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Le ministre des Armées Sébastien Lecornu était l’invité de #LaGrandeInterview de Sonia Mabrouk dans #LaMatinale sur CNEWS, en partenariat avec Europe 1.

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00:00Bonjour Sébastien Lecornu. Bonjour, merci pour votre invitation.
00:04Et bienvenue à la grande interview sur CNews et Europe 1.
00:06Vous êtes le ministre des Armées, de nouveau reconduit à la tête de ce ministère ô combien stratégique dans la défense de nos intérêts.
00:12Vous êtes aussi l'auteur du livre « Vers la guerre, la France face au réarmement du monde » chez Plon, nous allons en parler.
00:18Mais tout d'abord Sébastien Lecornu, l'actualité c'est la mort de Jean-Marie Le Pen.
00:22Il y a eu hier soir des manifestations de joie à Marseille, à Lyon, à Paris, place de la République,
00:27avec des tirs de feu d'artifices et des slogans antifascistes.
00:30Quoi qu'on pense du personnage de tel rassemblement ?
00:33Est-ce qu'il vous indigne, comme Bruno Retailleau qui a dit ceci,
00:36la mort d'un homme fut-il un adversaire politique ne devrait inspirer que de la retenue et de la dignité ?
00:42Le combat politique c'est pour les vivants.
00:44Et donc il faut poursuivre le combat politique avec les vivants, mais il faut respecter les morts.
00:48C'est une affaire de dignité, je crois.
00:50C'est quelque chose de même civilisationnel, et Bruno Retailleau a raison de le dire.
00:54Évidemment, Jean-Marie Le Pen a été, vous ne l'avez peut-être pas connue personnellement, un adversaire politique.
00:59Non, j'étais jeune en 2002, c'est un adversaire politique.
01:02Mais une fois de plus, je pense que dans le champ civilisationnel,
01:04en tout cas dans le rapport personnel que j'entretiens, et avec les morts, et à la mort,
01:09il y a une forme de respect qu'il faut avoir.
01:11Et les scènes de l'IS, je crois, disent quelque chose d'assez dégradant
01:16sur le rapport que les vivants doivent entretenir avec les morts.
01:18Mais une fois de plus, on a ces opinions politiques,
01:20et le combat politique continue avec les vivants.
01:23Ça me semble simple et de bon sens.
01:25Dans l'actualité, justement, ce sont les hommages et les commémorations
01:28des dix ans des attentats de Charlie Hebdo, l'Hyper Cacher et Montrouge
01:31qui occupent nos pensées, nos mémoires, dans un contexte de menaces terroristes prégnants.
01:36Une menace, Sébastien Lecornu, endogène, dont parle beaucoup le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau,
01:41mais aussi exogène, et donc une menace liée à une capacité de projection,
01:45liée à des groupes djihadistes au Sahel et au Proche et au Moyen-Orient.
01:48D'où vient, selon vous, le risque le plus important, aujourd'hui, par rapport à notre pays ?
01:53Menace exogène, par définition, souvent plus militarisée, plus durcie, davantage planifiée.
01:58Et en fait, ce qu'il faut bien comprendre, c'est qu'aujourd'hui,
02:00on a une mouvance djihadiste qui est en train de muter,
02:03et dont les canaux numériques, d'ailleurs, sont en train de la réorganiser.
02:05On a une plaque africaine sur le Sahel, avec différents groupes,
02:09d'ailleurs, tous ne sont pas liés à l'État islamique, et aussi des branches, évidemment, d'Al-Qaïda.
02:13Une plaque sur l'Afrique de l'Est, une plaque sur le Proche et le Moyen-Orient,
02:17et on y reviendra, parce que c'est tout l'enjeu aussi de ce qui se passe en Irak,
02:20mais aussi en Syrie, liée évidemment aux prisons et à la bataille assyrienne.
02:24Et de manière beaucoup plus significative, et de manière, je le crois, beaucoup plus préoccupante,
02:29des réseaux russophones, qui partent globalement de l'Iran,
02:34toute la branche du Haut Khorassan, et qui va d'ailleurs jusqu'aux Philippines.
02:38Et cette branche-là, russophone, on l'a vu avec l'attentat, d'ailleurs, même à Moscou,
02:42rappelez-vous, du Krokus City Hall, l'attentat à Téhéran, il y a maintenant de cela quasiment un an,
02:47on a une branche de l'État islamique qui est en train de se réorganiser,
02:50qui est beaucoup plus déconcentrée qu'avant.
