Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • 02/04/2025
Brice Teinturier, directeur général délégué d'Ipsos et Jérôme Jaffré, chercheur associé au Cevipof de Sciences-Po, constatent la remise en cause nouvelle de la légitimité du pouvoir judiciaire mettant, selon eux, en péril la légitimité du processus électoral de l'élection présidentielle de 2027. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien-du-mercredi-02-avril-2025-9425771

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00Le table ronde ce matin dans le grand entretien après le séisme politique issu de la condamnation
00:06de Marine Le Pen lundi.
00:07Deux politologues, deux spécialistes de la chose politique et de l'opinion à notre
00:11micro, Léa.
00:12Brice Tinturier, directeur général d'Ipsos et Jérôme Jaffray, chercheur associé au
00:16Cevipof.
00:17Bonjour à tous les deux.
00:18Et soyez les bienvenus Brice Tinturier, je précise qu'on va aussi longuement parler
00:22de votre étude Ipsos qui sort aujourd'hui, elle analyse l'état du lien social et du
00:28lien intergénérationnel en France.
00:30Mais d'abord donc la déflagration Marine Le Pen, avant de voir les conséquences pour
00:352027 et la reconfiguration de la scène politique après ce jugement dans l'affaire des assistants
00:42parlementaires.
00:43Une question plus personnelle pour vous Jérôme Jaffray qui est observé depuis longtemps,
00:49maintenant 40 ans peut-être, la vie politique, auriez-vous imaginé que la favorite des
00:55sondages soit, à ce jour, interdite de présidentielle ?
00:59Écoutez, c'est évidemment un événement majeur, une déflagration comme vous l'avez
01:04dit.
01:05Est-ce qu'on est surpris ? Bien sûr, on est surpris, pas par le verdict, pour tous
01:11ceux qui ont suivi le dossier, le procès, le dossier est accablant et la défense était
01:17totalement inadaptée.
01:18C'est l'exécution provisoire évidemment qui empêche Marine Le Pen d'être candidate
01:24à la présidentielle si elle est maintenue après le processus d'appel, là qui surprend
01:29tout le monde.
01:30Là où je passe de la surprise à la stupéfaction, c'est qu'on entre dans une nouvelle ère
01:36de notre vie politique et c'est ça qu'il faut mesurer ce matin pleinement.
01:40D'abord parce qu'il y a une atteinte grave à la légitimité de l'ensemble des institutions
01:48et ça, ça n'est pas le fait que du rassemblement national, à partir du moment où c'est,
01:53y compris même le Premier ministre, parle de son trouble et au-delà même, qui laisse
01:59entendre que cette loi est totalement inadaptée et un Premier ministre qui est d'ailleurs
02:04jugé parti puisqu'il y aura un procès en appel du Modem sur le même sujet, on voit
02:09bien.
02:10Donc il y a une critique de ce qui est le système qui englobe du coup la justice et
02:16qui fait que, si vous voulez, la légitimité des institutions est en cause.
02:20Et le deuxième facteur, c'est la légitimité du processus électoral et du grand rendez-vous
02:25de 2027 qui est en cause.
02:27Pourquoi ?
02:28Eh bien, si vous voulez, nous sommes dans un processus où la légitimité de celui
02:32ou de celle qui sera élu est en cause.
02:34D'abord, c'est ce qu'a dit Marine Le Pen dans son interview sur TF1 lundi.
02:38Elle a dit « Celui qui sera élu président, quelle sera sa légitimité si je suis empêché
02:45de me présenter ? »
02:46Donc elle a mis une mèche, elle a allumé une mèche là-dessus.
02:50Si Le Pen est candidate, finalement, et battue, elle dira que c'est à cause de la condamnation
02:57qu'elle a subie.
02:58Si Le Pen ne peut pas être candidate, elle dira que l'élection est volée.
03:02Et si Le Pen est élu alors qu'elle a été condamnée à 4 ans de prison, dont 2 ans
03:08fermes pour un président élu, c'est un achèvement démocratique que nous constaterons en mai
03:142027.
03:15Donc, la légitimité du processus électoral est en cause et ça, c'est sans précédent
03:20et d'une gravité extrême.
