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00:00Il est 8h13, les procès pour violences intra-familiales se multiplient ces derniers mois dans le Nord-Franche-Comté.
00:05Dans certains tribunaux, comme à Vesoul par exemple, chaque mois, une journée entière est consacrée à ces affaires florales.
00:11Et on vous donne la parole ce matin, comme tous les jours sur notre antenne.
00:14Venez nous dire si vous pensez qu'il faudrait punir plus sévèrement les auteurs de ces violences dans les familles.
00:20On vous attend au standard 0384 22 82 82.
00:25La procureure de la République de Belfort est avec nous ce matin.
00:28Bonjour Jessica Van Der Scher.
00:29A Belfort, est-ce que vous constatez une augmentation ou pas de ce type d'affaires dans votre juridiction ?
00:34Au cours des dernières années, nous avons eu comme partout en France une augmentation très importante des dossiers et des procédures de violences conjugales.
00:41Ce chiffre par contre, sur l'année 2024, est stable par rapport à l'année 2023.
00:47Et nous attendons de voir si ce sera la même tendance sur 2025.
00:50L'important de voir si ce chiffre se stabilise, c'est qu'au cours des dernières années,
00:56nous avons beaucoup de procédures qui n'étaient jamais dénoncées.
00:59Et aujourd'hui, heureusement, les gens n'hésitent plus à porter plainte.
01:02Et pareil, les voisins, les amis qui constatent des faits de violences conjugales,
01:06qui entendent crier dans un appartement, appellent systématiquement les policiers ou les gendarmes.
01:10D'où les chiffres qu'on avait, c'était 326 signalements à la police, 53 agresseurs jugés.
01:15Pourquoi si peu ?
01:17C'est-à-dire ?
01:19De jugements par rapport aux signalements.
01:22Oui, déjà parce qu'un signalement n'est pas forcément égal à des faits qui sont caractérisés.
01:28Pour qu'un dossier soit jugé devant le tribunal en matière de violences conjugales, il nous faut des preuves.
01:33La difficulté, c'est que souvent, les violences se passent dans un huis clos.
01:37Et nous avons aussi beaucoup de victimes, malheureusement, qui refusent de venir déposer plainte.
01:42Nous sommes intervenues parce que les voisins nous ont appelées, par exemple,
01:45et la victime refuse de venir au commissariat.
01:47Ou elle refuse d'aller voir un médecin.
01:49Sans certificat médical, sans audition de la victime, c'est compliqué de poursuivre.
01:53Est-ce qu'il y a beaucoup de récidives dans ce genre d'affaires ?
01:57Nous avons un certain nombre de dossiers où nous avons des récidives.
02:01Nous avons aussi de nombreux dossiers où ce n'est pas le cas.
02:04Il faut bien comprendre aussi que dans ce domaine des violences conjugales, nous avons tout un tas de situations.
02:09Et à Belfort, comme dans tous les tribunaux de Franche-Comté,
02:11nous avons déployé tout un arsenal répressif pour s'adapter justement à chaque situation.
02:16Les personnes qui sont primo-délinquantes, c'est-à-dire qui n'ont jamais été condamnées
02:20et sur lesquelles on est sur des faits mineurs et sur un seul épisode de violence, par exemple,
02:25elles sont convoquées devant un délégué du procureur pour faire un stage.
02:29À Belfort, c'est un stage de communication conjugale d'une journée
02:32pour apprendre à mieux communiquer au sein du couple.
02:34Et ce sont lesquels les plus fréquents ou pas nécessairement ?
02:36Alors, c'est un tiers des procédures.
02:40Et à l'autre bout du spectre, nous avons effectivement des gens qui sont déjà connus
02:43pour des faits de violence ou d'autres infractions et qui, là, parfois, peuvent être en récidive.
02:47Et pour cela, c'est la comparution immédiate et c'est la majeure partie du temps de l'incarcération.
02:52Que pensez-vous de l'initiative du tribunal de Vezoul,
02:55une journée et demie par mois consacrée à ces violences intrafamiliales ?
02:59Nous avons mis en place exactement la même chose à Belfort
03:01et je crois dans d'autres tribunaux français aussi.
03:04Cette audience spécialisée a l'avantage, en fait, de regrouper ces dossiers de violence conjugale.
03:10Ces dossiers sont moins nombreux de façon à ce qu'on ait plus de temps pour les juger.
03:14À Belfort, nous passons aussi à un petit film qui a été fait par le ministère de la Justice
03:18en début d'audience pour montrer surtout l'impact des violences sur les enfants.
03:23Que les enfants soient victimes eux-mêmes de violences ou surtout qu'ils soient témoins de ces violences.
03:27Et dans la lutte contre les violences conjugales, c'est eux aussi, quand ils sont là,
03:31que l'on cherche à protéger parce que les dégâts de voir ses parents se détruire,
03:36s'insulter, se violenter sont énormes.
03:39Nos auditeurs ont la parole tous les jours, notamment sur la page Facebook.
03:42Ils ont répondu largement oui à notre question, faut-il sanctionner plus sévèrement ?
03:47Et Nurgule nous appelle, auditrice, ce matin. Bonjour !