02:52Avant, il y avait quelque chose de très central avec Daesh,
02:54lorsque notamment le califat existait en Syrie et en Irak,
02:57et désormais, on voit des cellules se réorganiser d'ici en Turquie, d'ici d'ailleurs en Iran,
03:03et qui, objectivement, sont particulièrement préoccupantes.
03:06L'activité des services, des GSI, Gérald Darmanin a été ministre de l'Intérieur à l'époque,
03:10pendant les Jeux Olympiques.
03:11Des GSE nous ont permis, pendant les Jeux Olympiques, de mener beaucoup d'opérations,
03:15y compris, d'ailleurs, avec les armées françaises.
03:17J'ai communiqué encore récemment, d'ailleurs, entre Noël et le Jour de l'An,
03:20nous avons mené l'armée française dans le cadre de l'opération dite Chamal,
03:24qui est l'opération que François Hollande avait déclenchée en 2015,
03:27justement en 2015-2016 avec Jean-Yves Le Drian, à la suite des attentats.
03:31Nous avons encore frappé récemment des emprises de Daesh en Syrie, dans la bataille syrienne.
03:35Et quand vous dites que les cellules se réorganisent, Sébastien Lecornu,
03:37ça veut dire que cette menace exogène est de nouveau réactive ?
03:40Oui, mais si vous voulez, des cellules...
03:41C'est important, oui ? C'est-à-dire qu'elle est revenue sur le défendant ?
03:45Je crois qu'elle n'a jamais complètement disparu, point-virgule,
03:48même si la plupart des attentats que nous avons connus depuis dix ans
03:51étaient davantage liés à des menaces endogènes ou des radicalisations individuelles.
03:56Et c'est vrai qu'avec Bruno Retailleau, dans le moment dans lequel nous sommes,
03:59on est en train de redoubler d'efforts et de vigilance,
04:01c'est ce qu'Emmanuel Macron nous a demandé,
04:03parce qu'on voit bien que là, on peut avoir de nouveau une conjugaison
04:06d'un risque terroriste domestique, d'une radicalisation individuelle,
04:11mais aussi évidemment une menace dite projetée.
04:15Et ces cellules, comme je vous le disais, sont plus petites, plus autonomes,
04:18parfois plus difficiles à détecter.
04:20C'est d'ailleurs pour ça qu'en 2025, je remets beaucoup de moyens sur la DGSE,
04:24on communique peu évidemment sur notre service de renseignement,
04:27mais pour garder un plateau de lutte antiterroriste,
04:29de contre-terroriste très important, très soutenu.
04:31Menaces projetées, bien sûr, alors du Sahel, du Proche et du Moyen-Orient.
04:35À ce sujet, sur la Syrie, on a vu que la diplomatie européenne, française et allemande,
04:39s'est rendue en Syrie à la rencontre de l'islamiste au pouvoir,
04:43Abou Mohamed Al-Jolani, qui se fait appeler, c'est son nom, Ahmed Al-Shara.
04:48Est-ce que pour vous, Sébastien Lecornu, un islamiste peut-être inclusif ?
04:51Je pense qu'il faudra juger aux actes.
04:53Alors après, comme il se trouve que je suis ministre...
04:55Vous avez des doutes ?
04:56Moi, il se trouve que je suis ministre de la sécurité extérieure des Français.
04:59Donc j'essaie de regarder très froidement nos intérêts.
05:03Qu'est-ce qu'on a comme intérêt en Syrie ?
05:05Le terrorisme, on vient de le dire.
05:07Badilles assyriennes, mais également la plupart des prisons
05:11dans lesquelles vous avez un certain nombre de détenus Daesh.
05:13Ça, quel que soit le régime qui va venir en Syrie,
05:17de toute nationalité, et donc français aussi.
05:20Et donc par définition, c'est pour nous une préoccupation majeure.
05:23La deuxième des choses, elle est liée au terrorisme,
05:25c'est le captagon.
05:26Trafic de drogue qui, en général, finance le terrorisme.
05:30Deuxième enjeu majeur.
05:31Troisième enjeu majeur pour nous français,
05:33la dissémination d'armes chimiques.
05:35Car comme vous le savez, le régime de Bachar Al-Assad
05:37disposait de stocks importants d'armes chimiques.