03:22Brice Tinturier, Marine Le Pen, condamnée inéligible pour l'instant, avez-vous été
03:26surpris et stupéfaits comme Jérôme Jaffray ?
03:29Oui, bien sûr, parce qu'on pouvait suivre le procès, on voyait bien qu'il allait déboucher
03:35très probablement sur le verdict qui a été rendu.
03:37Mais ce qui me paraît tout à fait nouveau par rapport, par exemple, à un précédent
03:42président comme celui de Dominique Strauss-Kahn quand il avait été empêché, c'est que
03:46Dominique Strauss-Kahn n'avait pas été candidat déjà trois fois.
03:49Là, il y avait une espèce d'enracinement de Marine Le Pen, une montée en puissance
03:54régulière du RN et l'actualité judiciaire percute cette dimension.
03:59Donc ça, c'est le premier point.
04:00Le deuxième point, c'est que ce qui me surprend le plus, ce n'est pas la réaction de Marine
04:04Le Pen ou de ses supporters du RN, l'idée de la victimisation, l'idée qu'il y aurait
04:11tout à coup un système qui chercherait à l'empêcher, c'est un air déjà connu.
04:16C'est plutôt ce qui se passe du côté des autres responsables politiques.
04:19Et ça, c'est beaucoup plus nouveau.
04:21On avait, jusqu'à une date récente, quand même une condamnation très claire de tout
04:26ce qui était atteint à la séparation des pouvoirs et ceux qui critiquaient la justice
04:31étaient justement critiqués par le reste des responsables politiques.
04:34Et là, on en a vu, et non des moindres, qui ont questionné, mis en cause, effectivement,
04:40la légitimité des décisions qui ont été prises.
04:43Il n'est pas sain que dans une démocratie, une élue soit interdite de se présenter
04:47à une élection, a dit Laurent Wauquiez.
04:49François Bayrou s'est dit troublé et veut faire évoluer la loi sur l'exécution provisoire.
04:54Jean-Luc Mélenchon a estimé que la décision de destituer un élu devrait revenir au peuple
04:59et donc pas à la justice.
05:00C'est vrai que de gauche à droite, en passant par le sommet de l'État, il y a une petite
05:05musique depuis 48 heures qui laisse entendre une forme de défiance, comme si le problème
05:10était la décision de justice et pas tant le fond du dossier.
05:15Et malgré tout, on peut se dire que ce qui constitue la démocratie, c'est aussi un
05:20système de contre-pouvoir.
05:21C'est un bloc qui nécessite qu'il y ait séparation entre ses pouvoirs et entre la
05:27justice et le pouvoir politique.
05:29Et on voit bien là que des formations, et pas seulement le Rassemblement National, ou
05:33que des responsables politiques, commencent à critiquer la légitimité du judiciaire.
05:38C'est ça qui me semble être le plus nouveau et qui rejoint ce que disait Jérôme Jaffré
05:41à l'instant.
05:42C'est-à-dire qu'on a un processus pour 2027 qui commence à être entaché d'illégitimité.
05:47Oui, ce qui est grave aussi, c'est quand même le glissement du Rassemblement National.
05:51On ne peut pas seulement dire que ce qui pose problème, c'est l'attitude de ceux qui ne
05:56sont pas du Rassemblement National.
05:58Critiquer une décision de justice, on a parfaitement le droit de le faire.
06:02Et donc, il n'y a pas de surprise, comme l'a dit Brice, effectivement, sur ce plan.
06:07Il faut en revanche passer à « c'est le système, c'est la démocratie qui est exécutée ».
06:13Alors que, précisément, la justice est un élément fondamental de la démocratie.
06:18Et que l'appel est légitime en revanche.
06:21Alors l'accusation de la justice fait de la politique, on l'attendait bien sûr.
06:25Mais je trouve, d'une certaine façon, que la justice vient de faire de la politique.
06:30C'est en mettant l'appel en audience de toute urgence.
06:34C'est-à-dire qu'il y a quand même bien le signe d'un problème, normalement.
06:39Un appel, c'est environ deux ans.
06:41Et d'ailleurs, le modem où le parquet a fait appel, où il y aura un nouveau procès,
06:45il n'y a toujours pas d'audience fixée.
