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00:00Bonjour Edouard Philippe, bonjour madame Mabrouk, merci d'avoir accepté notre invitation à la grande interview sur ce News Europain.
00:10Ancien Premier Ministre, Président d'Horizon, candidat déclaré en vue de 2027, il y a beaucoup de sujets d'importance à évoquer ce matin avec vous.
00:18Vous avez d'ailleurs coutume de rappeler que vous réservez votre parole quand vous avez quelque chose à dire.
00:22On va essayer de respecter cela ce matin et je voudrais démarrer, M. Edouard Philippe, par le nom très ferme du régime algérien, la liste des ressortissants expulsables par la France.
00:32Les autorités françaises sont invitées à suivre les voies d'usage, dit le communiqueur, des termes très stricts. Est-ce à vos yeux l'humiliation de trop ?
00:41En tout cas, c'est une réelle hypocrisie. Parce que si nous sommes dans une difficulté avec l'Algérie, c'est que l'Algérie ne respecte pas les obligations qui lui incombrent en vertu des traités et des conventions que nous avons signées avec l'Algérie.
00:53Elle ne respecte pas le protocole ou l'accord de 1994 sur la réadmission des citoyens algériens vers l'Algérie.
01:02Et donc, elle se place elle-même dans une situation où au fond, on n'a plus envie de régler nos questions par le droit. Je trouve cela très préoccupant.
01:10Et je pense qu'il faut réagir. Je crois que le gouvernement prépare ce qu'il a appelé une riposte graduée. Et ça me paraît la bonne réaction.
01:18Est-elle suffisante ? Renaud Taillot va donc passer par les visas pour les passeports diplomatiques. Qu'est-ce qu'on a encore là aujourd'hui ?
01:25Il va revenir sur un échange de lettres diplomatiques de 2007 qui autorise les diplomates algériens ou les porteurs d'un passeport diplomatique algérien à entrer sur le territoire national sans visa.
01:39Je crois d'ailleurs que c'est le seul exemple d'un pays non européen.
01:44Et je pense que c'est très bien, dès lors que l'Algérie ne respecte plus ses obligations, de faire la riposte graduée.
01:50Alors la riposte graduée, par principe, elle est graduée. On ne commence pas tout de suite par l'échelon ultime.
01:56Oui, sauf que le Président a déjà dit que l'échelon ultime ne serait pas activé.
01:59D'ailleurs, vous-même, vous avez été l'un des premiers à parler de cet accord, du détricotage des accords dérogatoires de 68.
02:05Pourquoi, selon vous, Edouard Philippe, alors que Bruno Retailleau veut engager le bras de fer, le Président de la République a déjà renoncé à cet outil que sont ces accords ?
02:14Je ne crois pas qu'il ait renoncé. Je pense qu'il doit espérer. D'abord, je ne suis pas dans sa tête.
02:20Je ne suis pas là pour expliquer ce que peut penser Emmanuel Macron.
02:23Mais comme il entre dans la riposte graduée, il ne dit pas immédiatement jusqu'où il va aller.
02:29Du point de vue tactique, je peux l'entendre. Si c'est ça, je peux l'entendre.
02:33Mais en tout état de cause, ce que je sais, c'est qu'il faut dire les choses assez clairement.
02:37Un, notre différent et la tension qu'à mon avis il faut assumer est une tension qu'il faut assumer avec le gouvernement algérien.
02:46Pas avec le peuple algérien et certainement pas avec les Français d'origine algérienne.
02:51Mais avec le gouvernement algérien qui décide, à mon sens, pour des objectifs de régulation intérieure et de régulation politique intérieure en Algérie,
03:01de tendre la donne et de désigner la France comme le responsable de tous les maux en Algérie.
03:06Et je pense que ça, nous ne pouvons pas l'accepter. Il faut probablement, je l'ai dit, mettre un terme à ces accords de 1968,
03:16puisqu'il prévoit un régime favorable et assez favorable aux Algériens.
03:21Exceptionnel. C'est un accord dérogatoire qui n'existe pas avec les autres pays du Maghreb.
03:26Il y a d'autres accords avec des pays, mais il n'y en a aucun qui soit aussi étendu.
03:29Et c'est sur cette ligne-là, Edouard Philippe, qu'il faut complètement le détricoter.
03:33Je comprends qu'on y aille de façon graduelle. C'est probablement l'intérêt de la relation diplomatique et de la conduite des affaires.
03:42Mais je pense qu'il faut être très ferme et fixer la ligne qui consiste à dire que si l'Algérie ne respecte pas ses obligations,
03:48alors il n'y a aucune raison de lui offrir un statut plus favorable. Aucune.
03:54Vous connaissez très bien la nature profonde de nos relations avec le régime, on le précise à chaque fois, algérien.
03:59Si je vous ai posé la question sur Emmanuel Macron, la question d'ailleurs, c'est que craignons-nous ?
04:03Pourquoi la France tarde-t-elle, selon certains, à réagir ?
04:07Vous avez parlé des Français d'origine algérienne. Est-ce qu'on craint des tensions communautaires sur notre sol ?
04:13En tout cas, il n'est pas anormal d'y réfléchir.
04:17Est-ce que c'est normal de les craindre ?
04:19Ce serait inconséquent de ne pas y réfléchir.
04:21Peut-être que cela rentre en ligne de compte s'agissant du Président.
04:24On a une histoire tellement imbriquée et une population d'origine algérienne tellement importante en France
04:29qu'on sait bien que si nous ne faisons pas les choses bien,
04:32si nous donnons le sentiment que c'est une réaction contre le peuple algérien
04:36et pas contre un gouvernement algérien qui nous désigne comme la cause de tous ces problèmes,
04:41alors il peut y avoir des crispations.
