Associations, entreprises, mutuelles, EPHAD, crèches ou hôpitaux, le groupe SOS regroupe un ensemble d’acteurs qui font la promesse d’agir pour l’intérêt général. Tous sont détenus par des associations. Comment se développer à grande échelle en conservant ce modèle ? Comment continuer d’agir pour la solidarité malgré la baisse de soutien des États-Unis sur ce sujet ? Quel modèle adopter pour les établissements de santé ? Jean-Marc Borello, président du directoire du groupe, répond dans un grand entretien.
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00:00– Prêt pour l'impact, c'est la question que je pose chaque semaine à une personnalité qui compte dans notre économie.
00:10Aujourd'hui, je reçois Jean-Marc Borrello, bonjour. – Bonjour.
00:12– Bienvenue, vous êtes le fondateur, le président du directoire du groupe SOS.
00:16Tiens, ça veut dire quoi pour vous ce mot « impact » qu'on met un peu à toutes les sauces ?
00:21– Alors c'est pour nous un mot indispensable parce qu'il y a très longtemps,
00:24dans la querelle qui opposait l'économie sociale, l'économie classique, etc.,
00:29nous avons eu le malheur de dire que les statuts ne faisaient pas la vertu
00:33et que l'on soit association, coopérative, mutuelle, entreprise de capitaux.
00:38L'important n'était pas les statuts qu'on avait adoptés,
00:41mais plutôt ceux qu'on créait concrètement pour la société.
00:45Une fois qu'on a dit ça, encore faut-il le mesurer.
00:48Et donc pour nous, ce n'est pas simplement un mot, c'est une exigence,
00:51l'exigence de mesurer l'impact de nos actions, l'impact social, économique et environnemental.
00:57Et à ce propos, nous avons créé il y a trois ans un sommet de la mesure de l'impact
01:01qui aura lieu au CESE au mois de mai, qui réunira 4000 personnes,
01:06des ministres, des grands chefs d'entreprise, des universités.
01:09Et l'idée est de dire quoi qu'on fasse, il faut être capable de le mesurer
01:13pour s'améliorer ou changer d'orientation, ou tout simplement pour avancer dans la bonne direction.
01:19Est-ce que ça veut dire d'une certaine façon que ça guide vos actions ?
01:24Parce que c'est tellement grand le groupe SOS qu'on peut se dire
01:28c'est quoi le lien entre une association et une entreprise,
01:31entre un hôpital, une épicerie solidaire, un bar, un Ehpad, une crèche, j'en passais des meilleurs.
01:38Donc c'est ça peut-être, c'est cette mesure d'impact ?
01:40Qu'est-ce qu'on fait de bien pour la société ?
01:42Le lien c'est l'intérêt général, très clairement, le point commun entre tous les types d'établissements
01:48que vous venez de citer, qui sont organisés autour de l'humain.
01:52Que ce soit l'humain abandonné dans des zones rurales où il n'y a plus de commerce,
01:56que ce soit la personne en situation de difficulté sanitaire,
02:00que ce soit la personne en fragilité du fait de son âge,
02:03alors ça peut être dans une crèche ou dans un Ehpad,
02:06parce que la fragilité c'est ce qui relie nos vies du début jusqu'à la fin,
02:09et donc mesurons l'impact de ce que nous faisons
02:13et essayons d'améliorer les conséquences de nos actes.
02:16Alors quelques chiffres, pour cerner le groupe SOS,
02:20c'est plus de 22 000 personnes employées, un chiffre d'affaires d'un milliard 800 millions d'euros.
02:24En fait c'est la somme de tous les budgets des associations, des entreprises qui composent le groupe.
02:31Tiens, quel est le degré d'autonomie de chacune de ces structures ?
02:35Et puis derrière il y a la question aux subsidiaires, qu'est-ce que vous leur apportez aux uns et aux autres ?
02:39Mais d'abord le degré d'autonomie.
02:40Alors le degré d'autonomie c'est effectivement d'être dans le cœur de son sujet.
02:44Il est évident que Wings of the Ocean qui lutte contre les plastiques dans les océans,
02:49avec des bateaux qui organisent des milliers de manifestations avec des bénévoles
02:53pour empêcher les plastiques de se déverser dans la mer,
02:57a sa logique, de la même manière qu'un hôpital a des logiques.
03:01Alors le degré d'autonomie c'est qu'il y a des valeurs fondamentales.
03:04Dans nos hôpitaux, il n'y a pas de paiement par le patient, de quoi que ce soit,
03:10il n'y a pas de clientèle privée.
03:12Donc en clair l'idée c'est que, quels que soient les biens ou services,
03:16il faut qu'ils soient accessibles à tous,
03:19quel que soit le degré, le niveau de richesse de chacun.
