« Plus vous êtes essentiels, moins vous êtes payés »
Flora Ghebali, militante écologiste et éditorialiste, assume avec humour être une « bobo parisienne » !
Dans son projet Les Essentiels, elle va à la rencontre des métiers essentiels qui ont tenu la France debout pendant le confinement. Pour neo, elle nous parle de ces métiers trop peu valorisés et de l’importance de respecter les ressources naturelles. 🌱🚜
Flora Ghebali, militante écologiste et éditorialiste, assume avec humour être une « bobo parisienne » !
Dans son projet Les Essentiels, elle va à la rencontre des métiers essentiels qui ont tenu la France debout pendant le confinement. Pour neo, elle nous parle de ces métiers trop peu valorisés et de l’importance de respecter les ressources naturelles. 🌱🚜
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00:00Si vous cherchez la bobo qui sommeille en moi, vous allez la trouver.
00:03Je cumule pas mal de clichés.
00:04J'ai mon permis mais je conduis jamais parce que d'avoir une voiture à Paris, ça n'a aucun sens.
00:07Je suis végétarienne, je n'aime pas beaucoup les produits animaux.
00:11J'ai grandi à Paris intramuros.
00:13Alors c'est un mot pour les bobos de chez Bobo.
00:16C'est bon, vous m'avez jugé, c'est fait, regardez, jugez-moi, c'est bon.
00:20Voilà, maintenant on discute.
00:21La différence entre un bobo et un bourgeois,
00:23un bourgeois, sociologiquement, c'est quelqu'un qui a beaucoup de pouvoir d'achat,
00:27un gros capital économique comme on dit.
00:30Un bobo, c'est ce qu'on appelle un bourgeois bohème.
00:32C'est quelqu'un qui a ce capital économique mais qui, au lieu de s'acheter des montres et des voitures,
00:37va s'acheter un gin vintage et manger des graines et du café au lait d'avoine.
00:41Salut Néo, c'est Flora Ghebali, je suis activiste et éditorialiste dans les médias
00:46et je suis ce qu'on appelle une vraie bobo parisienne,
00:50revendiquée, assumée, j'ai aucun problème à le dire.
00:52J'ai lancé sur ma chaîne YouTube une série qui s'appelle Les Essentiels
00:56où je pars à la rencontre des métiers essentiels
00:58qui ont tenu la France debout pendant le confinement.
01:01Heureusement qu'on a mis des bottes.
01:02D'ailleurs, la tension entre les métiers essentiels et non essentiels,
01:05c'est un peu la même que celle qu'on trouve entre les villes et les campagnes,
01:08entre les bobos et les ruraux.
01:10Et moi, je pense qu'au lieu de parler de division,
01:12on doit travailler à la réconciliation.
01:15Et donc, moi, ce que j'ai décidé de faire avec
01:17j'essaye douceur, bienveillance et humour,
01:20une série où on va essayer de se réunir.
01:23Et donc, ça va être une bobo à la ferme,
01:25une bobo dans les poubelles,
01:26parce que j'ai passé une journée avec Ludo,
01:28les boueurs stars de TikTok.
01:29Ça va être une bobo à la caisse d'un intermarché à Marseille.
01:32Vous savez, Emmanuel Macron, pendant le Covid, il nous a dit
01:35« Ceux qui ont des métiers essentiels, vous pouvez continuer à travailler.
01:38Ceux qui ont des métiers non essentiels, vous restez chez vous. »
01:40Donc, il a créé une hiérarchie entre nos métiers.
01:43Et pourtant, le truc hyper bizarre,
01:45c'est qu'en fait, il y a une espèce de pyramide inversée.
01:48C'est-à-dire que plus vous êtes essentiels, moins vous êtes payés.
01:51Plus vous êtes précaires, plus vous souffrez physiquement de votre travail,
01:55plus c'est dur et moins c'est valorisé socialement.
01:58On a construit toute une pyramide sociale
02:00où en fait, ce qu'on valorise, c'est les gens qui travaillent qu'avec leur tête.
02:03Moi, je suis sûre d'un truc.
02:05C'est que travailler qu'avec sa tête, à un moment, ça rend malheureux.
02:08Et qu'en fait, on a besoin de travailler avec ses mains,
02:09on a besoin de travailler avec son cœur et on a besoin de travailler avec sa tête.
