Le président Volodymyr Zelensky a répété ce vendredi 25 avril qu'il considérait que la Crimée appartenait à l'Ukraine malgré son annexion par la Russie en 2014, soulignant que la position de Kiev à ce sujet restait "inchangée" en dépit des pressions américaines.
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00:00Olivier Ravanelé, on va parler de ce conflit ukrainien et d'un sujet qui va être crucial sur le plan militaire, ce n'est pas Kursk, c'est la Crimée.
00:09Oui, la Crimée dont on parle beaucoup et de cette reconnaissance de la Crimée, reconnaître l'annexion de la Crimée, reconnaître que la Crimée est russe, ça fait partie des points de crispation pour Zelensky.
00:20Historiquement, la Crimée a été longtemps russe, elle a basculé du côté ukrainien et c'est Khrushchev qui l'a fait basculer du côté de l'Ukraine.
00:28Il y a toujours eu un attachement très fort, notamment à la ville de Sébastopol.
00:32Quand on rentre dans le détail des négociations actuellement, on voit bien que ce qui est sur la table, c'est au fond ce qu'on va écrire dans un futur accord de paix.
00:41Vous avez, et si on le voit sur la carte, une ligne de front, sur cette ligne de front, vous avez des territoires qui sont objectivement contrôlés militairement par la Russie.
00:51C'est ce qu'on appelle une occupation de facto.
00:53Donc, de facto, si vous gelez les combats, il y en a qui sont d'un côté, il y en a qui sont de l'autre.
00:59Et dans une trêve qui est appelée à durer, les territoires qui sont contrôlés sont de facto du côté des Russes.
01:06Ça ne veut pas dire que tout le monde reconnaît qu'ils sont russes.
01:09Et puis, vous avez ce que Trump semble commencer à aborder, c'est-à-dire un État qui reconnaît de droit, déhouré,
01:18que cette partie-là, ben oui, elle est bien russe.
01:21Et c'est ce que réclame Poutine sur la Crimée.
01:23La Crimée, il la contrôle depuis dix ans.
01:25Il a investi 25 milliards de dollars pour la développer.
01:28Il a construit un pont magnifique pour bien la rattacher au continent russe.
01:33Et Poutine demande que tout le monde reconnaisse que la Crimée est russe et restera russe ad vitam.
01:40Évidemment que pour Zelensky, ça n'est pas possible.
01:43Évidemment que pour les Européens, ça n'est pas possible parce que c'est faire fi du droit international.
01:48Là où il y a quelque chose qui bouge, c'est que Trump dit,
01:51moi au final, peut-être que je peux reconnaître que cette Crimée est bien russe.
01:56Le problème, c'est qu'il y a déjà 11 pays qui l'ont reconnu.
01:58Ce n'est pas les plus fréquentables.
01:59Il y a la Corée du Nord, il y a la Biélorussie évidemment, il y a l'Afghanistan.
02:03Est-ce que Trump a conscience qu'il va rentrer dans cette liste-là en le reconnaissant ?
02:07Peut-être pas.
02:08Ou bien il s'en fiche, et ça ce serait terriblement trumpiste de dire,
02:12après tout, si c'est ça le prix à payer pour la guerre, on fait plaisir à Poutine,
02:15on lui dit que la Crimée est à lui et on passe à autre chose.
02:18Il ne faut pas le perdre de vue ça.
02:19Mais néanmoins, ce point de crispation-là, il est là.
02:23Et en fait, tout l'enjeu, et là je parle sous votre contrôle,
02:26vous avez abordé ces sujets de manière beaucoup plus pointue que moi,
02:30l'enjeu des négociations, ça va être de trouver la formulation
02:33qui permettra à tout le monde de pouvoir signer en bas.
02:35Aux Ukrainiens de dire, on ne l'a pas perdu,
02:38et aux Russes de pouvoir dire, on l'a gagné.
02:40Et c'est, encore une fois, des artifices juridiques
02:46qui vont permettre à chacun de pouvoir signer cet accord.
02:51Parce que ce qui est sûr, c'est que dans la négociation,
02:53personne à un moment donné dira,
02:55non mais la Crimée va revenir du côté de Zelensky,
02:57même lui n'y croit pas.
02:58Je vais m'adresser à l'ancien directeur de l'école de guerre.
03:00Si les négociations se font sur cette base-là
03:03et qu'on devait geler la carte de l'Ukraine de cette manière-là
03:07avec ces territoires occupés par la Russie
03:09qui reviendraient à la Russie,
03:11alors pourrait-on dire que l'Ukraine a perdu la guerre ?