03:23Donc ce sont les grands principes qui régissent à la fois les établissements
03:27et qui régissent évidemment les équipes qui seront bientôt plutôt 26 000
03:32parce que le temps d'imprimer chez nous, les chiffres ne sont plus valables.
03:36Oui, effectivement ça progresse en temps réel d'une certaine façon.
03:40On est dans un modèle d'économie sociale et solidaire ?
03:43Absolument, absolument.
03:45Alors on en a souvent parlé ici, mais on peut être rappelé en quelques mots ce que c'est
03:48et puis surtout pourquoi vous l'avez choisi ?
03:50Alors la particularité c'est que personne n'est propriétaire de quoi que ce soit,
03:54c'est-à-dire que l'ensemble de ces entreprises, associations, etc.
03:58sont détenues ou gouvernées par des associations.
04:02Donc aucun d'entre nous n'est propriétaire d'une action, d'un mètre carré d'immobilier,
04:07même si la valorisation immobilière du groupe SOS est plus d'un milliard.
04:12Ce sont les associations qui en sont propriétaires.
04:14Pourquoi on l'a choisi ?
04:15Parce qu'on ne voulait pas qu'à un moment donné,
04:18des actionnaires puissent décider de l'orientation.
04:21C'était la grande question.
04:23Alors c'était il y a 40 ans, puisque cette maison a été créée en 84.
04:28Donc nous fêtons cette année les 40 ans.
04:31Et l'idée était de dire, on peut être guidé par l'intérêt général,
04:34on peut être guidé par l'intérêt financier,
04:37mais quelquefois il peut y avoir une rencontre des deux qui ne va pas dans le bon sens.
04:40Donc pas d'actionnaire, pas de dividende.
04:43Pas de dividende, c'est ce que j'allais vous dire.
04:44Et donc une économie plus frugale, sans doute, que des grands groupes équivalents
04:49qui ont des comptes à rendre à leurs actionnaires.
04:51Avec un modèle coopératif aussi.
04:53Alors il y a des associations, il y a des coopératives,
04:56il y a des entreprises commerciales pures,
04:58mais elles sont détenues à 100% par les associations du groupe SOS.
05:02Comment, alors je vous ai déjà posé la question,
05:03puisqu'on s'est déjà rencontré sur ce plateau,
05:05mais comment on garde ce principe en grandissant autant,
05:08quand on est 26 000 ?
05:09C'est quand même un défi compliqué à relever.
05:12Absolument, c'est un défi qu'on n'avait pas tout à fait prévu,
05:15parce qu'on démarre une association avec quelques copains
05:18avec qui on partage l'essentiel,
05:20et puis lorsqu'il y a 500 000, 10 000, 20 000 et bientôt 30 000 salariés,
05:26il faut faire en sorte que les gens se rencontrent régulièrement
05:29et surtout que l'essentiel de ce que nous sommes remonte du terrain.
05:33Une fois que j'aurais dit bottom-up de manière générale,
05:36objectivement, ceux qui travaillent dans les hôpitaux en Lorraine
05:39savent de quoi on a besoin dans un hôpital en Lorraine,
05:43mieux que ce que le siège ne le saurait,
05:45et c'est valable pour ceux qui élèvent des moutons en Bretagne
05:48pour faire de l'éco-pâturage.
05:52Objectivement, entre nos bergers, nos chirurgiens et nos marins,
05:56chacun est mieux placé pour savoir quelle est la stratégie à adopter.
05:59Est-ce que vous faites de la politique avec le groupe SOS ?
06:03Non, on ne fait pas de la politique, en tout cas on n'est pas partisans.
06:07Nous sommes extrêmement divers.
06:10Moi j'ai été engagé toute ma vie, j'étais syndicaliste,
06:12j'ai travaillé pour les gouvernements à partir de 1981,
06:16j'ai quitté la fonction publique ensuite.
06:19C'est un secret pour personne que j'ai accompagné la création du mouvement présidentiel,
06:24que je continue à accompagner,
06:26mais objectivement je suis assez minoritaire dans ma propre maison.
06:29L'idée c'est que chacun est parfaitement libre.
06:32L'important c'est de militer,
06:34parce que le militantisme professionnel c'est bien,
06:37je continue à penser qu'aujourd'hui plus que jamais,
06:40chacun doit s'investir aussi pour l'ensemble de la société.
06:44Je vous ai posé cette question aussi,
06:46parce que vous venez de lancer avec un collectif d'associations et d'agences,
06:49une campagne, une campagne collective,
06:51intitulée Make Exclusions Great Again,
06:54évidemment on voit qu'il vous ciblait.
06:56Pourquoi vous vous êtes dit,
06:58il faut qu'on marque le coup par rapport à ce qui se passe aux Etats-Unis ?