05:39Puis le quatrième enjeu, c'est évidemment la réaction russe et iranienne
05:44qui viennent d'accuser un coup terrible avec la chute du régime de Bachar Al-Assad
05:48et qui emporte un sujet que vous connaissez bien,
05:50qui est le sujet de la sécurité de la frontière entre la Syrie et le Liban.
05:53Ça, pour le ministère des armées, c'est quatre sujets clés
05:56et qui ne sont pas que des sujets diplomatiques ou de pétitions morales,
05:59mais qui sont des sujets qui touchent à la sécurité française
06:02dans l'intérêt des Français.
06:03Vous décrivez un bourbier sécuritaire dans un tel bourbier.
06:05Pardonnez-moi, El Jolani, je repose ma question.
06:07Vous dites que vous attendez les actes.
06:09Il y a eu des actes passés.
06:10Daesh, il a quand même participé à des actions en Irak et en Syrie.
06:14J'imagine que pour nos armées, le voir arriver au pouvoir, ça doit...
06:17De toute façon, il y a un bourbier syrien.
06:19Je crois qu'on aurait une carte ici pour montrer les différentes forces en Syrie,
06:22les bases russes d'un côté, les bases américaines de l'autre,
06:25les forces démocratiques syriennes à un endroit,
06:28les incursions turques à un autre, la badia qui n'est pas...
06:31Oui, il y a un chaos syrien depuis maintenant de nombreuses années.
06:34Il est lié à Daesh, il est lié à Bachar al-Assad.
06:37Comme ministre des armées, je ne suis pas là pour faire la morale.
06:40Je crois que ça va rassurer tout le monde.
06:41Je suis là pour regarder très froidement nos intérêts de sécurité.
06:44Et donc, on jugera aux actes.
06:45Jean-Noël Barreau y est allé le week-end dernier.
06:47Et les premiers mots qu'il a eus, d'ailleurs, pour ses interlocuteurs,
06:51c'était de parler de Daesh. On ne peut pas être plus clair.
06:52Face aux ambassadeurs avant-hier, Emmanuel Macron,
06:54évoquant justement les groupes djihadistes cette fois-ci en Afrique,
06:57a affirmé que les dirigeants africains avaient oublié de nous dire merci,
07:00estimant qu'aucun d'entre eux ne gérerait aujourd'hui un pays souverain
07:04sans cette intervention française.
07:06Ce n'est pas grave, ça viendra avec le temps, a ironisé le président français.
07:10Cette déclaration, Sébastien Lecornu, a été jugée comme méprisante
07:13par différents pays africains.
07:15Le Tchad a appelé au respect des Africains.
07:17Quant au Sénégal, il a rappelé que la France a contribué à déstabiliser
07:20une partie de l'Afrique avec l'intervention en Libye.
07:23Que répondez-vous à ces dirigeants africains ?
07:25Déjà, il n'y a pas eu d'opération de lutte contre le terrorisme au Sénégal.
07:29Il ne faut pas tomber dans tous les pièges informationnels qui nous sont tendus.
07:32Qu'est-ce qu'a dit le président de la République lundi ?
07:34Que globalement, le Mali, le Niger et le Burkina Faso,
07:37s'il n'y avait pas eu l'armée française, ces pays seraient tombés
07:40aux mains des islamistes. C'est vrai.
07:42Qu'est-ce qu'on constate par ailleurs ?
07:44En général, lorsque nous sommes partis, la lutte contre le terrorisme
07:47ne se poursuit pas. Ce qui est d'ailleurs, du reste, un enjeu majeur pour nous
07:51parce que vous avez des pressions migratoires qui peuvent venir du Sahel
07:54et remonter par le Maghreb, qui sont à redouter dans les années qui viennent.
07:57Mais ça veut dire soit qu'on est partis trop tôt, soit que les dirigeants africains
08:00ne sont pas investis dans la lutte contre le terrorisme.
08:02Les jeunes militaires de Burkina Faso, 2500 morts, civils,
08:07tombés sur des attentats terroristes depuis que nous sommes partis.
08:11C'est un drame. Le sujet, ce n'est pas ce qu'on a déménagé nos bases.
08:15Le sujet, il est sécuritaire et il est humanitaire.
08:17Je lis aussi beaucoup dans la presse depuis trois jours qu'on dit
08:19nous avons été remplacés par les Russes et les Chinois.
