seuils
19:54dont on parle effectivement
19:55des changements
19:56de circulation océanique
19:57qui restent du domaine
19:58du possible,
19:59mais aussi la fonte
20:00des sols gelés,
20:02la fonte du Groenland,
20:04une accélération
20:04de l'élévation
20:05du niveau de la mer
20:06qui au prochain siècle
20:07et dans les prochains siècles
20:08pourrait atteindre
20:09quelques mètres.
20:10Alors, ça paraît lointain
20:11mais c'est aujourd'hui
20:11qu'on en décide,
20:12c'est ça qui est important
20:13et personne n'arrêtera
20:14l'élévation du niveau
20:14de la mer aujourd'hui.
20:15Donc on n'en décide pas
20:16justement Jean-Joselle.
20:18Il y a de très nombreuses
20:19questions sur l'application
20:20d'Inter
20:20avec ceux qui vous interrogent
20:23sur les décideurs politiques
20:24puisque vous les connaissez,
20:25que vous les avez rencontrés,
20:26que vous les avez même convaincus
20:29sans forcément les inciter
20:30à agir.
20:31Vous décrivez les prédateurs,
20:34vous dites qu'ils sont bien connus,
20:35les sociétés d'exploitation
20:36de combustibles fossiles,
20:39la chimie,
20:40je ne vais pas faire la liste infinie.
20:43Vous revenez sur la détermination
20:44des lobbies
20:45et une question d'actualité
20:46puisque nous avons,
20:48que le monde catholique
20:49a un nouveau pape.
20:50pour vous raconter
20:51ce qui n'est pas une anecdote.
20:53Certains,
20:53dans les lobbies,
20:55sont allés jusqu'à tenter
20:56d'influencer la rédaction
20:57de l'encyclique
20:58du pape François,
21:00Laudato Si.
21:01C'était une encyclique
21:02très importante
21:03dans l'église catholique
21:05pour évoquer la question
21:06écologique.
21:08Et j'ai eu un des grands moments
21:10des dernières années
21:11que j'ai eus,
21:11c'est la rencontre
21:12avec le pape.
21:13J'ai été avec Pierre Laroutourou
21:14et nous avons passé
21:14une demi-heure
21:15avec le pape François
21:16justement autour
21:17de l'Odato Si
21:18et voilà,
21:19de projets autour du climat.
21:20Et effectivement,
21:22disons,
21:23Claude-Henri d'ailleurs
21:23qui était assez impliqué
21:24sur ces aspects,
21:26a fait une enquête
21:28et clairement,
21:29il y a eu du lobbying
21:30qui n'a pas été,
21:31disons,
21:32qui n'a été aucun succès
21:33d'ailleurs parce que
21:34l'Odato Si,
21:34c'est remarquable.
21:35Je vous engage à lire
21:36l'Odato Si,
21:36que vous soyez catholique
21:37ou non,
21:38lisez-le.
21:39C'est vraiment un grand moment,
21:40une grande lecture.
21:41Mais c'est fascinant
21:41de voir que le lobbying
21:42peut aller s'injuster
21:45jusque dans le cœur
21:48du cœur de la curie romaine.
21:52Pourquoi est-ce que
21:52la technique ne va pas
21:54nous sauver ?
21:55Il y a ceux qui sont optimistes
21:57et qui font confiance
21:58en la science
21:59et à la capacité
22:00des êtres humains
22:00de trouver des solutions
22:02finalement pour éviter
22:04la catastrophe,
22:05Jean Jouzel.
22:05Oui,
22:05c'est la voie qui me...
22:06Alors,
22:07la technique,
22:08je suis tout à fait favorable
22:10à l'innovation,
22:10à la recherche,
22:11mais c'est dans la mesure
22:13où elle s'inscrit
22:14dans cet objectif
22:15de neutralité carbone.
22:17Donc,
22:17il faut de la recherche,
22:19de l'innovation
22:19dans tous les domaines.
22:21Mais,
22:21disons,
22:22ce n'est pas la technologie
22:23qui nous sauvera
22:23et nous avons consacré
22:25un chapitre
22:26à la géoingénierie,
22:27en particulier
22:28les risques
22:28posées par la géoingénierie
22:31solaire,
22:31ceux qui pensent
22:32qu'en envoyant des particules
22:33dans l'atmosphère,
22:34nous pourrions maîtriser
22:35le réchauffement climatique,
22:36le limiter,
22:37alors qu'on met une épée
22:38de Damoclès
22:39sur les jeunes d'aujourd'hui,
22:40tout simplement,
22:40parce qu'il y aurait
22:41un choc terminal
22:42si on devait arrêter
22:43dans quelques dizaines
22:44d'années.
22:44Donc,
22:45c'est vraiment terrible
22:45de penser à ça,
22:46de penser que la technologie
22:48résoudra tout.
22:48Ce n'est pas vrai.
22:49Elle peut aider
22:50dans certains contextes.
22:51Jean Jouzel,
22:52il y a ce livre
22:52Les orphelins de la planète
22:53que vous co-signez
22:54avec Alain Grandjean
22:55et Claude Henry
22:56qui est publié
22:57chez Grasset.
22:58Et il y a un rendez-vous
22:59aussi également
23:00le 15 mai
23:00que vous organisez.
23:02Dites-nous
23:02à quoi ça va ressembler ?
23:03Merci.
23:03C'est vrai que ce livre
23:05parle d'engagement
23:06et j'engage les jeunes
23:07à s'engager,
23:09tout le monde
23:09à s'engager.
23:11Une des façons
23:11que nous allons nous engager
23:12c'est d'essayer
23:13d'aller vers le grand public.
23:14C'est ce que nous faisons
23:15à travers ce forum
23:16international
23:16de la météo et du climat.
23:18Ce sera du 15 à 17 juin
23:19à Paris.
23:20Une journée consacrée
23:21ensuite à vie
23:22et les changements climatiques
23:23et dans le cadre
23:23de l'année de la mer,
23:25plus tournée
23:26vers les présentateurs météo
23:28consacrés à l'océan.
23:29Ce sera à Nice
23:30du 6 au 8 juin.
23:31Et Céline Dacosta
23:32y sera ?
23:33Voilà.
23:33Et merci beaucoup.
23:34Merci infiniment.
23:36C'est important pour nous
23:36de témoigner.
23:37Merci Jean Jouzel.
23:39C'était un bonheur
23:39de vous recevoir.
23:40Merci beaucoup.
23:41Et je vous souhaite
23:42une excellente journée.
23:43Le combat continue.

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