04:42Je pense que ce n'est pas scandaleux de le prendre en compte.
04:45Ce n'est pas une faiblesse de le prendre en compte.
04:47Ça ne peut pas être le driver de la politique française.
04:53Le prendre en compte, peut-être, mais ça ne peut pas être le driver de la politique française.
04:56L'intérêt de la France, c'est de dire maintenant, ça suffit.
04:59Que le ministre de l'Intérieur ait mis en balance sa démission,
05:02si un bras de fer sur ce sujet n'est pas engagé, vous le comprenez ?
05:05Vous le soutenez même, Bruno Rotaillot ?
05:07J'ai dit combien je me réjouissais que sur l'accord de 68 il ait pris la même position que moi.
05:13Je ne veux pas dire qu'il l'a dit le premier.
05:14En tout cas, je l'ai dit le premier, mais je suis d'accord avec lui.
05:16La démission d'un gouvernement, je considère que c'est une arme qui est à la disposition de chaque ministre,
05:25mais je ne suis pas sûr qu'il faille la mettre en scène.
05:27D'accord. Il faut l'utiliser avec parcimonie.
05:29D'abord, on ne l'utilise qu'une fois.
05:31Et ensuite, je ne crois pas qu'il faille la mettre en scène.
05:35J'observe d'ailleurs qu'on fait dire à Bruno Rotaillot,
05:39peut-être un peu plus que ce qu'il a dit réellement dans l'interview dont on a déduit cela.
05:45Je le crois plus prudent que l'interprétation qu'on a faite de ses propos.
05:49On en parlera tout à l'heure parce qu'il s'agit aussi du bloc central.
05:52Une question d'actualité sur ce qui est en cours en ce moment,
05:55Édouard Philippe à la gaieté lyrique à Paris,
05:56avec l'évacuation par les forces de l'ordre de migrants illégaux soutenus par des manifestants d'extrême gauche
06:02qui se sont rassemblés toute la nuit.
06:05Ça ressemble à une ZAD avec une intervention des forces de l'ordre.
06:09Vous avez connu ça avec Notre-Dame.
06:11C'est assez différent.
06:12Faire un autre domaine.
06:13C'est une évacuation malgré tout.
06:14Ça reste sensible.
06:15Est-ce qu'il faut y aller sans que la main tremble ?
06:19Les évacuations, c'est toujours sensible, c'est toujours délicat
06:21parce que c'est l'utilisation de la force et l'utilisation de la force est toujours délicat.
06:25Lorsque j'étais Premier ministre, nous avons organisé l'évacuation d'un certain nombre d'universités
06:30qui étaient occupées et bloquées.
06:32Je peux vous dire que ce n'est pas des opérations d'une très grande simplicité.
06:35Je me réjouis qu'elles se soient à l'époque extrêmement bien passées.
06:38Contrairement à ce qu'avaient dit des insoumis, qu'avaient inventé.
06:42Là, je crois que le préfet de police est tout à fait dans son rôle.
06:46Ça fait 4 mois que cet équipement est bloqué.
06:49Ça fait 4 mois que les gens qui sont à l'intérieur ne se voient offrir aucune solution d'une certaine façon.
06:56Ça ne peut pas durer.
06:57Je ne crois pas qu'en faisant durer cette affaire, elle ira mieux.
07:00Il faut donc libérer l'équipement.
07:03Et je crois, puisque je comprends, si j'écoute les manifestants
07:08qu'un certain nombre de mineurs sont concernés,
07:10il faut que les autorités compétentes pour s'occuper des mineurs non accompagnés puissent le faire.
07:16C'est-à-dire en France, le département, et à Paris, la ville de Paris.
07:20Ce n'est pas facile, mais je ne vois pas comment on pourrait se satisfaire d'une situation
07:25où on aurait un équipement culturel bloqué, des gens qui vivent dans de très mauvaises conditions,
07:30et un désordre considérable enquisté dans Paris.
07:36Et des journalistes parfois agressés, menacés.
07:38J'apporte évidemment mon soutien à nos journalistes qui sont en train de filmer.
07:43Nous venons de voir les images en direct.
07:45Edouard Philippon poursuit notre entretien sur CNE.
07:47C'est le flou total depuis la déclaration de François Bayrou,
07:50qui a affirmé que le débat sur le retour à la retraite à 62 ans était clos.
07:54Le ministre de l'Économie, Eric Lombard, ne reprend pas ses mots.
07:57Contrairement à la ministre des Comptes publics, hier, sur notre antenne,
08:00qui dit que c'est irréaliste de revenir à cela.
08:02Les syndicats sont vent debout.
08:04Là, je plante le décor.
08:05Une partie des représentants du patronat, ce matin, quittent la table des négociations.
08:09De votre côté, est-ce que vous êtes toujours effaré par ce débat ?
08:13Peut-être encore plus aujourd'hui qu'hier.
08:15Je trouve que quand le Premier ministre a lancé l'idée de ce conclave,
08:21je ne sais pas d'ailleurs pourquoi on a trouvé ce mot qui ne me paraît pas extraordinaire,
08:24mais enfin conclave,
08:26j'ai trouvé que ce n'était pas idiot.
08:29Pas idiot pour autant qu'on ne revienne pas sur la loi,
08:32c'est-à-dire sur son ambition,
08:34c'est-à-dire sur le fait que pour financer nos retraites,
08:36il allait falloir travailler plus longtemps.
08:38Mais peut-être que les partenaires sociaux, en discutant,
08:41peuvent trouver des façons d'appliquer la loi
08:43qui soient intelligentes,
08:45plus intelligentes que ce qu'ont trouvé les législateurs
08:47et qu'en le soumettant ensuite aux législateurs,
08:49on puisse améliorer le contenu de la loi.