08:21Bon, il n'en est rien. Déjà, les Chinois ont un agenda économique très dur en Afrique,
08:26mais absolument pas d'agenda militaire. Il y a une base à Djibouti, mais elle sert à autre chose.
08:29Et les Russes, là où ils ont tenté de nous remplacer, n'y sont pas arrivés.
08:33On va parler de notre influence.
08:34Je vais vous dire une chose juste sur le Tchad.
08:35Qu'est-ce que vous dites notamment aux dirigeants tchadiens ?
08:38Parce que ces mots, en réalité, vous accusent de néocolonialisme.
08:41Si j'étais mon propre interviewer, vous me pardonnez cette coquetterie,
08:44savez combien de fois nous avons quitté le Tchad depuis maintenant de cela,
08:50quatre décennies ou cinq décennies ? Quatre fois.
08:53Et la vraie question, en fait, c'est si demain, après être partis,
08:57un nouveau régime, parce que les alternances politiques sont là dans ces pays,
09:01un nouveau régime nous demande d'y retourner, qu'est-ce qu'il faudra faire ?
09:05Eh bien, je n'ai pas la réponse à cette question.
09:07Et en fait, c'est ça dont, à mon avis, les forces politiques françaises,
09:09parce que parlons de nous, parlons de nos intérêts.
09:11Le Tchad, la base de Tchad, c'est 300 millions d'euros par an pour le contribuable français.
09:15Donc, ça mérite, à mon avis, un débat aussi entre les forces politiques.
09:18C'est au fond, quelle est notre bonne présence en Afrique ?
09:21Et ça, le président Macron y a répondu en disant, on a des bases,
09:24on y est resté parfois trop longtemps et nous nous sommes substitués
09:27à des dirigeants politiques dans la lutte contre le terrorisme,
09:30croyant bien faire en faisant le travail à leur place.
09:33Et, pardon, parce que je ne suis pas que ministre des Armées,
09:35je considère aussi que l'influence française en Afrique,
09:37elle n'est pas que militaire, si elle se résume à une base,
09:40très franchement, c'est, à mon avis, complètement une vision du XIXe siècle,
09:45culturelle, économique. Le vrai agenda, il est, à mon avis, économique.
09:48Et je vais vous dire une chose, je pense aussi que nous ferions bien
09:51de regarder l'Afrique lusophone, l'Afrique anglophone.
09:54On a vu ce que nous avons fait récemment en Éthiopie ou avec le Nigeria,
09:57qui sont des pays sur lesquels il y a une attente de France absolument énorme.
10:00Mais regardons déjà l'Afrique francophone, où nous avions quand même une influence.
10:05Alors, vous niez aujourd'hui l'implantation à l'influence chinoise et russe,
10:09mais elle est réelle. D'ailleurs, en capacité économique, les entreprises,
10:14la liste est impressionnante. Pour la langue, la francophonie a reculé.
10:18Sur les sujets de sécurité, je dois vous dire de la manière la plus clinique qui soit,
10:25là où les Russes, et notamment la SNP Wagner, qui d'ailleurs connaît
10:28des difficultés importantes, où le ministère de la Défense russe
10:32ont voulu nous remplacer, c'est un échec.
10:34C'est un échec tactique et c'est même un échec de coopération
10:37dans la manière de travailler avec les armées africaines.
10:38Mais je ne suis pas là pour donner les bons points et les mauvais points.
10:40Reparlons de nos propres intérêts.
10:42Le président Hollande a eu raison d'envoyer les forces françaises au Mali
10:46lorsque Bamako était à deux doigts de tomber aux mains des djihadistes.
10:49Est-ce qu'ensuite, nous sommes restés peut-être trop longtemps dans cette opération
10:52qu'on appelait Barkhane, avec quand même pratiquement 60 morts pour la France
10:56dans cette opération ? C'est probable.
10:58Et je pense que là, on revient lucidement à un bilan.
11:01On ne peut pas faire le travail à la place des pays concernés,
11:04qui sont des pays souverains.
11:06Alors Sébastien Lecornu, on poursuit notre entretien sur ces news européens.
11:09Il y a l'influence, il y a aussi l'ingérence.
11:11Emmanuel Macron a parlé de la France et des Etats-Unis
11:14lors de cette conférence devant les ambassadeurs
11:16et donc évidemment de Donald Trump, en dénonçant au sujet cette fois-ci
11:20d'Elon Musk une internationale réactionnaire.
