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Regardez L'invité pour tout comprendre avec Yves Calvi du 09 mai 2025.

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00:00Il est 18h43, bonsoir Eric Ayer, vous êtes économiste spécialiste du marché du travail, merci de prendre la parole sur RTL.
00:08Nous revenons avec vous sur ce chiffre impressionnant sur les défaillances de petites entreprises.
00:13Après une année 2024 marquée par un nombre record de faillites, 2025 pourrait être encore pire.
00:18Les PME, notamment dans l'immobilier et la construction, sont particulièrement touchés avec des prévisions à 68 000 défaillances sur cette année.
00:26Que se passe-t-il exactement ?
00:28Alors, il faut prendre un peu de recul et imaginer qu'habituellement, vous avez à peu près 55 000 défaillances d'entreprise chaque année.
00:35Quand on est dans une année normale, on peut monter à 60 000 quand ça va mal et descendre aux alentours de 45 000 quand ça va bien.
00:44Ce qu'il faut avoir en tête, c'est qu'au cours de la crise sanitaire et pendant les années 2020, 2021, 2022, 2023, ça n'allait pas très bien.
00:51Et pourtant, on n'a jamais connu aussi peu de défaillances d'entreprise.
00:54On est descendu à 28 000 défaillances d'entreprise uniquement au cours de l'année 2022.
01:01Donc, en fait, pendant toutes ces années-là, on a sauvé toutes les entreprises, y compris les entreprises qui auraient dû faire défaillance si il n'y avait pas eu la crise sanitaire.
01:09Alors, comment on les a sauvées ?
01:11On a fait des prêts garantis par l'État et on n'a pas ciblé à qui on donnait ces prêts, on les a donnés à tout le monde.
01:17Et donc, on a sauvé des entreprises qui auraient dû faire défaillance il y a 4 ans.
01:22Et elles, c'est ce qu'on appelle des entreprises zombies.
01:24Aujourd'hui, vous avez à peu près 120 000 entreprises zombies.
01:28C'est-à-dire que, vous voyez, si on doit faire une moyenne, on devrait dire qu'une année normale, c'est 55 000 défaillances.
01:35On devra en plus absorber ces 120 000 entreprises qui vont faire défaillance un jour ou l'autre, le jour où elles ne pourront plus rembourser leurs prêts garantis, par exemple.
01:46Et donc, c'est pour ça qu'on va rester longtemps sur des rythmes élevés de défaillances d'entreprise.
01:50Les tribunaux de commerce vont limiter aux alentours de 68 000, 70 000.
01:55On ne peut pas aller bien au-delà.
01:57Et donc, il faut s'attendre à encore 2-3 années avec des niveaux de défaillance très élevés.
02:02Mais ce n'est qu'un rattrapage, finalement.
02:03C'est ça. Donc, Éric Ayer, vous nous dites qu'aujourd'hui, si autant d'entreprises ferment,
02:09ce sont ces mêmes entreprises qui auraient dû fermer avant, mais qui ont été aidées avec ces prêts garantis par l'État accordés pendant le Covid.
02:16Il y a les deux. Il y a les entreprises qui, comme dans une année normale, vous faites défaillance, d'accord ?
02:21À peu près 55 000.
02:23Et celles qui auraient dû fermer pendant l'épidémie.
02:25Et celles qui auraient dû fermer. Donc, c'est la somme des deux qui fait qu'on va rester à des niveaux élevés.
02:29Il faut quand même aussi dire qu'aujourd'hui, on n'est pas dans une bonne situation.
02:33Donc, c'est normal qu'on soit à des niveaux élevés de défaillance, au-delà de 55 000.
02:38Mais là, on touche des records parce qu'il y a en plus les entreprises qui auraient dû faire défaillance avant.
02:44Ces fameuses entreprises zombies qui, petit à petit, disparaissent.
02:47Certaines régions sont-elles plus exposées ?
02:50Alors ça, je suis incapable de vous le dire parce que les données dont on dispose, c'est la Banque de France.
02:56Ce n'est pas des données régionales. Donc, je suis vraiment désolé. Je ne peux pas répondre à votre question.
02:59Et donc, si je vous demande si l'immobilier et la construction sont les secteurs les plus touchés, en revanche, là, vous pouvez me répondre.
03:05Oui, là, je peux vous répondre. Oui, effectivement.
03:08Alors, si on regarde les entreprises zombies, c'est effectivement dans le commerce, dans la construction,
03:14effectivement, où il y avait le plus grand nombre d'entreprises qui auraient dû faire défaillance et qui ne l'ont pas fait.
03:20Donc, ça, il y a énormément d'entreprises qui vont disparaître dans cela.
03:24Et ensuite, aujourd'hui, vous avez quand même certains secteurs qui ne se portent pas bien parce qu'aujourd'hui, il faut quand même rappeler,
03:31on est dans un attentisme en termes de demandes intérieures et en termes de demandes étrangères.
03:37Et donc là, c'est un peu tous les secteurs qui vont être impactés.
03:40Mais les deux précités et l'immobilier font partie des secteurs qui vont être le plus touchés par les différentes entreprises.
03:47L'immobilier et la construction, pourquoi ? Parce que la loi zéro artificialisation nette des sols ?
03:53Parce que baisse des permis de construire ? Parce que les Français n'arrivent plus à emprunter ? Pourquoi ?
03:59Alors, ça, c'est les raisons très conjoncturelles.