08:51Je n'ai pas vraiment de problème avec ça.
08:53Mais depuis que le conclave a été engagé,
08:56qu'est-ce qui s'est passé ?
08:58Il s'est passé un bouleversement considérable aux Etats-Unis.
09:01Il s'est passé des transformations d'alliances
09:04qui imposent à l'Europe
09:06de réviser totalement le monde
09:08dans lequel elle était imprudemment, à mon avis, enfermée.
09:13À ce moment-là, ça n'a plus beaucoup de sens.
09:15C'est pour ça que le Premier ministre a dit « exit »
09:18le retour à l'Europe.
09:20Si c'est pour ça, il a bien fait.
09:22La vérité, c'est que consulter les partenaires sociaux
09:25sur comment est-ce qu'on organise le système productif français,
09:28le système social français
09:30dans un pays, dans un continent
09:32où la menace russe est désormais avérée,
09:35où le parapluie américain est désormais incertain.
09:38Ça, c'est une excellente question.
09:39Je trouve que ça, c'est de la démocratie sociale
09:41au meilleur de sa forme et au meilleur de son ambition.
09:43En somme, vous trouvez que ces débats-là
09:44ne sont pas à la hauteur de ce que nous vivons
09:46et de ce qui nous est opposé comme menace ?
09:47Je les crois un peu dépassés.
09:48C'est ce que j'ai dit.
09:49Il y a eu une joute verbale entre vous et le Premier ministre.
09:51Le ton s'est durci.
09:52Il y a eu un échange d'arguments.
09:54J'ai le droit de ne pas être d'accord.
09:55J'ai le droit de dire ce que je pense.
09:57Je n'ai aucune envie de renoncer à dire ce que je pense.
09:59Je l'entends.
10:00Lui non plus, apparemment.
10:01Il vous a dit quand même que vous ne croyez pas à ce terme,
10:03la démocratie sociale.
10:05Moi, je crois beaucoup à la démocratie sociale.
10:07Je crois à la démocratie sociale quand elle a du grain à moudre.
10:10Si la démocratie sociale,
10:11c'est prendre les organisations syndicales
10:12en leur disant
10:13« Vous pouvez discuter, mais vous ne pouvez pas faire ça.
10:15Vous ne pouvez pas faire ci.
10:16Vous êtes encadrés dans un tout petit espace. »
10:18Ce n'est pas vraiment de la démocratie sociale.
10:19Je préfère leur dire
10:20« Écoutez, qu'est-ce qu'on fait ?
10:21Qu'est-ce qu'on fait pour, je vous dis,
10:23adapter notre système productif et notre système social
10:25à des nouvelles menaces ? »
10:26Jusqu'où êtes-vous prêt à aller ?
10:27C'est impressionnant, ça.
10:28Tout à fait.
10:29Mais est-ce que vous assumez,
10:30M. Edouard Philippe, ce matin,
10:31sur CNews et Europe 1,
10:32qu'il faut travailler plus ?
10:33Est-ce qu'il faut assumer une retraite jusqu'à 65 ?
10:35Madame Mabrouk ?
10:3667 ans ?
10:37Est-ce que vous l'assumerez en campagne ?
10:39Non seulement je l'assume ce matin sur CNews et sur Europe 1,
10:43mais je le dis depuis longtemps.
10:45Je le dis depuis longtemps.
10:47Je dis que,
10:48compte tenu de l'évolution démographique de notre pays,
10:50compte tenu du fait que,
10:52et c'est tant mieux,
10:53nous vivons de plus en plus longtemps,
10:54et qu'il y a de plus en plus d'inactifs,
10:56et de moins en moins relativement d'actifs,
10:58notre système par répartition arrive au bout de son efficacité,
11:02au bout même de sa crédibilité,
11:04et que donc il faut modifier notre système social.
11:06Et puis je dis par ailleurs quelque chose qui paraît évident,
11:08mais qui est contesté,
11:09et après tout, c'est très bien,
11:11quelque chose dont je suis convaincu,
11:12c'est que si nous voulons défendre à la fois notre prospérité
11:15et notre sécurité,
11:17alors il va falloir qu'on travaille plus.
11:19Travailler plus,
11:20parfois plus dans la semaine,
11:21parfois plus dans l'année,
11:23parfois plus en fonction de l'âge qu'on a.
11:26J'ai toujours été fasciné qu'on estime
11:28qu'on pourrait travailler autant à 30 ans
11:31qu'à 64 ans.
11:33La vérité, c'est que vous avez,
11:35dans les périodes de la vie,
11:36en fonction de vos choix personnels,
11:38en fonction de votre situation,
11:39même de santé,
11:40des moments où vous pouvez,
11:41le cas échéant, travailler plus.
11:42Et ce que je vous dis là,
11:44ce n'est pas l'expression de la droite libérale abominable,
11:46la CFDT a toujours été très ouverte sur cette idée.
11:50Donc, travailler plus dans la semaine,
11:51travailler plus dans l'année,
11:53et en effet, travailler plus tout au long de la vie.
11:55C'est ce que font, madame Brouk,
11:57tous les pays d'Europe.
11:58Mais ça provoque des cris de passion,
11:59des cris d'orfraie dans notre pays.
12:00De droite ou de gauche.
12:02S'ils le font tous à droite ou à gauche,
12:04ce n'est pas parce qu'ils veulent nous ennuyer,
12:07c'est parce qu'ils ont considéré
12:09que c'était la seule façon de préserver ce qu'ils étaient.
12:11Moi, je dis aux Français,
12:13ce n'est peut-être pas agréable à entendre.