03:50Bonjour, bonjour.
03:52D'où est-ce que vous nous appelez ce matin ?
03:54Donc moi j'habite à Grand-Charmont. Je suis habitante de Grand-Charmont.
03:58Je crois que vous avez vous-même subi des violences intrafamiliales pendant plusieurs années.
04:02Est-ce que vous pensez qu'il faudrait donc condamner plus sévèrement les auteurs ?
04:06Oui, parce que lorsque nous portons plainte, justement, c'est là que la guerre elle commence.
04:12Et c'est très très difficile en fait, en tant que victime, de se faire entendre.
04:17C'est-à-dire que c'est difficile d'avoir confiance, de se confier, c'est ça que vous nous dites ?
04:23De se confier, non, de se faire entendre plus.
04:26De se faire entendre, d'accord.
04:28On ne voit pas la différence, avant de porter plainte, c'est un isolement, c'est une autre guerre.
04:34Et après, porter plainte, justement, c'est une autre guerre, mais cette fois-ci, c'est avec une procédure judiciaire.
04:41Mais il n'y a pas trop de différence. Je n'ai pas vu trop de différence.
04:46Merci pour votre témoignage, Johan Urgul.
04:48Ce matin, je me retourne vers la procureure de la République de Belfort.
04:51Notre auditrice parle de guerre.
04:53Ça vous fait réagir, ça, ce matin, j'imagine ?
04:54Alors, je pense qu'effectivement, on a certains couples où on a effectivement une guerre ouverte.
04:58On en a parfois qui se battent physiquement.
05:02On en a qui se battent aussi à coup de procédure, au pénal, devant le juge d'affaires familiales.
05:06Et parfois, certains couples sont suivis aussi par le juge des enfants.
05:09Je ne sais pas à quel moment votre auditrice a été victime de violences conjugales.
05:14Ce que je peux vous dire, c'est qu'aujourd'hui, une femme qui vient déposer plainte pour violences conjugales,
05:19que ce soit au commissariat ou à la gendarmerie, elle est normalement prise en charge immédiatement.
05:24On a mis aussi en place des possibilités de transport vers l'hôpital pour favoriser et faciliter l'examen médical de la victime.
05:30Parce qu'on a besoin de ce certificat aussi pour constater les blessures.
05:34Et lorsque nous avons les témoignages et les éléments qui caractérisent les violences dans la procédure,
05:40systématiquement, nous faisons ce qu'on appelle un déferment.
05:44C'est-à-dire que la personne qui est mise en cause et qui est en garde à vue vient devant le procureur de la République.
05:49Et nous mettons en place un contrôle judiciaire avec une interdiction de contact,
05:53une interdiction de paraître au domicile familial lorsqu'ils habitent ensemble,
05:57au domicile de la victime lorsqu'ils habitent séparément.
06:00Et nous avons aussi des logements prévus avec l'armée du salut pour extraire l'auteur qui n'aurait pas de famille ou autre où habiter,
06:07et qui est logique à l'armée du salut avec un suivi psychologique.
06:11Et toute personne qui enfreindrait ce contrôle judiciaire en envoyant ne serait-ce qu'un SMS,
06:16un appel au conjoint qui l'a interdiction de contact, il est à nouveau vu par le procureur de la République et placé en détention.
06:23Vous prenez une justice résolutive qui s'intéresse donc aux raisons de l'infraction, globalement, les causes.
06:30Comment ça s'applique aux violences intrafamiliales ?
06:33Alors nous le mettons en place également en domaine de violences intrafamiliales,
06:37notamment sur les violences conjugales, puisque dans les violences intrafamiliales,
06:40il y a à la fois les violences à l'encontre du conjoint et les violences à l'encontre des enfants du couple.
06:44Nous avons constaté ce que je vous disais en introduction, dans un tiers des dossiers,
06:48nous sommes sur des gens qui sont des primo-délinquants, qui étaient totalement inconnus de la justice.
06:52Et on s'est aperçu en traitant ces dossiers que le problème, c'était qu'ils étaient en situation de séparation.
06:57Soit la séparation était imminente, soit elle avait commencé,
07:00et on se retrouve effectivement parfois dans la guerre que vous déclarez,
07:03entre les avocats, le partage, les difficultés financières qui font que parfois on ne peut pas quitter le logement immédiatement.
07:10Et pour ces gens-là, nous avons mis en place un stage qui est dit de communication conjugale,
07:14dans lequel à la fois nous avons une première demi-journée pour travailler comment expliquer son désaccord,
07:20sans en venir aux insultes et à la violence physique.
07:23Et dans une deuxième partie, nous brossons un tableau des conséquences sur les enfants.
07:28Et surtout, nous balayons tous les dispositifs sur le territoire de Belfort qui peuvent venir aider ces gens,
07:34soit à maintenir l'union dans le couple, sans violence, soit à se séparer si malheureusement ils ne peuvent pas rester ensemble.
07:41Et votre rôle c'est également de faire de la pédagogie, comme vous le faites ce matin sur notre antenne.
07:45Merci beaucoup Jessica Van Der Scher, procureure de la République de Belfort.
07:48Bonne journée.
07:49Merci.

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