La ville de Nice aligne des chiffres de fréquentation record : elle se hisse à la 2e place des destinations les plus recherchées en France. Les Américains en sont tombés amoureux : +20% de fréquentation l'année dernière. Mais jusqu'où le tourisme est-il supportable ? Jean-Sébastien Martinez, directeur de l'Office du Tourisme de Nice, et Christophe Souques, restaurateur, vice-président de la branche Restauration de l'Union des Métiers et de l'Industrie de l'Hôtellerie, sont les invités de RTL Soir.
Regardez L'invité pour tout comprendre avec Yves Calvi du 10 avril 2025.
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00:09RTL Soir, en direct de Nice
00:12Nous sommes à Nice, il est 18h44, c'est un véritable bonheur, mais ce bonheur est-il vraiment partagé par tous les Niçois ?
00:19Je ne parle pas des hôteliers, ni des restaurateurs, et encore moins des plagistes, mais bien des habitants, confrontés au tourisme de masse.
00:25Notre reporter et correspondante Marie Bonnet-Blanc les a rencontrés aujourd'hui dans les rues de la ville.
00:30C'est terrible les touristes, ils se croient tout permis, et quand c'est des américains, c'est encore plus !
00:37Bon, mais les Niçois, ils savent que ça rapporte aussi pour la ville.
00:40Je pense que les touristes, effectivement, on en a besoin, après c'est vrai qu'à Nice, il y a certains quartiers où c'est un peu difficile de passer l'été, parce qu'il y a beaucoup de monde.
00:48Pour nous qui habitent ici, on doit éviter des endroits, ça c'est vrai et certain.
00:52Là, on est vraiment dans les centres, côté Masséna, quelquefois c'est impossible de fréquenter.
00:57Tout ce qui est Airbnb, etc., évidemment, c'est problématique, parce que tout le monde ne fait plus que ça.
01:02Je pense qu'on ne peut pas non plus avoir le beurre et l'argent du beurre, donc si on enlève du tourisme, est-ce qu'il va rester à Nice ?
01:08Ah là là ! Bonsoir Jean-Sébastien Martinez, vous êtes directeur de l'Office de tourisme de Nice. Est-ce que vous comprenez ces préventions ?
01:14Tout à fait. On a bien conscience de l'importance du lien entre la supportabilité touristique, entre les résidents et les touristes.
01:21C'est pour ça que l'Office de tourisme conduit chaque année une étude, une enquête sur la relation que les métropolitains ont avec le tourisme,
01:30pour s'assurer que cette relation soit bonne, puisque comme certains l'ont évoqué, le tourisme est un indépendant essentiel de notre activité économique du territoire.
01:36Le maire de Nice, Christian Estrosi, vient d'annoncer de nouvelles mesures pour lutter contre l'omniprésence de logements Airbnb.
01:43Il a raison Christian Estrosi ?
01:44Il a raison. Notre volonté c'est d'allier tourisme et supportabilité, donc d'être toujours soucieux que les Niçois,
01:52et notre priorité c'est d'abord les Niçois, les métropolitains avant le tourisme, et derrière le tourisme qui recherche de la qualité.
01:58Si c'est pour avoir un tourisme où on n'a pas d'authenticité, où on retrouve les mêmes choses que partout, il n'y a pas d'intérêt de venir à Nice.
02:04Venir à Nice, c'est partager la vie des Niçois, c'est vivre avec les Niçois, et avoir une différence, une expérience niçoise.
02:09Et pourtant dans certains quartiers de la ville, vous le savez, jusqu'à 70% des logements touristiques sont détenus par des investisseurs professionnels.
02:16Où est le problème ?
02:17Il n'y a pas dans des quartiers 70% de logements qui sont détenus par des loueurs professionnels.
02:23Au plus fort, on est à 16%, et après on a une offre hôtelière de qualité qui marche très bien et qui permet de répondre aux choses.
02:32Donc mon chiffre était faux ?
02:33Votre chiffre n'est pas le bon.
02:33Parfait, il faut le dire quand on se trompe.
02:35On se tourne vers Christophe Souk, qui est à vos côtés, restaurateur niçois, représentant de l'UMIH, de l'Union des métiers de l'industrie de l'hôtellerie sur la Côte d'Azur.
02:46C'est ce qu'on aime.
02:47Et j'imagine que vous, les touristes, vous les voulez en masse ?
02:51Je ne suis pas si d'accord que ça.
02:53Ah ben ça fait du bien entendre.
02:54On a l'avantage d'avoir un tourisme qui est à l'image de la ville, c'est-à-dire on a des touristes qui sont curieux de découvrir la ville.
03:03Je suis content, j'ai discuté avec quelqu'un qui travaille chez vous tout à l'heure, qui découvrait pour la première fois la ville en disant
03:08« Waouh ! Effectivement, il suffit d'aller manger un peu sur le bord de mer, voyager un petit peu à l'intérieur du vieux Nice pour trouver ces monuments magnifiques, ces couleurs magnifiques. »
03:16On ne parle pas de la beauté de la ville de Nice.
03:18Vous avez entendu des niçois qui s'exprimaient il y a quelques instants sur notre antenne en disant
03:21« Il y en a trop, on en a marre, ça ne va pas. »
03:24Et eux, ils ne vivent pas du tourisme, visiblement.