03:15Non, je ne crois pas qu'on puisse dire ça.
03:17Parce que le fait que l'Ukraine vive encore
03:20après trois ans d'une guerre terrible
03:22explique qu'au contraire, l'Ukraine a gagné la guerre.
03:26Elle a perdu le contrôle d'une partie de ses territoires.
03:29Celui qui a fondamental...
03:30C'est quand même une sacrée partie de son territoire.
03:32Mais bien sûr, 20%.
03:34Sûrement une sacrée partie.
03:36Mais autant nous, nous avions perdu la guerre en 70,
03:38autant on a perdu la guerre de 40,
03:40autant les Ukrainiens n'ont pas perdu cette guerre.
03:42On ne peut pas dire ça.
03:44Et je pense que celui qui l'a perdu, c'est Poutine.
03:46Et c'est Poutine, c'est pour ça qu'il veut quand même
03:48gagner quelque chose.
03:49Parce que par rapport à toutes ses envies,
03:51par rapport à son rêve, par rapport à ses promesses,
03:54il est vraiment très en deçà.
03:56Et il ne peut pas laisser cette guerre se terminer
03:58sans avoir acquis quelque chose de sérieux.
04:00D'où l'importance de la Crimée pour lui.
04:03Et je pense d'ailleurs qu'il cherchera à aller plus loin
04:05et à faire reconnaître aussi, il ne l'a pas dit encore,
04:08mais les territoires occupés.
04:10C'est pour ça que la position de Trump
04:12est tout à fait importante.
04:14Ce que je crains, moi, c'est un scénario à l'Afghan.
04:17Qu'est-ce que c'est un scénario à l'Afghan ?
04:19C'est un scénario qui est basé sur la lassitude de Trump.
04:22On se rappelle dans les...
04:24Pour parler de doigt de 2019 ou 2020,
04:27mais 2019, à un moment donné,
04:30il n'y arrive pas à Trump.
04:31Et puis, alors, il lâche tout.
04:33Il lâche tout aux talibans,
04:34dont on sait qu'ils se saisiront du palais du gouverneur
04:37à Kaboul, avant même que les Américains soient partis.
04:40Et donc, je crains que ça ne se passe comme ça.
04:43Et on ne doit pas oublier,
04:44parce que ça, c'est dans l'histoire.
04:46Les Américains ont laissé tomber
04:48tous leurs alliés depuis 1945.
04:51Ça s'est toujours passé comme ça.
04:53Le Shanghai Tchèque, les Vietnamiens, les Irakiens,
04:55tous, tous.
04:57Et donc, on se dit, au fond,
04:58il y a quand même une logique de l'histoire.
05:00Et il y a une logique Trumpienne
05:02et il y a une logique américaine.
05:03Et je serais vraiment triste qu'elle aboutisse.
05:05Intéressant, ce parallèle au scénario afghan.
05:08Monsieur l'ambassadeur,
05:08est-ce que la Crimée est russe ou pas ?
05:11Alors, d'abord, je rappelle
05:13que la Chine n'a pas reconnu
05:15l'annexion de la Crimée.
05:17Et donc, s'il y avait un tel mouvement
05:19des États-Unis,
05:21ça serait effectivement très, très grave.
05:24Deuxièmement, moi, je crois
05:24qu'il ne faut pas rentrer dans un débat historique
05:27pour savoir si la Crimée
05:28a été russe,
05:31parler de Catherine II
05:33et de tout.
05:34Enfin, tout se revenir sur toute cette histoire.
05:35La réalité est qu'il y a un État
05:37qui est indépendant,
05:38qui est souverain
05:39et puis son voisin
05:41l'attaque pour prendre une partie du territoire.
05:44Ensuite, je crois, comme vous,
05:46qu'il y a des formules diplomatiques
05:48qui peuvent exister,
05:50qui flottaient
05:50et qui, je crois,
05:52auraient pu être acceptées.
05:54Elles sont peut-être encore dans le circuit
05:56qui consisteraient à dire
05:58qu'on met la question de côté
06:01pour dix ans,
06:02que l'Ukraine s'engage
06:04à ne pas essayer de regagner
06:06la Crimée par la force
06:08et que dans dix ans,
06:09on en reparle.
06:11Ce genre de choses,
06:12à mon avis,
06:12est tout à fait jouable
06:13et puis on peut avoir un gel
06:15de la ligne de confrontation.
06:18Ce sont des situations
06:19qui, malheureusement,
06:20existent par ailleurs
06:21et qui peuvent exister
06:22pour des années.
06:23Je pense à la péninsule coréenne.