Éric de Riedmatten reçoit un invité dans #LHebdoDeLEco pour approfondir un sujet économique…
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00:00Beaucoup d'inquiétudes autour du secteur automobile et toutes les PME qui en dépendent, les équipementiers.
00:06Nous sommes avec le patronat de l'automobile.
00:09Merci d'être avec nous, Xavier Oran.
00:10Vous êtes délégué général de Mobiliance, qui représentait toute cette filière.
00:15Inquiétudes parce que beaucoup de PME, aujourd'hui, commencent à être en difficulté.
00:19Disons-le, c'est la Chine qui vous inquiète aujourd'hui.
00:22La Chine n'est pas le premier point de préoccupation.
00:24Ce sont des compétiteurs, on va y revenir, qui sont tout à fait exceptionnels.
00:27Il ne faut pas avoir peur de cette compétition, mais en revanche, il faut corriger nos faiblesses.
00:32Et donc, si nous sommes dans une situation extraordinairement complexe et sensible,
00:36c'est parce que nous en sommes avant tout les premiers responsables,
00:39à la fois au niveau européen, mais aussi au niveau français,
00:43avec des politiques publiques qui sont souvent déconnectées des réalités du marché,
00:47des réalités économiques et sociales de nos territoires.
00:50Et c'est cela, avant tout, qui nous fait aboutir à des niveaux absolument ahurissants,
00:55parce que, à la fois, notre niveau de production en France n'a jamais été aussi bas que dans les années 60.
01:01C'est quand même une sacrée contre-performance.
01:03Et puis, le niveau de marché, en termes de consommation,
01:05c'est un bond en arrière qui contraste de manière très singulière
01:10par rapport au bond en avant que la Chine a magnifiquement réussi.
01:13Il faut bien le reconnaître.
01:14C'est un peu la double peine.
01:17C'est la double peine.
01:17Mais ça remonte à il y a longtemps.
01:18Quand on a délocalisé nos usines, on savait bien qu'un jour ou l'autre, on en paierait la faible.
01:22Bien sûr.
01:23Mais si on a délocalisé nos usines, il y avait une stratégie aussi de localisation
01:26à la fois de nos constructeurs et des équipementiers.
01:28Mais on n'a surtout pas réglé l'éléphant dans la pièce.
01:32L'éléphant dans la pièce au niveau de l'industrie automobile,
01:36ce sont nos problèmes de compétitivité.
01:38Ça, c'est un problème qui dépend de nous, qui dépend de l'Europe et qui dépend de la France.
01:43Et donc, à force de ne pas avoir traité ce problème au fond,
01:46qui a fait l'objet quand même d'un nombre assez incalculable de rapports officiels,
01:51de rapports parlementaires, de rapports au niveau du gouvernement,
01:53donc c'est le boulet que nous traînons.
01:56Et au cours de ces dernières années, les différentiels de compétitivité,
01:59en particulier avec la Chine, mais pas seulement, se sont évidemment accentués.
02:03Donc, on est en plein décrochage.
02:05Et ce qui existait déjà avant le Covid avec des écarts de compétitivité de l'ordre de 20%,
02:10eh bien aujourd'hui, c'est 25 à 30% supplémentaires seulement sur ces cinq dernières années.
02:16Donc, quand on parle d'écarts de compétitivité,
02:18c'est un fossé aujourd'hui qui s'est élargi entre l'Europe, la France en particulier,
02:24et le reste du monde qui est extrêmement dynamique.
02:26Une fois dit ça, comment s'en sortir ? Comment remonter la pente ?
02:28Ou est-ce qu'on baisse les bras et on dit l'automobile, c'est fini pour nous, Européens ?
02:31Il ne faut pas baisser les bras, certainement pas, parce que d'abord, il y a une responsabilité qui est colossale.
02:37Quand on parle d'industrie automobile en Europe, c'est quasiment 10% du PIB de l'Europe, c'est 15 millions d'emplois.
02:44Ce sont des compétences qui sont extrêmement larges, extrêmement étendues.
02:48C'est un écosystème économique qui est très enraciné dans les territoires européens et encore français.
02:53Il y a un savoir-faire qui est évident et qui s'exporte.
02:56Je pense en particulier à nos équipementiers comme Forvia ou Valeo qui sont très présents en Chine.
