• il y a 6 mois
À l'occasion d'une émission consacrée à l'histoire du sauvetage des enfants juifs du camp de Vénissieux sous l'Occupation, Céline Alonzo et André Bercoff reçoivent l'historienne Valérie Portheret, auteure de "Vous n'aurez pas les enfants" publié chez XO Éditions, et la romancière Anne Bassi, auteure de "Dieu le fit" publié aux éditions du Layeur.

Retrouvez La culture dans tous ses états tous les vendredis avec Céline Alonzo et André Bercoff à partir de 13h.

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##LA_CULTURE_DANS_TOUS_SES_ETATS-2024-06-07##

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News
Transcription
00:00Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org
00:30Ohé saboteur, attention à ton fardeau dynamique
00:36L'hymne de la résistance sur Sud Radio André Bercoff
00:39Le chant des partisans
00:42Aujourd'hui avec nos invités l'historienne Valérie Porteret et la romancière Anne Bassi
00:46nous allons vous raconter l'histoire inédite du plus grand sauvetage d'enfants juifs
00:50entrepris en France pendant l'occupation dans un camp, le camp de Vénicieux
00:55et nous allons aussi vous raconter l'histoire d'un haut lieu de la résistance André
00:59à savoir celui de Dieu le fit dans la Drôme, un lieu de la résistance civile
01:04Oui, c'est une histoire très très très forte et vous savez,
01:08quand on vend l'Israël, effectivement il y a la forêt des Justes
01:12les Justes sont tous ces non-juifs qui ont sauvé, sauvé littéralement
01:17des centaines, des milliers de juifs pendant l'occupation allemande
01:21et Valérie Porteret, l'historienne, a reconstitué ces heures
01:25dans un très très beau livre qui s'appelle « Vous n'aurez pas les enfants »
01:29Ce livre, c'est ce qui s'est passé au camp de Vénicieux
01:33Il faut rappeler très rapidement, le 26 août 1942, pour répondre aux exigences des nazis
01:39le gouvernement de Vichy ordonne la grande rafle des juifs étrangers dans la région de Lyon
01:43Au petit matin, ils sont 1016 à être arrêtés et rassemblés au camp de Vénicieux
01:48Dans la nuit du 28 au 29 août 1942, des membres d'œuvres sociales et charitables
01:53présents dans l'enceinte du camp, réussissent à convaincre les parents
01:56d'abandonner leurs enfants et de les confier à une association interconfessionnelle
02:00l'amitié chrétienne, seule façon de les sauver
02:04108 enfants sont exfiltrés du camp, puis cachés dans différents lieux jusqu'à la fin de la guerre
02:09545 adultes, eux, seront conduits à Drancy, puis à Auschwitz
02:14où la grande majorité d'entre eux sera gazée
02:17Plusieurs enfants ont été requis par des familles d'accueil et des institutions à Dieu le Fils
02:22et à ses alentours, c'est là que se déroule l'intrigue du nouveau roman d'Anne Bassi
02:26Dieu le Fils, dans lequel elle rend hommage, notamment aux Justes
02:31Et cette citation qui est très très belle d'Albert Camus
02:34commence le livre en exergue de Anne Bassi
02:37Notre monde n'a pas besoin d'âmes tièdes, il a besoin de corps brûlants
02:41Et effectivement, appel au corps brûlant, on en a beaucoup, beaucoup besoin aujourd'hui, Céline
02:46Et oui, les Juifs de France, qui étaient ces hommes et ces femmes
02:49qui ont risqué leur vie pour sauver des Juifs
02:51Après la guerre, que sont devenus les enfants sauvés
02:54et que sont devenus, effectivement, les sauveteurs ?
02:56Aussi, répondons dans un instant sur Sud Radio, donc avec Valérie Porteret
03:00et Anne Bassi, alors restez avec nous, on revient dans quelques instants
03:06Sud Radio, la culture dans tous ses états
03:08André Bercoff, Céline Alonso
03:10Vous n'avez réclamé la gloire, ni les larmes
03:15Ni l'orgue, ni la prière aux agonisants
03:20Onze ans déjà, que cela passe vite onze ans
03:25Vous vous étiez servi simplement de vos armes
03:30La mort n'éblouit pas les yeux des partisans
03:33Strophe pour se souvenir, sur Sud Radio, interprétée par Léo Ferré
03:37Ce sublime poème de Louis Aragon rend hommage aux résistants immigrés
03:40André Bercoff, et il nous plonge
03:43dans une période très sombre de notre histoire
03:45André, pour en parler, nous avons le plaisir de recevoir
03:47la romancière Anne Bassi
03:49qui publie « Dieu le fit » aux éditions Marc Page
03:52et l'historienne Valérie Porteret
03:54auteure d'une œuvre magistrale sur les heures tragiques du camp de Vénissieux
03:59Bonjour à vous et merci d'être avec nous sur Sud Radio
04:02Alors Valérie Porteret, votre livre paru aux éditions Ixo
04:06s'intitule « Vous n'aurez pas les enfants »
04:10Que signifie ce titre ?
