• le mois dernier
Avec Nicolas Baverez, essayiste et avocat, auteur de "Sursaut" (Editions de L'Observatoire)

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Transcription
00:00Sud Radio, La Vérité en face, Patrick Roger.
00:04La Vérité en face jusqu'à 10h chaque jour bien sûr pour aborder de face ce qui se passe,
00:11ce que nous vivons, ce que nous pouvons vivre aussi peut-être demain.
00:14Nous avons décrit une certaine France en fait tout à l'heure, une photographie avec Jérôme Fourquet.
00:19On va voir un petit peu, on va se pencher peut-être sur l'avenir avec vous Nicolas Baverez.
00:22Bonjour.
00:23Bonjour.
00:24Vous écrivez sur Soho aux éditions de l'Observatoire.
00:27C'est une suite un petit peu de ce que vous aviez décrit il y a une vingtaine d'années, c'est ça ?
00:32Vous-même, je le disais tout à l'heure avec un brin d'humour,
00:37mais je ne sais pas si c'était de l'humour,
00:39vous étiez considéré comme le déclinologue en chef par un certain Premier ministre.
00:44C'est vrai, non ?
00:45Oui.
00:46La France qui tombe a suscité beaucoup de polémiques et donc c'est normal d'être critiqué
00:52du moment qu'on écrit et qu'on est dans le débat public.
00:55C'est vrai que je pense que la France qui tombe n'a pas été lue pour ce qu'elle était,
00:59c'est-à-dire premièrement un constat réaliste de la situation de la France
01:03et de sa glissade qui s'est terriblement amplifiée depuis
01:06et puis surtout un appel à essayer de changer le modèle.
01:10Donc la déclinologie c'est effectivement une pseudo-science de charlatans.
01:16Alain Juppé aussi avait écrit un article qui s'appelait
01:19« L'insoutenable légèreté du déclinisme ».
01:24En réalité, on voit que l'insoutenable légèreté était de leur côté.
01:29Mais il n'y avait pas une exagération peut-être ?
01:32Parce qu'elle tient encore debout la France aujourd'hui, 20 ans après.
01:35Non, là on est vraiment dans une situation qui est très inquiétante.
01:38La France est redevenue l'homme malade de l'Europe comme en 1958, en allant vite.
01:45Sur le plan économique, quand on a des gains de productivité,
01:50la productivité qui baisse de 6% depuis 2019,
01:53une croissance qui est pratiquement à l'arrêt,
01:55un chômage qui va de nouveau vers 8%
01:58qu'on n'a jamais eu de plein emploi depuis les années 70,
02:03une balance commerciale déficitaire de 100 milliards,
02:06des exportations qui s'effondrent.
02:08Maintenant l'Italie est 4e exportateur mondial et nous le 7e.
02:12Et enfin déficit public 6,2% du PIB, la dette 115% du PIB,
02:1846 000 euros pour chacun des 68 millions de Français.
02:23Pouvoir d'achat de la pauvreté, on la voit partout.
02:26On est maintenant au 26e pour la richesse par habitant.
02:29On est 15% en dessous de l'Allemagne.
02:31Oui, ça c'est un chiffre qui interpelle.
02:3326e en fait pour la richesse par habitant.
02:3615% en dessous du niveau de l'Allemagne,
02:3950% en dessous du niveau des Etats-Unis.
02:45Et la pauvreté, elle touche 9 millions de Français,
02:48elle touche de plus en plus de territoires.
02:51Et puis maintenant on a ce qu'on pensait impossible,
02:55une 5e République qui est paralysée.
02:58Et enfin un décrochage diplomatique qui est spectaculaire
03:02avec une France qui est marginalisée en Europe et en Allemagne.
03:06Donc ce qui s'est passé,
03:09et c'est dommage que ce livre n'ait pas été lu pour de bon
03:14au lieu d'être simplement rejeté,
03:17c'est qu'à l'époque, ce qui s'est passé,
03:19c'est-à-dire l'engrenage crise économique, crise sociale,
03:22crise politique, crise diplomatique, on aurait pu l'arrêter.
03:25Et de fait, toutes les occasions ont été perdues.
03:28Et aujourd'hui on se retrouve dans la position de 58,
03:31ce que le général De Gaulle dit dans ses mémoires sur ce qu'il a trouvé,
03:35c'est-à-dire le miracle ou la faillite.
