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L'inclusion scolaire systématique dans le collimateur des enseignants.
Dans une lettre ouverte adressée aux élus de l'Hérault mais aussi aux parents d'élèves, le syndicat SNUDI/FO 34 évoque une tripple maltraitance.

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Transcription
00:00 7h45 avant de recevoir notre invité, c'est la bonne heure en tout cas pour vous rappeler la question du jour.
00:04 Est-ce qu'on est allé trop loin en voulant intégrer les enfants en situation de handicap à l'école ?
00:08 C'est la question qu'on vous pose ce matin, qu'on vous pose déjà depuis hier sur les réseaux sociaux,
00:12 à laquelle vous répondez. Il y a trois choix de réponse.
00:16 Non, oui, ça pose trop de soucis pour les autres.
00:19 Ou oui, c'est trop difficile pour beaucoup d'enfants handicapés.
00:21 Guillaume, on fait un petit point au niveau des résultats ?
00:23 Ce qu'on appelle l'inclusion systématique dans l'éducation.
00:27 Est-ce qu'on n'est pas allé trop loin ?
00:28 Vous répondez non à une petite majorité, 54%.
00:32 Vous répondez oui, c'est trop difficile pour beaucoup d'enfants handicapés, à 33%.
00:36 Et vous répondez oui, parce que ça pose aussi des soucis et des problèmes pour les autres, à 13%.
00:42 Et vous êtes 185 à avoir voté au moment où je vous parle.
00:45 Alors maintenant, vous allez prendre la parole.
00:47 Vous allez pouvoir vous exprimer sur France Bleu Héro.
00:49 Je vous donne le numéro 04 67 58 6000.
00:52 Vous pouvez nous appeler tout de suite.
00:53 Sabine Reynaud est notre invitée ce matin. Sabine Reynaud du syndicat FO Snudi 34.
00:58 - Bonjour Sabine Reynaud. - Bonjour.
01:00 - Merci d'être venue nous rejoindre.
01:01 Syndicat FO Snudi, Snudi c'est le syndicat national unifié des instituteurs
01:06 que vous représentez pour le département de l'Héros ce matin.
01:10 Vous avez adressé une longue lettre ouverte aux élus de l'Héros.
01:13 Alors les élus, les maires notamment, en priorité les maires,
01:17 parce qu'en matière d'école et d'enseignement au premier degré,
01:21 ce sont souvent les maires qui sont concernés.
01:24 Et puis les parents d'élèves aussi à travers les fédérations de parents d'élèves
01:27 pour alerter sur les conséquences négatives, dites-vous, de l'inclusion systématique.
01:32 Qui pour vous est une mauvaise chose.
01:34 Quand je dis mauvaise chose, c'est le côté systématique qui vous pose problème.
01:37 - Tout à fait. Alors dans cette longue lettre, il n'y a pas que la question de l'inclusion.
01:42 Puisqu'on a essayé de faire un petit peu l'état des lieux de façon globale,
01:47 même si ce n'est pas exhaustif.
01:48 Il y a également la question des suppressions de postes.
01:51 Il y a la question des contre-réformes qu'on subit régulièrement.
01:57 Il y a la question du dénigrement dont les enseignants font l'objet de la part des ministres.
02:03 Voilà. Donc, ceci étant, la question de l'inclusion dans les écoles
02:09 est actuellement le problème majeur qui affecte non seulement la scolarisation de tous les élèves
02:18 et en premier lieu la scolarisation d'une partie des élèves en situation de handicap.
02:24 Je dis bien une partie, puisque tout l'enjeu du propos qu'on tient,
02:31 c'est bien de faire la distinction entre l'inclusion scolaire,
02:36 pour laquelle les enseignants n'ont aucune opposition.
02:40 - Oui, vous n'êtes pas contre le principe de l'inclusion.
02:42 - Exactement.
02:44 Mais si on émet la moindre critique sur cette question-là,
02:50 on s'expose systématiquement à des accusations à la fois mensongères et des amalgames.
02:59 C'est-à-dire que si on se met à dire qu'il y a un problème avec la façon dont est mise en place
03:05 cette inclusion à tout prix,
03:08 on s'expose à s'entendre dire qu'on rejetterait les enfants en situation de handicap
03:14 et qu'on serait favorable à de la ségrégation.
03:19 - On vous fait un procès d'intention.