04:12C'est le titre d'un tract des mouvements de la résistance de Lyon
04:18qui a été balancé dans les rues au moment
04:22où les autorités de Vichy s'apprêtaient à vouloir reprendre
04:26les 108 enfants qui venaient d'être sauvés de Vénissieux
04:31« Vous n'aurez pas les enfants »
04:33je peux vous le citer, il est dit
04:35« Le conflit est ouvert, le conflit est public
04:38L'église de France se dresse contre l'ignoble tartarin raciste
04:42Français de toute opinion, de toute croyance
04:45écoutez l'appel de vos consciences
04:47ne laissez pas livrer des innocents aux bourreaux »
04:50Alors rappelez-nous ce qui s'était réellement passé
04:53cette fameuse nuit du 26 août 1942
04:56Alors le 26 août 1942 se déclenche une vaste opération
05:00de police et de gendarmerie
05:02qui est organisée sur l'ensemble des dix départements
05:06qui constituent en fait cette région de Lyon
05:09et elle vise en fait tous les juifs étrangers
05:12qui sont rentrés en France après le 1er janvier 1936
05:16et de nationalités allemandes, ex-autrichiens, polonais
05:20dansigois, létons, sarrois, tchécoslovaques
05:24estoniens, soviétiques et réfugiés russes
05:27Alors en fait à l'aide de fiches de recensement
05:30les préfets ont élaboré justement des listes
05:33de ces juifs arrêtés avec des colonnes
05:36qui mentionnaient en fait leur état civil
05:39leur nationalité, leur domicile, leur profession
05:42et leur situation de famille
05:45Ensuite pour que le coup de filette soit le plus large possible
05:49les préfets étaient tenus de s'assurer
05:52que la population française ne vienne pas en aide
05:55aux personnes visées par l'Arabe
05:57et puis notamment pour parer au questionnement éventuel
06:01des personnes lors de leur arrestation
06:04une réponse avait été préparée d'avance
06:07comme quoi en fait ces personnes seraient dirigées
06:11en Pologne dans la région de Lublin
06:14où devrait être créé un état israélite
06:18Et enfin côté pratique, il était demandé
06:22d'exiger de ces personnes de ne réunir
06:25en quelques minutes que quelques effets personnels
06:29notamment du lâche de corps, une ou deux couvertures
06:33Et au total, 1016 juifs étrangers
06:37hommes, femmes et enfants sont arrêtés
06:40à leur domicile en général entre 4 et 5 heures du matin
06:44et dirigés au camp de Vénissieux
06:46qui se situe dans la proche banlieue de Lyon
06:49Et donc des résistants avaient eu vent
06:52avaient eu connaissance dès le 8 août
06:54de cette grande rafle qui se préparait
06:58Alors c'est Gilbert Lesage
07:00dès le 8 août qui organise en fait une réunion
07:04avec les grands personnages de l'amitié chrétienne
07:08que sont l'abbé Glasberg, juif ukrainien
07:10converti au catholicisme
07:12le père Chaillet qui est un théologien
07:15qui fait partie du groupe très restreint
07:18des catholiques lyonnais
07:20qui demandent une relecture des textes bibliques
07:22qui demandent un travail interconfessionnel
07:26Et également, ils ont mis au courant
07:29des personnes de l'Osée
07:31dont Charles Lederman
07:33votre grand-père, Anne
07:35qui était depuis 1941
07:38responsable du bureau lyonnais de l'Osée
07:41une œuvre de secours notamment aux enfants
07:46Et oui, votre grand-père, Anne
07:48a été un des acteurs, on peut dire
07:51principaux de cette
07:54résistance
07:56Principaux, je ne sais pas
07:58en tout cas un des acteurs, c'est certain
08:00il a été très impliqué
08:02sans doute aussi
08:04j'en avais un peu parlé avec lui
08:06du fait qu'il était avocat
08:08et cette analyse des textes
08:10qui a été faite de l'exception
08:12à la déportation pour les enfants mineurs
08:14non accompagnés
08:16c'était une interprétation des textes
08:18qu'il fallait réussir à faire
08:20en application d'une loi de 1886
08:22qui permettait de faire des délégations
08:24de paternité
08:26sans doute que son intervention
08:28était également
08:30encore plus justifiée
08:32et appréciée grâce à ces analyses
08:34de textes qu'il a réussi à faire
08:36En fait, les résistants
08:38à l'époque, on peut dire qu'ils ont mis
08:40en place, Valérie Porteret
08:42une sorte vraiment de stratagème
08:44pour sauver ces enfants
08:46et se sont appuyés justement sur ce texte
08:48dont vous parliez, Anne Bassi
08:50Pour revenir au 8 août
08:52déjà ce qu'il faut bien comprendre
08:54c'est que Gilbert Lesage
08:56qui leur fait cette proposition
08:58de les accompagner au camp de Vénissieux
09:00pour participer en fait officiellement
09:02au triage des personnes
09:04qui seront arrêtées
09:06Gilbert Lesage est en fait un résistant
09:08et il est connu
09:10de ces différentes œuvres
09:12qui travaillent déjà depuis deux ans
09:14à l'accueil, à l'entraide
09:16et au sauvetage
09:18des juifs qui sont
09:20pourchassés. Or
09:22la proposition qu'il leur a faite
09:24c'est en réalité de rentrer au camp
09:26de Vénissieux, de participer
09:28à la commission de criblage
09:30soit pour vérifier que les personnes
09:32arrêtées étaient bien arrêtables
09:34c'est-à-dire conformément
09:36en réalité au texte
09:38soit de participer
09:40au sauvetage clandestin
09:42et notamment en falsifiant des papiers
09:44c'est-à-dire
09:46de façon illégale
09:48mais déjà par rapport
09:50au sauvetage légal qui pouvait être
09:52au camp, il est vrai que
09:54ces personnages
09:56de l'amitié chrétienne et de l'osée
09:58étaient très importants, notamment
10:00parce qu'ils parlaient plusieurs
10:02langues et que les personnes
10:04qui étaient arrêtées au camp
10:06ne parlaient pas français et que donc
10:08ils allaient s'adresser aux autorités
10:10en allemand, en yiddish
10:12et
10:14donc en réalité ça aurait été
10:16impossible.
10:18Pour résumer, on proposait à ses parents
10:20d'abandonner leurs parents
10:22au profit de cette association
10:24d'amitié chrétienne
10:26en lui cédant
10:28leur droit de paternité
10:30mais qu'est-ce qu'ils ont dit aux parents
10:32pour les convaincre de le faire ?