07:01Alors ce qui se passe aux Etats-Unis,
07:03et peut-être qu'il n'est pas utile d'aller chercher aussi loin,
07:07je crois que j'ai une profonde détestation
07:10pour les politiques qui passent leur vie à désigner des boucs émissaires.
07:15Donc les migrants une fois,
07:17les LGBT la fois d'après, etc.
07:19Donc ça fait partie de l'ADN du groupe,
07:23la lutte contre les exclusions,
07:25et évidemment que nous devons faire valoir des pensées positives.
07:30Je n'ai pas envie de lutter contre tel ou tel extrême,
07:34j'ai envie de pousser les valeurs qui au groupe SOS nous animent,
07:37c'est-à-dire le vivre ensemble.
07:39Mais est-ce que c'est aussi,
07:40parce qu'il y a tout un tissu associatif au sein du groupe SOS,
07:43est-ce que certaines des associations qui font partie du groupe
07:45sentent déjà, et je reviens aux Etats-Unis quand même,
07:48l'effet des coupes budgétaires décidées par Donald Trump ?
07:51Parce qu'on a reçu ici,
07:52notamment des associations qui sont dans le domaine de la santé,
07:56qui disent que l'impact, malheureusement,
07:58l'impact négatif, il est comme ça, ultra rapide.
08:01L'impact est dramatique sur l'ensemble du monde,
08:05c'est-à-dire que nous sommes présents dans une cinquantaine de pays,
08:08alors pas sur de l'humanitaire d'urgence,
08:10ce qui nous a mis à l'abri des coupes budgétaires,
08:12mais il faut savoir qu'aujourd'hui,
08:14l'aide internationale a été divisée par deux en un mois.
08:18Ça veut dire clairement que des dispensaires ont fermé du jour au lendemain,
08:22que des soins ont été interrompus,
08:24que les livraisons d'alimentation n'arrivent plus dans un certain nombre de pays,
08:29et on a des catastrophes humanitaires au Soudan,
08:32au Nord-Kivu, en RDC,
08:34pour des tas de raisons,
08:35mais sauf que les humanitaires n'ont plus les moyens d'y aller,
08:38donc la mobilisation de la société civile est encore plus importante,
08:42parce qu'on voit bien que les États,
08:45quels qu'ils soient, peuvent varier brutalement.
08:47Mais est-ce que ce n'est pas aussi le signe qu'on s'est un peu endormi,
08:50il y avait une solution de facilité à se reposer sur la manne américaine ?
08:54Alors, c'était la moitié de l'aide humanitaire internationale,
08:58c'est extrêmement important.
09:01De manière générale,
09:03la sollicitation du grand public a été sans doute un peu oubliée,
09:06y compris par le groupe SOS,
09:08où nous n'avons quasiment pas de recours à des campagnes de dons, etc.
09:13Donc l'idée aujourd'hui de sensibiliser le grand public,
09:16de manière à ce que les citoyens réagissent et éventuellement prennent le relais,
09:20est aujourd'hui un vrai sujet,
09:22et c'est pour ça que la mobilisation des 40 ans se fait vraiment au niveau du vivre ensemble.
09:27Parce que, évidemment, tout ceci est parfaitement lié,
09:29quand on a le choix entre mourir dans un pays,
09:32ou passer la Méditerranée en risquant sa vie,
09:34on tente le coup en Méditerranée,
09:36et ce ne sont pas des barrières virtuelles
09:39qui empêcheront les gens d'essayer de survivre, eux et leurs enfants.
09:43Je reviens peut-être aux engagements en matière d'environnement, d'énergie, climat,
09:48du groupe SOS.
09:50En 2022, vous aviez adopté un plan sobriété, énergie et climat.
09:55Est-ce qu'on peut faire un premier bilan sur les actions que vous avez menées
09:57et sur l'efficacité de ce plan ?
10:00Premier sujet, mesurer. Mesurer parce que le groupe SOS a des milliers de véhicules,
10:06a des bâtiments, quelquefois extrêmement énergétivores,
10:09parce qu'un hôpital, surtout s'il est un peu ancien, est une passeport thermique.
10:13Ils ont été construits dans les années 70.
10:15Absolument. On sait bien qu'on n'est pas des consommateurs d'énergie,
10:18parce que l'été, il faut le chauffer, l'hiver, il faut le chauffer sérieusement,
10:22et l'été, il faut le rafraîchir, compte tenu de la fragilité de ses résidents.
10:25Et c'est assez amusant, parce que quand on s'est lancé là-dedans,
10:29il y a eu, comme dans toute organisation, quelques résistances.
