Le Premier ministre, dans une interview publiée ce samedi 3 mai, s'est prononcé sur l'utilisation du terme "islamophobie". Un mot rejeté par certains après la mort d'un fidèle dans une mosquée du Gard.
Catégorie
📺
TVTranscription
00:00Anne-Charlene Bézina, votre choix du 20h BFM, nous avons deux minutes pour parler de ce terme islamophobie.
00:06De quoi es-tu le nom ?
00:08La controverse autour de la qualification d'islamophobie du crime d'Abou Barqar Sissé
00:12agit, c'est vrai, la vie politique depuis une semaine.
00:15Point sur le droit, la politique et le vivre ensemble autour de cette notion.
00:18Alors que dit le droit ?
00:19Alors que dit le droit ? Eh bien beaucoup de choses.
00:21D'abord sur les propos, l'article 10 de notre déclaration des droits de l'homme
00:23qui dit bien que la liberté d'expression, elle est religieuse ou elle n'est pas,
00:26donc elle est absolument totale.
00:27Sauf qu'il ne faut évidemment pas troubler l'ordre public
00:30et l'injure raciste ou antisémite, elle est punie par le droit pénal.
00:35Non public, c'est les articles 225.16, si c'est suivant, je n'y reviens pas.
00:39Public, c'est la loi très importante sur les délits de presse de 1881.
00:44Donc on ne manque pas évidemment d'arsenaux pénaux sur ces questions
00:47avec une spécificité évidemment pour la religion juive
00:50qui est l'antisémitisme par rapport à la Shoah
00:52et avec ce délit de négationnisme ou le délit d'apologie,
00:56toutes ces questions qui sont relayées en fait par les délits de presse.
00:59La seule chose qu'il faut avoir en tête, c'est que ça n'interdit pas un discours sur la religion,
01:03voire même une critique sur la religion.
01:05Et en ce sens, la France, elle est complètement alignée aussi
01:07sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme.
01:09Il n'y a pas de délit, de blasphème.
01:11On peut, et je cite ici l'affaire sur les caricatures de Malo Aumet
01:14et le très important arrêt du tribunal correctionnel,
01:17on peut heurter, choquer ou inquiéter une religion.
01:20Donc voilà les impératifs.
01:22Pour les crimes, évidemment, c'est encore plus grave.
01:24Et le Code pénal dit une chose très importante,
01:26c'est que les peines encourues sont aggravées
01:28lorsqu'il y a une infraction commise à raison de l'appartenance
01:30ou de l'appartenance, non appartenance mais supposée aussi,
01:35dans des cas graves, victimes par rapport à son ethnie,
01:39sa nationalité, sa race, sa religion.
01:41Et on met ça aussi en comparaison avec ce qu'on appelle les crimes de haine,
01:45homophobie, transphobie, etc.
01:46Donc en fait, en gros, on n'a pas un droit qui va nous dire
01:49qu'il y a un crime islamophobe ou antisémite, etc.
01:52Mais on nous dit un crime raciste, un crime qui va inciter à la haine.
01:57C'est ça que le droit punit.
01:59Et tout dépend des circonstances de l'infraction.
02:01La procureure a bien dit, bon là, l'idée qu'il n'y ait pas d'antiterrorisme
02:03n'amenuise évidemment pas l'infraction.
02:06Alors, politiquement, c'est quand même là qu'on va avoir un problème
02:08par rapport au fait que déjà personne ne fait ce travail-là, juridique,
02:11d'expliquer les mots.
02:12Et puis, parce que la France Insoumise a ensuite estimé
02:16que l'islamophobie pourrait, dans ce cadre-là, être une islamophobie d'État.
02:20Donc au fond, on se rend compte que l'adoption de ce terme,
02:22François Bayrou dit, en tant que citoyen, il faut poser les mots sur les réalités.
02:26Mais Bruno Retailleau, ministre de l'Intérieur, lui répond,
02:29au fond, employer l'islamophobie, ça peut aussi avoir un effet de maximisation
02:33parce qu'on ne pourrait plus critiquer une religion.
02:35Alors, ce qu'il faut dire, c'est qu'au fond, lutter contre le fanatisme religieux,
02:38ce n'est pas lutter contre les religions,
02:40que ce qui blesse beaucoup et que le crime ici, c'est la simplification,
02:45c'est le vide, au fond, autour de tous ces termes qui sont utilisés,
02:48qui incitent à la haine.
02:49Je rappelle quand même les termes de Gérard Collomb
02:51quand il a quitté le ministère de l'Intérieur en disant
02:53« on risque d'avoir une France l'un contre l'autre ».
02:55Donc, n'oublions pas le poids des mots, le poids du droit,
02:58l'empathie nécessaire à toutes ces questions
03:00et le risque aussi du vote confessionnel.
03:02Merci.