10:34En réalité
10:36au moment où la proposition
10:38est faite le 8 août
10:40à l'amitié chrétienne qui sert
10:42auparavant à d'autres œuvres
10:44de l'osée, la cimade
10:46à des éclaireurs
10:48de participer au sauvetage
10:50on a 11 exemptions
10:52donc
10:54au moment où ils sont dans le camp
10:56le 26 août, il n'y a plus
10:58que 6 exemptions
11:00mais ils se rendent donc compte
11:02très vite qu'en fait il n'y a qu'eux
11:04qui sont au courant et que les autorités
11:06du camp, il y a eu tellement
11:08d'ordres et de contre-ordres, ils ont
11:10le doute en vérité sur ce qu'ils savent
11:12le 28 août
11:14en réalité, ils ont
11:16déjà préparé
11:18le sauvetage de près de la moitié des internés
11:20du camp, mais il y a un message
11:22téléphonique qui est arrivé
11:24qui demandait qu'au moins 800 personnes
11:26soient déportées, et là ils ont pris peur
11:28ils se sont dit, on vient de réaliser
11:30pratiquement le travail de triage
11:32que les policiers auraient été incapables de faire
11:34et là ils nous demandent de faire du chiffre
11:36et là on nous demande de faire du chiffre et en gros
11:38tout ce qu'on a réussi
11:40de faire, ça va être annulé
11:42donc à un moment, ils ont même eu
11:44une panique
11:46tout à fait
11:48et puis finalement, ils ont mis
11:50en place un stratagème pour sauver
11:52tous les enfants, alors ça c'est
11:54d'un côté la perspicacité de Gilbert Lezache
11:56celui qui est à la tête du service social
11:58de Vichy, qui dit
12:00écoutez, on n'a qu'à mettre en avant
12:02le télégramme
12:04du 5 août
12:06et notamment
12:08l'alinéa qui dit que tous les enfants
12:10non accompagnés de moins de 18 ans
12:12peuvent
12:14rester sur le sol français
12:16et de l'autre côté, l'abbé Glasberg
12:18et le père Chaillet
12:20en compagnie de Jean-Marie Soutoux
12:22vont décider d'aller dans toutes
12:24les baraques pour
12:26persuader les parents de signer
12:28un acte d'abandon
12:30de paternité en faveur
12:32de l'amitié chrétienne
12:34qui a été patronnée notamment par le cardinal
12:36Gilbert. Donc ils vont réussir, pour avancer
12:38dans l'histoire, ils vont réussir à exfiltrer
12:40108 enfants, ils vont être cachés
12:42dans différents lieux dans cette région
12:44notamment à Diolophie
12:46Anne Bassy, où se déroule
12:48l'intrigue de votre deuxième roman
12:50dans lequel effectivement, on peut dire
12:52c'est un hommage à la résistance française
12:54vous-même, qu'est-ce qui vous a donné envie d'écrire
12:56sur ce sujet ?
12:58Ce qui m'a donné envie d'écrire, c'est surtout
13:00le thème des secrets de famille
13:02et des enfants cachés, qui est un thème qui m'intéresse
13:04depuis longtemps et j'avais écrit un premier roman
13:06sur les secrets de famille
13:08c'est vrai que l'histoire des
13:10enfants cachés qui ont appris tardivement
13:12qu'ils ont été des enfants cachés
13:14et qu'ils étaient juifs
13:16ça m'a toujours fascinée
13:18de comprendre comment on construit son identité
13:20quand on nous cache, en fait
13:22une information aussi importante
13:24ensuite, c'est vrai que Diolophie
13:26l'histoire de Diolophie, Vénitieux
13:28je la connais à travers une histoire personnelle
13:30de l'engagement de mes grands-parents
13:32de mon grand-père et de ma grand-mère aussi
13:34et d'une autre partie de membres de ma famille
13:36et j'ai eu envie
13:38d'écrire un roman
13:40en essayant de rendre hommage au juste
13:42mais plus globalement à la résistance
13:44puisqu'il y a des résistants qui ne peuvent pas être qualifiés
13:46de justes
13:48et de romancer tout ça
13:50donc ce n'est pas une histoire
13:52personnelle.
13:54Oui, c'est pas votre histoire personnelle
13:56enfin je veux dire, votre histoire pavouane
13:58vous n'avez pas l'âge de cela
14:00mais je voulais savoir, qu'est-ce que ça pouvait être
14:02pas la question aux deux
14:04mais aussi à la romancière
14:06qu'est-ce que ça fait quand on dit à des parents
14:08écoutez, vous devez dire
14:10vos enfants vont changer de nom, vous devez y renoncer
14:12en tout cas pour le moment
14:14et dire, voilà, c'est plus à vous
14:16voilà, si vous voulez les sauver
14:18il n'y a qu'une chose à faire, qu'ils changent
14:20vous n'êtes plus leurs parents
14:22en tout cas pour le moment, ils changent de nom, etc.
14:24Que pouvait être
14:26vous avez eu des réactions
14:28que pouvait être la réaction des parents
14:30ou de certains parents à ce moment-là, quand on dit ça
14:32La réaction des parents
14:34à qui on demande d'apprendre à leurs enfants
14:36de se taire ?
14:38C'est ça, d'apprendre à leurs enfants de se taire
14:40ils n'ont plus le même nom, ils n'ont plus la même famille
14:42ils n'ont plus leur père et leur mère
14:44Alors moi j'ai eu des récits directs d'enfants
14:46auxquels les parents leur ont dit
14:48maintenant tu vas devoir apprendre à changer
14:50de prénom, de nom
14:52et à mentir
14:54j'ai pas parlé avec les parents
14:56qui ont demandé aux enfants
14:58et ce que j'ai souvent remarqué
15:00et entendu, c'est que ces enfants
15:02ont essayé d'être des enfants sages
15:04en fait, et d'accepter
15:06et de dire je vais faire ce que papa et maman me disent
15:08presque comme si c'était une condition suspensif
15:10pour les revoir
15:12de façon consciente ou inconsciente
15:14donc ils ont appris à mentir
15:16alors moi, en tant que romancière
15:18j'ai fait le choix dans le roman
15:20de créer un personnage
15:22donc fictif, Christophe, qui est un nouveau-né
15:24puisqu'il a quelques heures
15:26quand il quitte sa mère biologique
15:28pour être accueilli
15:30dans cette famille de résistants catholiques
15:32donc on n'a pas à lui apprendre
15:34de mensonges, c'est préverbal
15:36il n'a pas la mémoire de cela
15:38et en général, Valérie Porté, vous avez eu des témoignages
15:40oui, bah moi, en fait
15:42j'ai commencé
15:44mon travail en 1992
15:46et à partir de 2012
15:48je suis partie avec un caméraman
15:50recueillir la parole
15:52des enfants sauvés
15:54et des enfants de sauveteurs
15:56que j'ai pu retrouver
15:58et ça a été une parole vraiment
16:00précieuse pour connaître
16:02en réalité qu'est-ce qu'un enfant
16:04a vécu de l'intérieur
16:06notamment
16:08alors que ça soit par exemple
16:10au moment de la rafle
16:12ou de l'exode, même encore avant
16:14de la rafle, de la séparation
16:16qui est le pire moment
16:18de ces enfants
16:20cette nuit du 28 au 29 août
16:221942
16:24au camp
16:26où en réalité
16:28ces enfants
16:30ont fait la promesse
16:32à leurs parents
16:34de toujours
16:36rester dans la communauté
16:40il y avait quand même un aspect très
16:42religieux
16:44de garder, de faire les gestes de prière
16:46en tout cas
16:48si la situation
16:50le permettait
16:52et la promesse avait également été faite
16:54par les sauveteurs aux parents
16:56que dès que la situation
16:58le permettrait, les enfants
17:00seraient ensuite remis
17:02à leur famille rescapée
17:04puisque le sauvetage
17:06pour maintenir les suites positives
17:08du sauvetage jusqu'à la fin de la guerre
17:10entre 1942 à 1944, il fallait
17:12mettre ces enfants dans des familles non-juives
17:14donc
17:16aussi dans les paroles
17:18des enfants sauvés, on a
17:20aussi vu ce que l'enfant sauvé
17:22a vécu de l'intérieur, un deuxième
17:24déchirement qui a été celui de sa séparation
17:26avec ses sauveteurs
17:28parce que les sauveteurs
17:30qu'on a à Diolfi, qu'on a à
17:32Poit-la-Valle, qu'on a à Beauvalon
17:34qu'on a dans le village inconnu
17:36de Saint-Sauveur de Montagut en Ardèche
17:38qu'on a au Chambon
17:40tous les témoignages qu'on a de ces enfants
17:42parlent d'un fait de sauveteur
17:44de coeur, c'est-à-dire des personnes
17:46qui non seulement les ont sauvées
17:48mais les ont aimées, et les ont aimées
17:50comme leurs propres enfants
17:52ce qui signifie quand même que les enfants
17:54sauvés en France, pour beaucoup
17:56et hormis certaines périodes
17:58plus particulières ou difficiles
18:00où le danger pointait, ils ont vécu
18:02de façon inclusive avec
18:04leur famille.