06:47Mais là, il y a urgence.
06:48On met début 2026 le procès d'appel, et le délibéré à l'été 2026.
06:55Donc du côté de la justice, on voit bien qu'il y a un problème, et d'une certaine
06:59façon, la justice laisse entendre qu'elle voudrait être bien sûre de sa décision.
07:04Ce qui, soit dit en passant, pose le problème du système de défense du Rassemblement National,
07:09qui ne peut pas continuer à dire « il n'y a aucun problème circulé, il n'y a rien
07:12à voir ». La surprise aussi, c'est le silence d'Emmanuel Macron.
07:16À partir du moment où c'est tout le système judiciaire qui est mis en cause, qui préside
07:20le Conseil supérieur de la magistrature ? Qui est garant de l'indépendance de la justice ?
07:25C'est Emmanuel Macron.
07:26Comment se fait-il qu'il n'ait pas encore pris la parole pour indiquer que la justice
07:31est légitime dans les décisions qu'elle prend, à condition qu'elle respecte les
07:36lois votées, et dans les lois votées, il y a bien l'exécution provisoire ?
07:39Le fait que la Cour d'appel se prononce avant l'élection présidentielle permettra
07:44au moins de purger cette question de l'empêchement qui ne serait pas justifié ou légitime de
07:51Marine Le Pen.
07:52Mais ce que je crois, si on revient aux Français, très important aussi, c'est que les Français
07:56ne sont pas si choqués que cela.
07:58Les premières enquêtes ont déjà été publiées par la décision de justice.
08:02Et pourquoi ? Parce qu'on n'empêche pas le Rassemblement national d'avoir une candidature
08:07à l'élection présidentielle.
08:08Pour les Français, Jordan Bardella, c'est une personnalité connue qui a mené la liste
08:13RN aux européennes avec succès.
08:15Donc le procès aussi, consistant à dire « on empêche, on capte, on vole, on interdit une
08:21candidature RN » est un faux procès de soin de l'union.
08:24La petite musique sur le système qui empêcherait la favorite des sondages de se présenter,
08:31est-ce que dans 2, 3, 4 jours, ça peut commencer à percuter l'opinion et à marcher dans
08:38l'opinion ?
08:39On verra.
08:40Je n'en suis pas si sûr.
08:41Je crois qu'il y a là quelque chose quand même que les Français ont intégré.
08:43Il va y avoir une stratégie, il y a déjà une stratégie de victimisation du Rassemblement
08:47national.
08:48Mais il n'est pas certain que cette stratégie va franchement s'étendre auprès de l'ensemble
08:53des Français.
08:54Elle nous montre en revanche que la notabilisation du RN n'est pas si achevée que ça.
08:59Puisque très vite, on en est revenu aux fondamentaux du RN, la lutte anti-système.
09:04C'est-à-dire à la Trumpisation ?
09:06Mais c'est une forme de Trumpisation de la vie politique.
09:08Et à commencer évidemment par…
09:10Alors on a Sylvain au téléphone sur ce sujet.
09:13Bonjour et bienvenue.
09:14Oui bonjour, merci de prendre ma question.
09:17Voilà, effectivement, je voulais interpeller vos invités sur… de voir s'il n'y en
09:22avait pas tous les ingrédients clairs et nets qui marquent la Trumpisation de la société
09:27française avec une population, une partie des médias qui soutiennent Marine Le Pen
09:32en omettant d'évoquer les causes de sa condamnation.
09:36Voilà, je voulais avoir l'avis de vos invités.
09:39Merci beaucoup Sylvain.
09:40Jérôme Jaffray sur la Trumpisation peut-être en marche de la vie politique française.
09:47C'est effectivement une des grandes questions.
09:48Le Rassemblement national, évidemment, il laisse tomber sa dédiabolisation pour la
09:53mise en cause du système des institutions et maintenir l'hypothèse de la candidature
09:59Marine Le Pen quand même.
10:00C'est tout son jeu.
10:01Marine Le Pen, dans le Parisien ce matin, annonce d'ailleurs une question prioritaire
10:05de constitutionnalité qui sera déposée éventuellement juste après le procès en
10:08appel.