11:23D'abord, quel est l'objectif d'une telle internationale ?
11:26Je pense qu'il y a un projet politique défendu par Elon Musk,
11:29mais ça, à la rigueur, comme ministre des Armées,
11:31je n'ai pas d'appréciation particulière à avoir.
11:33Moi, ce qui m'intéresse beaucoup, c'est qu'il y a toujours eu
11:35une influence américaine par les GAFA, par les grandes entreprises.
11:39Ce n'est pas ce dont parle le président.
11:41Non, mais j'essaie d'aller plus loin devant vous
11:43parce que c'est la première fois que je m'exprime sur ce sujet
11:45et de dire en fait que je pense qu'au-delà des tweets de M. Musk,
11:48on ferait mieux surtout de regarder de très près
11:50ce qui va se passer sur la stratégie spatiale.
11:52Je pense que le vrai enjeu...
11:54C'est l'une des batailles.
11:55Pardon de parler de moi à chaque fois et de parler des intérêts français,
11:57mais je pense que c'est ce qu'on attend de moi.
11:59De voir SpaceX et de voir le patron de SpaceX
12:03rentrer dans l'administration américaine,
12:05pour la première fois, vous allez avoir des intérêts américains privés
12:08qui vont quasiment se juxtaposer à l'administration américaine.
12:11Pour autant, je ne pense pas d'ailleurs qu'il y ait une confusion,
12:14une fusion des entreprises et cette administration.
12:17Comment vont réagir les Européens, notamment dans notre souveraineté,
12:20notre capacité à garder un accès à l'espace ?
12:22C'est vrai pour les lancements en courte orbite,
12:24comme en haute orbite.
12:27Je pense que c'est un sujet clé.
12:29Il y a ce que le président de la République a dit.
12:31Je renvoie le ministre des Affaires étrangères à s'exprimer sur le sujet.
12:33Moi, je mets un autre sujet sur la table en même temps.
12:35La bataille spatiale.
12:36Je pose la question toujours autour d'Elon Musk,
12:39cette supposée ou réelle ingérence.
12:41Est-ce qu'il n'y a pas deux poids, deux mesures ?
12:43Vous parliez justement de l'action d'Elon Musk
12:45quand il s'est agi d'un autre milliardaire.
12:47Je pense à George Soros et ça nous concerne tous
12:49puisqu'il a financé des ONG en Europe.
12:51Personne n'a pas entendu le gouvernement français
12:53s'indigner de son ingérence.
12:55Je ne pense pas qu'il y ait deux poids, deux mesures.
12:57Je respecte la souveraineté de chaque pays.
13:00Ça ne me viendrait pas à l'esprit.
13:02Pendant la campagne américaine, j'étais très prudent
13:04sur ce que j'ai dit.
13:05Tout le monde ne l'a pas fait d'ailleurs.
13:07Je fais attention à ça.
13:08Donald Trump qui continue, Sébastien Lecornu,
13:10de promettre la fin de la guerre en Ukraine.
13:12À ce sujet, Emmanuel Macron a appelé l'Ukraine
13:14à des discussions, je cite, réalistes sur son territoire.
13:17Au sujet du territoire ukrainien.
13:19Est-ce un appel lucide à acter de concession territoriale
13:22alors que Kiev est en difficulté sur le champ de bataille ?
13:26Difficulté, c'est certain.
13:28Avec une ligne de front qui évolue très lentement,
13:32à vrai dire, avec une érosion.
13:34Je pense que ces dix derniers jours,
13:35on parle de 85 à 90 kilomètres carrés
13:38qui ont été grignotés.
13:39Sur Koursk, les Ukrainiens ont tenté une contre-offensive
13:42depuis dimanche sur lequel ils reprennent un peu du terrain.
13:44Ce qu'il faut comprendre dans ce qu'a dit
13:45le président de la République, c'est que de fait,
13:46au fond, on voit bien que dans les discussions
13:48qui pourraient exister, vous avez au fond plein de critères.
13:52Mais vous avez deux familles de sujets
13:54qui retiennent l'attention de toutes les capitales.
13:56La première, c'est évidemment le sort
13:58des territoires occupés par la Russie.