03:21 Vous n'êtes pas contre le principe de l'inclusion,
03:23 vous êtes contre le principe de l'inclusion systématique,
03:25 parce que vous dites que c'est le prétexte à masquer des baisses de moyens
03:31 qui jusqu'à présent étaient accordées aux enfants en situation de handicap.
03:36 C'est ça que vous dites ?
03:37 - C'est ça. Le nerf de la guerre, c'est ça ce qu'on dit.
03:40 Il faut savoir en tête que les établissements spécialisés
03:45 pour lesquels nous on réclame non seulement le maintien,
03:48 mais la création de places supplémentaires,
03:50 c'est-à-dire les IME, Instituts Médico-Éducatifs,
03:54 ITEP, Instituts Thérapeutiques, Éducatifs et Pédagogiques,
03:58 les IEM, Instituts de Rééducation Motrice,
04:02 - Ou les classes Ulysse, vous êtes vous-même enseignante dans une classe Ulysse.
04:05 - Ce sont des établissements d'enseignement, ils sont reconnus comme tels.
04:09 Donc vouloir qu'une partie des enfants qui ont des notifications
04:13 délivrées par la MDPH, ce n'est pas nous qui le disons.
04:16 - Les départementales des personnes handicapées.
04:18 - Ils ont des notifications.
04:19 Actuellement dans les Rôds, il y en a 400 qui n'ont pas de place.
04:23 Au niveau national, ils sont 23 000,
04:25 ça a été avoué par l'ex-ministre Attal.
04:30 Vouloir que ces enfants puissent bénéficier des conditions
04:34 de scolarisation et de prise en charge pluridisciplinaire
04:37 dans le cadre de ces établissements,
04:39 c'est au contraire défendre le droit de ces élèves
04:42 à bénéficier d'un environnement adapté,
04:45 de soins, une prise en charge correspondant à leurs besoins.
04:48 - Donc les moyens ont baissé, mais parce qu'ils ont été retirés ?
04:51 - Oui, ça vient d'une directive européenne qui a été reprise
04:56 pour réduire les coûts, c'est simple.
04:58 Une année en établissement spécialisé, c'est 46 000 euros,
05:02 une année à l'école ordinaire, c'est 6 000 euros.
05:04 C'est ça la réalité.
05:06 - Tout simplement.
05:07 Donc du coup, on a mis en place ce qu'on appelle l'inclusion systématique,
05:11 qui consiste à sortir ces enfants de ces établissements
05:15 et de cet enseignement spécialisé
05:18 pour les intégrer dans des classes dites "normales",
05:21 et là vous dites "c'est catastrophique".
05:24 - Tout à fait, parce que...
05:26 ce que les collègues vivent, dont je fais partie,
05:33 ce sont parfois des situations de violence extrême
05:38 dont les enfants ne sont bien évidemment pas responsables.
05:41 - Vous parlez de triple maltraitance.
05:43 - Triple maltraitance.
05:44 - Pour les enfants en situation de handicap,
05:45 pour les autres qui ne le sont pas,
05:47 et pour les enseignants, expliquez-nous.
05:48 - C'est-à-dire qu'une partie de ces enfants se retrouve en souffrance
05:52 parce qu'ils sont dans des locaux inadaptés,
05:55 avec des contraintes et des exigences
05:57 qui ne correspondent pas à ce dont ils ont besoin,
06:00 et donc ils explosent, ils sont ingérables.
06:02 Je vous cite quelques exemples,
06:04 ce sont des enfants qui vont s'enfuir,
06:06 qui vont grimper partout, qui vont jeter des objets,
06:10 qui vont pincer, griffer, mordre enfants et adultes,
06:14 ce qui place tout le monde en insécurité.
06:17 Deuxième maltraitance, la maltraitance,
06:19 vous l'avez bien compris, pour les autres élèves,
06:21 qui se font frapper, insulter,
06:24 et pour lesquels nous sommes finalement démunis,
06:28 nous les équipes,
06:30 parce que quand on signale les difficultés,
06:34 on nous rétorque,
06:36 on nous culpabilise, et on nous dit qu'on ne sait pas bien faire,
06:40 et que c'est notre posture professionnelle qui est à revoir,
06:43 et que de toute façon,
06:45 l'enfant a le droit d'être scolarisé,
06:49 donc il faut qu'il reste à l'école.
06:51 Et la dernière maltraitance, vous l'avez compris également,
06:54 c'est les personnels, que ce soit les enseignants,
06:57 les AESH, les ATSEM, notamment en maternelle,
07:00 - Quand il y en a encore, parce que c'est pareil,
07:02 le nombre a considérablement diminué ces derniers temps.
