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00:00Avec nos invités Louis de Raguenel, bonsoir Louis, Rachel Kahn, Alexandre Devecchio, Gautier Lebret qui est là.
00:06On a le plaisir d'accueillir Hervé Morin, ancien ministre de la Défense, bonsoir à vous.
00:10Bonsoir.
00:10On vous voit beaucoup en ce moment, et tant mieux, vous portez une parole qui est importante et qu'il faut entendre.
00:15Dès lors que vous m'invitez, je suis heureux de venir.
00:17Écoutez, nous sommes heureux de vous accueillir et nous sommes aussi avec Jules Torres.
00:20Madame Ferrari.
00:21Bonsoir Jules. On va commencer peut-être par évoquer le Président Macron.
00:25Alors là, en ce moment, il rencontre les chefs d'état-major d'une trentaine de pays, de l'Union mais aussi de l'OTAN.
00:29Un peu plus tôt dans l'après-midi, je vous le disais, il a rendu hommage aux victimes du terrorisme.
00:33Il en a profité pour faire un parallèle entre la situation intérieure et la menace extérieure. Écoutez-le.
00:40Une grande nation, elle n'a pas à choisir, elle a à répondre.
00:44Et elle n'a pas à décider de lutter contre les menaces géopolitiques qui s'imposent à elle
00:52ou contre les menaces sur son sol projetées par les terroristes.
00:55Elle a affaire les deux en même temps. C'est ce que nous faisons.
00:58Alors à l'heure où l'équilibre du monde se reconfigure, où ce qu'on croyait acquis s'éloigne
01:03et où ce qui paraissait exclu se rapproche, il nous faut en effet défendre ces valeurs indéfectibles de notre République
01:10parce que nous n'avons aucunement envie de subir.
01:15Nous voulons choisir le destin qui est le nôtre.
01:19Nous devons choisir le destin qui est le nôtre.
01:22Hervé Morin, vous adhérez à ce que dit le Président Macron ?
01:24Oui, il est évident qu'une grande nation que nous sommes doit bien entendu
01:30à la fois assurer la sécurité intérieure et assurer sa défense.
01:33Il n'y a aucun doute là-dessus.
01:35Après, la question qui se pose, c'est comment ?
01:38Avec quelle méthode ? Quel moyen ?
01:42Vous voyez, j'ai eu la chance d'aller sur votre chaîne dimanche.
01:47J'ai eu plusieurs industriels de la défense qui m'ont dit
01:52mais les commandes, on les attend toujours.
01:54Elles ne sont pas passées les commandes ?
01:56Non, bien sûr que non.
01:57C'est des intentions de commandes.
01:59Il y a un moment, et puis les commandes, on ne les passe pas.
02:04J'allais dire simplement, puisque l'idée est de construire une architecture européenne,
02:09c'est d'avoir une vraie réflexion commune des nations,
02:13et pas de l'Union Européenne, mais des nations qui ensemble
02:16décident de bâtir une architecture de sécurité.
02:18On voit bien quels sont les pays avec lesquels on doit discuter.
02:21Et donc, dans cette idée, et dans une programmation militaire,
02:25on augmenterait les moyens.
02:27Ce qu'il faut absolument faire, c'est jouer la complémentarité.
02:32J'ai des moyens de patrouille maritime, je vais assurer la surveillance maritime.
02:36J'ai des moyens de ravitaillement,
02:40je les mettrai à disposition.
02:43Le moyen de ravitaillement, malheureusement, c'est une grande faiblesse européenne.
02:46Mais bon, bref, faire en sorte que cette programmation en matière de défense,
02:50elle joue aussi la complémentarité entre nations
02:53qui, en quelque sorte, décident de passer un pacte de confiance.
02:56C'est ce qui est en train de se jouer avec cette réunion des chefs d'État-major,
02:59vous pensez, ou pas, à Paris ?