12:15Ce n'est pas populaire, surtout.
12:16Je le dis parce que je le pense.
12:18Et je le dis depuis longtemps.
12:20Et vous le direz encore longtemps en campagne.
12:22Pourquoi voudriez-vous que je change d'avis ?
12:23Parce que pour certaines raisons, on peut parfois...
12:26Vous connaissez des gens qui disent des choses qui sont populaires
12:28alors qu'ils ne le croient pas ?
12:29Vous, non ?
12:30Ecoutez, voilà. Moi, je dis qu'il faut travailler plus.
12:32En réalité, ce que vous reprochez au gouvernement Bayrou,
12:34c'est de ne pas engager de réformes structurelles et courageuses.
12:36En réalité, ce que je reproche à notre époque,
12:38à notre système politique tel qu'il est aujourd'hui,
12:41c'est de ne pas pouvoir engager de réformes audacieuses.
12:44Nous avons, et c'est le produit de la dissolution,
12:46une Assemblée nationale qui est dépourvue de majorité.
12:49Nous avons un Bloc central qui soutient le gouvernement
12:52qui est dépourvu de contrats de coalition.
12:54Et donc, nous sommes dans une situation, objectivement,
12:57où rien de grand et, à mon avis, rien de très ambitieux
13:01ne peut être fait.
13:02Ça ne veut pas dire que rien ne sera fait.
13:04Il peut y avoir des projets de loi...
13:05Vous allez vous demander la faute à qui ?
13:07C'est comme ça.
13:08C'est le résultat de décisions.
13:11La dissolution était une décision funeste.
13:13L'équilibre politique qui est sorti des urnes
13:15est un équilibre qui contraint chacun, au fond,
13:18à ne pas faire grand-chose.
13:19On peut se permettre cela ?
13:20Attendez, vous avez récemment parlé de folie,
13:22Édouard Philippe, de la dette et de la nécessité
13:24de maîtriser la dépense publique pour préserver
13:26des marges de manœuvre pour les sujets.
13:27Le moment important, je pense que nous y sommes.
13:29C'est le moment important avec l'effort de défendre...
13:31On peut être contraint à l'immobilisme aujourd'hui ?
13:33C'est ce que je regrette.
13:35Sinon, qu'est-ce qui va se passer ?
13:36Je constate qu'on va peut-être faire quelques lois utiles,
13:39mais que la réforme d'ensemble de notre système productif,
13:42la réforme d'ensemble de notre système social,
13:44la réforme d'ensemble de notre système éducatif,
13:48dont je considère que c'est probablement la priorité première,
13:52si on veut se redonner les moyens de la puissance.
13:55Vous voyez, moi, j'aime bien discuter des sujets techniques.
13:59Bon, je ne fais pas de la politique pour régler des sujets techniques.
14:02Ce qui m'intéresse, c'est le pays.
14:04Ce qui m'intéresse, c'est la France.
14:05Si on veut redonner à la France les moyens de sa puissance,
14:08c'est-à-dire les moyens d'être respectés,
14:10les moyens de la confiance en elle,
14:11les moyens de défendre ses intérêts,
14:13il faut qu'on redevienne prospère, on ne l'est pas assez.
14:16Il faut qu'on redevienne, si j'ose dire, pardon,
14:22parce qu'il faut que notre système éducatif fonctionne beaucoup mieux
14:26pour qu'on soit un peuple de citoyens,
14:30un peuple capable de continuer à innover technologiquement,
14:35intellectuellement, culturellement.
14:36Est-ce qu'on peut encore l'être ?
14:37Est-ce qu'on a encore notre souveraineté
14:38quand la dette française au dernier compteur
14:40a atteigné 3 303 milliards d'euros ?
14:42Ça va s'alourdir 150 milliards d'ici à la fin de l'année.
14:45Et puis cette question,
14:46ceux qui nous regardent et nous écoutent ce matin se disent
14:48« Vous y avez contribué également, Monsieur le Premier ministre ? »
14:51Oui, alors écoutez, ce que je vous propose,
14:52c'est qu'on commence par regarder la réalité en face
14:54puis ensuite on racontera ce qu'on a envie.
14:56Quand j'ai été nommé Premier ministre en 2017,
14:58dans les deux premières années et demie du moment où j'ai été à Matignon,
15:02nous avons baissé les impôts, baissé le déficit,
15:05et stabilisé, et même un tout petit peu baissé la dette.
15:07Donc on va quand même se dire les choses tranquillement.
15:09Et je suis heureux de l'avoir fait.
15:11Et je ne l'ai pas fait simplement en regardant passer les voitures,
15:14je l'ai fait en prenant des décisions extrêmement populaires.
15:19Le quoi qu'il en coûte de la période Covid…
15:21Ensuite est arrivé le Covid.
15:24C'est vrai que quand vous décidez de financer 85 % des salaires en France,
15:30quand l'État décide de payer 85 % des salaires
15:33parce que les gens ne peuvent plus aller travailler,
15:35c'est sûr que la dépense publique augmente et que donc la dette augmente.
15:38Est-ce qu'il fallait faire ? Je le crois et je l'assume.
15:41J'étais d'accord avec cette décision, je l'ai prise.
15:44Je pensais qu'il fallait la faire.
15:46Est-ce que je crois qu'il fallait assez vite ensuite cesser le quoi qu'il en coûte
15:52ou en tout cas fermer le robinet ?
15:54Oui, mais il ne vous aura pas échappé qu'assez vite après le Covid.
15:57On m'a remercié.
15:59Donc c'était devenu un blanc sain pour tout en réalité.
16:02Je vous ai dit ce que j'en pensais.