14:00C'est ce qu'a dit le président de la République
14:01en précisant que c'est à la main des Ukrainiens
14:03et que c'est aux Ukrainiens de décider ces paramètres.
14:05Mais ça veut dire que ce n'est plus un totem.
14:07Mais en fait, ça ne l'a jamais été.
14:09Ça dépendait de la situation tactique et militaire.
14:11Parce qu'en fait, vous voyez bien que dès lors
14:12que la ligne de front est en train de sécher,
14:14de se durcir, elle s'installe dans la durée.
14:17Donc c'est le principe de réalité militaire.
14:19Nos démocraties médiatiques, il faut qu'on ait perdu de sa vue.
14:21Mais enfin, c'est la situation tactique
14:22sur le terrain militaire qui donne ça.
14:24Donc la première famille de sujets,
14:25c'est évidemment les questions territoriales.
14:27Et le président Macron n'a pas dit quelque chose de très nouveau.
14:29Au fond, il l'a dit publiquement, c'est certain.
14:31Mais en disant, ça reste à la main des Ukrainiens.
14:33Et il y a une deuxième série de sujets
14:35qui sont clés, qui nous concernent très directement.
14:38C'est quelles sont les garanties de sécurité
14:40que l'on peut apporter à l'Ukraine demain ?
14:42Traduction plus claire, comment on fait en sorte
14:44que ça ne recommence pas ?
14:47Oui, parce que Géorgie, parce que Crimée,
14:49parce qu'Ukraine, on ne peut pas ne pas voir
14:51les dix dernières années.
14:52Et donc Moldavie, point d'interrogation,
14:53Pays Baltes, point d'interrogation,
14:55eux sont dans l'OTAN, et Ukraine,
14:57le reste de l'Ukraine, demain.
14:58Et un autre point d'interrogation,
14:59Monsieur le ministre des Armées,
15:00l'Europe de la Défense,
15:01c'est à chaque fois la même question.
15:03C'est avec qui l'Allemagne ?
15:04On considère l'Allemagne comme un partenaire
15:06dans cette Europe de la Défense,
15:07mais la réalité, est-ce que vous pouvez nous le dire
15:09ouvertement et officiellement, si je puis dire,
15:11l'Allemagne ne nous considère pas
15:12comme un partenaire dans l'Europe de la Défense,
15:13elle regarde toujours vers l'OTAN ?
15:14Oui, alors, Général de Gaulle disait
15:16dans ses conversations avec Alain Peyrefitte
15:18que les Allemands étaient naïfs
15:20et qu'il n'en finissait pas de s'en remettre
15:22indéfiniment aux Etats-Unis,
15:24lesquels Américains ne viendraient jamais
15:26complètement au secours de l'Allemagne.
15:27Vous voyez, c'est en 1962 ou 1963
15:29qu'il dit ça à son ministre de l'Information
15:31de l'époque.
15:32Donc le problème, il est ancien.
15:33Vous avez une part des Européens
15:35qui sont dans une relation transatlantique
15:37que je pourrais qualifier de naïve.
15:39Elle est ancienne, elle est liée à l'histoire,
15:41et il ne semble pas comprendre
15:43dans ses capitales qu'au fond,
15:45démocrate comme républicain d'ailleurs,
15:47on parle beaucoup du président Trump,
15:49mais Mme Harris disait des choses
15:51peut-être plus diplomatiquement en tout cas,
15:53mais globalement qui consistent à dire
15:55qu'il y a un pivot qui est en train de se faire
15:57de l'Europe vers le Pacifique Nord.
15:59La question chinoise monopolise
16:01toutes les attentions à Washington.
16:03Donc les Européens n'ont pas d'autre choix désormais
16:05que de se prendre en main sur
16:07les sujets de sécurité et de défense.
16:09Sur les différentes capitales,
16:11vous avez des réactions qui sont différentes,
16:13mais vous savez qu'il y a un débat électoral
16:15actuellement en Allemagne,
16:17et on voit bien que ce sujet est un sujet
16:19de campagne électorale en Allemagne.
16:21Du reste, ça ne l'a pas été suffisamment
16:23chez nous, je le crois, en juin dernier.
16:25Peut-être reviendra-t-il à l'occasion.
16:27L'armée française qui a formé des soldats ukrainiens,
16:29M. le ministre des Armées,
16:31au sein de la brigade appelée Anne de Kiev,
16:33et on a financé cette brigade,
16:35brigade de laquelle des centaines
16:3755 désertions lorsque
16:39la demi-brigade était en formation
16:41sur le territoire national.