03:38Et c'est de nouveau le dilemme français.
03:41Donc vous écrivez sur saut,
03:43ce qui veut dire que tout n'est pas, contrairement à ce que disent certains, fichu.
03:47Pas du tout.
03:49Mais pour ça il va falloir faire des choix.
03:52Alors les choix c'est quoi ? Quels sont-ils aujourd'hui ?
03:55De façon très concrète, pour les auditeurs qui nous écoutent,
03:59quel choix doit-on faire ?
04:01Alors je pense que le premier choix, c'est comme 58,
04:05c'est-à-dire qu'il faut arrêter de prétendre faire de la grande politique européenne ou mondiale
04:09tant qu'on n'a pas remis la France debout.
04:11Donc le premier choix, c'est priorité absolue à la reconstruction d'une puissance française.
04:17Le deuxième grand choix ensuite, c'est de miser sur nos atouts.
04:21Tous ceux qu'on saccage.
04:23La France c'est un pays extraordinaire,
04:25on peut tout faire de l'agriculture, de l'industrie,
04:28de l'énergie décarbonée avec le nucléaire,
04:31des services, de l'immobilier, du tourisme.
04:34Chacun de ces secteurs a été méthodiquement démoli.
04:38Deux exemples, le secteur nucléaire, on a réussi à le mettre à bas
04:42alors que c'est un atout compétitif formidable.
04:44Alors là, on le remet sur les rails.
04:47Oui, mais sauf que pour remettre ce genre de truc sur les rails, il faut 15 ans.
04:51Et l'autre chose, prenons l'immobilier,
04:54on est revenu à une crise du logement qui participe d'ailleurs de ce problème social,
04:58équivalente aux années 50,
05:01avec des gens qui ont expliqué que le logement était une rente,
05:04mais c'est une aberration complète.
05:07Mais c'est ce qui est encore expliqué par certains aujourd'hui, Nicolas Barrette.
05:10Prenons aussi l'agriculture.
05:12On est maintenant devancé par l'Allemagne et par les Pays-Bas.
05:15Donc vous voyez, on est rentré dans un système malthusien qu'il faut casser.
05:19Et donc le deuxième grand choix, c'est de dire que maintenant,
05:23la priorité, c'est la production.
05:26On ne peut pas continuer à être un pays qui ne produit que 36% des biens industriels.
05:30Il y a des forces inverses, si je puis dire,
05:32qui disent qu'il faut arrêter de produire
05:34parce que ça participe au réchauffement climatique,
05:37il faut arrêter, il faut consommer différemment.
05:40C'est comme à la fin de la troisième ou de la quatrième république.
05:42Quand vous avez un régime en crise,
05:44vous avez ce côté tragi-comique
05:47que tout ce qu'il tue est encensé,
05:52sanctuarisé, idolâtré.
05:54Tout ce qui pourrait le sauver est critiqué et dénigré.
05:57Et donc nous en sommes là.
05:59Mais là où les choses vont changer aussi,
06:02c'est que ce système que Jérôme Fourquet appelle
06:07le stato-consumérisme,
06:09ou que moi j'appelle la décroissance à crédit,
06:13c'est-à-dire l'idée d'abandonner la production
06:16et d'avoir une économie tirée par la consommation
06:19qui est elle-même alimentée par des transferts sociaux,
06:2234% du PIB, eux-mêmes financés par la dette publique,
06:25ça, c'est terminé.
06:27Parce que quelque part, il faut produire pour pouvoir utiliser,
06:30avoir tous ces services.
06:32Sauf que nous, on a fait le choix de casser la production
06:35et de profiter de la mondialisation pour importer à bas coût.
06:38En détruisant notre industrie, en détruisant nos emplois.
06:41Et ça, c'est terminé parce que la mondialisation a explosé,
06:45que maintenant, il y a de nouveau des barrières
06:47qui se mettent en route un peu partout.
06:49Donc ce système-là, il est terminé aussi.
06:55– C'est pour ça que, d'une certaine manière,
06:58on va être obligé de bouger.
07:00Les deux grandes questions qui sont posées,
07:02c'est d'une certaine manière, vous parliez des grands choix,
07:05ça c'est un choix qui va se poser à tous les citoyens.
07:08Est-ce qu'on est capable, est-ce que nous nous réformons
07:11par nous-mêmes, un peu comme on l'a fait en 1983
07:13avec le tournant de la rigueur alors qu'on était aux portes du FMI ?