10:09Elle ne peut pas l'être avant pour savoir si la liberté de l'électeur est entravée.
10:13Trumpisation, alors d'abord dans les soutiens que reçoit Marine Le Pen.
10:18Je dois dire qu'on est un peu ahuri, mais que les masques tombent.
10:22C'est-à-dire que Marine Le Pen devient à ce moment-là la candidate de Poutine, de
10:27Trump et de Musk en vue de la présidentielle de 2027.
10:31Ça fait des soutiens un peu encombrants.
10:34Mais la logique de ces soutiens, c'est d'une part qu'aucun d'eux, et j'ajoute Bolsonaro,
10:40auteur d'un coup de tentative de coup d'État au Brésil, excusez-du-peu.
10:43On est donc dans une situation où ces soutiens, d'une part, ne respectent pas le jeu démocratique
10:48normal de séparation des pouvoirs et de légitimité des institutions dont parlait
10:52Brice Dinturier.
10:53Et en outre, dans cette affaire, c'est la destruction de l'Union Européenne qui est
10:58l'objectif fondamental de ces différentes parties.
11:01Et une candidate anti-Union Européenne, élue en France comme le soutien à l'AFD, le parti
11:09d'extrême-droite en Allemagne, s'inscrit dans une logique.
11:13Mais nous avons une situation, si vous voulez, dans ces affaires, où, en définitive, pour
11:19Marine Le Pen, annoncer qu'elle va faire appel devant la Cour de justice de l'Union
11:26Européenne, là, je dois dire que c'est le sommet absolu de l'anti-européisme militant.
11:31Ça aide le RN ou ça le pénalise d'être soutenu par Musk, Poutine et consorts ?
11:39Non, je pense que ça a une base qui, évidemment, est solidaire et qui est resserrée, qui,
11:44face à ce qu'il considère être un environnement extérieur hostile, se resserre autour de
11:49Marine Le Pen.
11:50Mais ça n'aide pas à élargir.
11:52Et tout l'enjeu du RN, c'est quand même d'élargir toute la stratégie de Marine
11:56Le Pen qui était une bonne stratégie de dédiabolisation, de notabilisation.
12:01Elle permettait progressivement de capter des nouveaux segments de l'électorat, les
12:06plus âgés, une partie de la droite traditionnelle, etc.
12:08Et je crois que c'est ça qui vole en éclats, parce qu'on revient à quelque chose qui
12:13est véritablement le Rassemblement National, qui s'oppose au système dans ce qu'il
12:18a de plus caricatural dans ses expressions, et avec des soutiens, comme Jérôme Jaffray
12:23l'a rappelé, qui sont des soutiens en France extrêmement répulsifs.
12:27Poutine, Orban, Elon Musk, Trump, mais pardonnez-moi, si on se mettait à leur place, c'est-à-dire
12:35après le coup de tonnerre de cette décision de justice, c'est vrai qu'ils ont deux
12:38choix aujourd'hui.
12:39Et c'est ce qu'essayait d'exprimer aussi Sébastien Chenieux au micro-débat de Sonia
12:42Duvillers.
12:43C'est-à-dire qu'en gros, ils ont deux stratégies.
12:44Soit ils continuent dans la dédiabolisation et la notabilisation, ils ne tapent pas trop
12:47sur la justice, sur le système, un peu mais pas trop, au cas où, à l'été prochain,
12:54elle serait autorisée à se présenter, elle puisse élargir son socle, comme vous dites
12:58Brice Tinturier.
12:59Soit alors, elle peut se dire que ce qui a marché aux Etats-Unis, ce qui a marché
13:04au Brésil, ça peut peut-être marcher en France.
13:06Et elle y va fort dans la trumpisation, elle peut hésiter quand même entre ces deux stratégies
13:12politiques.
13:13Et surtout, ça peut être deux stratégies successives, c'est ce qu'il faut comprendre.
13:16L'urgence pour le rassemblement sénial, c'est de tenir son électorat.
13:20Ce n'est pas d'élargir aujourd'hui, c'est de faire en sorte que ces soutiens, les 35%
13:25d'intentions de vote qu'il y a dans les sondages de présidentiel, c'est un trésor
13:29incroyable pour l'ORN qui n'a jamais dépassé 23% dans une présidentielle.