10:33Parce que ceux de la santé nous disaient,
10:35la priorité, ce n'est pas forcément d'améliorer l'impact thermique du bâtiment,
10:40mais d'acheter le nouveau robot qui permet, etc.
10:43Lorsque la crise énergétique est venue,
10:46et lorsque l'explosion des prix de l'énergie a frappé l'ensemble des établissements,
10:50tout le monde a compris que nous avons plutôt bien fait
10:52d'entreprendre la rénovation des bâtiments,
10:55et d'ailleurs, nous la relançons en ce moment en collaboration avec l'ADEME,
10:59puisqu'on a un vaste programme sur l'ensemble de nos établissements,
11:03pour améliorer la qualité thermique des bâtiments.
11:06Mais on pourrait dire que le fait de s'adresser à des fournisseurs locaux
11:10en matière d'alimentation, ça pouvait paraître un peu wok il y a quelques années.
11:15Lorsqu'il y a eu des difficultés d'approvisionnement,
11:18lorsqu'il y a eu des routes bloquées,
11:19lorsqu'il y a eu une explosion des prix d'alimentation,
11:21on était assez content d'avoir des accords avec les producteurs locaux.
11:25Effectivement, et vous avez renforcé ce partenariat avec l'ADEME.
11:28Il y a notamment ce programme qui s'appelle DETER pour décarboner le tertiaire.
11:32Absolument.
11:32C'est ça que vous déployez ?
11:34On le fait depuis quelques années,
11:37et l'ADEME est intervenue pour aider, financer les recherches,
11:41parce que lorsqu'on a plus de 1000 établissements à travers le pays,
11:44dont certains font plusieurs dizaines de milliers de mètres carrés,
11:47ça représente un investissement assez lourd.
11:49Donc l'ADEME nous accompagne,
11:51mais l'idée c'est vraiment, un, évaluer les besoins,
11:55et deux, prendre les mesures pour permettre d'avoir des énergies plus vertes
11:59sur l'ensemble de nos bâtiments.
12:00Est-ce que ça touche aussi l'alimentation ?
12:02Le fait de chercher de l'alimentation plus durable,
12:05ou même plus locale ?
12:06Absolument.
12:07Alors ça touche l'alimentation,
12:09d'une part dans nos propres établissements,
12:10c'est-à-dire qu'on essaie,
12:12je crois que nous sommes à peu près parvenus
12:14à avoir plus de la moitié de l'alimentation bio dans nos crèches,
12:17on essaie d'avancer sur le reste des établissements.
12:20Ça coûte plus cher ?
12:22Ça coûte plus cher,
12:24ça coûte sans doute un peu plus cher.
12:25La question c'est la qualité,
12:27comment on lutte contre le gaspillage.
12:29Encore une fois,
12:30si on fait plus intelligemment,
12:31on devrait faire en sorte que ça coûte pas plus cher,
12:34parce que lorsqu'on s'approvisionne localement,
12:37on est moins sensible au coût des transports et du carburant, etc.
12:41Après, on a des actions spécifiques.
12:43Vous parliez des épiceries solidaires.
12:46Nous sommes implantés dans les marchés d'intérêts nationaux,
12:48et en particulier Rungis,
12:50avec Stéphane Laiani qui le dirige
12:51et qui est un de nos grands supporters.
12:54On a installé des chantiers d'insertion
12:56qui récupèrent les fruits et légumes invendus,
12:59qui permet de les conditionner
13:01et de les faire arriver dans nos épiceries solidaires,
13:04puisqu'on a un réseau de plus de 700 épiceries solidaires.
13:07Et là aussi, ça permet à des gens
13:09qui n'ont pas les moyens d'accéder à une alimentation de qualité,
13:12parce que la réalité, c'est que lorsqu'on va dans un supermarché
13:16et que nos camarades de l'armée,
13:19du secours catholique ou du secours populaire
13:21récupèrent des denrées,
13:24c'est souvent des denrées sèches,
13:25c'est-à-dire des pâtes, du riz, etc.
13:28Donc faire arriver dans les épiceries solidaires
13:30pour ceux qui n'ont pas les moyens
13:32de se nourrir convenablement des fruits et des légumes,
13:36qui auraient été mis à la benne,
13:38c'est plutôt intelligent et ça ne coûte pas plus cher.
13:41Alors on va ouvrir un chapitre consacré à la ruralité.
13:44Le groupe SES agit, entre autres,
13:45pour revitaliser un certain nombre de zones rurales.
13:49Et celui qui était à votre place la semaine dernière,
13:51Nicolas Chaban, le directeur général de la marque de consommateurs,
13:55c'est qui le patron ?
13:55A une question pour vous sur ce thème, on l'écoute.
13:58Jean-Marc Borrello, bonjour.
14:00On sait que vous faites beaucoup pour les campagnes et la ruralité.