07:05 - Tout à fait, il faut dire que la maternelle
07:07 se prend de plein fouet à cette question-là,
07:10 parce que quand les enfants arrivent en maternelle,
07:12 parce qu'il y a eu la destruction aussi
07:14 de tout le secteur de pédopsychiatrie,
07:16 de prise en charge précoce des enfants
07:19 qui connaissent des difficultés,
07:21 les enfants arrivent en maternelle,
07:23 il faut des mois, voire des années
07:25 pour obtenir des mesures de compensation,
07:28 donc les enseignants de maternelle et les AESH,
07:30 quand il y en a, parce qu'il faut le temps
07:32 pour obtenir une AESH, se débrouillent tout seuls, sans moyens.
07:35 - Est-ce qu'on est allé trop loin en voulant intégrer
07:38 les enfants aux situations de handicap à l'école ?
07:39 C'est la question qu'on vous pose ce matin.
07:41 Oui, non, vous pouvez prendre la parole, bien sûr,
07:43 vous vous exprimez sur les réseaux sociaux,
07:44 mais vous avez le 04 67 58 6000
07:47 pour nous dire ce que vous en pensez, on vous attend.
07:49 - Appelez-nous maintenant, dans cinq minutes, il sera trop tard.
07:51 Sabine Reynaud, alors vous écrivez cette lettre
07:53 au maire du département de l'Hérault et aux parents d'élèves,
07:56 vous n'avez pas de retour encore pour le moment.
07:58 - Si, on en a eu quelques-uns, oui, de maire.
08:01 - Alors vous êtes très concrètement, maintenant,
08:02 vous espérez quoi, vous demandez quoi ?
08:04 - Alors, le but premier de cette lettre,
08:07 comme je vous le disais, ce sont les collègues qui nous disent
08:11 il faut faire connaître largement la réalité
08:15 derrière la vitrine de l'école inclusive
08:17 et derrière la vitrine de l'école publique en général.
08:20 Parce que nous, on a peur, on ne peut pas s'exprimer,
08:23 donc nous, en tant que syndicat, on prend nos responsabilités,
08:26 on assume ça.
08:28 - Vous êtes lanceur d'alerte.
08:29 - Exactement, exactement, parce qu'il faut absolument
08:33 que les parents prennent conscience et prennent connaissance
08:36 de ce qui se passe actuellement dans les écoles,
08:38 parce que le gouvernement entend aller encore plus loin
08:41 dans le démantèlement de l'école publique.
08:44 On parlait de l'inclusion, mais je voudrais parler aussi
08:47 de la suppression massive des enseignants spécialisés,
08:50 dont je fais partie, notamment ceux qui travaillent
08:54 au sein des RAZED, les réseaux d'aide,
08:57 qui ont été complètement délabrés,
08:59 qui permettaient justement de récupérer une partie des enfants
09:02 qui n'étaient pas en situation de handicap,
09:04 mais qui avaient des difficultés passagères ou durables,
09:08 qui ne relevaient pas du handicap.
09:10 Et du coup, ces enfants-là, qui ont des moindres difficultés,
09:14 sont totalement abandonnés parce que
09:16 toute l'énergie, tout le temps, est actuellement absorbée
09:20 par des enfants qui présentent des troubles sévères.
09:23 Et donc, nous, le but de cette lettre,
09:26 c'est d'informer les parents de façon à ce que les parents,
09:30 comme ça se fait actuellement dans le département du 93,
09:33 qui est en grève massive depuis la rentrée le 26 février,
09:37 qu'ils ont reconduite jusqu'à aujourd'hui,
09:40 la FCPE du 93 soutient la mobilisation des enseignants,
09:45 et nous, ce que nous cherchons à faire,
09:46 c'est que les parents puissent soutenir également nos revendications.
09:51 - Solange est avec nous, elle nous appelle du Tarn à Groyer.
09:54 Bonjour Solange !
09:56 - Oui, bonjour, voilà.
09:58 Moi, je suis maman de trois enfants handicapés,
10:02 qui ont respectivement maintenant 28, 23 et 11 ans.
10:11 Ils ont tous eu un parcours scolaire de la maternelle.
10:16 Le dernier est arrivé jusqu'à CE1.
10:23 Je l'ai maintenu à l'école, parce que c'était un enfant très calme,
10:27 qui ne posait pas d'opposition, qui voilà.
10:31 Donc, il a été maintenu à l'école,
10:33 et puis après, il est parti sur l'IME de l'hostage à Navez.
