"Notre sécurité se joue aussi en Ukraine" : C'est ce qu' a dit Emmanuel Macron hier soir à la télévision, le chef de l'état s'est expliqué pendant 40 minutes après ses propos polémiques sur l'envoi de troupes occidentales en Ukraine. Et il a assumé l'ambiguïté stratégique de cette position, tout en ciblant ceux qui posent des limites à leur soutien à l'Ukraine. Une mise au point qui risque d'être fraîchement accueillie à Berlin, où Emmanuel Macron se rend ce vendredi.
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00:00 - Sa position à lui en tout cas.
00:01 - Avec un président en grave pour un exercice délicat où chaque mot compte.
00:04 C'est un exercice délicat d'abord parce que le sujet est grave, je le disais, c'est la guerre,
00:08 mais aussi parce que le président de la République s'est adressé à deux types de publics.
00:11 D'un côté la population, les Français, c'est-à-dire vous et moi,
00:14 et de l'autre côté les experts, c'est-à-dire les diplomates, les militaires en France,
00:18 mais aussi à l'étranger, chez nos alliés, comme en Russie.
00:21 D'où quelques contorsions qu'on a pu voir d'ailleurs dès le début de l'interview sur sa formule,
00:25 vous savez, ne pas exclure.
00:27 Regardez ce qu'il a répondu.
00:30 - Vous êtes assis devant moi.
00:32 Est-ce que vous êtes debout ?
00:34 Non.
00:36 Est-ce que vous excluez de vous lever à la fin de cette interview ?
00:38 Vous n'allez pas l'exclure ?
00:40 - On est même sûrs de le faire.
00:42 - Voilà.
00:44 - Rapporter au fait de ne pas exclure, d'envoyer des troupes, c'est un peu baroque comme exemple,
00:47 parce que quand on est assis, on finit toujours par se lever à un moment,
00:50 mais on a compris l'idée.
00:52 En gros, ne pas exclure, ça ne veut pas dire le décider tout de suite,
00:54 ça ne veut pas dire le faire maintenant.
00:56 - Chaque mot compte, disiez-vous, Mathieu, il y a des mots interdits quand on est président.
01:00 - Oui, et surtout quand on est chef des armées.
01:02 Regardez par exemple cet extrait.
01:04 - Jamais nous ne mènerons d'offensive.
01:08 Jamais nous ne prendrons l'initiative.
01:10 - Si on ne fait ni l'un ni l'autre, qu'est-ce qu'on fait ?
01:14 Il l'a dit un petit peu plus loin,
01:16 on se tient prêt à répondre.
01:18 Pourquoi ce choix des mots,
01:20 on interdit offensive, on interdit initiative,
01:22 mais on dit ne pas répondre,
01:24 c'est pour ne pas nous placer dans une position d'agresseur,
01:27 par exemple, au regard du droit international.
01:29 Dans le choix des mots, toujours, comment qualifier la Russie ?
01:32 La question lui a été posée par Gilles Boulot.
01:34 Regardez.
01:36 - Le régime de Vladimir Poutine est-il l'ennemi de la France ?
01:38 - Il est l'adversaire.
01:40 - Quelle est la nuance sémantique entre adversaire et ennemi ?
01:42 - Nous ne faisons pas la guerre à la Russie.
01:44 - Alors là, le mot interdit, vous l'avez compris,
01:48 c'est ennemi, et on dit adversaire.
01:50 Pourquoi pas ennemi ? Parce que ça nous ferait passer un cap,
01:52 évidemment, un ennemi, on lui fait la guerre,
01:54 un ennemi, surtout si on envoie des troupes au sol en Ukraine,
01:56 on deviendrait co-belligérant.
01:58 - Et on sentait hier soir le poids des mots,
02:00 parce qu'on se doutait que chaque mot
02:02 pouvait avoir des conséquences ensuite.
02:04 - Oui, exactement, d'où le soin apporté au vocabulaire.
02:06 Et on a un président qui s'est montré parfois,
02:08 qui a assumé de ne pas être précis sur la nature des troupes
02:10 ou l'engagement qu'il pourrait déployer au sol en Ukraine,
02:12 et puis à d'autres moments,
02:14 s'est montré extrêmement précis.
02:16 Regardez, par exemple, comment il qualifie la situation en Ukraine.
02:18 - Qu'est-ce qui se joue en Ukraine ?
02:20 Une guerre qui est existentielle
02:22 pour notre Europe et pour la France.
02:24 - Donc, si la guerre est existentielle,
02:26 c'est qu'elle menace notre existence,
02:28 et donc, est-ce qu'elle menace notre vie ?
02:30 C'est la question que va lui poser G.Boulot.
02:32 - La sécurité de l'Europe
02:34 et la sécurité des Français
02:36 se jouent là-bas.
02:38 - Et ce sont nos intérêts vitaux.
02:40 - Vous employez là un terme
02:42 qui a des connotations particulières,
02:44 je vous dis la sécurité.
02:46 - Alors là, on a le droit de dire
02:48 que c'est une guerre existentielle,
02:50 mais qu'elle ne menace pas nos intérêts vitaux.
02:52 Pourquoi ?
02:54 Parce que cette notion d'intérêt vitaux,
02:56 elle est au cœur de ce qu'on appelle
02:58 la doctrine nucléaire.
03:00 Emmanuel Macron l'avait rappelé en 2020,
03:02 le rôle de la dissuasion nucléaire française,
03:04 c'est de protéger la France et les Français
03:06 contre toute menace d'origine étatique,
03:08 contre nos intérêts vitaux.
03:10 On voit bien que là, le président fait attention
03:12 de ne pas rajouter à l'escalade.