14:03Est-ce que vous pouvez nous dire à quel point, selon vous,
14:06faire vivre ces campagnes est important pour les campagnes,
14:10mais aussi pour le pays tout entier ?
14:12Voilà, merci beaucoup.
14:14C'est important, pas seulement pour les campagnes.
14:17C'est ce que je retiens de sa question.
14:18Pour le pays tout entier, pourquoi ?
14:20Parce que s'ils disparaissent les services dans les zones rurales,
14:24on va avoir des fortes augmentations dans les zones urbaines
14:28qui ne seront pas capables de loger les gens.
14:31Et on voit le prix de l'immobilier qui devront habiter de plus en plus loin
14:35et donc se déplacer pour venir bosser.
14:37Donc les programmes SOS sur la ruralité,
14:40c'est évidemment le plus célèbre d'entre eux, les 1000 cafés.
14:43On en a ouvert et on doit entre 300 ou 400 aujourd'hui.
14:47Et on continue à développer ce dispositif.
14:49Mais c'est aussi les villes moyennes
14:51où on s'est attaché à essayer de comprendre ce qui n'allait pas.
14:54la fermeture des boutiques dans les villes moyennes.
14:57On avait des rues principales dans des villes moyennes
15:00qui étaient petit à petit désertées.
15:02Et en réfléchissant, les camarades d'SOS ont inventé un machin
15:05qu'on appelle le co-selling.
15:07On l'a créé d'abord à Vitry-le-François.
15:10On s'est dit qu'il n'y a peut-être pas la place pour 8 boutiques différentes.
15:14Et puis les gens n'ont pas forcément les moyens
15:17d'acquérir une boutique, signer un bail, s'engager pour plusieurs années.
15:21Donc on a loué des boutiques avec les collectivités locales,
15:24souvent, la mairie de Vitry-le-François par exemple.
15:26Et on a installé 6 commerçants dans la même boutique
15:28qui paient 100 euros par mois,
15:31mais qui peuvent arrêter à tout moment,
15:33qui ne sont pas prisonniers d'un bail,
15:35qui n'ont pas d'investissement.
15:37Et donc dans la même boutique,
15:38vous avez 5 ou 6 commerçants différents.
15:41Et du coup, la boutique revit.
15:42Le modèle économique est plus facile.
15:45Ils s'entraident.
15:46Et donc on fait revivre dans une boutique
15:48ce qui n'existait plus dans le village.
15:50Est-ce qu'il y a un effet d'entraînement ?
15:52C'est-à-dire que ça vaut pour l'opération 1000 bars
15:55ou le micro-café,
15:55mais peut-être aussi pour ces opérations dans les villes moyennes.
15:58C'est-à-dire qu'à partir du moment où une boutique
16:00ou un bar s'installe ou se réinstalle,
16:03qu'est-ce que ça crée après ?
16:04L'idée, c'est de créer des cercles vertueux.
16:06C'est-à-dire qu'on peut s'installer.
16:08Quand on a regardé...
16:09Le prix de l'immobilier est évidemment
16:11beaucoup moins cher dans ces villes moyennes
16:13ou dans ces villages,
16:14sauf que si vous vous installez là,
16:16encore faut-il avoir des services.
16:17S'il n'y a pas d'épicerie,
16:19si vous n'avez pas accès au minimum,
16:22vous ne pouvez pas vous installer.
16:24Donc l'idée était de dire
16:25essayons de retrouver les conditions
16:26qui permettent aux gens de s'installer.
16:29Si des gens arrivent,
16:30s'ils s'installent,
16:31ça fait des enfants qui peuvent permettre
16:33de réouvrir l'école.
16:34Ça fait un lieu dans lequel
16:36on peut aller refaire le monde,
16:37ce qui est mieux que de le faire sur des parkings
16:39ou des ronds-points en discutant.
16:42Ça fait une épicerie
16:43où on peut aller acheter
16:44le sel qu'on a oublié d'acheter
16:46la semaine d'avant.
16:47Et donc, en clair,
16:48ça crée un dispositif vertueux
16:51pour le village
16:52qui permet de réattirer des habitants.
16:56Puisqu'on parle de ruralité,
16:58alors le patrimoine français,
16:59il n'est pas seulement en milieu rural,
17:01mais il est aussi très important
17:02en milieu rural.
17:03Il y a des actions du groupe SOS,
17:06des associations
17:06qui sont spécifiquement engagées sur ce...
17:09J'imagine que oui,
17:10parce que quand on est aussi grand
17:12que le groupe SOS...
17:13Alors absolument.
17:13Dans la plus belle ville du monde,
17:16Marseille,
17:17il y a un fort...
17:18Vous êtes un peu parti pris, là,
17:19mais bon...
