Conversion au bio, agrivoltaïsme, réduction des produits phytosanitaires… Comment réussir une transition environnementale agricole tout en ayant un faible impact sur le business ? C’est l’un des principaux sujets du Salon de l’Agriculture. Relever ces défis peut contribuer à la « fierté française », thème de cette 61e édition.
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00:06L'invité de Smart Impact, c'est Valérie Leroy, bonjour, la directrice du Salon international de l'agriculture, 61e édition, qui se tient du 22 février au 2 mars.
00:17Comme toujours, les chiffres sont impressionnants. Combien de visiteurs, d'exposants, de politiques en visite ?
00:26Alors c'est vrai que sur le Salon de l'agriculture, qui est quand même un événement hors normes, tout est hors normes, donc, pour les visiteurs,
00:33imaginez qu'on reçoit 1% de la population française en moyenne chaque année, ce qui fait à peu près entre 600 et 620 000 visiteurs, donc c'est quand même beaucoup.
00:44Plus de 1 000 exposants, avec des producteurs et des éleveurs également présents, 4 000 animaux.
00:51Et je termine sur les visites politiques. On va dire jusqu'au Covid, qui a été un marqueur, on est à une moyenne d'une cinquantaine, et là, depuis, on est passé plutôt à 80, 85 visites chaque année.
01:04Oui, et on en reparlera évidemment ensemble. Ça représente 16 hectares, 9 pavillons. Comment faire en sorte qu'un tel barnum pollue et consomme le moins possible ?
01:14C'est très compliqué, en fait, parce que... Alors là, vous avez donné les dates du Salon qui couvre 9 jours. En fait, nous, en réalité, on occupe le parc pendant 21 jours.
01:24C'est-à-dire entre... Là, il y a, en ce moment...
01:26Oui, ça bosse, là.
01:26Voilà, ça vaut dans deux jours, mais il y a déjà des équipes qui y sont depuis la semaine dernière. Donc 21 jours, avec une période de montage, avec des camions qui viennent,
01:37avec plus tard les animaux... Enfin, demain, les animaux, etc. C'est compliqué d'avoir un... Comment dire ? D'avoir un impact... Déjà de mesurer son impact et de le réduire.
01:48Pour autant, depuis 6, 7 éditions, on travaille et on crante des choses chaque année, pas tout seul, avec les exposants, à qui on demande le plus souvent possible
01:59de construire des stands réutilisables ou en matériaux réutilisés. On fait des pôles d'apport volontaire de matériel pour entretenir nos filières de recyclage.
02:13Et on travaille aussi beaucoup avec le parc, puisque nous, on loue, on est locataire du parc...
02:17Du parc des expositions de la Porte de Versailles, à Paris.
02:19Exactement. Et ce parc, qui est en travaux, en mouvements, en réfection depuis des années et pour encore 4-5 ans, a fait énormément de progrès aussi.
02:28Il y a certains halls qui sont HQE, par exemple. Ils ont mis en place un système de récupération de pluie, chaudières aux colzas, etc.
02:39Donc tout ça, c'est des choses qui sont très importantes pour nous.
02:41Et qui améliorent, évidemment, par ricochet aussi, le bilan carbone du Salon international de l'agriculture.
02:48Il y a toujours une question centrale, que ce soit un événement comme le VAUT ou un grand événement sportif.
02:55Je pense aux JO, aux Jeux olympiques et paralympiques, à Paris l'été dernier. C'est le transport.
03:00C'est-à-dire que vous nous dites que 1% de la population française, 600-650, eux, ils viennent.
03:06Donc est-ce que vous avez, vous, des leviers ?
03:08Ou est-ce que c'est un combat quasi impossible à mener pour les inciter à venir en train plutôt qu'en avion, qu'aux voitures, etc. ?
03:17Alors on ne peut pas les forcer, évidemment. Mais on peut fortement les inciter.
03:21Et donc on a une communication qui va dans le sens de préférer les mobilités douces.
03:28Voici le plan pour venir à vélo si vous êtes dans Paris. Pour venir en bus, par exemple, vous êtes 50 dans un bus, vous n'êtes pas tout seul dans une voiture, etc.
03:38Il y a un élément quand même important aussi, c'est qu'on a vu au fil des années, je dirais un peu comme dans beaucoup de villes,
03:46le nombre de voitures diminuer juste du fait que le nombre de places de parking a lui-même nettement diminué.
03:55Donc il y a eu une période où le salon de l'agriculture recevait sur les 9 jours 700 bus, par exemple.
04:03Les 700 bus, on ne peut plus les accueillir maintenant sur le parc.