18:06C'était comme si c'était leur famille.
18:08Anne Bassi, vous écrivez ceci dans votre roman
18:10les enfants ont changé de nom et de prénom
18:12ils ont appris à faire le signe de croix et à cacher leur identité
18:14ils n'ont pas porté de tatouage
18:16sur leur bras mais dans leur tête
18:18le sentiment d'abandon ne les a jamais
18:20quittés.
18:22Oui, ça c'est quelque chose qu'on entend
18:24quand on peut parler avec ces enfants-là
18:26ils ont toujours gardé à l'esprit
18:28ce moment
18:30de la déchirure
18:32alors il y a ceux qui ont retrouvé leurs parents
18:34il y en a eu heureusement, et puis ceux qui les ont
18:36jamais retrouvés, effectivement qui ont créé
18:38des liens très forts avec leurs parents
18:40leurs parents adoptifs
18:42et avec leur famille
18:44on sait qu'ils sont aussi restés
18:46amis et très proches
18:48et des frères et sœurs de cœur
18:50avec les enfants de ces
18:52parents, de ces justes en fait.
18:54Alors que sont devenus les 108 enfants sauvés
18:56du camp de Vénitieux, Valérie Porteret
18:58vous avez parcouru le monde pour les retrouver
19:00vous avez réussi à en identifier
19:0290
19:04et à en rencontrer
19:06et à en rencontrer 24
19:08alors comment avez-vous fait ? Que vous ont-ils
19:10raconté de particulier ?
19:12Vous nous direz tout dans un instant sur Sud Radio
19:14restez avec nous.
19:37Je n'oublierai jamais l'illusion
19:39tragique
19:43Il est lu par Louis Aragon d'ailleurs
19:45Oui exactement, André Vercoff
19:47Ce poème sur la prise de Paris
19:49en 40 est un moment de vérité où chacun
19:51devait choisir entre courage et résistance
19:53ou lâcheté et collaboration
19:55écrivez-vous Anne Bassi dans votre
19:57deuxième roman Dieu le Fille paru
19:59aux éditions Marque Page
20:01alors Valérie Porteret au terme
20:03de 25 ans de recherche, vous avez
20:05réussi à reconstituer le parcours de
20:0790 enfants sur les 108 rescapés
20:09du camp de Vénitieux
20:11vous en avez interviewé 24
20:13comment y êtes-vous
20:15parvenue ? Ca semble incroyable
20:17cette enquête
20:19Oui surtout qu'au départ
20:21pareil en 92-93
20:23on n'avait pas de
20:25retrouvée de liste
20:27de ces enfants exfiltrés de Vénitieux
20:29donc on commençait une enquête
20:31au résultat improbable
20:33c'était
20:35une enquête très
20:37importante puisque quand j'avais rencontré
20:39Klarsfeld
20:41il m'avait bien précisé qu'il avait pointé du doigt
20:43cette affaire comme étant
20:45un tournant de l'été 42
20:47dans Vichy aux Juifs
20:49Serge Klarsfeld
20:51donc c'est vrai que
20:53quand même
20:55du poids quand Serge Klarsfeld
20:57vous dit c'est une affaire éminemment
20:59importante
21:01qui explique ce tournant
21:03de l'été 42, de l'engagement
21:05des populations
21:07j'ai pas le temps de faire
21:09cette enquête
21:11c'est vrai
21:13Qu'est-ce qui vous a permis de visualiser
21:15de comprendre
21:17l'organisation de ce camp ?
