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La soumission chimique consiste en l'administration, à des fins criminelles, de substances psychoactives à l'insu de la victime ou sous la menace, pour commettre un crime ou un délit.

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Transcription
00:00 C'est un crime qui passe encore largement sous les radars, la soumission chimique.
00:04 Pour mieux le connaître et surtout le combattre, le gouvernement a missionné deux parlementaires.
00:08 Les auditions commencent aujourd'hui.
00:10 Ces deux parlementaires, Sandrine Jossot et Véronique Guillotin, vont recevoir des victimes
00:13 et des spécialistes du sujet, notamment notre invitée.
00:16 Bonjour Leïla Chawashi.
00:17 Bonjour.
00:18 Vous êtes pharmacienne au Centre d'Addictovigilance de Paris, experte sur ce sujet de la soumission
00:23 chimique auprès de l'Agence Nationale du Médicament.
00:25 Quand on parle de soumission chimique, on pense le plus souvent au GHB et à ce genre de drogue utilisée en soirée.
00:30 Mais c'est bien plus vaste que ça.
00:32 Oui, bien sûr.
00:33 Déjà, pour rappeler simplement la définition, la soumission chimique, c'est le fait de droguer
00:36 une personne à son insu ou sous la menace, c'est-à-dire clairement sans son consentement,
00:41 pour commettre un crime ou un délit.
00:43 On parle beaucoup des agressions sexuelles, mais bien sûr, ça concerne tout type d'agression.
00:47 Les vols, les enlèvements, les séquestrations, les homicides, la traite des êtres humains.
00:52 C'est un sujet très large.
00:53 On pense souvent aux jeunes filles.
00:54 Ce sont évidemment beaucoup de jeunes femmes, mais c'est également des hommes, des personnes
00:58 transgenres, tout milieu confondu et tout âge confondu.
01:01 Et ça arrive aussi en famille ?
01:02 Et ça arrive également en famille.
01:04 Le domicile, c'est le premier lieu qui est retrouvé dans notre enquête nationale.
01:08 C'est un lieu qui n'est pas si sécure que ça en matière d'usage criminel de drogue.
01:12 Combien il y a de victimes en France ?
01:14 C'est très compliqué de définir un nombre exact.
01:17 Nous, ce qu'on a, ce sont des signalements suspects qui nous sont apportés.
01:19 On travaille essentiellement sur les données de plainte.
01:21 Mais comme vous l'imaginez, pour les agressions sexuelles, pour ne parler que de celles-là,
01:26 on a moins de 10% des victimes qui déposent plainte à l'heure actuelle.
01:29 Si en plus, on rajoute à ça que la plupart du temps, les agresseurs sont connus, donc
01:33 on rajoute tous les phénomènes d'emprise, la peur des répercussions socioprofessionnelles
01:37 par exemple, c'est un obstacle supplémentaire.
01:39 L'usage des substances quand il est fait de façon volontaire, parce qu'on s'est
01:43 alcoolisé par exemple ou consommé de l'AMDMA, est culpabilisant.
01:48 Il ne devrait pas l'être, mais il l'est pour les victimes.
01:50 Et puis ensuite, pour peu qu'on vous administre une substance, vous avez une amnésie potentiellement
01:54 des faits.
01:55 Donc avec cette difficulté de se rendre compte de son statut de victime, qu'est-ce que
01:58 je vais dire à la police ? Je ne sais rien.
02:00 - Alors justement, j'allais vous demander, la victime ne se rend compte de rien ?
02:02 - Alors, c'est plus compliqué que ça.
02:04 Nous, dans nos données, c'est une victime sur deux qui a une amnésie des faits.
02:07 Et elle n'est pas totale forcément.
02:09 Ce n'est pas forcément le fameux trou noir, le blackout total.
02:11 On peut avoir des flashs, ce qu'on appelle nous une amnésie partielle.
02:14 En revanche, les victimes, elles ne sont pas dupes.
02:16 C'est important de le dire, les victimes le savent.
02:18 Quand vous vous réveillez nue...
02:19 - Ils savent qu'il leur est arrivé quelque chose ou ils savent exactement ce qui s'est
02:23 passé ?
02:24 - Non, exactement ce qui s'est passé, non.
02:25 Mais en revanche, quand vous vous réveillez nue dans la rue avec un blackout, il ne faut
02:28 pas avoir un doctorat pour savoir que potentiellement on a subi une agression sexuelle.
02:33 Donc souvent, les signes qui vont alerter une victime, ça va être le fait d'avoir
02:37 des troubles de mnésie.
02:39 Justement, j'ai oublié quelque chose, j'ai un trou noir en présence de faits criminels
02:45 ou délictuels possibles.