07:17Ou est-ce qu'on tombe dans le système grec,
07:19c'est-à-dire que la France est restructurée par le FMI,
07:23l'Union Européenne et la BCE.
07:25– Et ça, on est aux portes de ça.
07:27– Je rappelle qu'aujourd'hui, on emprunte à des taux plus élevés
07:31que le Portugal, l'Espagne et la Grèce.
07:34Donc la crise financière, elle a démarré.
07:37Là encore, on fait semblant de ne pas la voir.
07:40La discussion parlementaire est surréaliste.
07:43On n'arrête pas d'accumuler des impôts sur une économie exsangue
07:46et des entreprises qui n'en peuvent plus
07:48et de prévoir des dépenses supplémentaires.
07:51On est totalement en dehors de toute forme de réalité.
07:54Et la deuxième grande question,
07:56est-ce qu'on arrive à reconstruire la France à l'intérieur du cadre républicain
08:03ou est-ce qu'on passe par l'expérience autoritaire ?
08:08Ce qui est le cas en Italie, ce qui a été le cas sans doute,
08:14on va voir ce qui se passe aux États-Unis,
08:16mais ça a déjà été le cas avec Trump,
08:18première version, peut-être qu'on va avoir un Trump deuxième version.
08:22Donc ce sont ces deux grandes questions.
08:25Là où il y a deux choses qui sont importantes,
08:28premièrement, ce pays est bourré d'atouts.
08:31Ce qui est incroyable, c'est d'être arrivé à une situation pareille.
08:34Et la deuxième chose,
08:36c'est que je pense que comme le système international a bougé,
08:41on a aujourd'hui une circonstance,
08:44on est passé complètement à côté du cycle de la mondialisation,
08:47aujourd'hui ce monde où la géopolitique prime l'économie,
08:51les États reprennent la main sur les marchés,
08:53la souveraineté sur l'ouverture des frontières,
08:55c'est un monde qui correspond quand même davantage à notre esprit national.
08:58Vous voyez, il y a des paradoxes,
09:00c'est que d'une certaine manière,
09:02les États-Unis c'est une extraordinaire réussite économique
09:07et c'est une réussite économique en partie avec une philosophie française,
09:11l'IRA de Biden,
09:13l'idée de mettre de l'argent public pour lever de l'argent privé
09:16en faisant de la réindustrialisation du numérique,
09:19de la transition écologique et de la stabilisation de la classe moyenne,
09:23normalement c'est un système à la française,
09:26mais c'est les États-Unis.
09:28– C'est ce que nous avions fait à la sortie de la guerre,
09:30c'est ce que vous dites, il faut planifier en fait les choses.
09:32– Et mettre l'argent sur la production,
09:34nous on met l'argent uniquement sur les transports sociaux.
09:37– Une question d'actualité Nicolas Baverez aussi
09:39par rapport justement à nos finances,
09:42une question qui se pose sur le poids des collectivités territoriales aujourd'hui,
09:48est-ce qu'on doit déposer un certain nombre de choses
09:52sur les collectivités territoriales pour qu'elles activent l'économie
09:58ou est-ce qu'au contraire on doit reprendre ça au niveau central
10:02et puis ça nous amène à la fameuse question de la taxe d'habitation
10:06qui avait été supprimée,
10:07est-ce qu'il faudra une contribution citoyenne ?
10:10– Alors, premièrement on a vu ce que donnait avec Emmanuel Macron
10:16qui a poussé à bout, à l'extrême, l'hyper-présidentialisme,
10:21le caractère beaucoup trop centralisé
10:24et il a fini par faire exploser les institutions de la Ve République.
10:27Donc il faut décentraliser mais pas du tout comme on l'a fait jusqu'à présent
10:31puisque chaque fois qu'on a décentralisé,
10:33on a gardé la même compétence à l'intérieur de l'État et on a doublonné.
10:37Et la deuxième chose c'est qu'on a décentralisé
10:40en enlevant les ressources effectivement des collectivités.
10:44Donc on a des collectivités qui sont irresponsables d'un point de vue financier
10:49et ça se traduit notamment par le laxisme incroyable
10:51de la gestion de la fonction publique territoriale
10:54avec des taux d'absentéisme qui défient le bon sens
10:57qui peuvent atteindre parfois plus de 30 jours.