16:43Les chiffres qui ont circulé, notamment
16:45de la part de journalistes ukrainiens, sont absolument
16:47pas confirmés. Qu'est-ce qui s'est passé ?
16:49Le principe de la formation de la brigade,
16:51c'est de faire sa cohérence. Vous prenez
16:532000 hommes,
16:55vous formez l'état-major, tous les
16:57systèmes de bataillons et de compagnie,
16:59et vous donnez les armes qui vont
17:01avec, et la formation qui va avec ces armes,
17:03et la doctrine qui va avec. Ça s'appelle mettre en cohérence
17:05tout ça. Il se trouve que pour des raisons
17:07de besoins tactiques, visiblement,
17:09l'armée ukrainienne a explosé cette brigade
17:11lorsqu'elle est retournée en Ukraine.
17:13Que nous avons financé. Oui, mais
17:15pourquoi ils l'ont fait-ils ?
17:17Pourquoi nous l'avons financé dans ce cas-là ?
17:19Parce qu'il fallait le faire. Je crois que l'aide
17:21à l'Ukraine n'est pas à débattre. En tout cas,
17:23votre question, ce n'est pas ça. C'est qu'est-ce qui s'est passé
17:25sur la brigade ukrainienne ? Ils ont
17:27reventilé les différentes compagnies de cette brigade
17:29sur différentes lignes de front.
17:31Souvent sur les plateaux de CNews,
17:33il y a des débats sur faut-il rétablir le service militaire.
17:35Je pense qu'on a une bonne illustration
17:37aussi de ce qu'est une armée de conscrits.
17:39C'est-à-dire une armée avec des gens qui ne sont pas
17:41volontaires, qui ne sont pas professionnels,
17:43qui doivent être formés très rapidement,
17:45et pour lequel, lorsqu'on a un combat de haute intensité
17:47face à l'armée russe,
17:49évidemment, il y a des sujets de faiblesse.
17:51Bien sûr que c'est important, parce que
17:53dans le livre, quand je défends
17:55l'armée de métier, quand je défends l'armée professionnelle,
17:57il faut que celles et ceux qui nous regardent
17:59comprennent que les combats d'aujourd'hui
18:01dans des univers dans lesquels il y a des drones,
18:03il y a de la guerre électronique,
18:05il y a un combat en trois dimensions.
18:07Tout ça a changé. On dit que c'est 14-18 en Ukraine.
18:09C'est 14-18 avec beaucoup de technologies.
18:11Et donc il y a une professionnalisation.
18:13C'est un enjeu. La question de la conscription en Ukraine
18:15est d'ailleurs un grand débat politique.
18:17Est-ce que vous êtes en mesure de nous confirmer
18:19ce matin la sanctuarisation des augmentations
18:21du budget de la Défense ? Vous avez averti
18:23que si ces évolutions n'étaient pas...
18:25Enfin, vous avez averti que ces négociations
18:27plutôt... que ces évolutions
18:29n'étaient pas négociables. Est-ce que ce matin
18:31vous avez eu la confirmation que tout sera bien maintenant ?
18:33Non, mais c'était déjà sanctuarisé
18:35dans la copie que Michel Barnier avait arrêtée
18:37et François Bayrou a décidé de repartir
18:39de la copie de Michel Barnier.
18:41Même copie, mêmes évolutions,
18:43mêmes augmentations. Mais je l'ai toujours dit, de toute façon,
18:45c'est pas un plafond, c'est un plancher.
18:47On va arriver à 50,5 milliards d'euros
18:49pour 2025.
18:51C'est juste suffisant.
18:53Pour ? Pour répondre aux besoins
18:55de sécurité. Sinon ?
18:57Juste, on ne comprend pas.
18:59On est arrivé à 31 milliards d'euros
19:01en 2017. On arrivera
19:03aux alentours de 69 milliards d'euros
19:05en 2030. Point d'étape
19:07à 50,5 milliards d'euros. Oui,
19:09parce que la modernisation de la dissuasion nucléaire
19:11nécessite des moyens, parce que la modernisation
19:13sans précédent de notre armée de terre depuis la fin
19:15de la guerre froide nécessite des moyens.
19:17On parlait du spatial, vous avez désormais des sauts
19:19technologiques qui nécessitent des moyens.