16:04Et on vous a remercié à ce moment-là.
16:06Donc on peut comprendre la cause et l'origine de tout cela.
16:08En tout cas, je peux bien assumer tout ce que j'ai fait,
16:11mais certainement pas ce que je n'ai pas fait.
16:13En tout cas, sur ces sujets, et nous avons parlé de la retraite,
16:16Edouard Philippe, il y a des divergences au sein du gouvernement.
16:19Elles se multiplient également.
16:20Je voudrais vous prendre l'exemple d'un sujet en particulier,
16:22c'est le voile dans le sport.
16:24La ministre des Sports estime qu'il ne faut pas l'interdire
16:27et que ce n'est pas un signe d'antrisme, tout comme d'ailleurs Elisabeth Borne,
16:30contrairement à Bruno Retailleau.
16:32Et vous, sur ce sujet, est-ce que vous êtes pour l'interdiction du voile dans le sport ?
16:36Je trouve que c'est une question un peu délicate.
16:41Et si vous m'autorisez, je voudrais...
16:43D'abord, aujourd'hui, ça n'est pas interdit.
16:46Ou plus exactement, aujourd'hui, c'est interdit dans les compétitions
16:51lorsqu'on représente la France.
16:53Et on peut interdire le port du voile dans le sport
16:57pour des motifs d'ordre public.
16:59Mais comme toujours, quand c'est pour des motifs d'ordre public,
17:02il faut montrer que c'est la seule façon d'éviter des troubles à l'ordre public.
17:04C'est donc assez restrictif.
17:06Autrement dit, aujourd'hui, une interdiction générale et absolue
17:09du port du voile dans le sport serait contraire à ce qui est la laïcité en France.
17:14La laïcité en France, c'est la neutralité absolue
17:18de tous ceux qui sont détenteurs de l'autorité de l'État,
17:21ou de l'autorité publique, plus exactement,
17:24et la liberté pour les citoyens de pratiquer et de manifester leur culte.
17:31C'est ça, la laïcité.
17:32Il y a quelques exceptions, notamment l'interdiction du voile à l'école,
17:36parce que ce sont des mineurs qui sont visés,
17:38mais vous savez qu'à l'université, le port du voile est autorisé.
17:41Et que le port du voile est autorisé dans l'espace public, dans les transports publics.
17:44Donc, est-ce qu'on pourrait l'interdire complètement dans le sport
17:47et est-ce qu'il faudrait l'interdire complètement dans le sport ?
17:49Si on le faisait sans le recours à la loi,
17:52ce devraient être les fédérations sportives.
17:54Les fédérations sportives sont des personnes privées,
17:56mais elles sont dépositaires de la délégation de services publics de l'État.
18:01Avant de terminer ma réponse, je voudrais vous faire remarquer un exemple.
18:04Que de précautions, M. le Premier ministre ?
18:06Non, non, j'essaie de planter un décon.
18:07Pour donner votre avis personnel ?
18:08Oui, mais c'est une question compliquée, donc j'essaie de planter le décon.
18:10Pourquoi est-elle compliquée ?
18:11Est-ce que ce n'est pas une question de mœurs, tout simplement ?
18:13Non, parce que c'est à la fois une question de mœurs...
18:14Que de laïcité ?
18:15C'est une question de mœurs, c'est une question de laïcité,
18:17c'est une question de liberté, c'est une question compliquée, je la prends au sérieux.
18:21Une remarque.
18:22Est-ce que vous avez déjà vu, Mme Mabrouk, une avocate plaider avec un voile ?
18:30Pas à ma connaissance.
18:31Pas à ma connaissance non plus.
18:33Pour une raison assez simple, c'est que les barreaux, en général,
18:37réglementent et considèrent qu'il n'est pas permis,
18:41et je crois qu'il y a eu des contestations,
18:43mais que les tribunaux ont donné raison aux barreaux.
18:46Je trouve ça assez intéressant.
18:47Pourquoi ? Qu'est-ce qu'il y a derrière ?
18:49Derrière, il y a l'idée que, dans certains moments,
18:51qui ne sont pas l'exercice de l'autorité publique,
18:54on n'a pas envie de connaître la distinction religieuse.
18:58Quand vous avez un avocat, quand vous êtes confronté à la justice,
19:01mais quand vous avez un avocat,
19:03vous n'avez pas envie de savoir si votre avocat, il est de telle ou telle confession.
19:06Et ça ne doit pas être un élément qui entre en ligne de compte,
19:09puisque le seul élément, c'est la justice.
19:11Quand on est en matière sportive,
19:13on est un peu dans cet état d'esprit, reconnaissons-le.
19:16Dans le sport, il y a une aspiration à l'universel.
19:19Au fond, la seule distinction qu'on a dans un match de foot,
19:22c'est le maillot qu'on porte,
19:24et le talent dont on peut se prévaloir.
19:28Je pense donc qu'il y a beaucoup de raisons sérieuses
19:33qui devraient considérer, qui devraient nous amener
19:36à réglementer le port du voile dans le sport.
19:38Je ne crois pas qu'une interdiction générale et absolue soit possible.
19:42Je pense donc que nous devrions cantonner cette interdiction
19:47aux compétitions organisées dans le cadre
19:51de ce que les fédérations sont responsables d'organiser.
19:54Je vais vous poser la question différemment.
19:56Pardon, ma réponse est peut-être un peu longue.
19:58Mais vous voyez bien que...
19:59Est-ce que le voile est un signe,
20:01est un symbole de l'antrisme islamiste en France ?
20:03Il est évidemment utilisé par certains comme un élément de l'antrisme.
20:06Je ne crois pas d'ailleurs que toutes les personnes qui portent le voile...