11:00Donc il faut sortir de ce système, avoir des compétences pour les collectivités,
11:06des ressources qui leur soient propres
11:08et en même temps un système de confiance financière.
11:10– Vous imaginez la révolution que ça suscite ?
11:12Que ça susciterait justement parce qu'il faudrait revoir toutes les structures ?
11:16– Oui mais si vous voulez…
11:17– Mais ça c'est jouable quoi, c'est ce que vous dites dans le sursaut,
11:19c'est possible ça.
11:20– Mais évidemment, on ne voit pas pourquoi…
11:22– Sur 10 ans ?
11:23– Alors le redressement d'un grand pays développé, ça c'est la bonne nouvelle,
11:27c'est que si on arrête de faire uniquement des erreurs
11:31et de vivre j'allais dire en absurdistan,
11:33un grand pays développé, le privilège c'est qu'il y a beaucoup de capital immatériel.
11:37Donc on peut relever un grand pays développé en moins de 10 ans.
11:41Je rappelle qu'on a quand même deux exemples dans notre histoire.
11:44En 45, tout le monde pense qu'on va retourner aux années 30.
11:47Dans les années 30, la France fait la performance la plus lamentable
11:51de tous les pays développés.
11:53On n'a pas retrouvé en 39 notre niveau de production de 29.
11:56Il se trouve qu'en 2 ans, en 47, on est au niveau de 39
12:00et dès 49, on est au niveau de 1929.
12:04Parce que les réformes de structures et surtout le fait que les Français
12:10à ce moment-là ont vraiment décidé de reconstruire le pays
12:12et de le reconstruire en le modernisant.
12:1458, c'est la même chose.
12:16De Gaulle a raison, les caisses sont vides, l'inflation est élevée,
12:20le déficit public est abyssal, les comptes extérieurs sont déséquilibrés
12:26et on vide l'aide américaine.
12:28En 3 ans, c'est terminé.
12:30On va avoir la plus belle décennie de croissance dans les années 60.
12:36Mais où est De Gaulle aujourd'hui ?
12:38On n'a pas d'hommes ou de femmes providentiels,
12:42mais c'est là où c'est une forme de bonne nouvelle.
12:44C'est-à-dire que c'est aux Français de se bouger.
12:47C'est par les Français qu'on va reconstruire ce pays.
12:50Et franchement, ils nous montrent qu'ils en sont capables.
12:53Ce qu'on a fait pour les Jeux Olympiques, c'était pour un événement,
12:56ça a été remarquable, et par l'organisation, et par les performances.
13:01Donc, quand les Français acceptent de jouer le jeu du monde réel,
13:04et qu'ils se mobilisent, ça marche.
13:07Mais pourquoi acceptons-nous de faire pour notre pays
13:10ce qu'on a fait pour le sport et pour un événement ?
13:12– D'un mot, la contribution citoyenne, la locale, évoquée par la ministre,
13:15vous y pensez ?
13:16– La suppression de la taxe d'habitation est évidemment une erreur,
13:19et là encore, c'est de la pure démagogie.
13:21On a coupé l'essentiel de la population française de la dépense locale.
13:25Et de l'autre côté, du coup, on a massacré les propriétaires
13:30avec des hausses de la taxe foncière en plus.
13:33Et maintenant, on s'étonne qu'il n'y ait plus de logement.
13:35Ben oui, il n'y a plus d'investissement immobilier parce que…
13:38– Donc c'est une bonne idée, alors, d'une contribution ?
13:41– L'immobilier a été…
13:43Et évidemment, tout le monde doit participer aux services publics locaux.
13:46C'est le bon sens.
13:49Et l'espèce de…
13:52Enfin, c'est quand même aberrant qu'aujourd'hui,
13:54il n'y a plus que les propriétaires de résidences secondaires
13:57qui participent aux services locaux dans des communes
13:59dont ils ne sont pas les résidents permanents.
14:01Donc arrêtons là, si vous voulez.
14:04Là, vous avez parfaitement raison, c'est que dans tous les exemples
14:08de décisions politiques complètement irresponsables, c'est absurde.
14:11C'est un exemple microéconomique mais qui est extrêmement parlant.
14:15Et du coup, pourquoi est-ce qu'il n'y a plus de mise en chantier aussi ?
14:19Parce que maintenant, pour un maire,
14:21accepter des nouveaux logements, c'est uniquement des problèmes
14:25et aucune ressource supplémentaire
14:27puisque la plupart des gens n'apporteront aucune ressource.
