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00:00Un constat à présent Marguerite, toujours pas assez de filles dans les filières scientifiques.
00:0425% seulement et ce chiffre ne bouge quasiment pas, c'est tout le problème.
00:09La ministre de l'éducation veut que cela cesse et lance un plan.
00:12Filles et maths, on l'écoute.
00:14On ne peut pas se satisfaire d'avoir seulement 25% de filles dans les formations pour les métiers d'ingénieur et les métiers du numérique.
00:24Et on peut d'autant moins s'en satisfaire qu'on stagne à ce niveau-là depuis le début des années 2000.
00:31Donc c'est pénalisant pour les femmes qui n'accèdent pas ou qui accèdent moins à des métiers qui sont rémunérateurs.
00:38Et puis c'est pénalisant pour le pays parce que globalement, on sait qu'on ne forme pas assez d'ingénieurs.
00:44C'est pour ça que moi j'ai lancé le plan Filles et maths avec un message à toutes les jeunes filles.
00:50Prenez votre place, on a besoin de vous.
00:52Vous réagissez avec nous Mohamed Nassiri, bonjour.
00:57Vous êtes professeur de mathématiques au lycée et dans le supérieur spécialisé dans les inégalités de genre.
01:04Filles, garçons, première question, pourquoi est-ce qu'on en est encore là ?
01:08Dans vos classes par exemple, pourquoi les filles renoncent aux maths ?
01:12Qu'est-ce qu'elles vous expliquent ?
01:14Malheureusement, il faut savoir que c'est important de le comprendre, c'est un phénomène qu'on a de moins en moins de filles et également de garçons qui déjà font des mathématiques.
01:25La réforme du lycée a accentué les personnes qui abandonnent les mathématiques entre la seconde et la première et puis la première et la terminale.
01:35Mais elle a également aussi du coup accenté les inégalités de genre.
01:39Donc il y a encore moins de filles.
01:41On est notamment sur une fille sur deux qui abandonne les mathématiques entre la première et la terminale.
01:46Tandis que pour les garçons, c'est un sur quatre.
01:48Donc c'est un vrai problème.
01:50Effectivement, avant, on avait moins de filles qui faisaient des mathématiques.
01:55Mais normalement, si vous avez connu ce système-là, c'est ce qu'on appelait les terminales scientifiques, les terminales S.
02:00En fait, on avait trois composantes de disciplines.
02:03On avait les mathématiques, on avait les SVT et on avait les sciences de la vie de la Terre et sciences physiques et chimiques.
02:11Et donc, il y avait cette triplette scientifique qui faisait qu'en fait, on arrivait à garder les filles jusqu'en terminal.
02:16Aujourd'hui, comme il y a un choix qui peut être fait d'abandonner les mathématiques et l'informatique,
02:20qui restent des disciplines qui sont très sélectives, notamment parce que Mme Borne parlait justement des ingénieurs.
02:26Donc les mathématiques restent une discipline, notamment pour entrer dans les classes préparatoires,
02:30pour pouvoir après passer les concours d'école d'ingénieurs.
02:32Donc si on n'a plus de filles justement, donc si elles abandonnent les mathématiques en amont,
02:37forcément, en fait, on ne les retrouvera pas par la suite.
02:39Et donc après, le pourquoi elles abandonnent, c'est multifactoriel comme problème.
02:43Ce n'est pas que l'école, c'est sociétal comme souci.
02:46Oui, mais vous, votre retour de terrain ?
02:47Parfois, qui ne se reconnaissent pas.
02:50Votre retour de terrain, puisque vous les fréquentez au quotidien, ces élèves.
02:54Vous voyez bien quel est le discours dominant.
02:56C'est justement ça, en fait, il y a par exemple, oui, oui, bien sûr.
02:59Et par exemple, les filles ne s'identifient pas, par exemple, dans des métiers mathématiques ou informatiques,
03:06parce que si là, maintenant, je demande à quelqu'un de penser, même à vous,
03:09si je demande de penser à une personne qui fait de l'informatique,
03:12la première personne qui va vous venir en tête, c'est peut-être, je ne sais pas, un geek à lunettes derrière un écran.
03:16Ce n'est pas forcément une fille ou une femme qui fait de l'informatique.
03:19Donc il y a aussi un souci de rôle modèle.
03:21D'ailleurs, c'est une des mesures proposées par Elisabeth Borne de jouer sur ces rôles modèles-là.
