Brigades à moto, manifestants nassés, LBD… Voilà tout ce qui a changé en matière de maintien de l'ordre depuis le mouvement des gilets jaunes.
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00:00Face à une menace qui évolue, nos méthodes et nos outils doivent eux aussi évoluer.
00:05Là, on surajoute des choses, on multiplie des choses,
00:08ça paraît être, et on le voit bien, il me semble,
00:11on a bien vu durant toutes les manifestations des Gilets jaunes,
00:13que c'était la porte ouverte à toute une série de dérives.
00:30Moi, j'étais dans la manifestation, mais je n'étais pas au cœur des violences.
00:40On entendait tout à la radio, et c'était l'horreur.
00:45La France a connu, le week-end dernier, des événements d'une extrême gravité.
00:50Le service d'ordre, je vous le dis, sera revu en conséquence,
00:53avec mobilité, réactivité et fermeté réaffirmée.
01:00Eux, ils ne sont pas là pour encadrer vraiment la manifestation,
01:19ils sont là vraiment pour stopper le trouble.
01:21Dans ce qu'elles sont normalement constituées,
01:22en fait, les CRS et les escadrons de gendarmerie mobile,
01:27ils peuvent disposer de ces policiers qui sortent du rang, interpellent et ramènent.
01:32Comme on vide ces unités-là, elles se retrouvent à faire de la garde statique,
01:38et donc à laisser le terrain aux policiers de sécurité urbaine.
01:44En fait, ce n'est pas un trait de génie,
01:46la création de ces braves brigades de répression de l'action violente,
01:50c'est surtout la conséquence, de loin en loin, de choix budgétaires.
01:53Déjà qu'il y a des problèmes de commandement qui sont liés déjà à la diversité,
01:57au fait qu'il y a des policiers, il y a des gendarmes,
01:59il y a la préfecture de police de Paris qui est un espèce d'État dans l'État,
02:03or arrivent pendant les grandes manifestations des unités de police qui viennent d'autres régions.
02:07Si en plus de ça, on vient mélanger à ça,
02:10des BAC, l'ABRI, une nouvelle unité de police à moto,
02:15ceci, cela, voire même des policiers municipaux un jour, etc.,
02:17ça va devenir un foutoir complet.
02:24Là, la doctrine nouvelle, ça consiste à dire
02:26que ce qui est le marqueur de l'efficacité policière, c'est l'interpellation.
02:31Il faut faire du chiffre, il faut faire de l'interpellation,
02:33il faut poursuivre, il faut ensuite transmettre à la justice
02:35pour que les gens soient condamnés.
02:44Le rôle de la BAC dans une manifestation,
02:47ça va être de cibler ceux qui troublent la manifestation,
02:51exclusivement, et aller interpeller, c'est-à-dire d'aller au contact.
02:54Nous, en tant que CRS, on est là pour bloquer,
02:57pour bloquer ou pour centraliser une zone,
02:59ou pour vraiment nasser quelque part.
03:01Ils ne sont pas formés au maintien de l'ordre,
03:03mais ça reste des policiers, des agents interpellateurs,
03:05des policiers de terrain,
03:09ils font ça quand même tous les jours, interpeller des gens.
03:11La plupart des personnes qu'on interpelle sont des personnes interpellées
03:14aux alentours, aux abords de la manifestation.
03:16En fait, on a l'influence de plusieurs éléments historiques.
03:24D'abord, encore une fois, les banlieues.
03:42C'est ce qu'on avait appelé à l'époque la loi Estrosi,
03:45du nom du maire de Nice actuel,
03:48qui voulait ainsi prévenir les violences entrebandes.
03:51Et on s'est dit, on va les utiliser pour gérer
03:55tout ce qui arrive sur le lieu de la manifestation,
03:58avec le moindre équipement, offensif ou défensif.
04:02Il faut absolument rappeler la différence fondamentale
04:04qu'il y a entre le fait de se promener avec des boules de pétanque,
04:08par exemple, ce qui peut être une arme par destination
04:10extrêmement dangereuse pour la vie des policiers et des gendarmes,
04:13et le fait simplement de se promener avec un masque
04:16pour lutter contre les gaz lacrymogènes.
04:18Or, on a vu des gens interdits de manifester,
04:20mis en garde à vue simplement parce qu'ils avaient
04:23dans leur sac à dos un gilet jaune et un masque
04:27contre le gaz lacrymogène, voilà.