21:19Après
21:21tout le travail en archive
21:23m'a permis
21:25de trouver des pièces
21:27manquantes et par exemple
21:29quand vous me parlez du camp
21:31je vais penser au témoignage du docteur Adam
21:33qui lui avait la responsabilité
21:35du sauvetage médical
21:37dans le camp et qui tout de suite
21:39après guerre a écrit un témoignage
21:41et dessiné un croquis du camp
21:43vu d'avion. Et puis après
21:45en 2012
21:47j'ai pu retrouver
21:49un des travailleurs indochinois
21:51qui était là au moment des rafles
21:53et qui m'a dit à la fin
21:55de son témoignage qu'il avait réalisé
21:57le projet du camp en 1941
21:59et puis enfin en 2018
22:01j'ai pu
22:03identifier un fond
22:05il est unique au monde, c'est les seules photos
22:07des juifs internés
22:09qui a été prise d'ailleurs au camp de Vénitieux
22:11par un autre travailleur indochinois
22:13Chui Ngo Tron
22:15et qui
22:17nous a laissé ce cliché
22:19incroyable où j'ai pu reconnaître
22:21même des enfants que j'avais filmés
22:23et j'ai pu les reconnaître
22:25justement parce qu'en fait
22:27quand je les ai interviewés, ils étaient plus âgés que leurs parents
22:29à l'âge de l'arrestation
22:31mais il y avait des albums photos
22:33et j'avais vraiment en tête
22:35ces photos
22:37et puis de toute façon j'avais les albums sur mon ordinateur
22:39et c'est vraiment
22:41des fonds photos qui m'ont vraiment
22:43permis de progresser sur ma recherche
22:45et si ce n'est même de
22:47comprendre des témoignages
22:49d'enfants, juste pour vous donner un exemple
22:51mon premier témoin
22:53Claude Clévis qui avait 17 ans
22:55au camp de Vénitieux me dit
22:57quand tous les enfants ont été réunis
22:59dans le réfectoire du camp
23:01dans la nuit, au même
23:03moment, les parents étaient
23:05conduits à la gare Saint-Priez pour être
23:07conduits à Drancy
23:09et on les a vus, leur visage
23:11collé aux fenêtres pour tenter
23:13d'apercevoir une dernière fois leur enfant
23:15et c'était une scène incroyable
23:17de film, je me suis dit comment
23:19expliquer ça et en fait
23:21grâce à ce fond photo
23:23on a des photos qui ont été prises dans le réfectoire
23:25on comprend très bien en visualisant
23:27qu'effectivement quand les convois
23:29des adultes sont partis, ils ont longé
23:31ce réfectoire vitré et qu'ils ont
23:33pu apercevoir une dernière fois
23:35leur enfant. Et oui mais ces enfants
23:37alors justement qui ont assisté
23:39au départ, la scène dans votre livre
23:41elle est terrible, est-ce
23:43qu'ils savaient ce qu'il allait
23:45se jouer dans ce camp
23:47à ce moment précis ?
23:49Il y a eu des
23:51tout, que ce soit les sauveteurs, les
23:53assistants sociaux ou les
23:55enfants que j'ai pu interroger
23:57la nuit du 28 au 29
23:59août, c'est pour eux une nuit
24:01d'épouvante, c'est des cris
24:03des pleurs, une panne d'électricité
24:05en plus qui s'est ajoutée, un orage
24:07c'est
24:09vraiment
24:11la catastrophe. Pour autant on a
24:13certains enfants qui toute leur vie
24:15ont vécu sans savoir ce qui s'était joué
24:17c'est délicieux, parce qu'ils étaient trop petits
24:19parce qu'aussi certains parents
24:21ne leur ont pas dit au revoir
24:23ils n'ont pas pu leur dire au revoir
24:25donc ils sont allés goûter les enfants
24:27et ils n'ont jamais revu leurs parents
24:29donc en réalité
24:31parfois j'ai rencontré
24:33ces anciens enfants
24:35sauvés
24:37pratiquement au seuil de leur vie
24:39et ils ne savaient toujours pas ce qui s'était joué
24:41et c'est vrai que quand on a
24:43travaillé avec eux et notamment
24:45et surtout
24:47on a travaillé, c'était comme un pulse
24:49en fait eux, ils m'apportaient
24:51ce qu'aucune archive écrite m'apportait
24:53c'est-à-dire ce qu'ils avaient vécu, ce qu'ils avaient
24:55ressenti de l'intérieur, moi je leur apportais
24:57une documentation et surtout
24:59la preuve de ce qui
25:01s'était joué à Vénicieux, c'est-à-dire les
25:03actes de délégation de paternité
25:05puisque quand j'ai commencé en 92
25:07on pensait qu'elles avaient disparu
25:09et je les ai retrouvées en 2003
25:11aux archives départementales du Rhône
25:13Anne Bassi, je voudrais
25:15vous demander, qu'est-ce que
25:17vous, vous avez choisi, j'ai lu votre livre
25:19vous m'avez fait lire d'ailleurs avant qu'il ne paraisse
25:21j'ai eu le plaisir
25:23de le lire à ce moment-là mais
25:25qu'est-ce qui a fait que vous avez
25:27expliqué pourquoi vous avez évidemment
25:29lu ce sujet, vous avez
25:31répondu à la question de Céline mais
25:33pourquoi vous en avez
25:35fait un avocat, pourquoi vous avez
25:37choisi cet intérêt-là
25:39Alors c'est vrai que
25:41le métier d'avocat c'est un métier que je connais bien
25:43Bah j'imagine oui, vous êtes avocate
25:45même, en tout cas vous l'avez exercée longtemps
25:47Et
25:49il y a beaucoup d'enfants cachés
25:51qui sont devenus des avocats
25:53Ah bon ?
25:55Je les ai rencontrés, pas dans le cadre de ma
25:57de mon parcours professionnel mais
25:59j'ai remarqué et ça m'a toujours
26:01intrigué, je ne fais pas de lien de causalité
26:03directe et c'est vrai que
26:05j'aime bien avoir comme
26:07personnage principal
26:09Je dis ça parce que je ne suis pas sûre que Christophe ce soit le héros
26:11en réalité dans mon livre, mais j'aime bien avoir
26:13comme personnage principal un avocat
26:15pour arriver à le décrire
26:17tant dans son univers professionnel que
26:19dans l'évolution de cet univers professionnel
26:21qu'effectivement dans ses interrogations
26:23ses angoisses et même
26:25ses certitudes
26:27Et oui, et votre
26:29héros adolescent, il faut le préciser
26:31il s'était vraiment promis de le devenir
26:33avocat, il avait une réelle revanche
26:35à prendre sur la vie
26:37et il dit
26:39« Ma plume sera mon revolver et le verbe
26:41mon glaive » écrivez-vous Anne Bassi
26:43Oui, c'est-à-dire que quand il est confronté à cette
26:45injustice qui est, sans dévoiler
26:47le livre, la saisie
26:49de ce poulain
26:51qu'il adore et qu'est le sien
26:53tout d'un coup
26:55il y a une partie en lui
26:57qui est sans doute
26:59très sensibilisée à l'injustice
27:01qui s'exprime comme vous venez de le dire
27:03Céline, et le lecteur
27:05comprend, enfin j'espère, qu'effectivement
27:07son avenir, son destin
27:09va être de quitter la ferme
27:11cet univers agricole pour devenir
27:13sans doute un avocat
27:15ou en tout cas il va exercer
27:17il pourrait aussi devenir procureur
27:19je pense qu'il y a un moment où on peut douter
27:21Mais il y a eu réaction contre l'injustice
27:23et il y a des revanches à prendre
27:25Oui, tout à fait
27:27Et effectivement il y a un lourd fardeau qui pèse
27:29sur ses épaules depuis l'enfance, on le sent
27:31tout au long de votre intrigue
27:33Un jour il découvrira à l'âge adulte
27:35deux secrets de famille et il sera vraiment
27:37en état de choc quand il découvrira effectivement
27:39ces secrets. Je voudrais dormir
27:41des années entières jusqu'à effacer mon drame
27:43j'aurais préféré ne jamais naître pour ne pas
27:45avoir à endurer cela
27:47je traverse un abîme
27:49de silence, le silence de ceux qui savaient
27:51le silence des témoins, le silence des morts
27:53pourquoi n'ont-ils rien dit ?