17:19Je suis un tout petit peu parti pris,
17:21mais ça s'entend à mon accent,
17:22donc la couleur est annoncée.
17:24Il y a un fort à l'entrée de la ville
17:25qui s'appelle le Fort Saint-Nicolas,
17:27construit par Louis XIV,
17:28qui était abandonné.
17:31Il a servi de prison
17:32pendant l'occupation,
17:33mais clairement,
17:34il était interdit d'accès au public
17:36depuis 380 ans.
17:39Une de nos associations,
17:40Actavista,
17:41l'a rénové pendant 15 ou 20 ans
17:43pour le rendre accessible au public
17:45et le secteur culture du groupe SOS
17:47vient de le réouvrir au public,
17:50donc c'est sur le Vieux-Port.
17:52En moins de 6 mois,
17:53on a eu 200 000 visiteurs
17:54parce que ce bâtiment
17:57était à la vue de tous
17:58sur le port
17:59et personne ne pouvait y accéder.
18:01Aujourd'hui,
18:02il y a des pépinières
18:03d'entreprises culturelles,
18:04il y a des bistrots,
18:05il y a un jeu de boule,
18:06évidemment,
18:06sinon on ne serait pas dans le midi.
18:08Il y a des visites organisées
18:09sur l'histoire du lieu
18:11et donc c'est à la fois
18:12de la rénovation du patrimoine
18:14par une association d'insertion
18:16où les jeunes apprennent
18:18le métier de rénovation
18:19du bâtiment ancien
18:20et sortent avec un diplôme.
18:21Donc évidemment,
18:22c'est un sujet de formation
18:24pour les jeunes des quartiers nord
18:26qui, objectivement,
18:27n'avaient pas connu
18:28le patrimoine ancien.
18:30C'est une fierté pour eux
18:31de travailler sur ces sujets,
18:34c'est-à-dire que participer
18:35à la rénovation
18:36d'un lieu emblématique,
18:38c'est plus sympa
18:39que de repeindre la cage d'escalier
18:41de l'HLM
18:44dans laquelle on habite.
18:45Donc il y a de la fierté,
18:46il y a de l'acquisition
18:46de compétences
18:47et il y a 200 000 Marseillais
18:49qui découvrent
18:50le Fort Saint-Nicolas
18:50depuis moins d'un an.
18:53Nouveau chapitre
18:54dans ce grand entretien
18:55consacré aux crèches
18:57et aux EHPAD
18:58et à la question
18:58du non lucratif.
19:00Crèche, EHPAD privée,
19:02certaines d'entre elles
19:03qui ont été dénoncées
19:04dans notamment deux livres
19:05enquêtes du journaliste
19:06Victor Castanet.
19:07Peut-être une question générale
19:08pour commencer.
19:09Quelles leçons
19:09vous tirez
19:10de ces scandales ?
19:11On peut parler de scandales.
19:13Je crois qu'il faut pouvoir,
19:15il faut être mesuré.
19:17Il y a des difficultés
19:19que nous partageons tous.
19:20La difficulté de recruter
19:22du fait des salaires,
19:23même si le Ségur
19:24a permis d'augmenter
19:26les salaires,
19:27ça n'est pas encore
19:28au bon niveau.
19:29Donc que l'on soit privé,
19:30public, lucratif ou pas,
19:32il y a un véritable effort
19:34à faire en matière
19:35de recrutement des salariés,
19:36de carrière, etc.
19:37D'attractivité.
19:38D'attractivité des métiers.
19:40Alors, nous avons pris
19:41comme option à SOS,
19:43non pas de payer
19:44beaucoup plus
19:45parce que les réalités
19:46économiques sont ce qu'elles sont,
19:47mais plutôt de dire
19:48on peut devenir aide-soignant,
19:50mais on vous accompagnera
19:51dans votre évolution.
19:53Être aide-soignant
19:54pendant quelques années,
19:55si on prépare
19:55l'école d'infirmière,
19:56ça permet de devenir infirmière,
19:58et si on est infirmière,
19:59on peut continuer ses carrières.
20:00Je crois que 5
20:02de nos 11 ou 12 hôpitaux
20:04sont dirigés
20:05par d'anciennes infirmières
20:06qui sont devenues
20:07cadres de santé,
20:08directrices d'hôpitaux,
20:09et on est très content
20:10d'avoir d'abord
20:11une majorité de femmes
20:12qui dirigent ces hôpitaux,
20:14mais en plus de femmes
20:15qui ont été d'abord infirmières.
20:16Donc ça,
20:17c'est donner une perspective...
20:19La promesse à SOS,
20:20c'est venez comme vous êtes,
20:21on vous accompagnera,
20:22pardon pour la reprise,
20:24mais c'est vraiment ça
20:25le sujet.
