Anne Fulda reçoit Frédéric Charpier pour son livre «L’affaire Lebovici – Autopsie d’une époque» dans #HDLivres
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00:00 -Bienvenue à l'heure des livres, Frédéric Charpier.
00:03 Vous êtes journaliste d'investigation,
00:05 vous avez écrit plusieurs livres en quête.
00:08 Vous venez de publier dans la collection "Intime conviction"
00:12 l'affaire Lebovici-Autopsie d'une époque,
00:15 publié aux presses de la cité.
00:17 Un livre en quête qui revient sur une affaire non résolue,
00:21 ce qu'on appelle aujourd'hui un "cold case",
00:24 qui avait fait beaucoup de bruit dans les années 80.
00:28 L'affaire Lebovici commence par la découverte du corps
00:33 de cet homme qui travaillait dans le cinéma
00:35 dans un parking de l'avenue Foch.
00:38 Il était un prestatario producteur.
00:40 Parlez-nous de cet homme, qu'il était peu connu du grand public.
00:45 -Il était peu connu.
00:47 En enquêtant, j'ai découvert que la presse le connaissait mal.
00:52 Il avait une autorité dans le milieu du cinéma incontestable.
00:57 Il était un des personnages de premier plan du cinéma.
01:01 Il était à la fois régent, il l'avait été.
01:04 -Il avait créé Armedia. -Il avait créé Armedia.
01:07 Il avait été obligé de céder pour une question de monopole.
01:11 Mais ça ne l'a pas empêché de rebondir.
01:14 C'était très ingénieux, très habile.
01:16 Il avait créé deux sociétés, une distribution et une production.
01:20 Il a rebondi tout de suite après avoir cédé Armedia.
01:24 Il a gardé beaucoup d'attaches avec ses stars,
01:28 qui lui devaient beaucoup.
01:30 Il a presque organisé pour produire à leur tour des films.
01:35 En devenant producteur, il s'émancipait de pas mal de contraintes.
01:41 C'était son génie pour rebondir.
01:43 Mais il n'était pas que ça.
01:45 -Il y avait plein de paradoxes, de petits tiroirs.
01:50 -Il y avait des gros tiroirs bizarres.
01:53 C'était quelqu'un d'assez contrasté,
01:55 qui avait des goûts pour un certain nombre de choses,
01:59 qui, a priori, ne cadraient pas avec sa notoriété,
02:02 sa puissance monopolistique et capitalistique.
02:06 C'était un homme qui a fait d'énormes succès au cinéma,
02:10 au début des années 80, en particulier.
02:13 Mais il avait des travers.
02:15 Le mot n'est pas bien choisi, mais il avait quelques penchants
02:20 pour des thèmes, des sujets, des vies parallèles,
02:23 qui ne cadraient pas avec le sujet, avec sa personnalité.
02:27 C'est une partie du bouquin de l'enquête,
02:30 et ça a été aussi une partie de l'enquête policière.
02:34 C'est bien, avec l'édition, une édition un peu particulière.
02:38 -Vous dites que c'est une réussite financière.
02:42 Il mène une vie de quelqu'un qui a réussi.
02:45 Il a un hôtel particulier, il passe ses vacances près de Saint-Tropez.
02:50 Mais dans le même temps, il est proche de Guy Debord,
02:53 de l'ultra-gauche.
02:55 C'est assez amusant, c'est des paradoxes assez étonnants.
02:59 -Je dirais que ce sont... -Il est éditeur, d'ailleurs.
03:02 -Lui, il est éditeur. -Aussi.
03:05 -Ce sont de vrais faux paradoxes.
03:08 Au fond, Guy Debord, quand on creuse le personnage,
03:12 c'était quelqu'un qui a émergé après 68, un peu avant,
03:16 et c'est surtout l'après 68 qu'il a mis devant la scène.
03:20 C'est quelqu'un qui avait beaucoup d'arrogance idéologique
03:25 et qui ne cadrait pas non plus avec le personnage.
03:27 Mais en même temps, quand on enquête,
03:30 on découvre qu'il aimait bien le pouvoir, l'argent, la vie facile,
03:35 la notoriété.
03:36 Grosso modo, il n'était pas du tout gêné de vivre en marge,
03:41 voire grâce aussi un peu au crochet.
03:44 Le crochet de Lebovici,
03:45 qui était très généreux, surtout vis-à-vis de Guy Debord.
03:49 -Pourquoi êtes-vous intéressé à cette affaire ?
03:52 On le retrouve, il a 52 ans, Lebovici,
03:55 il a été tué par balle comme un truand.
03:59 Pourquoi vous êtes penché sur cette affaire ?
04:02 Elle est non résolue ou c'est plutôt cette atmosphère autour ?
04:06 -Disons qu'au départ, ce qui m'a intéressé, c'était Guy Debord.
04:11 Je m'intéressais à lui depuis quelque temps.
04:13 Avant de démarrer un livre, je fais ce que j'appelle une pré-enquête.
04:18 Je vérifie si un sujet est intéressant, si c'est possible de le faire
04:23 et en quoi c'est intéressant.
04:25 J'étais parti de Guy Debord.
04:29 Il m'a amené directement à Lebovici.
04:31 Honnêtement, je ne connaissais pas très bien son histoire.
04:34 Et comme je connais par ailleurs le milieu policier,
04:38 je me suis dit que c'était marrant,
04:40 comment sait-il que ça n'est pas matché, qu'il y ait eu cet échec ?
04:44 On s'étonne, on croit que la police réussit tout ce qu'elle entreprend,
04:48 mais en fait, ce n'est pas vraiment vrai.
04:51 Elle le reconnaît elle-même.
04:53 Comme je connais bien le milieu, je me suis dit que ce serait marrant
04:57 d'essayer de se glisser dans les pas de la crime de l'époque
05:00 et de voir pourquoi et dans quelles circonstances.
05:03 Il a été tué et comment l'enquête n'a pas débouché.
05:07 On n'a pas le temps de développer,
05:09 mais il y a une sorte d'enquête dans l'enquête,
05:12 qui est l'un des volets du livre.
05:14 En tout cas, c'est très intéressant.
05:16 Ça permet de revenir au-delà de ce crime non élucidé,
05:21 sur toute une ambiance, toute une époque.
05:24 "L'affaire Lebovici, autopsie d'une époque",
05:26 un livre paru aux presses de la Cité.