19:21Et comme en plus on souhaite protéger notre souveraineté,
19:23c'est-à-dire ne pas dépendre d'autres puissances,
19:25quelles qu'elles soient, forcément ça mérite
19:27un investissement important.
19:29J'ajoute du reste que cet argent,
19:31c'est quand même beaucoup de milliards pour celles et ceux qui nous
19:33écoutent, a en plus un mérite, c'est qu'au-delà
19:35de nous protéger, ce qu'il mérite essentiel,
19:37les répercussions en termes d'emploi,
19:39de croissance et de balance commerciale
19:41extérieure sont énormes, parce que derrière, évidemment,
19:43ce succès en appelle d'autres et appelle
19:45aussi des points de croissance et de l'emploi.
19:47On va conclure Sébastien Lecornu avec une question
19:49sur votre livre, Vers la guerre, la France
19:51face au réarmement du monde, qui rencontre
19:53un véritable succès, preuve qu'il y a une
19:55appétence pour ces sujets. Vous livrez
19:57une analyse incisive sur la
19:59position de la France face aux crises géopolitiques.
20:01Tout à l'heure, à la question de notre influence,
20:03vous avez répondu qu'on n'avait pas perdu notre
20:05influence, mais est-ce que vous reconnaissez qu'on a un retour
20:07quand même des États puissants, ce que
20:09Kissinger avait appelé un monde néo-westphalien ?
20:11La France fait face aujourd'hui à des nations
20:13comme la Turquie qui rêve de l'Empire ottoman,
20:15de l'Iran qui rêve de
20:17l'Empire perse, etc.
20:19Que pesons-nous face à tout cela ?
20:21Le livre n'est jamais que la mise en page
20:23de mes notes depuis deux ans et demi, et de fait, j'essaie
20:25de montrer ça. Alors après, ce qui est intéressant, c'est de voir que
20:27cet ensemble-là n'est cohérent et ne
20:29s'unit que par le refus du monde occidental,
20:31en tout cas du monde, on va dire,
20:33tel qu'il a été imaginé au XXe siècle.
20:35C'est tout le sud global.
20:37Oui, mais une fois qu'on a dit ça,
20:39ce qui est intéressant, c'est de regarder deux choses.
20:41De voir que tous ces pays ont des problèmes internes énormes.
20:43Vous voyez les quatre heures de conversation de Vladimir
20:45Poutine avec les différents auditeurs
20:47russes. Vous avez la moitié
20:49de cette conversation qui repose sur
20:51l'inflation et les questions migratoires.
20:53Et l'autre phénomène important et intéressant,
20:55c'est de voir au fond qu'une vieille théocratie désormais
20:57comme l'Iran n'a quand même pas
20:59que des choses à voir avec un pays comme
21:01la Russie, qui vient d'une ère
21:03post-soviétique, ou la relation
21:05entre l'Inde et la Chine, dont on sait qu'elle est complexe.
21:07Donc à la fois, il faut bien comprendre qu'il y a une
21:09alliance de circonstances pour réfuter
21:11ce que nous sommes, que pour autant
21:13ce n'est pas un monde monolithique.
21:15Et pour conclure, c'est là où, c'est pour ça que je suis beaucoup
21:17plus optimiste sur la France. Il ne faut pas qu'on fasse de France-bashing.
21:19Alliés mais non-alignés,
21:21on a un rôle particulier.
21:23Et vous voyez la relation particulière qu'on a avec Pékin.
21:25On n'a pas la même diplomatie que
21:27Washington, de toutes les évidences, pour
21:29aborder le défi chinois. La relation
21:31de grande proximité que nous avons avec l'Inde,
21:33et ça, quelles que soient les échéances à
21:35venir, quels que soient les gouvernements, la vie
21:37politique intérieure française, il faut qu'on conserve
21:39impérativement cette singularité
21:41française qui nous protège dans la durée,
21:43en plus de notre rare moment.
21:45Merci Sébastien, aujourd'hui, vers la guerre.
21:47Alors, point d'interrogation, on peut l'enlever,
21:49puisque la guerre est aux confins de l'Europe.
21:51Merci d'avoir été notre travail. Il y a un débat quand même, c'est pour ça que j'ai mis
21:53le point d'interrogation. Tout à fait, bonne journée à vous.
21:55A vous aussi.

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