20:09Pardon, je vais vous dire.
20:10Au Havre, je vois beaucoup de gens,
20:14beaucoup de vieilles dames,
20:16pardon de le dire comme ça,
20:17beaucoup de vieilles dames qui portent le voile,
20:19et ce n'est pas un symbole de l'antrisme.
20:21Ce n'est pas vrai.
20:22Mais je sais aussi, parce qu'il ne faut pas être naïf,
20:24qu'il y a beaucoup d'antrisme dans le sport et ailleurs,
20:28et que le port du voile,
20:31parce qu'il implique justement la distinction et la revendication,
20:36est un instrument de l'antrisme.
20:38Donc il faut être extrêmement prudent,
20:41pas du tout naïf,
20:42mais en même temps ne pas totalement oublier ce que veut dire la laïcité.
20:45Quelle est la première décision que prennent généralement
20:47les régimes dictatoriaux et islamistes
20:49quand ils viennent au pouvoir par rapport aux femmes ?
20:52Vous voulez que je compare la France,
20:55pays démocratique et laïc,
20:56à une autocratie religieuse ?
20:59Pas sur les femmes, pas du tout.
21:01Il y a un antrisme islamiste qui est de la même nature, non ?
21:04Évidemment que c'est abominable.
21:06Évidemment que je suis totalement contre.
21:08Vous parlez du symbole.
21:10La laïcité, c'est-à-dire la liberté,
21:14la liberté des citoyens de croire ou de ne pas croire,
21:19n'a rien à voir avec la formulation par l'État
21:23d'une vérité en matière religieuse.
21:27Je serais assez mal à l'aise avec un État qui interdirait la religion.
21:31Vous voyez ?
21:32Nous n'en sommes pas là.
21:33Mais j'espère bien qu'on n'en est pas là.
21:35Il y a quelqu'un qui n'a pas de...
21:40La laïcité, ça se défend, non ?
21:42J'entends, mais je vous parle aussi des mœurs,
21:44parce qu'il y a la laïcité.
21:45Est-elle d'ailleurs simplement suffisante ?
21:47Je crois que c'est vous-même qui aviez parlé il y a quelques années,
21:50en provoquant d'ailleurs des crispations d'un concordat pour les femmes,
21:53estimant que la laïcité ne suffirait pas.
21:56Non, pardon, mais ce n'est pas ce que j'ai écrit.
21:59J'ai écouté votre entretien, mais allez-y, précisez-le.
22:01Je vous remercie de citer un livre qui s'appelle
22:05« Des lieux qui disent ».
22:07Effectivement.
22:08J'ai dit que si nous n'arrivions pas à régler la question
22:12d'une religion qui s'implante et qui se développe très vite
22:17dans une société qui se sécularise,
22:19certains proposeraient forcément un concordat,
22:22c'est-à-dire un droit particulier pour une religion particulière.
22:27Je pense que ça, c'est la fin de la laïcité telle qu'on l'aime en France.
22:31Et je pense qu'il faut donc se battre dans le cadre actuel
22:34et ne pas revenir sur les fondamentaux de la laïcité,
22:38qui est une loi hyper exigeante pour les agents publics
22:42et pour tous les détenteurs de l'autorité publique
22:44et pour les collectivités territoriales et pour l'État,
22:46et une loi de liberté pour les individus.
22:48Je vous pose ces questions sur ce sujet, Edouard Pille,
22:50parce que ce n'est pas sur ces sujets,
22:52comme l'antrisme islamiste,
22:53comme l'immigration difficilement maîtrisée
22:56et aussi la sécurité que la droite a perdue quelque part,
22:59selon vous, c'est une question,
23:00son identité, tandis que la gauche, sur d'autres sujets,
23:03a mené et mène une bataille culturelle plus affirmée.
23:09La droite passe son temps à parler de ça.
23:11Je ne sais pas si elle a perdu son identité là-dessus,
23:14mais elle passe son temps à parler de ça.
23:15Elle en parle, mais est-ce qu'elle résout les problèmes ?
23:16Peut-être pas, mais elle en parle beaucoup.
23:20Voilà, j'observe ça.
23:24Je pense que ces sujets d'identité sont sérieux,
23:31sont préoccupants à certains égards.
23:34Je ne crois pas que ce soit,
23:35à force de ratiociner sur l'identité, qu'on avance.
23:38Si vous voulez, je crois qu'une nation, ça tient dans le mouvement.
23:41Je pense qu'une nation, ça tient par une stratégie,
23:43par un projet, par une ambition.
23:45Pas par une identité, une culture, une langue ?
23:47Aussi, aussi.
23:48Mais ce n'est pas en regardant dans le rétroviseur qu'on avance.
23:51Parler d'identité, c'est regarder le rétroviseur ?
23:53Non, ce n'est pas ce que je veux dire.
23:54Mais ce que je veux dire, c'est très exactement ça.
23:56Notre nation, la France, est une nation politique.
23:59Elle tient par un projet, par une stratégie.
24:01Quand elle n'a pas de projet, pas de stratégie,
24:03alors elle se regarde le nombril, elle se déchire.
24:06Les forces de tension sont tellement fortes dans notre pays qu'elles se déchirent.
24:09C'est pour ça qu'il faut toujours appeler au rassemblement
24:12et qu'il faut toujours, en politique,
24:14commencer par le projet et par la stratégie.
24:16Le reste, c'est du détail.
24:18Je pense très sincèrement.
24:20Certains vous reprochent, Edouard Philippe, déjà en vue de 2027,
24:22d'être trop modéré, à l'image du Bloc central.
24:24L'époque n'est pas ou n'est plus au modéré.