13:33Il faut tenir.
13:34Donc, peu importe que la majorité des Français trouvent que la décision est juste, il faut
13:39que ceux qui sont prêts à voter Le Pen considèrent que c'est une décision injuste, inacceptable.
13:44Mais deuxième temps, et donc on a par exemple le meeting qui aura lieu dimanche et qui rappelle
13:51irrésistiblement le meeting Fillon du Trocadéro, quand vous êtes au désespoir, vous réunissez.
13:57Alors là, c'est pas compliqué.
13:58Vous n'avez pas besoin d'avoir 100 000 personnes.
14:01Vous prenez une place pas trop grande, vous avez 3000 personnes, elles donnent l'impression
14:06d'être bondées et vous comptez sur les chaînes d'info pour en faire un événement
14:10massif qui donne le sentiment que le pays tout entier est dans la révolte.
14:15Le deuxième temps, c'est le procès en appel.
14:20Et là, vous pouvez avoir une toute autre attitude vis-à-vis de la justice.
14:24Exemple de dire, nous avions une interprétation qui est que les collaborateurs de nos députés
14:30européens faisaient de la politique.
14:32Manifestement, ce n'est pas celle que la justice retient.
14:36Nous reconnaissons donc que nous nous sommes trompés sur cette interprétation et sommes
14:40prêts à rembourser.
14:41Et avons bien sûr changé complètement notre façon de faire, ce qui à ce moment-là peut
14:46conduire à une peine, la peine sera confirmée puisque la faute est établie, mais elle sera
14:51peut-être un peu moins grande et l'exécution provisoire pourrait être écartée puisqu'il
14:55n'y aurait plus de risque de récidive.
14:57Donc, nous avons deux temps, d'abord insulter, tenir, puis ensuite négocier et évoluer.
15:04Et on voit Brice Ceinturier sourire, pour quelle raison ?
15:07Parce que je ne crois pas qu'on puisse faire un tel tête-à-queue dans un laps de temps
15:12aussi rapide et quand vous avez des médias, des déclarations qui ensuite sont rappelées
15:18et auxquelles les responsables politiques sont confrontés.
15:21Regardez ce qu'on a aujourd'hui.
15:22On rappelle, on ressort des interventions de Marine Le Pen qui disaient qu'il fallait
15:28absolument avoir une inéligibilité à vie pour ceux qui étaient condamnés pour du
15:32détournement public.
15:33C'est terrible pour elle.
15:35Donc la stratégie, je vois bien en deux temps que pointe Jérôme Jaffray, me paraît moi
15:41extraordinairement difficile à mettre en œuvre pour être crédible.
15:44Et je trouve que le choix est difficile, mais que c'est justement effectivement aujourd'hui
15:48qu'ils auraient intérêt à faire un choix clair, qu'il y a un besoin de clarté.
15:52Le socle il est là, le socle il ne va pas partir, on le voit dans toutes les enquêtes.
15:57Justement, et juste c'est la dernière question avant de parler de votre étude, parce qu'à
16:00l'origine vous avez invité pour parler de cette étude-événement, cher Brice Ceinturier,
16:04quelles conséquences pour 2027 sur les autres partis ? Est-ce que le socle peut partir ? Est-ce
16:09que c'est une bonne nouvelle pour LR par exemple cette décision d'hier ? Est-ce qu'il peut
16:12y avoir un impact sur le camp central, sur la gauche, sur Jean-Luc Mélenchon ? Rapidement.
16:19Théoriquement, tout est bousculé, tout est chamboulé.
16:22Et c'est pour ça que le Rassemblement National maintient la candidature Le Pen.
16:26Il maintient totalement la candidature Le Pen, Le Pen est toujours candidate, on ne cherche
16:29pas de plan B, c'est pour bloquer tout le reste du jeu politique.
16:32Parce que vous avez raison, les Républicains, si on passe de Le Pen à Bardella, les Républicains
16:37peuvent considérer qu'ils ont une chance réelle de récupérer une partie de l'électeur
16:41à partie et qu'à ce moment-là, ils peuvent rejouer un rôle séparé des macronistes.