03:26Alors, je pense que dans les radiotrottoirs qui ont été prises, si effectivement vous parlez de la place Masséna, elle est tellement grande, je ne vois pas où est le problème.
03:35Et sur le cours Saléa, peut-être sur le cours Saléa, parce qu'effectivement il n'y a quasiment que des restaurants et des bars,
03:41effectivement à certaines heures c'est un peu compliqué de circuler.
03:43Mais c'est peut-être aussi ça qui fait que les gens ont envie de venir.
03:47Cette vie ?
03:48Bien sûr que oui.
03:49Si vous êtes touriste et que vous aimez voir un cœur de ville, vieille ville, avec des rues étroites, avec des bâtiments hauts qui font de l'ombre et de la fraîcheur,
03:59ne me dites pas que vous voulez être tout seul dans la rue.
04:01Et là, je pose la question à tous les deux finalement, y compris à vous, M. Martinez.
04:05Est-ce concilier tourisme de masse et qualité de vie ? C'est possible ?
04:08Alors, moi déjà je voudrais, je vais me permettre, je ne suis pas d'accord du tout, alors j'ai entendu de sur-tourisme, etc.
04:13Je pense qu'il faut faire très attention, quand on est une ville qui a une qualité aéroportuaire, du rail, de l'autoroute et des voies de circulation et du transport intérieur avec le tram,
04:25on n'a pas d'histoire de sur-tourisme.
04:27Le sur-tourisme c'est quand vous avez un endroit qui n'est pas fait pour recevoir du tourisme en nombre.
04:33Nice est tout à fait pour, on a une capacité hôtelière, une capacité de réception qui est énorme et on n'est pas au maximum.
04:38C'est pour ça que je ne suis pas d'accord sur le sur-tourisme.
04:40Le sur-tourisme c'est quand vous allez par exemple dans le Var, cher pays de M. Cannes-Rivière, et qu'il y a quelqu'un qui est sur Instagram,
04:47on regarde cette super plage, etc.
04:48Et là vous avez 200 personnes qui vont venir derrière, il n'y avait pas de banc, vous n'avez pas de poubelle, vous n'avez pas de garage, vous n'avez pas de place pour vous garer.
04:54Et là vous avez tout bousillé.
04:56C'est ça, c'est le sur-tourisme.
04:57Donc là on parle de beaucoup de touristes, voire trop pour certains, mais pas du tout de tourisme de masse.
05:02Il n'y a pas de sur-tourisme, on a pris l'arrêté anti-croisière pris par la métropole pour limiter et pour contenir cette population.
05:09Précise pour nos auditeurs que c'est la limitation des énormes bateaux de touristes à venir jusqu'à Nice.
05:15Tout à fait, sur Nice et sur la métropole, la ville franche.
05:17C'est également notre souci au quotidien de ne pas communiquer sur des lieux qui ne sont pas en capacité d'accueillir suffisamment de monde.
05:24Et c'est enfin notre rôle à l'Office de tourisme métropolitain, à la demande de Christian Estrosi,
05:28de pouvoir guider le flux des touristes un peu partout et le répartir sur l'ensemble du territoire.
05:33Y a-t-il, oui ou non, une tension sur le logement dans la ville ?
05:35Autrement dit, trop d'Airbnb et pas assez de vrais habitants.
05:40Tout à fait, et ça ce n'est pas une problématique touristique, c'est une problématique essentiellement foncière.
05:44Il y a la spéculation immobilière qui est faite au travers du Airbnb pour du tourisme,
05:49mais elle ne vient pas concurrencer l'offre touristique, elle vient concurrencer l'offre de logement pour les actifs.
05:53Et ça c'est un réel problème, même pour les professionnels du tourisme,
05:56qui ne peuvent pas forcément loger leurs employés en haute saison ou basse saison.
05:59C'est une difficulté que vous rencontrez ?
06:00Oui, quand on recrute pour loger les personnes, bien sûr.
06:03Mais ce problème-là, ça fait 35 ans que je fais mon métier, ça fait 35 ans que j'ai le même problème.
06:08Ça a toujours été, on a toujours été en deçà des capacités,
06:11mais surtout les 5 premières villes de France, les 6 ou même les 7 premières villes de France, ont le même problème.
06:15Nos confrères du monde évoquaient cette semaine l'arrivée de touristes américains en basse.
06:20Alors là, peut-être que vous allez me dire, peut-être que ce n'est pas vrai visiblement,
06:24mais plus, 20% supplémentaires sur un an.
06:26On peut les loger, s'occuper d'eux ?
06:28Ou là aussi, ça fait trop d'un coup.
06:30Ils sont exigeants, les clients américains.
06:32Ils sont exigeants, c'est une belle clientèle, c'est la clientèle qui dépense le plus.
06:35C'est 200 euros, un ménage français consomme pour 70 euros sur le territoire hors logement.
06:41Un américain, c'est 200 euros.
06:44Et il faut savoir que nous menons une grande campagne, puisque c'est notre première clientèle,
06:47c'est la première clientèle qui dépense, elle est essentielle pour notre territoire.
06:51Merci infiniment à vous deux, Jean-Sébastien Martinez, directeur de l'Office de tourisme du Nice,
06:55et Christophe Souk, restaurateur niçois, représentant de l'UMI,
06:58la fameuse union des métiers et de l'industrie de l'hôtellerie que nous aimons tant.
07:02Dans un instant...