24:26Je pense que certains vous le disent.
24:28La droite doit s'affirmer.
24:29Qu'est-ce que vous leur répondez, ce matin ?
24:30Je ne sais pas si je suis modéré.
24:33Pourquoi le pensent-ils, alors ?
24:34Vous avez dit que j'avais été le premier à dire
24:35qu'il fallait dénoncer les accords de 68.
24:37C'est modéré ?
24:38Vous avez dit que je suis le seul à assumer le fait
24:40qu'il va falloir travailler plus longtemps,
24:41y compris parfois jusqu'à 67 ans.
24:43C'est modéré ?
24:44Pourquoi certains pensent que vous n'êtes pas assez à gauche,
24:46pas assez à droite ?
24:47Parce que je m'exprime de façon modérée.
24:48Je m'exprime de façon nuancée.
24:50Parce que la réalité est compliquée.
24:51Parce que c'est très facile de balancer une idée
24:53comme ça en disant « il faut, il n'y a qu'à ».
24:56Moi, j'ai été premier ministre.
24:57Le « il faut, il n'y a qu'à », je sais que c'est compliqué.
24:59Voilà, c'est comme ça.
25:00Je sais que c'est compliqué.
25:01Je sais que la réalité est toujours plus compliquée
25:03que ce qu'on en dit sur les plateaux de télévision.
25:05Et je n'ai pas envie de renoncer à cette responsabilité-là.
25:09Et donc, quand je dis quelque chose,
25:13je commence par dire pourquoi c'est compliqué.
25:14Et ensuite, je dis ce que je veux.
25:15Vous êtes en train de nous faire l'éloge de la nuance
25:17qui est plus compliquée que l'affirmation,
25:19j'allais dire, brutale et claire.
25:21C'est ça ?
25:22Brutale, oui.
25:23On peut être, je l'espère, nuancé et clair.
25:26Vous l'êtes sur les plateaux de télévision.
25:28L'êtes-vous aussi sur certaines estrades.
25:30Je pense à cette image qui a marqué peut-être,
25:32permettez-moi l'expression, le peuple de droite,
25:34ou certains électeurs de droite, à la fête de l'Huma.
25:36Vous avez proclamé que lors d'élections cantonales,
25:39vous votez communiste face à l'extrême droite,
25:42qui suppose le rassemblement national.
25:44Est-ce que vous répéteriez cette phrase aujourd'hui ?
25:46Et est-ce que, selon vous, il y a plus de points communs
25:49entre la droite et les communistes que la droite et l'ERN ?
25:52Écoutez, je suis élu au Havre,
25:56dans une ville où une bonne partie de l'électorat est communiste
26:01et continue à voter pour des communistes.
26:03J'ai donc des élus communistes dans mon conseil municipal.
26:06J'ai un député communiste dans ma ville.
26:09Ils me combattent.
26:11Sans concession.
26:13Et je les combats, sans concession.
26:16Mais je les connais.
26:18Je les connais.
26:20Et je sais qu'en dépit de toutes nos différences,
26:22elles sont considérables.
26:24Et en dépit de leur volonté très ferme de me battre,
26:27et croyez-moi, ils ne me font pas de cadeaux.
26:30Quand il y a des sujets d'intérêt généraux,
26:33quand il y a des sujets d'intérêt républicain,
26:36ils ne se trompent pas toujours de combat.
26:39Et voilà.
26:41Il y a le Havre, il y a la scène nationale.
26:43Quand certains étaient alliés ou sont encore alliés
26:45avec les insoumis, vous êtes toujours...
26:47Écoutez, quand je vois la campagne de communication
26:51que la France insoumise fait contre Fabien Roussel,
26:54je me dis qu'ils ne sont pas très proches.
26:56Maintenant, pour la France insoumise, Fabien Roussel,
26:58c'est l'extrême droite.
26:59Ou un relais de l'extrême droite.
27:01Et les relents antisémites avec une caricature de Cyril Hanouna.
27:04Ne croyez pas que je fasse l'apologie du Parti communiste.
27:07Je vous demande si vous répéteriez cette phrase aujourd'hui.
27:09C'est pas exactement mon truc. D'ailleurs, ça les gênerait, j'imagine.
27:11Monsieur Darphilippe, il y a quelqu'un qui était à droite,
27:12Éric Soti, qui est parti vers l'ERN.
27:14Est-ce qu'il y a quelqu'un à droite qui est parti vers les communistes ?
27:16Non, je ne crois pas.
27:18Peut-être l'inverse, mais...
27:20En tout cas des électeurs.
27:22Et l'union de droite, pour vous, c'est mortifère,
27:24si je comprends bien.
27:29Moi, mon objectif, ce n'est pas de me positionner
27:31vis-à-vis d'un espace politique
27:33qui serait segmenté entre des précarés
27:36qui seraient dominés par des partis.
27:38Mon objectif, au fond, est assez simple,
27:40il est très difficile à réaliser,
27:42c'est de proposer aux Français un projet.
27:44En matière éducative, en matière de financement du modèle social,
27:46en matière de justice, en matière de défense,
27:49proposer aux Français un projet.
27:51Je ne vais pas aller le discuter avec les partis politiques,
27:53je vais le proposer aux Français.
27:55Et le miracle de la démocratie, c'est que les Français vont choisir.
27:58Et c'est très bien comme ça.
28:00Alors, vous parcourez la France, vous rencontrez les Français,
28:02vous avez réalisé énormément de choses.
28:04Que répondez-vous, à l'inverse, aux Français qui vous voient,
28:07Edouard Philippe, comme l'homme de la taxe carbone,
28:09des 80 km heure, de l'absurdissant administratif
28:12avec une surenchère de brimades lors de la Covid,
28:14et même de familles privées du dernier adieu à leur famille ?