04:07Donc en fait, quand ils viennent, ils vont se garer ailleurs, dans différents parkings,
04:12et les gens rejoignent le parc soit en métro, soit en tram, qui a nettement progressé aussi ces dernières années, soit à vélo d'ailleurs.
04:20Donc c'est un levier sur lequel on peut quand même agir.
04:23Quelques chiffres sur l'agriculture française. Balance commerciale excédentaire de plus de 5 milliards en 2023.
04:30La France, 6e exportateur mondial, 1er producteur européen de viande, bovine, céréales, oeufs, huîtres, graines, oléagineuses.
04:381er exportateur mondial de vins spiritueux, semences agricoles, je ne vais pas faire toute liste.
04:42Vous la voyez s'afficher. C'est vrai aussi des eaux minérales naturelles, des animaux vivants et j'en passe.
04:49Je donne ces chiffres parce que ça rejoint, ils rejoignent le thème du salon que vous avez choisi cette année, la fierté française.
04:58Vous en avez marre de l'agribashing ? C'est ce que ça veut dire quand on lit fierté française ?
05:03Alors nous, en tant qu'organisateur du salon, on est un peu la caisse de résonance même carrément de ce qui se passe dans le secteur agricole.
05:11Effectivement, ce n'est pas nous qui en avons marre, quoique, mais je le mets de côté,
05:16mais c'est le secteur agricole qui demande à avoir des occasions pour montrer ce qu'il sait faire de positif et être mis en avant.
05:24On a un ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire qui travaille sur la souveraineté alimentaire.
05:29Pendant le Covid, on en reparlait tout à l'heure, on a découvert le métier essentiel qui était celui d'agriculteur.
05:36C'est quand même des gens qui nous nourrissent. S'ils n'étaient pas là, on ne mangerait pas.
05:41Et avec une certaine qualité en France due au fait du respect de cahiers des charges, de certains attendus pour pouvoir faire les productions, etc.
05:50Donc oui, il y a un besoin de montrer qu'ils sont fiers.
05:53Et le salon de l'agriculture, depuis 61 ans, puisque c'est une édition, est l'endroit où se joue un dialogue
06:04entre ceux qui connaissent bien l'agriculture et qui la font et ceux qui la mangent ou qui la connaissent moins et qui viennent poser des questions.
06:10Donc les uns ont besoin de montrer qu'ils sont fiers de ce qu'ils font et les autres viennent les rencontrer pour découvrir ce qui fait cette fierté.
06:20Mais c'est aussi un métier qui attire moins. Il y a une baisse régulière du nombre d'exploitations.
06:26Là, on arrive avec une classe d'âge qu'il va falloir remplacer. C'est un des enjeux majeurs du secteur agricole aujourd'hui.
06:34Et ma question, elle rejoint finalement les enjeux de transition, de réduction d'impact dont on parlait.
06:42On a ce sentiment que le monde agricole, certainement que les normes sont trop nombreuses ou qu'elles sont trop complexes,
06:48mais est en train d'appuyer sur le frein dans cette ambition de transition environnementale.
06:52Comment vous, qui êtes la caisse de résonance, vous le ressentez, ça ?
06:56Alors nous, ce qu'on voit se jouer dans les thématiques qui ont cours dans le salon, c'est ce qui existe aussi dans la société, la difficulté des agriculteurs.
07:09C'est-à-dire comment aller dans le sens d'une transition agro-écologique, je dirais, au sens large ?
07:17Comment s'adapter au changement climatique tout en ayant un impact limité, je dirais, sur le business tout de suite et l'exploitation ?
07:27Parce que concrètement, quand on dit à un agriculteur qu'il va falloir irriguer autrement, qu'il va falloir arrêter tel système de phytosanitaire, etc.,
07:37ça a un impact sur son rendement.
07:39Oui, et ils sont très très nombreux à avoir très très peu de marge et à se mal payer.
07:45Absolument. Donc l'ambiguïté, enfin le paradoxe de dire qu'il faut aller vers plus de verres et en même temps, éventuellement, ça peut avoir des impacts pour certaines des productions des agriculteurs,
07:57ça existe évidemment dans le salon de l'agriculture et c'est discuté dans le salon de l'agriculture aussi, oui.
08:02Mais il y a pour la deuxième année consécutive, et ça va s'appeler à la durée, un SIAPRO, donc une partie du salon destinée aux professionnels.
08:12Il y sera beaucoup de questions d'énergie verte, de compléments de revenus, de méthanisation, etc., etc.
08:18Oui, parce qu'un des leviers, justement, pour progresser dans ce domaine-là, c'est de proposer aux agriculteurs des moyens financiers.