02:46 Donc par exemple, je vous ai pris l'exemple de se réveiller nue dans la rue ou dans les
02:49 buissons, c'est aussi se réveiller avec des habits différents, déplacer d'un espace
02:54 quand c'est dans l'espace privé.
02:55 Et puis après, ça peut être aussi constater des transactions bancaires inhabituelles,
02:59 des contrats qu'on aurait signés dont on n'a aucun souvenir.
03:02 Donc c'est toujours l'alliance des deux.
03:04 Des troubles neurologiques, des complications diverses en présence de faits criminels ou
03:09 délictuels possibles.
03:10 - Mais identifiez la cause.
03:11 Je reviens sur cette notion parce que j'ai lu le témoignage d'une femme qui racontait
03:14 qu'elle avait consulté trois neurologues, elle avait passé un scanner et aucun n'avait
03:17 pensé à la soumission chimique.
03:19 Ils avaient essayé de formuler plein d'hypothèses mais pas ça.
03:23 On n'arrive pas directement à la soumission chimique, ça ne vient pas en premier ?
03:26 - Alors, quand la victime le dit elle-même, forcément ça facilite la tâche.
03:31 Ce qui est le cas dans la plupart des cas.
03:32 La plupart des cas, la personne viendra vous dire très simplement "je sais que mon mari
03:36 me drogue parce que déjà il le fait sous la menace, donc il m'oblige à prendre tel
03:40 et tel produit".
03:41 La personne vous dira "je sais que quelque chose d'anormal est en train de se passer
03:44 parce que j'ai des ces fameux blackouts à répétition en présence de faits criminels".
03:48 J'ai découvert par exemple des contenus pornographiques me concernant dont je n'ai
03:52 aucun souvenir.
03:53 Donc là, la tâche est facilitée.
03:54 Mais il existe une part qui est la plus compliquée à repérer, c'est celle où il va y avoir
03:59 un rituel qui s'installe.
04:00 On a une récurrence, surtout dans les affaires de violences intrafamiliales.
04:04 Pas de violences apparentes mais c'est cycles réguliers d'amnésie, de vertiges, etc.
04:09 Et lorsqu'on se présente auprès du médecin, c'est là où il faut faire un grand travail
04:14 sur la formation des médecins pour dire qu'une fois qu'on a éliminé toutes les autres
04:17 possibilités, parce qu'il n'y a pas de tableau spécifique, juste des tableaux évocateurs,
04:21 il faut penser à la maltraitance chimique.
04:24 On n'a pas précisé de quel produit il s'agit.
04:25 Ce sont soit des drogues, soit des médicaments détournés de leur usage.
04:28 C'est bien ça ?
04:29 Tout à fait.
04:30 Majoritairement des médicaments sédatifs qui baissent la garde, fatiguent, etc.
04:33 Mais aussi des drogues stimulantes, aphrodisiaques, hypersensualisantes ou dissociatives qui font
04:38 perdre la notion de la réalité.
04:40 Alors vous, Leïla Chahouaïchi, vous serez auditionnée devant cette mission parlementaire
04:43 le 30 mai.
04:44 Qu'allez-vous dire à ces parlementaires ? Que préconisez-vous ?
04:47 Alors la question de la soumission chimique est extrêmement large.
04:51 Elle implique tout le monde.
04:53 C'est une question de vigilance solidaire, c'est une question de vigilance collective.
04:57 Et ce qui est très important à considérer, c'est qu'on ne peut pas être le seul sauveur
05:01 d'une personne.
05:02 On a besoin d'être de façon coordonnée, plusieurs acteurs ensemble, réunis autour
05:06 de la même table pour réfléchir aux meilleurs moyens de mettre en place un circuit efficace
05:11 puisque les circuits existent.
05:13 Pour la prévention, pour la prise en charge ?
05:14 Alors ça c'est déjà pour la prise en charge, il y a beaucoup à faire.
05:16 Mais au-delà de la prise en charge, on peut aller plus loin sur les mesures de prévention,
05:20 sur les campagnes de sensibilisation, sur la formation des professionnels, donc sur
05:24 l'éducation, à la santé.
05:26 On ne parle pas assez de consentement sous substance.
05:28 On commence à parler du consentement, mais c'est tout un autre volet que de parler
05:32 du consentement sous substance, même quand l'usage est volontaire.
05:35 Parce que rien ne justifie un viol quand bien même on aurait consommé volontairement.
05:39 Merci Leïla Chawashi, pharmacienne au centre d'addictovigilance de Paris et experte de
05:44 la soumission chimique auprès de l'Agence Nationale du Médicament.
05:46 Vous étiez l'invité du 5/7.

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