Un profil rare dans le monde de la mode et du luxe : c’est un critique cash et indépendant… Ce qui le met sur les listes de noires de certaines autant que ça lui ouvre des portes ! Au lendemain du défilé Pharrell Williams pour Vuitton, Lyas est ce matin l'invité de Mathilde Serrell. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/nouvelles-tetes/nouvelles-tetes-du-mercredi-22-janvier-2025-3904430
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00:00Les Nouvelles Têtes avec vous, Mathilde Serrell, ce matin à votre invitée à 24 ans, et un jour, on lui a prédit, il va bouffer Paris.
00:08Le critique mode Liass est dans notre studio.
00:11Bonjour Liass, Elias Medhini dans le civil, je vous accueille avec la Mother Monster, Lady Gaga bien sûr, Bande This Way.
00:35C'est elle qui a déclenché ce que vous faites et ce que vous êtes aujourd'hui.
00:38Oui, en tout cas, une passion, un goût pour la mode ou la performance à travers la mode.
00:44Je pense qu'elle a réussi à créer des personnages à travers ses vêtements et pour moi, ça n'existait pas avant.
00:51Vous venez de Rouen, vous avez grandi dans une double culture normande et algérienne et vous avez fui, dès que possible, vous avez rejoint Paris.
00:58En 2018, vous avez 17 ans et c'est le vénérable critique mode Loïc Prigent qui vous demandait un stage, qui vous dit cette phrase que Nicolas vient de citer.
01:07Tant pis, si tu l'as ou pas, le stage, tu vas bouffer Paris.
01:10Je pense qu'il a vu un truc en moi que je ne voyais pas, en tout cas, si je le voyais peut-être, parce que j'ai un égo quand même assez émotionné.
01:22La Mother Monster aussi.
01:24Oui, c'est ça, le narcissisme, en tout cas la délusion, je pense qu'il faut être délougeonné.
01:28Déloulou.
01:29Déloulou.
01:30Donc, vous vous êtes dit, oui, je vais y arriver.
01:33Alors, comment s'y prendre dans le milieu de la mode ? Vous avez rentré par la nuit.
01:37Les fêtes, d'abord ?
01:38Attends, parce que tout le monde sort dans ce milieu, je ne sais pas c'est comment, à la radio.
01:41Non, on se couche tôt.
01:42Tout de suite, c'est camomille tous les soirs, avec une dernière info sur Trump pour faire un cauchemar.
01:47Non, c'est à 15h.
01:4815h, c'est la teuf.
01:4915h, c'est bien.
01:50Nous, on rentre à 15h et on rencontre énormément de gens, en fait, et c'est bien, c'est à travers toute cette fête qu'on s'est créé des personnages de superstars la nuit.
02:02Vous y avez pris goût ?
02:05Ben ouais, j'ai trouvé un ailleurs.
02:07Et vous avez commencé à dire ce que vous pensez dans le milieu de la mode.
02:10Vous allez vous faire une renommée à la fois bonne et mauvaise parce que vous êtes
02:12très incisif et cache dans un monde assez policé, où il y a beaucoup de publics au
02:16reportage, il faut le dire, et où on est plutôt régi par une règle d'or qui s'appelle
02:19le silence.
02:20Quand on ne parle pas de ça, c'est qu'on n'a pas aimé.
02:24Ouais, moi je refuse, parce qu'en fait, avec toutes les discussions que j'ai eues avec
02:29tous ces gens dans la nuit et tout, j'ai réalisé que tout le monde avait des avis
02:33hyper forts sur la mode et hyper éduqués, tu vois, et que personne n'osait le dire.
02:39Je me suis dit, bon, alors, attends, j'ai un créneau, là, mon super star nous n'ose,
02:43je le ferai.
02:44Vous l'avez fait, vous vous êtes lancé sur les réseaux sociaux, vous êtes très
02:46suivi aujourd'hui sur TikTok, entre autres, vous avez 175 000 abonnés, 140 000 sur Insta.
02:52Bon, ça, c'est l'ère des réseaux sociaux, on va peut-être bouger, mais c'est à ce
02:55stade.
02:56Oui, c'est ça.
02:57Et donc, c'est vrai que vous avez votre langue bien pendue.
02:59Par exemple, hier, vous étiez au fameux défilé de Pharrell Williams pour Louis Vuitton
03:03qui ouvrait le bal de la Fashion Week masculine, il y avait des stars, Wemba Nyama, Omar Sy,
03:07Travis Scott, et vous, vous n'avez pas aimé, j'ai écouté la vidéo TikTok que vous avez
03:10postée dans la foulée.