16:46Mélenchon, il s'apprêtait à faire, eux ou nous, affrontement contre Marine Le Pen.
16:50S'il n'y a plus de Marine Le Pen, le discours Mélenchon se trouve pris à contre-pied.
16:54Donc, l'ERN là aussi bloque les choses pour essayer d'abord protéger Bardella le temps
17:00nécessaire, essayer de maintenir Marine Le Pen à flot et bloquer les concurrents.
17:05Voilà la situation.
17:06Bristain Thurier, un mot.
17:07Pour les LR, c'est quand même très compliqué parce que Bardella mort davantage que Marine
17:12Le Pen sur les sympathisants LR.
17:14Donc si demain, on avait non plus Marine Le Pen mais Jordan Bardella comme candidat,
17:18ça ne libérerait pas pour autant et forcément un espace important pour les LR.
17:22Pour, en revanche, Mélenchon, effectivement, tout ce sur quoi il a construit son argumentaire
17:27s'effondrerait.
17:28Alors, venons-en à la parution de la troisième vague de votre baromètre du lien social chez
17:34Ipsos, réalisé pour le groupe Ebra, en partenariat avec Saisie, école d'ingénieurs.
17:39On dit souvent que le lien social est abîmé en France, avec ce concept d'archipélisation
17:46du pays de France plus fracturé de jamais.
17:48Eh bien, ce n'est pas ce que vous observez, Bristain Thurier, dans votre étude, ou en
17:54tout cas, pas au niveau local.
17:55Non, et c'est ce que je dis, effectivement, depuis longtemps.
17:58Il y a une France fracturée, on la mesure d'ailleurs à travers notre autre baromètre,
18:02des fractures françaises, mais la France ne peut pas se réduire qu'à cela.
18:06Il y a des choses qui unissent nos concitoyens.
18:08Il y a d'abord cette idée, partagée par 67% des Français, c'est ce qu'on a dans
18:13cette enquête, que le lien social au plan local est bon.
18:16Ça veut dire que dans ce qu'ils expérimentent, l'idée majeure, ce n'est pas du tout la
18:21dislocation du lien social, c'est plutôt qu'il reste bon.
18:24En revanche, quand ils voient ce qu'il se passe au niveau national, quand ils pensent
18:29à ce qu'il se passe en France, là ils nous disent que ce lien social est mauvais
18:32à 71%.
18:33Donc la distorsion est maximale.
18:35Mais c'est parce que ce qui disloque le lien social à leurs yeux, c'est d'abord la violence,
18:41c'est aussi le racisme, l'antisémitisme, les inégalités et qu'il y a des éléments
18:45qui leur donnent ce sentiment.
18:46Mais il faut bien observer ce qu'ils expérimentent et ce qu'ils vivent au quotidien et ce qu'ils
18:51mesurent au plan national.
18:52C'est une enquête plutôt optimiste, alors qu'on enchaîne les enquêtes qui sont plutôt
18:57déprimantes sur le moral des Français.
19:00C'est une enquête qui montre qu'il y a quand même des problèmes dans ce pays, bien
19:03évidemment.
19:04Mais qui a l'intérêt, je crois, de souligner qu'il y a des points d'attachement qui sont
19:08forts entre les Français.
19:09Et notamment le sport.
19:11Alors, dans ce qu'ils perçoivent comme rassemblant les concitoyens, il y a le sport, il y a la
19:16gastronomie, il y a les services publics.
19:18Que vous soyez de droite ou de gauche avec des différences d'intensité, certes, mais
19:22il y a un attachement puissant de majorité de Français.
19:26Il n'y a pas en ce sens, de mon point de vue, une archipélisation.
19:29Il n'y a pas des Français qui seraient dans des petits îlots différenciés, sans
19:33point commun.
19:34Il y a des points communs, ce sont peut-être des points communs d'inquiétude d'ailleurs,
19:38sur l'avenir du système de protection sociale.
19:40Mais il y a beaucoup de choses qui continuent malgré tout à réunir les Français autour
19:45de valeurs communes, la liberté, la démocratie.
19:48Alors ensuite, on peut s'affronter sur le contenu qu'on met derrière ces termes.