14:31Mais il va falloir construire des accès, il va falloir construire des écoles,
14:34il va falloir construire des services publics.
14:36Et en plus, on va mécontenter les habitants existants.
14:40– Nicolas Baverez avec nous pour sursaut aux éditions de l'Observatoire.
14:44On continue jusqu'à 10h, on marque une légère pause
14:47et dans un instant, on va parler.
14:49La France n'est pas isolée, évidemment.
14:51La France est l'Europe et il y a ce qui se passe aux États-Unis,
14:54ce qui va se passer cette semaine, qui est particulièrement important.
14:57Trump ou pas, quelles sont les conséquences ?
15:00C'est ce que nous allons voir dans un instant avec vous, Nicolas Baverez.
15:03– Sud Radio, la vérité en face, Patrick Roger.
15:08– La vérité en face jusqu'à 10h avec Nicolas Baverez
15:12et ce livre aux éditions de l'Observatoire,
15:14sursaut, qui avait écrit « La France qui tombe » il y a une bonne vingtaine d'années.
15:21Donc on a évoqué le choix que doit faire la France
15:23entre la modernisation et le déclassement.
15:25Mais alors c'est vrai qu'il y a aussi des éléments extérieurs, bien sûr.
15:29Nous ne sommes pas seuls et il y a notamment ce contexte international
15:33qui est particulièrement important.
15:35On est entre les deux, nous la France et puis l'Europe,
15:38entre ce qui se passe d'un côté la Chine, l'Inde, la Russie,
15:41les fameuses BRICS etc. et puis de l'autre les États-Unis.
15:45Demain avec les élections américaines,
15:48vous dites que le choix de Trump peut être dangereux,
15:53indépendamment de toute idéologie politique,
15:55mais peut être dangereux pour la France sur un plan économique.
15:59– Assurément parce que le programme de Trump,
16:02c'est un programme d'hyper-protectionnisme d'abord.
16:07Donc l'idée de mettre 10 à 20% de droits de douane
16:10sur toutes les importations et 60% pour les importations venant de Chine,
16:15ça c'est l'équivalent, les États-Unis l'ont déjà fait en 1930
16:19avec le tarif, ce qu'on a appelé le tarif smooth-allay en juin 30
16:27et ça a complètement cassé les échanges et les paiements mondiaux.
16:30Et si Donald Trump installe ce genre de droits de douane,
16:35ça, ça veut dire qu'il va vraiment casser les échanges.
16:39– Il l'a déjà fait un peu, bien sûr.
16:41– Oui mais il l'a fait dans des proportions qui n'avaient rien à voir.
16:44Et ça, ça va avoir des effets d'abord dans le monde émergent, très durs,
16:49et ça va achever, j'allais dire, de mobiliser le Sud contre l'Occident,
16:54mais ça va aussi avoir des effets sur l'Europe,
16:56puisque l'Europe est la grande cible.
16:58Et puis il y a une autre dimension.
17:00– L'Europe est la grande cible de qui ?
17:01– De Trump. – De Trump.
17:02– Ça, il l'a clairement dit.
17:04Et l'autre aspect, c'est l'aspect, évidemment, stratégique et de sécurité,
17:09puisque Donald Trump avait déjà voulu sortir,
17:13avait envisagé sérieusement de sortir les États-Unis de l'OTAN
17:16pendant son premier mandat.
17:18Il est certain que dans ce qu'il a annoncé,
17:22il y aura en tout cas un changement très fort d'attitude
17:25vis-à-vis de la Russie et du soutien à l'Ukraine.
17:29Ce qui va mettre l'Europe devant ses responsabilités,
17:32c'est-à-dire si les États-Unis se désengagent de l'Ukraine,
17:36est-ce que l'Europe essaye de les remplacer ?
17:39Je ne pense pas qu'elle en ait ni la volonté ni les moyens.
17:43– Oui, mais certains pourront vous rétorquer, Nicolas Baveret,
17:46est-ce que finalement avec les démocrates, on a eu une guerre en Europe ?
17:49Alors ce n'est pas eux qui l'ont déclenché,
17:51mais enfin bon, ils étaient quand même derrière l'Ukraine,
17:54est-ce qu'il n'y aurait pas eu une possibilité de négocier avec la Russie avant ?
17:57Et une crise mondiale qui est intervenue ?