02:12Et aujourd'hui, les gens qui ont les métiers du cœur,
02:14les gens qui travaillent dans les hôpitaux, dans les EHPAD, dans les écoles,
02:18c'est les gens qui sont là pour s'occuper de nos aînés,
02:20élever nos enfants, guérir nos malades et soigner.
02:23Ce sont les gens qu'on méprise le plus.
02:25Donc, pour moi, le but, ce n'est pas de mettre une hiérarchie,
02:27c'est justement de casser cette hiérarchie.
02:29J'ai choisi volontairement de contacter Étienne.
02:32« Ça va ? »
02:32« Oui, décolle. »
02:33Il est agriculteur dans la Sarthe et il est éleveur de bovins.
02:36« Allez, viens ! Tu vas essayer ! »
02:39FNSEA, qui est le plus gros syndicat agricole,
02:43qui n'est pas toujours, on va se le dire sincèrement, très école.
02:45Et donc, pour moi, l'idée, c'était d'aller voir un agriculteur
02:47qui ne me ressemble pas en termes de conviction, de sociologie, etc.
02:51Et en plus, je suis végétarienne, évidemment.
02:53Étienne, alors il faudra lui demander ce que lui, il a pensé
02:54de nos points communs et de nos différences.
02:56Pour lui, la loi, et il n'a pas tort,
02:58la loi qui domine, c'est la loi du marché.
03:00Et donc, quand c'est la loi du marché qui régule les humains,
03:03il faut s'adapter au marché.
03:05Et donc, le bovin devient un objet capitaliste,
03:09le sol devient un objet capitaliste,
03:11l'abattoir devient juste un espace capitaliste.
03:14Moi, même si je sais, j'ai conscience, je ne suis pas folle,
03:16que c'est la loi du marché qui, aujourd'hui, régule les liens humains,
03:21j'ai l'envie que ça change,
03:23et que, par exemple, on mange moins de viande,
03:26mais qu'on en mange mieux,
03:27qu'on sache la provenance des animaux qu'on mange,
03:30que les abattoirs ne se passent pas dans n'importe quelle condition.
03:33Donc, on n'a peut-être pas la même vision politique des choses.
03:36En revanche, notre vision humaine des choses n'est pas très éloignée.
03:38C'est d'avoir vraiment une envie d'apaisement,
03:41que les choses se passent bien,
03:43que les agriculteurs puissent bosser, puissent nourrir les Français,
03:46qu'on arrête de se faire pressuriser par la grande distribution.
03:49Moi, je crois qu'une autre économie est possible,
03:51qu'une autre loi du marché est possible,
03:53mais dans le respect, à la fois de la dignité humaine,
03:56et à la fois des ressources naturelles.
03:58Déjà, plus juste pour les agriculteurs,
04:00au premier chef, comment on explique encore
04:02qu'il y ait des suicides tous les deux jours, tous les trois jours,
04:05dans le monde agricole, c'est quand même un truc dingue.
04:08Moi, j'ai rencontré un agriculteur, je lui dis, mais que tu gagnes combien ?
04:10Et il me dit, moi, j'ai de la chance, ma femme est aide-soignante,
04:12et elle gagne 1200 euros par mois.
04:14Je lui dis, mais toi ?
04:14Il me dit, moi, je ne gagne pas, je suis agriculteur.
04:16C'est quoi, ça ?
04:17Et deuxièmement, qu'il va respecter les ressources naturelles.
04:19C'est-à-dire qu'à un moment,
04:20si on crame tous nos sols en France, il n'y aura plus d'agriculteurs.
04:23Et moi, des agriculteurs, contrairement à ce qu'on entend dans les médias,
04:25j'en ai croisé des dizaines, littéralement des dizaines,
04:29qui m'ont dit que quand ils ont vu ce qui s'est passé dans leur champ
04:32en termes de changement climatique ces trois dernières années,
04:35ils sont terrorisés d'imaginer ce qui va se passer dans les trois prochaines années.
04:38Le changement climatique, ce n'est pas dans Cent Ans et au Pôle Nord,
04:41c'est aujourd'hui et en France.
04:43Donc, un, évidemment, avoir des agriculteurs qui gagnent mieux
04:46et qui sont dans une forme de dignité humaine,
04:49puisque tout travail mérite salaire, c'est la base.
04:52Et ensuite, des agriculteurs qui ont la capacité de se projeter dans l'avenir,
04:55parce qu'on a des conditions climatiques et de biodiversité
04:58qui leur permettent de continuer à nous nourrir.
05:01Un métier vraiment essentiel.