03:01Si j'ai bien compris, la réunion des chefs d'État-major,
03:04c'est une réunion qui est chargée de faire le point sur comment
03:09renforcer la défense ukrainienne, si j'ai bien compris, c'est cela ?
03:13Il y a deux volets, il y a le réarmement européen et le soutien à l'Ukraine.
03:16Le réarmement européen, ça passe pas d'abord par des chefs d'État-major,
03:21pardon de vous le dire, mais j'ai beaucoup d'estime pour eux,
03:24mais ça passe d'abord par des chefs d'État et de gouvernement
03:29qui, dans un cadre d'une réflexion politique,
03:32décident de fixer une ambition politique.
03:34Qu'est-ce que je veux ?
03:36Quelles sont les zones d'intérêt de l'Europe ?
03:39Quelles sont les zones de responsabilité de l'Europe ?
03:42À partir de cette construction-là politique d'une ambition,
03:47quels sont les moyens que nous mettons en œuvre ?
03:49Quels sont, par exemple, les volumes de force qu'on veut projeter ?
03:56Est-ce qu'on se sent capable de devoir projeter sur deux théâtres
03:59ou un théâtre et un théâtre accessoire ?
04:02Est-ce qu'on veut aller sur l'espace africain ?
04:04Bien, il y a donc une seconde phase.
04:07Et ensuite, troisièmement, on met les industriels de la défense
04:11autour de la table pour dire comment on bâtit
04:14des programmes de recherche et développement
04:16pour avoir toutes les briques technologiques dont on a besoin
04:19et enfin, des programmes d'armement autant que possible européens
04:22et non pas d'aller chercher des avions dont on sait
04:25qu'ils peuvent être arrêtés par les Américains
04:27quand ils décident de les arrêter.
04:28Hervé Maurin, est-ce que vous pensez toujours
04:29qu'il y a une politique de la peur qui est faite en France ?
04:32Ou est-ce que le danger est là et il faut assumer de le dire ?
04:37J'ai trop expliqué.
04:40J'ai dit depuis mercredi dernier que je trouvais
04:43que c'était excessivement exagéré.
04:45Charles Millon disait la même chose que vous ce matin
04:47chez Sonia Mabrouk.
04:48J'ai entendu.
04:49Bon, voilà, je pense que la diplomatie, ça se fait dans la confidentialité,
04:54dans la confidentialité de conversation
04:58qui n'a pas besoin d'être étalée tous les jours dans la presse.
05:02Là, j'ai eu le sentiment qu'il avait été plus mesuré.
05:05Mais ce que je sais, parce que pour tout vous dire,
05:07j'ai eu tellement d'appels, tellement d'élus me disant
05:13ce que vous avez dit, c'est exactement ce que j'entends
05:16en permanence dans ma commune, dans ma circonscription, etc.
05:19Les Français ont bien vu qu'à travers cette exagération,
05:22on rejouait un peu, pardon de la comparaison,
05:25mais un peu la scène du Covid.
05:27Du genre, je fais en sorte de redevenir l'acteur majeur
05:35de la scène politique française.
05:37Et ce n'est pas seulement ça, pour reprendre ce point-là,
05:40toute critique de la ligne officielle du président de la République
05:44est vue comme le fait que nous ne serions pas lucides,
05:47que nous ne serions pas patriotes,
05:48que nous ne serions pas alignés avec l'unité nationale.
05:52Il y a quand même ce sujet-là qu'on est en train de voir
05:55qui existait déjà pendant le Covid,
05:57où vous étiez contre le confinement,
05:59on vous disait que vous étiez tributaire de la mort des gens.
06:03Pendant l'invasion en Ukraine en 2022,
06:05on a vécu la même chose,
06:06où si vous étiez en désaccord avec Emmanuel Macron,
06:08vous étiez un poutiniste, un poutinolâtre.
06:10On vit la même séquence aujourd'hui et c'est très inquiétant.
06:13Gautier Lebret ?