04:02Il faut encore une fois avoir en tête qu'il y a du rattrapage.
04:06Et donc, on en avait beaucoup sauvé au cours de la crise sanitaire.
04:11Ces entreprises-là disparaissent petit à petit.
04:13Et oui, effectivement, aujourd'hui, il y a eu des taux d'intérêt qui ont augmenté assez fortement pendant cette période-là.
04:20Et donc, il y a des ménages qui auraient dû normalement emprunter pour acheter ou pour faire construire, qui ne l'ont pas fait.
04:29Et donc, ça, ça fait effectivement une demande qui a complètement chuté dans ce secteur-là.
04:35Et qui fait que, globalement, il y a en plus une crise du logement et d'immobilier qui viennent rajouter à ces zombies.
04:42Éric Ayer, on se rappelle que pendant le Covid, beaucoup d'entreprises avaient survécu grâce aux aides publiques.
04:47La perfusion a été débranchée.
04:50Oui, la perfusion a été débranchée.
04:51C'est pour ça que les entreprises qui ont été sauvées, peut-être à tort, maintenant disparaissent petit à petit.
04:58Alors, la perfusion a été enlevée.
05:01Mais il y avait quand même les prêts garantis par l'État qui n'ont pas encore fini d'être remboursés.
05:06Et c'est cela qui va se lever petit à petit.
05:09Et qui va...
05:11Vous voyez, c'est quand la mer se retire que l'on voit qui nage nu.
05:15Et bien, c'est à ce moment-là où on voit les entreprises qui auraient dû faire des faillances et qui le font aujourd'hui.
05:20Alors, quelle est la solution ?
05:22Est-ce qu'il faut leur donner plus de temps pour les rembourser ces prêts ?
05:25Est-ce qu'il faut baisser les charges, comme on le répète souvent ?
05:29Non, là, il y a vraiment...
05:30Pour les entreprises qu'on appelle zombies, je pense qu'on leur a laissé 4 ans de plus.
05:35On a maintenu leur espérance de vie au-delà de ce qu'il fallait.
05:40C'est fini, il faut qu'elle est ferme.
05:42Soit elles ont réussi, grâce à ces 4-5 ans supplémentaires, à changer de modèle et à survivre.
05:49Ça, peut-être que certains devront survivre.
05:51Mais on ne va pas continuer à maintenir par de l'argent public des entreprises qui ne sont pas productives.
05:57Donc, malheureusement, c'est un peu froid de le dire comme cela.
06:02Mais c'est normal que des entreprises qui ne sont pas rentables ferment.
06:06Et d'autres plus rentables vont prendre leur place.
06:08Bon, ça, c'est notre système capitaliste qui est ainsi.
06:12Et ce n'est pas à l'argent public qui a sauvé toutes les entreprises.
06:14Donc ça, il faut arrêter de les aider.
06:17C'est certain.
06:18Et peut-être espérer qu'ils y arrivent.
06:20Ensuite, il y a les nouvelles qui arrivent aujourd'hui.
06:22Et qui sont dans une mauvaise situation conjoncturelle.
06:26Parce que les taux d'intérêt sont encore élevés.
06:29Parce que la demande est extrêmement faible.
06:31Parce qu'il y a une guerre commerciale.
06:33Et là, je pense qu'aujourd'hui, les finances publiques ne vont pas permettre de sauver tout le monde.
06:40Mais il est possible que l'on mette en place une politique industrielle ou une politique économique
06:45pour se dire quelles sont les entreprises dans le tissu productif qu'il faut absolument sauvegarder.
06:51Parce que si on veut que demain, on regagne des parts de marché, il va falloir des entreprises
06:57qui soient là le jour où la demande va repartir.
07:00Et donc ça, c'est un choix de politique économique.
07:02Et c'est à cela que servent les budgets.
07:04Et on attend avec impatience les budgets de 2026 pour savoir, finalement,
07:08est-ce qu'il reste encore des marges de manœuvre ?
07:10Et si oui, vers quel secteur ces marges de manœuvre vont aller pour sauver le tissu productif ?
07:15En 30 secondes, est-ce que l'incertitude politique, notamment avec la dissolution, a pu jouer un rôle dans tout ça ?
07:20Ah oui, catastrophique.
07:21C'est-à-dire qu'aujourd'hui, l'incertitude politique, l'incertitude en règle générale, est très élevée aujourd'hui.
07:29C'est-à-dire que vous avez trois types d'incertitudes.
07:31Vous avez une incertitude nationale, liée à la dissolution.
07:35Vous avez une incertitude géopolitique, liée au conflit, notamment avec l'Ukraine.
07:41Et une incertitude commerciale, liée à la guerre commerciale lancée par Trump.
07:47Lorsqu'on fait tourner nos modèles, c'est cette incertitude qui pèse le plus
07:50sur l'économie, bien plus que la guerre commerciale en tant que telle.
07:54C'est cette incertitude qui fait que les entreprises arrêtent d'investir, que les entreprises arrêtent
07:58d'embaucher et qu'on entre finalement dans une croissance qui est extrêmement faible
08:03et qui n'est pas propice en fait à la création d'emplois et à la non-destruction des entreprises.
08:08Merci beaucoup Éric Ayer, économiste et spécialiste du marché du travail.
08:13Dans un instant, l'idée week-end sur RTL, nous partons au centre Pompidou.
08:16Mais celui de Metz, il célèbre en grande pompe son 15e anniversaire.
08:20A tout de suite.