18:01– Alors d'abord, sur la guerre d'Ukraine, il faut être clair,
18:05quand on lit ce que dit Vladimir Poutine,
18:10non seulement c'est uniquement une responsabilité russe,
18:14mais Vladimir Poutine n'entend pas, a priori, en rester là,
18:18quand on regarde ce qu'il dit.
18:20Donc on a un problème majeur, la Russie est maintenant vraiment
18:24une menace existentielle pour l'Europe.
18:26L'autre aspect, c'est évidemment ce qui se passe au Moyen-Orient.
18:30Donc le Moyen-Orient, l'Europe est complètement marginalisée.
18:34Je rappelle que c'est paradoxal puisque la politique extérieure européenne,
18:38elle est née en 1980 avec la déclaration de Venise
18:41qui portait précisément sur le Moyen-Orient.
18:44Donc aujourd'hui, l'Europe est totalement absente des discussions
18:49qui se passent entre Israël, le Hamas sous l'autorité palestinienne
18:56et derrière les États arabes de la région,
19:01et ce sont les États-Unis qui mènent le jeu.
19:06Donc on retrouve ce problème d'une Europe qui aujourd'hui
19:12n'existe pas diplomatiquement et stratégiquement,
19:14et qui économiquement est prise en tenaille entre les États-Unis,
19:18l'Ira, la réindustrialisation américaine et le dumping chinois.
19:22Et ça, ça nous montre que, si vous voulez, ça a été l'autre partie du déni français.
19:27On n'a pas voulu voir nos problèmes, mais on n'a pas voulu voir,
19:31on a occulté les changements du monde.
19:33Donc on est passé à côté du cycle de la mondialisation,
19:36mais ça, il est terminé depuis l'invasion de l'Ukraine.
19:40– Quand vous dites le cycle de la mondialisation est terminé, c'est-à-dire ?
19:46– C'est-à-dire ce qui avait démarré en 1979,
19:49l'idée de la libération, et qui avait été formidablement accélérée
19:52après la chute de l'Union soviétique.
19:55Un monde où les frontières diminuaient,
19:57où les marchés avaient la main sur les États,
20:00où les frontières économiques disparaissaient,
20:02où on avait une liberté de mouvement, des capitaux, des gens, des données.
20:06Aujourd'hui, c'est terminé, tout marche en bloc.
20:09Il y a toujours des interdépendances, mais elles sont sous le contrôle des États.
20:12On voit très bien que les États, maintenant, ils contrôlent les exportations,
20:17les flux de technologies, les flux de données, les flux de capitaux,
20:20avec les investissements.
20:22– Sauf qu'il y a quand même certaines entreprises, je pense aux GAFAM,
20:25qui sont plus fortes que certains États, qui ont réussi à imposer…
20:29– Ce n'est pas totalement vrai.
20:30C'est là où l'Europe reste décisive pour les États-Unis.
20:32C'est qu'aujourd'hui, Internet a éclaté aussi.
20:35Il y a un Internet russe, qui n'est pas celui…
20:38et les GAFAM n'y ont pas…
20:39Il y a un Internet chinois.
20:40Les GAFAM n'ont pas non plus droit de s'éteindre là-dedans.
20:43– Ça, c'est vu de d'autres terres françaises et européennes.
20:47– Exactement.
20:48Que nous, nous soyons dans la dépendance des États-Unis
20:52pour une grande partie de l'agriculture, pour l'énergie, pour la technologie,
20:57pour la finance et pour l'armement, c'est exact.
21:00Mais c'est une particularité européenne.
21:04Et ce qu'il faut bien comprendre, du coup,
21:06c'est que c'est aussi une autre raison pour remettre la France debout.
21:09C'est que, évidemment, c'est absolument vital pour notre pays.
21:13Mais c'est aussi le meilleur service qu'on puisse rendre à l'Europe.
21:16– Merci beaucoup.
21:17La France debout, c'est encore possible.
21:19Elle a peut-être un genou à terre, mais pas les deux.
21:22Nicolas Baverez, merci d'être venu aux éditions de l'Observatoire
21:26et puis sur les élections américaines.
21:27On va suivre évidemment ça avec intérêt cette semaine.
21:30Dans un instant, ce n'est pas Valérie Expert, c'est Benjamin Gleize
21:33qui sera avec Gilles Gansman pour les débats jusqu'à midi
21:37avant de retrouver André Bercoff.

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