03:11« If it was ironic, I would get it, but it's not.
03:16We all know that the only thing that Pharrell is bringing to Louis Vuitton is his fame.
03:20Because when people can't remember your clothes, you make them remember your face.
03:26»
03:27Voilà ce que vous dites.
03:28Donc, je résume, en gros, tout ce qu'il apporte, c'est sa redommée, en fait, à Louis
03:31Vuitton.
03:32Quand on ne peut pas se faire rappeler de ce qu'on fait, de son travail, de ce qu'on
03:36a produit, on fait pareil de ce qu'on est.
03:38Et donc, il a collé son visage, en fait, sur des sweatshirts.
03:41Oui, je trouve ça, c'est le niveau zéro du créateur, du design.
03:47Et en même temps, il n'est pas designer, donc il ne faut pas non plus s'attendre à
03:51ce qu'il...
03:52Mais vous attendiez un imprimé, vous attendiez d'être surpris par un imprimé.
03:56Il y a une veste en cuir, quand même, que vous avez sauvée dans cette histoire.
03:59Oui, mais une bonne pièce ne fait pas une bonne collection.
04:02Je pense qu'il faut toujours avoir un storytelling, avoir quelque chose à dire, un message, peut-être
04:08même.
04:09Et là, il n'y en avait aucun, à part « give me more money ».
04:12« Donnez-moi plus d'argent ».
04:13Ça marche.
04:14Ah oui, mais ça marche.
04:15Mais moi, je ne suis pas là pour juger le fait que ça marche ou pas, je suis là pour
04:18juger le fait que j'en tire quelque chose, un stimuli.
04:23Vous, ce que vous faites, surtout, c'est que vous dégagez une narration qui n'est
04:26pas celle qui va être créée par les maisons de couture, qui vont faire un communiqué
04:30de presse, qui vont dire « voilà, on s'est inspiré de ci ou de ça ».
04:32Vous créez, vous, votre narration, ce que vous avez senti, ce que vous avez vu.
04:35On va vous entendre sur une analyse d'un créateur que vous aimez.
04:38C'était pour Valentino.
04:39« It might not look like it, but it is punk.
04:42On ne dirait pas comme ça, mais c'est punk.
04:44Les couleurs, deux sacs parce qu'un c'est pas assez.
04:48Ce sont des signes d'extrême richesse.
04:51L'idée est plus démocratique qu'élitiste.
04:55Parce qu'offrir un coin de vue si précis sur le style détourne l'attention du vêtement
05:03en tant que tel pour se concentrer sur l'ensemble.
05:06Comme ça, n'importe qui peut le recréer en allant dans une putain de friperie.
05:12»
05:13Et là, vous vous expliquez, vous zoomez sur chaque pièce et vous dites « ben voilà,
05:16ça, ça, ça et ça, on peut le trouver dans une friperie ».
05:18Vous allez chercher toujours la profondeur dans l'histoire de la mode, l'analyse
05:22de la mode.
05:23C'est ça mon père est sociologue et je pense que ça veut dire tellement sur quelqu'un
05:30comment il s'habille.
05:31Et en tout cas, sur cette collection-là de Valentino, Alessandro Michele, c'était
05:36sa première collection pour Valentino.
05:38Et en fait, ce qui est bien, ce qui m'excite moi, c'est que c'est une nouvelle idée
05:44de l'opulence.
05:45En gros, les riches ne s'habillent plus comme des riches maintenant, mais lui, il
05:47dit « bah tenez, je vous donne un nouveau dressing qui était historiquement pour les
05:54riches, mais maintenant, il peut être recréé par n'importe qui en allant en friperie.
05:59»
06:00C'est excitant.
06:01Vous faites la révolution, si on peut le dire par petits coups de vidéo.
06:04Vous aimez qui ? Valentino par exemple, Alessandro Michele, Demna Vazalia, Balenciaga, Galliano,
06:15les grands…
06:16Non, les artistes !
06:17Les artistes !
06:18Il faut vous regarder les artistes.
06:19Justement, il faut dire, la mode rentre au Louvre, la grande exposition Louvre Couture,
06:23ça démarre vendredi.
06:24Et ce sera à suivre, c'est une grande première en France, il y aura même un Met Gala en
06:27mars.
06:28Bonne route à vous, Elias !
06:29Merci beaucoup !