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  • 28/07/2009
Chaussé d'un élégant talon noir et filmé de dos, un pied bascule lentement jusqu'à ce que la cheville rejoigne le sol dans une torsion cruelle.
Aucun décor qu'un fond neutre, aucun autre objet que la chaussure. Le cadre resserré ne laisse aucune échappatoire au spectateur et se referme ici après l'accomplissement du mouvement. La cheville bascule pendant toute la durée du film et sa progression acquiert la violence d'une torture.
En contrepoint, le titre bref refuse le pathos et appuie ironiquement sur la sonorité monosyllabique d'une ville jumelée avec celle d'Angers où vit l'artiste. Il autorise de nouvelles interprétations comme le rejet d'une identité imposée par l'ancrage géographique, via la métaphore de la fameuse Tour.
Le plus souvent en noir et blanc, les films de Cécile Benoiton cadrent une partie du corps de l'artiste engagée dans une activité liée à l'univers domestique. L'action est répétée ou, comme ici, étirée dans la durée du film, mais toujours dans la plus grande économie. L'inventaire des objets utilisés revendique la simplicité de la vie quotidienne : de l'éponge métallique à la bouteille de lait, en passant par le plat de cuisson.
Avec le talon noir, l'artiste décale son registre et introduit une sophistication pour mieux la renverser. Elle formule en même temps la revendication formelle qui fonde l'ensemble de ses films et l'éloigne de la référence historique du body art au profit d'un héritage plus directement cinématographique et qui va de Buster Keaton à Chantal Ackerman (on pense à son film : Jeanne Dielman, 23 quai du commerce, 1080 Bruxelles).
Sans dérouler d'autre narration que la progression d'un mouvement, ce petit film est un concentré de la puissance expressive - explosive ! - du cinéma.

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