04:50Le masque, c'est de plus en plus utilisé dès lors qu'on identifie
05:02des groupes extrémistes ou autres qui sont inclus dans la manifestation,
05:06que les débordements commencent à se mettre en place.
05:09On essaie de cloisonner toute une zone manifestante
05:14avec dedans ces gens-là pour essayer d'aller interpeller
05:18et éviter toute roule dans toutes les rues.
05:22Le problème, c'est que dans ces actions-là,
05:25ils prennent du gaz, systématiquement.
05:29La réplique avait principalement du gaz,
05:31et donc là, ils se sont attaqués.
05:33C'était très spectaculaire dans les manifestations parisiennes
05:36contre la loi travail.
05:38Le fameux incident de l'hôpital Necker à Paris
05:41est tout à fait typique de ça.
05:42La réalité, c'est une action policière qui crée une nasse à cet endroit-là,
05:45qui casse un cortège à cet endroit-là.
05:48Et ça contribue évidemment à surexciter, à mettre en colère, etc.
05:53tout un tas de gens.
05:54Malheureusement pour les gens, ils ne peuvent pas en sortir.
05:56Il n'y a qu'un seul point de passage, sauf qu'il faut le trouver.
05:59Après, le point de passage est défini, comme je disais tout à l'heure.
06:02Donc les gens sortent, mais sortent par petits groupes.
06:06Et les gens qu'ont pu être identifiés
06:09comme auteurs de troubles ou de violences ou de casse,
06:14ils sont interpellés.
06:28L'idée du flashball, c'était pouvoir neutraliser à distance, sans le tuer,
06:34quelqu'un qui menace directement les policiers.
06:39Ce n'était absolument pas quelque chose qui a été pensé
06:42en aucune manière pour faire du maintien de l'ordre.
06:44D'emblée, les CRS ont été hostiles à l'introduction du flashball en manifestation,
07:06en faisant valoir que les moyens offensifs qu'on emploie en manifestation
07:16sont des moyens qui visent la foule et non pas des individus.
07:18On veut mettre à distance les foules, mais on ne veut pas frapper les individus.
07:22Ils en ont été finalement équipés.
07:25Les gendarmes mobiles de la Gendarmerie nationale également, en bien moindre nombre.
07:36On n'a pas vu, même protégé, ça fait mal, ça fait mal.
08:06Et qu'est-ce qu'on fait face à une personne qui vous lance un pavé,
08:09à part avec un LBD ?
08:11Parce que les gaz lacrymogènes, du coup, ça ne suffit pas ?
08:14Dans l'instant T, non.
08:16Parce que le LBD, c'est une réponse immédiate.
08:18C'est-à-dire que dès lors qu'un bras est levé avec un pavé,
08:21on peut tout de suite lancer un LBD.
08:23Le gaz, le temps qu'il est jeté, le temps que le gaz s'évapore,
08:27que les plots sont lancés, ça y est, le pavé est déjà parti depuis longtemps.
08:30Il n'y a plus rien à avoir pris 3, 4 à un pavé.
08:32C'est une arme quand même non-létale.
08:33J'entends bien qu'elle blesse.
08:38Mais on nous enlève ça.
08:41On n'a aucune manière de nous répliquer face à une violence qui est à la distance.
08:54L'État français est un État qui, comme vous le savez,
08:58est un État sous surveillance budgétaire.
09:02Ça a une conséquence.
09:03C'est qu'on dispose de beaucoup moins d'unités de maintien de l'ordre,
09:06d'unités constituées, de compagnies républicaines de sécurité,
09:10des CRS ou de gendarmes mobiles qu'auparavant.
09:12Et donc, on fait appel à des forces de police
09:19qui sont des forces non spécialisées sur le maintien de l'ordre.
09:23Il est clair qu'aujourd'hui, beaucoup de manifestants ont peur.
09:27Beaucoup de gens qui envisageaient la manifestation
09:30comme un moment festif, récréatif, ont peur.
09:33Et que cette peur-là est l'un des effets les plus tangibles
09:36de la séquence de gestion des manifestations depuis 2016.
09:42Et la peur est toujours mauvaise conseillère.
09:44Parce que souvent, elle est partagée des deux côtés.
09:49Et lorsqu'on anticipe un certain niveau de violence,
09:53alors on sait qu'on se rend à la manifestation
09:56en étant prêts à assumer cette violence.