06:14Je veux juste souligner qu'en termes de communication
06:16en Arabie saoudite, aujourd'hui, on parle de paix
06:18entre les représentants ukrainiens et les représentants américains.
06:21Nous, on réunit les chefs d'État-major.
06:24Je ne vais pas aller jusqu'à dire qu'Emmanuel Macron prépare la guerre,
06:27mais quand vous réunissez les chefs d'État-major,
06:29surtout pas dire ça,
06:30et que de l'autre côté, on parle de paix en Arabie saoudite,
06:33il y a une sorte de hiatus.
06:35Après, je veux bien qu'il renvoie dos à dos
06:37la menace russe et la menace qu'est l'islamisme.
06:40Il me semble qu'il y a une vraie menace existentielle aujourd'hui
06:43qu'est l'islamisme et une menace qu'est la Russie.
06:45On peut refaire la liste en Afrique,
06:47dans les territoires d'outre-mer
06:48où ils insufflent un sentiment anti-français,
06:50les cyberattaques contre les hôpitaux,
06:51mais cette menace n'est quand même pas du même ordre.
06:53Et puis quand Emmanuel Macron nous dit
06:54qu'on lutte contre les deux menaces,
06:56vous trouvez que le président parle autant d'islamisme
06:58que de Russie en ce moment ?
07:00Évidemment, on a des agents de la DGSE absolument formidables
07:03qui déjouent très régulièrement des attentats en France,
07:06et donc on lutte contre l'islamisme.
07:07Enfin, Mulhouse, c'était il y a 15 jours,
07:10un islamiste algérien qui poignarde un retraité portugais.
07:14Je n'ai pas l'impression qu'aujourd'hui,
07:16l'islamisme, pour Emmanuel Macron,
07:18soit un sujet suffisamment pertinent
07:20pour prendre la parole à 20h.
07:22La Russie l'est visiblement.
07:23Pourtant, dans les rues de France,
07:24ce n'est pas les Russes qui tuent encore aujourd'hui.
07:26Alors ça, c'est un discours.
07:27Est-ce qu'il faut le tenir, Alexandre Devecu ?
07:29Ou est-ce que là, vraiment, on outrepasse notre rôle ?
07:32Il faut le tenir.
07:33J'irai même plus loin.
07:34Il y a un décalage entre la volonté de réarmer
07:37sur le plan extérieur, que je soutiens,
07:39parce que je pense que c'est le bon sens,
07:41même si la menace russe est une menace relative,
07:43s'en est une, et puis par ailleurs,
07:45il y a d'autres menaces,
07:46mais il y a un décalage entre cette volonté-là
07:48et le désarmement qu'on constate sur le plan national
07:52et même européen, avec un État de droit,
07:56pardonnez-moi, européen,
07:58qui nous désarme totalement,
07:59notamment en matière migratoire.
08:02J'ai appris hier que le concept de jambisation existait dans ce pays.
08:07Ça veut dire que la jambisation, c'est les...
08:09Qu'est-ce que c'est, Alexandre ?
08:10Bon, on ne sait pas tout, ça.
08:11Je vais expliquer.
08:12J'ai appris moi-même,
08:13mais c'est un phénomène en reconnaissance,
08:15c'est-à-dire que les narcotrafiquants
08:17esquintent leurs adversaires dans les cils,
08:21mutilent dans les jambes.
08:23Donc ça, c'est quelque chose d'absolument,
08:25je pense, hallucinant,
08:27qu'on n'aurait pas pensé vivre dans ce pays il y a 15 ans.
08:30Et là-dessus, j'ai l'impression que l'État
08:33ne prend pas du tout la mesure de la gravité
08:36en matière d'insécurité.
08:38Donc, pour qu'il y ait réarmement extérieur,
08:41il faut d'abord un redressement intérieur
08:43et un réarmement intérieur.
08:45Hervé Morin, je me tourne vers vous
08:47parce qu'on a peu de temps ensemble,
08:49donc je veux qu'on l'utilise à plein.