03:03Donc on voit qu'on a ce patrimoine et cette capacité à le convertir.
03:05Heureusement qu'on exporte nos équipements.
03:07Oui, on a un savoir-faire français qui est reconnu, mais nous sommes vraiment la croisée des chemins.
03:14Et donc si, dans les mois qui viennent, je pense qu'il faut avoir la notion de l'urgence quand on voit la situation avec objectivité,
03:23quand on prend du recul, il y a le feu à tous les étages de l'industrie automobile européenne
03:28et qui vient percuter toutes nos chaînes de valeurs traditionnelles.
03:31Donc il faut bouger, bouger très vite.
03:32Je comprends bien, mais quand vous avez les voitures chinoises, vous voyez qu'elles sont en train de monter en puissance.
03:35Est-ce qu'on veut dire que c'est bon ou mauvais pour notre économie ?
03:37Écoutez, de toute façon, on n'arrêtera pas ce progrès technologique.
03:39Aujourd'hui, il est stupéfiant et le progrès, non seulement les volumes, mais aussi les technologies et les modèles économiques,
03:46qu'on le veuille ou non, ils ont basculé de l'ouest vers l'est.
03:50Les centres de gravité se sont déplacés.
03:52Donc on peut dire que l'invasion a commencé ?
03:53Bien évidemment.
03:54Et c'est un, encore une fois, ce sont des compétiteurs extraordinaires.
03:58Donc il faut les connaître, il faut travailler avec eux, il faut être ouvert.
04:02Ce ne sont pas des droits de douane qui régleront, à mon avis, le sujet.
04:05Il faut apprendre et voir ce qui se passe sur le marché de la Grande Asie.
04:11Vous voulez dire qu'il ne faut pas se les mettre à dos, c'est ça, si on veut parler de manière brève ?
04:15Je pense qu'il n'y a plus d'autre option, en réalité, parce qu'ils ont acquis une telle puissance et une telle force
04:20qu'il faut rentrer plutôt dans une logique de coopération,
04:24plutôt que de laisser une logique de tension dominer la réalité du marché automobile mondial tel qu'il est aujourd'hui.
04:32Auto électrique, carte grise payante, désormais, c'est encore un mauvais point ?
04:37Non, mais c'est une aberration.
04:38On va continuer encore comme ça combien de temps ?
04:41Combien de temps ?
04:42On va envoyer des messages contradictoires, d'abord au marché, aux clients finaux,
04:47que ce soit les particuliers ou les entreprises.
04:50On se démarque en France par une instabilité réglementaire et fiscale qui est devenue chronique.
04:56Chaque mois qui passe, il y a une nouvelle taxe sur l'automobile, mais ce n'est pas possible.
05:01Ce n'est pas possible.
05:03Ça va alourdir le prix des voitures ?
05:04Non seulement ça va alourdir le prix des voitures, mais l'État parie sur des recettes fiscales.
05:09En réalité, je crains qu'il ne les ait pas, parce que les acteurs économiques particuliers ou entreprises
05:14vont prendre des décisions inverses pour s'adapter à une réglementation sans cesse changeante
05:19et par conséquent, ils vont prolonger la durée de vie actuelle de leur véhicule.
05:23Le département du Nord a renoncé.
05:25Oui, parce que, fort heureusement, et c'est une décision raisonnable et rationnelle
05:31de Xavier Bertrand et du conseil régional, c'est la première terre automobile de France.
05:36Bon, donc tant mieux, une région a pris cette décision,
05:41mais ce réflexe un peu pavlovien de surtaxer le produit automobile,
05:46eh bien c'est encore une première place que la France a gagnée,
05:49c'est la première place de toute l'Europe en termes de surcharge pondérale, si je puis dire, au niveau fiscal.
05:56Et donc les Français, comme les entreprises, n'en peuvent plus de ce sur-régime réglementaire et fiscal
06:01qui est devenu aujourd'hui une aberration.
06:04Donc j'espère que le gouvernement tiendra compte de cet état de fait
06:08au moment où il se lance dans la préparation du projet de loi de finances pour 2026.
06:14Merci d'être venu sur CNews, Xavier Oran, délégué général de Mobiliens, le patronat de l'automobile.
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