03:27Et après, donc ça, c'est un des premiers leviers.
03:29Et puis après, il y a aussi, quand on a des retours de terrain,
03:32on a notamment des choses comme quand il y a une majorité de garçons dans une classe,
03:38ça ne donne pas nécessairement envie à une fille d'aller dans une classe où il n'y a que des garçons.
03:42Moi, je peux vous faire un retour de terrain de la semaine dernière
03:45où une élève de terminale qui est partie faire des évaluations en informatique
03:50à l'université pour l'année prochaine m'a envoyé un message en me disant
03:55« En fait, M. Nasseri, vous avez raison, c'est vrai que c'est quand même étrange d'arriver dans une salle
03:58où il n'y a pratiquement que des garçons. »
04:00Et il y a aussi ce côté un petit peu, pas forcément toujours sécurisant,
04:04en se disant « En fait, on va arriver dans un milieu où il n'y a que des hommes ou que des garçons. »
04:08Parce qu'effectivement, on a aussi un problème, on a une montée de sexisme, tout ça,
04:11qui est assez présente aussi, qui monte dans les disciplines scientifiques malheureusement.
04:16Alors justement, Elisabeth Borne a laissé entendre, ce n'est pas du tout une annonce,
04:20elle l'a vraiment laissé entendre, qu'elle pourrait mettre en place des quotas pour les classes prépa.
04:25Est-ce que ça pourrait régler la question selon vous ?
04:27Alors, ça dépend de ce qu'on entend par quotas.
04:31Moi, je vais vous dire, moi je trouve ça, moi je suis un pro-quotas.
04:34Ce n'était pas du tout mon combat de base, mais je trouve qu'effectivement,
04:38on est tellement arrivé dans une situation très problématique,
04:40que si on ne fait pas de quotas, ça me semble difficile.
04:42Donc, je vous donne un exemple pour comprendre un petit peu comment je vois les quotas.
04:46Si demain, on pense aux classes préparatoires notamment.
04:49Si demain, imaginons, on a une classe préparatoire qui a 50 places,
04:5350 places dans sa classe préparatoire, et il y a 10 filles qui postulent,
04:56et 80 garçons, qu'est-ce que vous faites ?
04:59Vous avez 50 places, s'il n'y a que 10 filles qui postulent,
05:01vous prenez que 10 garçons et dans ce cas-là, vous videz le reste de votre classe,
05:04ou vous vous dites, non, on va quand même remplir.
05:05Mais du coup, vous n'avez pas réglé le problème,
05:07parce que tout simplement, vous n'avez pas réglé le vivier en fait.
05:10Donc, mettre des quotas, pourquoi pas,
05:12mais c'est une solution qu'il faut réfléchir,
05:14elle est radicale, elle est compliquée.
05:16Moi, je ne suis pas totalement contre,
05:17mais il faut vraiment qu'elle soit bien faite sur le terrain.
05:21D'ailleurs, justement, il y a 8 mesures qui sont proposées par Elisabeth Borne.
05:24Il y a des mesures qui semblent,
05:26il y en a plein que je trouve super.
05:28Sur le terrain, j'attends de voir ce que ça donne,
05:29parce que ça risque quand même d'être assez compliqué
05:31pour certaines choses à mettre en place.
05:32Par exemple, juste un exemple très rapidement,
05:35celle qui pourrait être très compliquée.
05:37Je ne sais pas, par exemple,
05:38il y a une des mesures qui, moi, me touche personnellement,
05:41parce que c'est la formation des enseignants et des enseignantes
05:43sur les stéréotypes de genre notamment.
05:47Et donc, je crois que dans les mesures,
05:49c'est marqué qu'il faut former tout le monde avant le 15 septembre,
05:51si je ne dis pas de bêtises.
05:52C'est très court en termes de délai.
05:54Si on prend juste l'Académie de Lille,
05:55je ne suis pas certain qu'on ait assez de formateurs
06:00et de formatrices déjà pour former
06:01tous les collègues sur le terrain.
06:05Et honnêtement, avant le 15 septembre,
06:07ça me semble très difficile,
06:08notamment si en plus vous devez ajouter des formations,
06:09laïcité, harcèlement, tout ça.
06:11Donc ça semble difficile sur le terrain en tout cas.
06:13Merci.
06:14Merci.
06:15Merci.