27:55écrivez-vous Anne Bassi
27:57Justement Valérie Bardet, le silence
27:59est-ce qu'on peut dire aujourd'hui
28:01avec le recul
28:03que c'est juste, que c'est cela
28:05que vous écrivez
28:07aussi Anne Bassi dans ce roman
28:09alors certains ont dit
28:11oui mais vous comprenez c'était une infime
28:13minorité, alors évidemment
28:15il suffit d'un juste pour
28:17ne pas détruire Gomorre
28:19ou Sodome, mais
28:21est-ce que c'était vraiment une infime minorité
28:23ou ce sont des gens
28:25simples qui ont réagi
28:27uniquement parce qu'ils trouvaient que c'était pas possible, c'était trop
28:29scandaleux, c'était trop
28:31trop immonde, trop terrible
28:33de laisser comme ça mourir des enfants
28:35c'était vraiment une
28:37réaction humanitaire
28:39pour
28:41la plupart des sauveteurs
28:43d'ailleurs, pourquoi aujourd'hui
28:45on ne peut pas expliquer l'ensemble du sauvetage
28:47des trois quarts des juifs de France
28:49en donnant le chiffre
28:51des justes parmi les nations
28:53tout simplement parce qu'on a
28:55une quantité d'anonymes
28:57de héros dont on ne connaîtra
28:59jamais l'identité
29:01pas du tout, et d'ailleurs
29:03on l'a vu moi, quand j'ai découvert le petit village
29:05de Saint Sauveur de Montagut
29:07en 2013
29:09en fait j'ai compris, parce que
29:11si j'ai pu monter mes
29:13médailles de justes
29:15les dossiers avec mes enfants sauvés
29:17c'est parce que les enfants des sauveteurs
29:19ont accepté mais en disant
29:21nos parents auraient
29:23jamais voulu
29:25c'est à dire que
29:27en réalité
29:29je pense que
29:31vous voyez, dans les familles françaises
29:33aussi on oublie assez de dire
29:35et dans les campagnes que beaucoup
29:37des familles avaient déjà
29:39perdu les leurs lors du premier conflit
29:41le 14-18
29:43alors moi en tout cas
29:45j'ai toujours entendu
29:47ma grand-mère me dire, est-ce que tu crois
29:49sincèrement que tes arrière-grands-parents
29:51dans leur petit village
29:53dans le Jura
29:55auraient accepté
29:57qu'on touche
29:59à ces personnes juives
30:01qui étaient venues, qu'on avait
30:03accueillies et parfois aidées depuis
30:051940 dans les villages, il y avait
30:07au moment de l'arabe, pour vous donner un
30:09exemple, à Saint Sauveur
30:11les familles juives qui vont
30:13être arrêtées sont arrivées depuis
30:15l'exode de 40, on leur a donné
30:17un travail, on les a aidé
30:19à se nourrir, un travail dans ce qu'ils savaient faire
30:21t'es cordonnier
30:23un travail de cordonnier
30:25à manger, on les
30:27a accueillis même dans le temple pour qu'ils
30:29puissent célébrer Shabbat
30:31on les considère comme le
30:33peuple élu de Dieu, on est fier
30:35de les recevoir, il y a cette raf
30:37les gens tout de suite
30:39racontent sur la place du village
30:41se réunissent, envoient
30:43certains des leurs jusqu'à Lyon pour savoir
30:45ce qu'il advient à ces gens
30:47et quand ils apprennent le sauvetage des enfants
30:49les reprennent
30:51sur recommandation des parents à l'intérieur du
30:53camp, ils disent il faut les redonner à ces gens-là
30:55tellement les liens sont serrés, les liens de confiance
30:57et c'est eux qui vont protéger
30:59ces enfants-là jusqu'à la fin de la guerre
31:01par exemple à Saint Sauveur
31:03cette
31:05histoire-là, elle l'est continuée
31:07dans le siblant, c'est-à-dire dans les
31:09rapports d'amour
31:11qui les liaient, mais
31:13pas dans une surexposition
31:15c'est ça, ils n'avaient pas
31:17besoin de se montrer pour dire
31:19ils continuaient leur histoire
31:21dans le temps
31:23mais c'est vrai que quand l'historienne est arrivée
31:25donc moi, je leur ai dit que
31:27j'avais besoin
31:29de cette parole, j'avais besoin
31:31de rentrer dans cette enquête
31:33et d'essayer ensuite de la
31:35transmettre aux jeunes générations
31:37c'est ça qui a sans doute dû les
31:39toucher, parce que
31:41quand même ils se sont rendus compte qu'il y avait
31:43urgence aussi de parler du sauvetage
31:45on n'en parle jamais parce qu'on ne sait pas
31:47comment l'expliquer en réalité
31:49c'est important
31:51de relever que beaucoup de
31:53femmes ont participé à ce sauvetage
31:55Anne Bassi, vous leur rendez un
31:57très bel hommage dans votre roman
31:59vous parlez notamment de cette
32:01figure féminine de la résistance
32:03Marguerite Souberan qui elle avait créé
32:05une école à Beauvalon qui a été
32:07vraiment un lieu de refuge
32:09pour beaucoup d'enfants
32:11c'est vrai que la résistance féminine
32:13on en a moins parlé
32:15alors que les femmes ont eu des rôles
32:17très importants, notamment parce que
32:19on se méfiait moins d'elles
32:21donc elles n'ont pas toujours eu des rôles genrés
32:23dans l'assistance médicale par exemple
32:25elles ont eu des rôles stratégiques
32:27elles ont été responsables parfois
32:29d'imprimeries clandestines
32:31on en a moins parlé
32:33or c'est vrai que j'avais envie
32:35d'attirer l'attention
32:37sur des rôles différents
32:39effectivement il y a Marguerite Souberan qui est extrêmement connue
32:41d'un point de vue historique
32:43à Diolophie il y avait Jeanne Barnier
32:45qui était aussi la responsable
32:47à la mairie, qui a fait beaucoup de faux papiers
32:49et c'est pour ça que
32:51j'ai appelé Jeanne Prunier
32:53avec le prénom de Jeanne dans le roman
32:55c'était un clin d'œil
32:57mais c'est vrai que la vraie héroïne
32:59dans le roman, c'est pour ça que je dis que Christophe
33:01c'est le personnage principal, la vraie héroïne c'est la maman
33:03c'est Madame Lemaire