10:40 Et puis après, il a intégré l'école d'Halliot à Castres,
10:44 dans une classe inclusive, enfin, esprit pour lui.
10:50 Et il s'est avéré que, vu mon expérience de maman,
10:57 de par mes trois enfants, chacun à leur âge,
11:03 j'avais eu raison de le maintenir à l'école,
11:05 parce qu'il a fait des progrès,
11:07 il est arrivé à faire de la sociabilisation,
11:10 mais parce que dans l'école d'Halliot,
11:13 il y a une équipe qui est là,
11:18 rien que pour ces enfants en situation de handicap,
11:21 et qui accompagne les enseignants de l'école.
11:24 - Il y avait des moyens dédiés, Solange,
11:26 c'est ça que vous nous dites ce matin, encore à l'époque,
11:28 ce qui est peut-être un peu moins le cas aujourd'hui, oui.
11:31 - Non, non, il y a aujourd'hui, pour mon fils de 11 ans,
11:35 il y a des moyens dédiés,
11:37 parce que l'école d'Halliot a passé un partenariat avec l'IME,
11:42 pour avoir ces moyens dédiés.
11:44 - Oui, d'accord.
11:46 - Et l'IME s'est mise à mettre ces moyens dédiés.
11:51 - Merci Solange de nous avoir appelé témoignage intéressant, Sabine Reynaud.
11:54 - Tout à fait, parce que c'est l'illustration de ce qu'on défend,
11:58 c'est-à-dire que les IME ou ITEP ne sont pas des lieux de ségrégation,
12:02 au cœur du fonctionnement de ces établissements,
12:05 c'est le lien permanent, constant avec l'école publique,
12:08 via ce qu'on appelle des parcours partagés,
12:11 que je connais bien puisque j'y ai travaillé,
12:13 c'est-à-dire qu'à chaque fois que c'est possible,
12:16 on organise des temps d'inclusion dans les écoles,
12:20 soit dans des classes ordinaires, soit dans des dispositifs ULIS,
12:24 de façon à ce que chaque enfant ait un temps d'enseignement
12:30 et de scolarisation adapté à ses besoins.
12:32 - Je voudrais qu'on écoute Nadia, qui nous appelle de Palavas-les-Flots,
12:34 on va faire assez vite quand même, parce que Nadia,
12:36 on a les infos qui arrivent juste après. Bonjour Nadia !
12:38 - Oui bonjour !
12:40 - Alors racontez-nous un petit peu.
12:41 - Comme enseignante dans les écoles, à l'époque on les disait, on ne triche,
12:47 intégration, et j'ai vu que ça fonctionne dans la plupart des cas vraiment très bien.
12:54 Mais c'est vrai, il faut prendre des mesures pédagogiques,
12:56 il faut s'adapter, et ce n'est pas une question de quelques heures à l'école
13:01 pour jouer ou dans les pauses ou faire du sport ensemble,
13:05 c'est vraiment intégration ou inclusion, comme on dit maintenant, à tous les niveaux.
13:13 Et c'est possible s'il y a des mesures pédagogiques vraiment adaptées.
13:18 Là, les discours, je les trouve inhumains et pratiquement inacceptables.
13:22 - Oui, merci Nadia. On n'a peut-être pas bien entendu au début, je rappelle,
13:25 vous avez travaillé en Autriche, non pas comme enseignante,
13:30 mais vous avez en tout cas vu qu'en Autriche ça a fonctionné,
13:33 donc il n'y a pas de raison que ça ne fonctionne pas,
13:35 mais encore faut-il, et on en revient toujours à la même chose,
13:37 la question des moyens, évidemment, qui sont mis en œuvre et accordés.
13:41 - Alors, je ne connais pas la situation de l'Autriche,
13:43 ce que je connais c'est la situation en France, et la France en France.
13:48 Les collègues, les écoles et les équipes sont confrontées à des effectifs lourds
13:53 qui ne permettent pas justement de pouvoir déployer cette attention,
13:58 et nous sommes contre les mesures de l'acte de l'école inclusive
14:02 qui vont aggraver encore cette situation.
14:04 - Merci d'être venue nous en parler ce matin, Sabine Reynaud,
14:06 du syndicat EFOS Nudie dans les Roses. Bonne journée à vous.
14:09 - Bonne journée.
14:10 - Merci.
14:11 - Ecoutez sur francebleu.fr, dans un instant les infos d'huit heures.
14:13 [Musique]

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