19:51La liberté, c'est la valeur préférée des Français, devant l'égalité et la fraternité.
19:54La solidarité continue à jouer un rôle majeur, elle est perçue comme importante
19:58et comme pouvant rassembler les Français.
20:01Il y a, encore une fois, des professions aussi qui sont perçues comme œuvrants au rassemblement
20:06des Français.
20:07Et je crois que ces points d'attachement, on a tendance à trop les négliger par rapport
20:12à tout ce qui, objectivement, fracture aussi cette société.
20:14On a Brice Tinturier et son enquête plutôt optimiste, qui donne un petit peu de baume
20:19au cœur.
20:20Oui, il y a Jérôme Fourquet et son archipel français.
20:25Qu'en pensez-vous, Jérôme Jaffer ?
20:28Je prendrai une troisième voix, si vous m'y autorisez.
20:31D'abord, l'enquête Ipso-Sési-Ecole d'ingénieurs est très intéressante.
20:36Ce qui me surprend, je n'en ferai pas une lecture aussi optimiste que celle de Brice
20:41Tinturier.
20:42Parce que nous sommes dans une période de très grave crise internationale.
20:45Nous sommes dans une période où le Président de la République a fait une intervention
20:49il y a très peu de temps pour parler de menaces existentielles sur le pays, pour
20:54faire appel au patriotisme des Français.
20:56Et qu'est-ce que nous avons à la question ? Je vois, j'ai le sondage sous les yeux,
21:02quels sont les éléments qui, selon vous, rassemblent plus aujourd'hui les Français.
21:05Et qu'est-ce que je vois ? Le sport et la gastronomie.
21:09C'est-à-dire du pain et des jeux.
21:12Panem et de circinces, apprenions-nous quand nous étions jeunes.
21:17Et excusez-moi, mais ce que je vois par exemple, c'est que le patriotisme, l'amour du pays
21:22auquel le Président de la République a fait appel en demandant aux Français de se mobiliser
21:26dans ce sens.
21:27Huitième ou neuvième position, 13% seulement de citations.
21:32L'histoire de France, 8%.
21:34La laïcité, 7%.
21:36La volonté de se projeter ensemble vers l'avenir, 5%.
21:40Donc, je ne suis pas aussi optimiste et enthousiaste.
21:44NICOLAS ROCHEFORT-CHAMPIGNON – Aristothe Turier.
21:46D'abord, je ne suis pas optimiste sur l'état du pays.
21:49J'essaye de dire…
21:50NICOLAS ROCHEFORT-CHAMPIGNON – Vous êtes d'accord avec ce que je dis.
21:52NICOLAS ROCHEFORT-CHAMPIGNON – Non, non, ça va y venir.
21:54J'essaye de dire qu'il y a deux versants et qu'il ne faut pas réduire simplement
21:57la réalité de ce pays uniquement aux fractures françaises qui existent.
22:01J'ai bâti ce baromètre, encore une fois, « Fractures françaises », il y a 13 ans.
22:05Donc, il y a des fractures.
22:07Mais il n'y a pas que cela.
22:08C'est déjà le premier point.
22:10Et bien évidemment que l'environnement international constitue une donne majeure
22:14et inquiète nos concitoyens.
22:15Maintenant, moi, je ne me gausserai pas de ces questions sur le sport ou la gastronomie.
22:20NICOLAS ROCHEFORT-CHAMPIGNON – Ce ne sont pas les questions, ce sont les réponses qui
22:22manquent.
22:23NICOLAS ROCHEFORT-CHAMPIGNON – Ce n'est pas du pain et des jeux.
22:24Ce n'est pas du pain et des jeux.
22:26Parce qu'à travers le sport, qu'est-ce qu'ils nous disent ?
22:28Ils nous disent que ce sont des valeurs, et des valeurs éminentes, qui sont mises en
22:32avant et qui peuvent nous rassembler.
22:33De mérite, de performance, de pureté.
22:37Et la gastronomie, c'est aussi un art de vivre à la française, et c'est aussi ce
22:41qui nous unit.
22:42Et vous pourrez en débattre autour d'une bonne table.

Recommandations