28:17Est-ce que c'est important de vous exprimer sur ce sujet ?
28:19Il y a deux aspects dans votre question.
28:21Il y a des mesures qui ont été décidées,
28:23j'en parle avec les Français que je vois,
28:25puisque je parcours le pays.
28:27Certains sont en colère, et le disent,
28:30et c'est très simple pour moi de les entendre.
28:32Certains ont vu leur colère passer,
28:36mais sont encore dans l'incompréhension,
28:38et on en discute.
28:40Et encore une fois, c'est très sain, j'assume ce que j'ai fait,
28:42et je peux en discuter avec les Françaises et les Français.
28:44Et puis, il y a la partie Covid.
28:46Vous dites l'absurdissant des mesures,
28:48vous dites des mesures trop dures.
28:50J'ai passé, madame Mabrouk, six jours
28:53dans les locaux de la Cour de justice de la République
28:55à répondre à des questions posées par des juges
28:58qui considéraient que je n'en avais pas fait assez.
29:01Ce fut une période très compliquée.
29:03Ce fut une période redoutablement compliquée,
29:05où nous avons essayé de prendre des mesures
29:08dont nous savions à chaque instant
29:10qu'elles présentaient toutes des inconvénients.
29:12Je ne vais pas me cacher derrière mon petit doigt.
29:15Ces mesures ont eu des impacts extrêmement durs
29:17pour beaucoup de Français.
29:19Mais je ne vais pas non plus renoncer
29:21à la responsabilité qui est celle
29:23de celui qui est Premier ministre à l'époque,
29:26c'est-à-dire chef du gouvernement,
29:28et qui doit faire face à une crise.
29:30Quand on fait face à une crise, on prend des décisions.
29:32Je les ai prises et je les assume.
29:34On va conclure, c'est la dernière question.
29:36Edouard Philippe, vous avez beaucoup de candidats
29:38potentiels à la présidentielle.
29:40Je ne vais pas tous les citer, on n'aurait pas le temps.
29:42Vous faites aujourd'hui figure de large
29:44favori dans les sondages.
29:46Certains craignent pour vous le syndrome Juppé,
29:49c'est-à-dire l'erreur de croire que c'est gagné,
29:51à vous entendre. Ce n'est pas le cas.
29:53Pour conclure, si vous deviez définir pour vous
29:55ce qu'est la France,
29:57le Premier ministre que vous êtes,
29:59le candidat à la mairie du Havre,
30:01celui qui connaît les arcanes du pouvoir,
30:03vous parcourez le pays, vous êtes en meeting,
30:05vous allez revenir à Marseille dans quelques jours.
30:07Qu'est-ce que la France ?
30:09Quelle image vous faites de notre pays ?
30:11D'abord, je dois dire que depuis
30:13quelques années, je parcours le pays,
30:15je vous l'ai dit, et que je n'ai pas
30:17encore trouvé le département
30:19qui ne serait pas beau, je n'ai pas encore trouvé
30:21l'endroit où je me sentirais mal,
30:23c'est un pays extraordinaire.
30:25Perclut paradoxe
30:27d'une très très longue histoire,
30:29qu'il connaît mal d'ailleurs,
30:31parce que c'est bien beau de se dire
30:33qu'on est le produit d'une longue histoire.
30:35Regardez le nombre de Français qui
30:37aujourd'hui, alors même qu'ils aiment leur pays,
30:39je ne le conteste pas du tout,
30:41ont du mal à comprendre
30:43ce qui a fait la grandeur de la France,
30:45par exemple au XVIIIe ou au XVIIe siècle,
30:47non pas du tout pour s'en glorifier aujourd'hui,
30:49mais pour le savoir. Donc c'est un pays
30:51de très longue histoire,
30:53avec des ressources
30:55exceptionnelles, traversées par des
30:57contradictions incroyables,
30:59c'est une nation politique la France.
31:01Ce n'est pas une nation
31:03dont l'identité serait linguistique,
31:05ce n'est pas une nation
31:07dont l'identité serait
31:09ethnique. Et qui a encore sa place dans le monde,
31:11avec la menace russe, alors qu'on est effacé
31:13des négociations. Evidemment,
31:15j'en ai
31:17ras le bol
31:19de ce pessimisme
31:21et de ce défaitisme
31:23qui est exprimé à longueur de temps
31:25sur les ondes. Nous sommes confrontés
31:27à des difficultés redoutables, certes,
31:29mais nous avons les ressources,
31:31nous avons l'ambition, nous avons le peuple,
31:33nous avons les pépites
31:35partout sur le territoire, pour être
31:37plus puissant, pour être plus prospère,
31:39pour mieux défendre nos intérêts, et surtout,
31:41Madame Mabrouk, pour avoir confiance
31:43et fierté en nous. Et je terminerai
31:45par ça, puisque vous avez dit que j'étais maire du Havre,
31:47et que je suis un heureux maire du Havre, et un fier maire du Havre.
31:49Au Havre, ville dénigrée
31:51pendant des années,
31:53regardée avec mépris,
31:55parfois, nous avons retrouvé
31:57la fierté d'être havré.
31:59Pas du tout par arrogance, mais parce que
32:01nous avons un projet, parce que la ville s'est
32:03transformée. Mais franchement,
32:05si on est capable de le faire
32:07avec cette confiance, avec cette fierté,
32:09et avec ce travail, on doit pouvoir le faire
32:11partout en France. Et pour la France.
32:13Merci, Edouard Philippe. Merci d'avoir accepté
32:15notre invitation. Très bonne journée à vous, et à bientôt.
32:17Merci.