20:27Ensuite,
20:27ce qui a été dit
20:28sur les EHPAD,
20:29sur les crèches...
20:30La mercantilisation
20:32de ces deux fragilités
20:34dont vous parliez.
20:34Alors,
20:35là encore,
20:36il y a ce qui relève
20:37de l'escroquerie,
20:38pure et simple.
20:39Évidemment que l'ex-groupe Orpea
20:41n'aura sans doute
20:42rien à voir
20:44avec l'actuel.
20:45Quand on a un actionnaire
20:46qui est un actionnaire public,
20:47puisque c'est la Caisse des dépôts
20:49qui a sauvé ce dispositif,
20:50on aura évidemment
20:51des pratiques
20:52qui n'existeront plus.
20:54Il n'empêche que,
20:55moi qui ai toujours dit
20:56qu'il n'y avait pas
20:57de vertu dans les statuts,
20:59je me dis aujourd'hui
21:01que lorsqu'une activité
21:02n'est plus lucrative,
21:04parce que la réalité
21:05c'est que les marges
21:05n'auront plus rien à voir
21:07avec ce qu'elles ont été
21:08dans le passé,
21:09peut-être que le non lucratif
21:10a un peu de savoir-faire.
21:12Comment fait-on ?
21:13Un,
21:14nous avons des coûts de gestion
21:15qui sont objectivement
21:17plus économes
21:20que le privé lucratif.
21:21Dans le groupe SOS,
21:22les salaires depuis le début
21:23sont limités
21:24de 1 à 15.
21:25Donc il n'y aura pas
21:26de salaire extravagant
21:29que je peux lire
21:29ici ou là
21:30sur des dirigeants
21:31d'entreprises
21:32et dont j'avoue
21:33que je suis toujours
21:35un peu étonné
21:36parce que pour 10 fois moins,
21:38il y a des tas
21:38de dirigeants talentueux
21:40qui dirigeraient
21:40ces mêmes entreprises.
21:41Les entreprises publiques
21:42ont des limitations
21:43de salaire
21:44et sont dirigées
21:45par des grands serviteurs
21:46de l'État
21:46qui réussissent très bien.
21:48Je ne suis pas persuadé
21:50qu'il soit utile
21:51de payer quelqu'un
21:5230 millions d'euros par an
21:53pour en plus perdre de l'argent.
21:55Mais ça,
21:55c'est encore une autre affaire.
21:57Donc je pense
21:58que le non lucratif
21:59a une carte à jouer.
22:01C'est 20%
22:02par exemple,
22:02si on regarde les crèches,
22:03c'est 20% des crèches
22:04françaises aujourd'hui
22:04qui sont gérées
22:05par des structures
22:06initiatives en fait.
22:07On a à peu près
22:08selon les catégories
22:10le public,
22:13le privé non lucratif
22:14et le privé lucratif.
22:16Alors le privé lucratif
22:17revendique quelquefois
22:18la participation
22:19à l'intérêt général
22:20et ce serait vrai
22:21s'il admettait
22:22par exemple
22:22dans les EHPAD
22:23des personnes
22:23à l'aide sociale.
22:25Parce qu'évidemment
22:26un EHPAD
22:27qui accueille des gens
22:28qui n'ont aucun revenu
22:29et pour lequel
22:30c'est le département
22:31qui se substitue,
22:33c'est moins rentable.
22:34Alors on peut aussi
22:35innover sur le plan économique.
22:36Le groupe SOS
22:37avait inventé
22:38il y a 7 ans
22:39un dispositif économique
22:40un peu particulier
22:41qui vient de devenir légal
22:43il y a 3 mois.
22:44On avait un peu anticipé
22:46l'évolution réglementaire.
22:48C'est ce qu'on avait appelé
22:48le surloyer solidaire.
22:49l'idée selon laquelle
22:52tout le monde doit accéder
22:53au même service
22:54mais tout le monde
22:56n'est pas obligé
22:56de payer le même prix
22:58en clair.
22:59On entre en EHPAD
22:59chez nous
23:00à peu près à 84 ans.
23:02Nous sommes évidemment
23:03beaucoup moins chers
23:03que le privé lucratif.
23:06Nous avons une partie
23:07de gens
23:07qui sont à l'aide sociale
23:08donc qui ne payent pas
23:09et pour les autres
23:10il y a une petite évolution
23:12en fonction des revenus
23:13considérant que quelqu'un
23:15parce que ça arrive
23:16qui a 6000 euros
23:17de revenus mensuels
23:18qui paie 1800 euros
23:20ou 2002 par mois
23:22ça ne change pas forcément
23:24sa vie
23:24ni la vie
23:25de ses futurs héritiers.