08:26C'est-à-dire qu'une perte de rendement peut peut-être être compensée par la fabrication d'électricité, par exemple en méthanisation ou en énergie nouvelle avec des éoliennes, etc.
08:36Donc oui, il y aura ça. Il y aura aussi de l'agrivoltaïsme, exactement. Dans SIAPRO, qui est destiné vraiment aux agriculteurs, il y a tout un cycle de conférences très intéressantes, très pratiques.
08:50On n'est pas dans des plénières ou des conférences magistrales. On est dans « je veux me convertir au bio, quelles sont les 10 questions à me poser ? »
09:00« Je veux transmettre mon exploitation, comment je fais ? Quelles sont les étapes ? » Donc c'est vraiment des choses extrêmement concrètes.
09:07Et effectivement, dedans, il y a aussi « comment je peux commencer à réduire mon impact environnemental ? » et « qui peut me renseigner ? » C'est des choses très pragmatiques.
09:18– Vous l'avez dit tout à l'heure, plus de 80 personnalités politiques attendues. J'ai l'impression que c'est un record et qu'il est un peu battu chaque année.
09:28Bon, est-ce que vous n'en avez pas ras-le-bol d'être un peu trivial ?
09:32– Non, on n'en a pas ras-le-bol. C'est aussi une source de fierté, comme le Salon, d'accueillir toutes ces personnalités politiques.
09:41Néanmoins, une fois qu'on a dit cela, le sujet, c'est de garder un équilibre entre la vocation première du Salon,
09:49qui est pour les agriculteurs de se montrer à du grand public et des professionnels, et en même temps de recevoir des personnalités politiques.
09:57C'est sûr que quand on en reçoit 20 dans la journée, par exemple, alors à part le « débordement » du service protocole qui, toute la journée, en enchaîne,
10:07ça peut nous poser des problématiques de flux, par exemple. C'est surtout en cela que…
10:11– Il faut rappeler que c'est un événement privé, le Salon international des agriculteurs.
10:16– Oui, vous faites bien de le rappeler, c'est un événement privé dans lequel tout le monde a des droits et des devoirs,
10:24y compris les personnalités politiques et leurs équipes.
10:27Donc ça, on l'a rappelé, sur le Salon lui-même, on a pour tout le monde, toutes les catégories de public,
10:32on a un code de conduite qui s'appelle la « C'est attitude » et qu'on propose à tout le monde d'adopter,
10:37c'est-à-dire on se comporte bien, si on boit un coup avec des amis, on ne boit pas trop, on respecte les animaux, etc.
10:44Et on a proposé aussi aux politiques une charte de bon déroulement en leur listant un certain nombre de choses
10:52qu'on pensait être respectables par eux pour avoir un Salon confortable pour tous.
10:59– Est-ce que le Président de la République va signer la charte ?
11:01Parce que sa visite l'an dernier, ça ne doit pas être un très bon souvenir pour vous.
11:04– Non.
11:06– Qu'est-ce que vous avez prévu pour que ça ne se reproduise pas ? Je ne dis pas que c'est facile.
11:09– Alors non, ce n'est pas un bon souvenir.
11:11On ne lui a pas demandé de signer la charte mais on l'a transmise à son cabinet.
11:15Alors qu'est-ce qu'on a prévu là ?
11:17On a prévu d'anticiper au maximum puisque l'année dernière,
11:21il y avait une dimension qui ne convient à aucun organisateur de grand événement.
11:26C'est une dimension de surprise avec une intrusion d'une manifestation.
11:31Donc là, on est en train de prévoir le maximum de choses.
11:34Je ne dis pas que tout va pouvoir être prévu mais on essaye au maximum d'anticiper
11:40et de répéter aux visiteurs.
11:43Notre campagne dans ce sens-là va s'accentuer demain et après-demain,
11:47de venir en semaine et de prendre en compte que la matinée inaugurale du samedi matin nécessite parfois,
11:57pour l'instant, je ne sais pas quoi, mais nécessite parfois des adaptations
12:01qui peuvent rendre la visite moins confortable que d'autres jours.
12:04– Si vous pouvez choisir, venez plutôt le lundi ou le mardi.
12:08– Le samedi après-midi peut-être déjà, mais effectivement, oui, c'est mieux.
12:12– C'est un bon conseil. Merci beaucoup Valérie Laurat.
12:13Bon, 61ème Salon international de l'agriculture et 2ème.
12:17S'il y a pro, on passe à notre débat,
12:19comment les start-up et les associations peuvent travailler ensemble ?