33:05et le père aussi
33:07mais il semblerait que les enfants
33:09soient accueillis, lorsqu'ils étaient jeunes
33:11par l'impulsion des femmes
33:13alors est-ce que c'est
33:15ce que je disais la dernière fois, est-ce que c'est la mère
33:17est-ce que c'est la femme, est-ce que c'est le féminin
33:19mais celles qui ont
33:21dit, celles qui ont accepté de prendre des enfants
33:23souvent quand ils n'avaient pas encore la parole
33:25alors est-ce que c'est plus simple, est-ce que c'est plus
33:27compliqué, ça je ne sais pas
33:29c'est vrai que je voulais rendre hommage à toutes ces femmes
33:31qui ont été exemplaires
33:33en fait
33:35c'est vrai que
33:37par rapport à ce que dit Anne
33:39moi je retrouve les paroles
33:41des enfants sauvés
33:43de ces femmes, ces femmes c'était des bras
33:45on a eu des bras
33:47pour nous prendre
33:49c'était le réconfort
33:51des bras maternels
33:53les hommes étaient par exemple
33:55à Saint-Sauveur, on se souvient
33:57Jean Baumel qui était sauvé, il a été accueilli
33:59chez les époux de Jo, donc il parle
34:01vraiment de cette femme
34:03les bras, et de l'homme
34:05c'était
34:07on ne discute pas les ordres
34:09mais en fait quand j'ai discuté
34:11avec l'enfant du sauveteur
34:13j'ai appris qu'en fait que quand
34:15Jean Baumel sous la Vénitieux dormait
34:17la nuit il y avait aussi des résistants
34:19qui venaient
34:21et donc c'était
34:23il fallait être aussi
34:25très prudent, et la prudence passait
34:27par une intransigeance
34:29c'était un peu ça, et puis les femmes c'est vrai
34:31qu'on avait eu beaucoup, on avait des veuves
34:33retrouvées aussi, ces femmes
34:35étaient vraiment
34:37heureuses de pouvoir accueillir
34:39un enfant, et souvent aussi
34:41on voit quand même cette notion
34:43du partage
34:45il y avait vraiment des femmes qui n'avaient
34:47rien, et qui repartageaient
34:49avec ces enfants, mais avec un
34:51grand bonheur. Oui parce qu'en plus c'était une
34:53situation économiquement difficile
34:55faut se rappeler
34:57est-ce que c'était que... Valérie Porteret
34:59comment ces enfants se sont reconstruits
35:01après la guerre ?
35:03Moi j'ai mis
35:05beaucoup de temps à comprendre
35:07chaque cas est très
35:09individuel, c'est-à-dire que vous n'allez pas avoir
35:11la même reconstruction si un enfant
35:13est devenu orphelin de ses deux
35:15parents après-guerre, s'il est
35:17devenu orphelin que d'un seul des parents
35:19ou s'il n'a perdu
35:21aucun des parents
35:23Chaque cas c'est très différent
35:25ça c'est une donnée
35:27très importante, et puis après
35:29moi ce que
35:31j'ai ressenti, c'est
35:33je les ai interrogés par exemple
35:35c'était quoi pour vous
35:37vous venger de Hitler ?
35:39Est-ce qu'il y a cette...
35:41Et en fait ils nous ont dit, bah nous en fait
35:43c'est d'avoir
35:45eu des enfants
35:47des
35:49arrières petits-enfants
35:51et aussi
35:53par certains côtés
35:55de savoir qu'on a écrit cette histoire
35:57par exemple le travail
35:59de Serge Carsfeld est souvent cité
36:01parce qu'il a mis des noms
36:03des visages
36:05et qu'après
36:07on met des histoires sur
36:09les noms et les visages
36:11et vous voyez ça c'est
36:13aussi une manière de
36:15les aider aussi à
36:17se reconstruire, en tout cas
36:19vous savez la plupart des enfants sauvés
36:21disent, et c'est très émouvant
36:23même quand un homme vous le dit à 90 ans
36:25vous savez en vieillissant
36:27aujourd'hui quand je me réveille
36:29la nuit je crie encore après ma mère
36:31Que faire pour que
36:33cette histoire emblématique de Vénitieux
36:35soit connue, transmise et expliquée
36:37la mémoire contre
36:39l'oubli et la barbarie
36:41on en parle dans un instant sur Sud Radio
36:43avec nos invités, à tout de suite
36:55...
37:07Louis Chédid sur Sud Radio
37:09qui rend hommage à Anne Franck
37:11André Bercoff, l'une des plus poignantes
37:13victimes de la seconde guerre mondiale
37:15Valérie Porteret
37:17l'histoire du sauvetage des enfants du camp de Vénitieux
37:19devrait être enseignée
37:21dans toutes les écoles de France
37:23et du monde
37:25comme l'a été le journal d'Anne Franck
37:27exactement, c'est vraiment
37:29le premier de mes voeux
37:31c'est que cette histoire rentre dans toutes les maisons
37:33dans toutes les écoles
37:35moi, Anne Franck, elle est en photo dans mon entrée
37:37et on pense à elle souvent
37:39elle est l'icône
37:41comme les enfants d'Isieux sont les
37:43icônes de la tragédie de l'enfance juive
37:45je pense que les enfants
37:47de Vénitieux
37:49pourraient incarner le sauvetage
37:51de l'enfance juive
37:53sachant qu'en plus, le lien entre les enfants
37:55d'Isieux et les enfants de Vénitieux
37:57se fond par une famille, la famille Tetelbaum
37:59deux enfants et la maman
38:01avaient été sauvés à Vénitieux
38:03deux autres vont être priés à Isieux
38:05et des suites de l'arrestation
38:07de ceux d'Isieux
38:09la police nazie va aller
38:11rechercher ces deux enfants et leur maman
38:13et les déporter, ce qui montre bien que
38:15si le sauvetage de Vénitieux
38:17n'avait pas réussi jusqu'au bout
38:19les 108 enfants seraient sans doute
38:21décédés
38:23à Auschwitz
38:25et la mémoire Anne Bassi
38:27est-ce que votre grand-père Charles Edelman
38:29votre grand-mère, est-ce que c'était
38:31vivace dans votre famille
38:33même si vous n'avez pas été
38:35eux n'ont pas été acteurs
38:37de cet épisode là
38:39mais est-ce que ça comptait
38:41est-ce que ça jouait pour vous dans la famille
38:43ou pas ?