23:27Donc on a adopté
23:28ce dispositif
23:28j'avais fait le tour
23:29il y a 7 ans
23:30des pouvoirs publics
23:31en demandant
23:32si c'était autorisé
23:33personne n'a été foutu
23:34de me répondre.
23:35Donc vous avez dit
23:36qu'on ne dit pas
23:37non on y va.
23:38J'ai refait un deuxième tour
23:39en posant la question
23:40différemment
23:41est-ce que c'est
23:41strictement interdit ?
23:42Personne ne m'ayant répondu
23:45on a décidé de l'adopter
23:46aux grandes dames
23:47des services juridiques
23:48du groupe SOS
23:49qui m'ont traité
23:50de dangereux gauchistes.
23:52On l'a mis en place
23:53et j'ai essayé
23:53de convaincre
23:54les ministres de la santé
23:55successifs
23:56que c'était le dispositif
23:58qui ne coûtait rien
23:59à l'Etat
23:59qui en matière
24:01d'intérêt général
24:02me paraît le plus
24:03j'allais dire
24:04en matière politique
24:05me paraît le plus juste
24:06ça veut dire
24:07que tout le monde
24:08a les mêmes services
24:09mais que ceux
24:11qui gagnent moins
24:11paient moins
24:12ceux qui gagnent rien
24:13enfin ceux qui n'ont pas
24:14de revenus
24:15l'aide sociale
24:15se substitue
24:16grâce à ça
24:17nous sommes les premiers
24:18gestionnaires
24:19des pas de ce pays
24:20et ça va s'amplifier
24:22de manière notoire
24:23dans les semaines
24:23qui viennent
24:24et je pense
24:27qu'on rend
24:28un vrai service
24:28d'intérêt général
24:29en ayant
24:30des comptes équilibrés
24:31puisque le groupe SOS
24:32vous l'avez dit
24:33cette année
24:33ce sera 2 milliards
24:34c'est pas un chiffre
24:36dont on se gargarise
24:37et une année
24:39on gagne 5 millions
24:40l'année d'après
24:40on perd 5 millions
24:41enfin si j'étais patron
24:42d'une entreprise cotée
24:43je serais viré depuis 38 ans
24:45en fait
24:45je n'aurais pas fait
24:46une brillante carrière
24:48le but c'est l'équilibre
24:50nous sommes plus sobres
24:52dans la gestion
24:53et donc sans doute
24:54que ces secteurs
24:55sont plutôt
24:56des secteurs
24:57dans l'économie sociale
24:58devraient fonctionner
25:00mais ça veut dire
25:01que ce modèle
25:02va naturellement
25:04s'imposer
25:05est-ce que c'est
25:06le pari que vous faites
25:07ou est-ce qu'il faut
25:08un coup de pouce
25:09de l'Etat
25:10d'une certaine façon
25:10ou un changement
25:11de réglementation
25:12ni l'un ni l'autre
25:13naturellement
25:16rien ne s'impose
25:17on s'impose
25:18avec l'optimisme
25:19de la volonté
25:20et le coup de pouce
25:22de l'Etat
25:22qu'il le garde
25:23objectivement
25:25il y a des secteurs
25:26qui méritent d'être aidés
25:27lorsque les gens
25:27n'ont aucun revenu
25:28lorsqu'ils sont en situation
25:29de dépendance particulière
25:31évidemment
25:32que la solidarité nationale
25:33doit jouer
25:34en revanche
25:35je pense que
25:36si ce secteur s'impose
25:37c'est parce que
25:38les acteurs de ce secteur
25:39vont l'imposer
25:40et moi
25:41à l'ESOS
25:42on aime bien la concurrence
25:43on aime bien gagner
25:45on aime bien la bagarre
25:47on aime bien les appels d'offres
25:48et encore mieux
25:49lorsqu'on a des appels d'offres
25:51ce qui est souvent le cas
25:51contre le privé lucratif
25:53on m'a longtemps dit
25:54quelle est la différence
25:55entre tes EHPAD
25:57et ceux d'Orpea
25:58je dois dire
26:00que grâce à votre confrère
26:01Castaner
26:01ils viennent de comprendre
26:03et d'ailleurs
26:04Castaner sera
26:05avec la ministre
26:06moi
26:06et puis le président
26:07de la mutualité
26:08au sommet de la mesure
26:09d'impact
26:10sur ces sujets là
26:10voilà
26:11le sommet de la mesure
26:12d'impact
26:12au mois de mai
26:13au CESE
26:14au Palais d'Iéna
26:15à Paris
26:16merci beaucoup
26:16je vous en prie
26:17Marc Borello
26:18et à bientôt
26:18sur Bsmart for Change
26:20on passe tout de suite
26:21à notre rubrique
26:21start-up
26:22C'est parti