38:45oui ça comptait beaucoup, je les ai toujours
38:47entendu parler de la résistance
38:49d'une part, ils étaient très engagés
38:51politiquement pour un monde
38:53meilleur, et ils ont été
38:55avocats, ils ont d'ailleurs
38:57ils se sont beaucoup occupés
38:59ensuite de la restitution des biens poliers
39:01ce qui les a occupés pendant plusieurs
39:03années, mais je crois que
39:05cette période de la
39:07résistance et des
39:09sauvetages
39:11c'était pour l'essentiel en fait parce que
39:13comme le disait Valérie
39:15contrairement à Isieux ou à d'autres
39:17rafles, c'est terminé de façon
39:19dramatique
39:21Vénitieux c'est l'espoir en fait
39:23Vénitieux c'est un sauvetage interconfessionnel
39:25d'hommes et de femmes qui seront pour
39:27certains qualifiés de justes, qu'ils ont
39:29fait au péril de leur vie
39:31parce qu'ils ont trouvé ça juste
39:33la définition
39:35du juste c'est
39:37ne pas être juif, sauver des juifs au péril de sa vie
39:39c'est pour ça qu'il y a toute une
39:41résistance juive d'ailleurs
39:43qui n'a pas pu être qualifiée
39:45de juste et ils l'ont fait
39:47parce qu'ils trouvaient ça juste, parce que c'était
39:49honnête de le faire
39:51parce que c'était inenvisageable
39:53de le faire autrement, sans rien attendre
39:55sans attendre aucune reconnaissance
39:57Valérie, porterez
39:59selon vous aujourd'hui, est-ce qu'on
40:01pourrait encore découvrir d'autres
40:03villages sauveteurs ?
40:05Je pense que
40:07la France
40:09on foule que des terres
40:11sauveuses, enfin une quantité
40:13de terres sauveuses
40:15c'est incroyable
40:17après, dans certains villages
40:19il y a eu un militia
40:21par exemple, qui a pu
40:23provoquer beaucoup de dommages
40:25mais un jour je me souviens très bien
40:27pour un colloque organisé par Serge
40:29Klarsfeld pour le 80e anniversaire de
40:31cette rafle du sauvetage, quelqu'un
40:33prend la parole et est ému
40:35en disant, mais comment
40:37avec tous les morts, tous les
40:39juifs exterminés
40:41vous pouvez parler du sauvetage
40:43et Serge Klarsfeld lui a dit, mais écoutez
40:45monsieur, pour conduire
40:47un convoi de mille personnes
40:49il suffit d'un conducteur, pour
40:51sauver une personne, il faut des centaines
40:53de personnes
40:55donc
40:57vous n'avez pas
40:59encore pris la mesure
41:01de la complexité
41:03du sauvetage, et ce qui montrait bien
41:05qu'aujourd'hui
41:07encore
41:09c'est un modèle de ce qu'il fallait
41:11faire, un modèle de ce qu'il faut toujours
41:13faire et qu'il faut l'enseigner
41:15en parler et expliquer
41:17comment...
41:19Alors la question que je vous posais à tous nous arrivons
41:21en fin d'émission, est-ce qu'à votre avis
41:23aujourd'hui en France, en 2024
41:25pas seulement pour les enfants
41:27juifs, pour d'autres enfants
41:29est-ce que ce serait encore possible
41:31ou est-ce que les divisions sont telles
41:33que ce serait...
41:35Est-ce que vous êtes optimiste ou pessimiste, encore une fois
41:37sans parler de tel ou de tel ou de tel
41:39ethnie ou autre
41:41est-ce que cette solidarité là, à votre avis
41:43pourrait encore exister ?
41:45Moi je pense que oui
41:47Je pense que oui
41:49parce que moi
41:51je pense que
41:53oui, mais qu'encore une fois
41:55il faut aller vers les jeunes
41:57leur donner du souffle
41:59que
42:01en fait
42:03le sauvetage est pédagogique
42:05et je pense que
42:07si on donne du souffle
42:09on trouvera
42:11comme pour la seconde guerre mondiale
42:13des idées
42:15des jeunes qui
42:17veulent s'engager
42:19et surtout du courage
42:21Il faut accepter le labeur et ne pas
42:23avoir peur des autres en quelque sorte
42:25Tout à fait
42:27Je crois quand même qu'il y a une grande différence
42:29entre aujourd'hui
42:31et cette époque
42:33c'est que les justes l'ont fait au péril de leur vie
42:35parce qu'aujourd'hui on voit qu'il y a des
42:37élans de solidarité, des actes concrets
42:39notamment, on y pense tous, vis-à-vis
42:41des étrangers
42:43c'est tout à l'honneur de ceux
42:45qui se sont engagés dans ce combat, bien sûr
42:47enfin ils ne sauvent aucun étranger
42:49au péril de leur vie
42:51Oui on se demande si le péril de la vie
42:53existe encore, enfin il existe bien sûr
42:55mais on espère
42:57qu'on n'aura pas à avoir
42:59à le prouver ou pas
43:01mais en tout cas, ce que vous avez fait
43:03Valérie, ce que vous avez fait
43:05Anne, ce qui est extrêmement important
43:07c'est de porter le témoignage
43:09et de raconter cette mémoire
43:11parce que qui vit sans mémoire
43:13vit sans rien
43:15Merci à vous deux d'être venus sur Sud Radio
43:17Valérie Porteret, je rappelle que votre livre
43:19Vous n'aurez pas nos enfants, préfacé par Serge Klarsfeld
43:21et Boris Cyrulnik
43:23est donc paru aux éditions Ixo
43:25Anne Bassi, votre deuxième roman
43:27« Dieu le fit » est publié quant à lui
43:29aux éditions Marque-Page
43:31Tout de suite, vous retrouvez
43:33Brigitte Lahaye sur Sud Radio

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