08:51Le réarmement de la France, il est possible.
08:53J'évoquais la dette française,
08:55qui est un véritable fardeau sur nos épaules,
08:57qui va sans doute obéir
08:59à une partie de cet effort de réarmement.
09:01Est-ce qu'il n'y a pas une responsabilité,
09:03encore une fois, de tous ceux qui ont dirigé ce pays
09:05à laisser grossir cette dette,
09:07qui de facto, même si on sort les dépenses
09:09de la défense de ce pactole-là,
09:12va nous amener quand même à être ralentis
09:14dans cet effort ?
09:16Au moins, déjà, c'était une revendication ancienne
09:18de ministres de la Défense français
09:20qui était de dire
09:22que l'effort militaire ne devrait pas être
09:24intégré dans la dette.
09:26Je me souviens de Michel Alliaud-Marie
09:28dire cela.
09:32Deuxièmement,
09:34l'effort militaire,
09:36pardon, mais ça je vous le confirme,
09:38et j'attends quelqu'un qui me dise le contraire,
09:40quand Emmanuel Macron annonce 100 milliards,
09:42ça repose sur rien.
09:44Et je me suis dit,
09:46il y a 100 milliards,
09:48il y a dû y avoir des revues stratégiques,
09:50on a dû commencer à...
09:52Rien de tout cela.
09:54Ils viennent juste de la commencer, la revue stratégique.
09:56Et donc, 100 milliards, c'est simplement le double
09:58de ce qu'on dépense aujourd'hui.
10:00C'est la seule explication qu'on peut avoir.
10:0264 millions d'euros de remboursement
10:04de l'intérêt de la dette.
10:06Donc, en clair, est-ce que c'est 100 milliards ?
10:08Non. Déjà, si on fait 10,
10:1020 ou 25 ou 30, j'en sais rien,
10:12mais il faut le faire de toute façon, à partir du moment
10:14où on sait exactement ce dont on a besoin
10:16et comment on bâtit cette unité
10:18capacitaire de nations européennes.
10:20Deuxième point.
10:22Troisième point.
10:24Là, je pense que
10:26tout le monde ne va pas être d'accord autour de la table.
10:28On va voir.
10:30Je pense que ce serait
10:32ne pas rendre service du tout
10:34à l'effort de défense nécessaire.
10:36Si on mettait ça
10:38en contrepoint de la réduction
10:40de notre modèle social,
10:42si on fait ça,
10:44je le dis,
10:46mais là, c'est grave,
10:48si on fait ça, on rompt
10:50toute capacité de bâtir l'unité nationale.
10:52Donc, on ne touche pas au volet social ?
10:54Je dis que...
10:5630 % de notre budget, c'est les dépenses sociales,
10:582 % de l'agriculture.
11:00Mais par ailleurs, il ne faut pas le poser aujourd'hui.
11:02On ne touche pas au modèle social.
11:04C'est-à-dire qu'aujourd'hui, l'effort militaire...
11:06C'est soit ça, soit ça.
11:08Ça, c'est une catastrophe.
11:10C'est une catastrophe pour la capacité de la France
11:12à se dire, je vais me redresser
11:14et nous allons nous redresser, nous, Européens.
11:16Je rappelle encore
11:18que sur les 1 000 milliards
11:20de dettes supplémentaires,
11:22470 milliards, ce sont
11:24les retraites.
11:26Et on discute, là, en ce moment,
11:28on a un conclave sur les retraites.
11:30Oui, le conclave, il est en cours.
11:32Tout le monde a quitté la table.
11:34De toute façon...
11:36Il n'y a plus un cardinal autour de la table, mais il continue.
11:40Mais il y a au moins une chose qui est certaine,
11:42c'est que si on veut sérieusement aborder
11:44la question des retraites, il faut mettre de là
11:46capitalisation
11:48en collectif complémentaire.
11:50Si on avait, j'ai vu cette étude
11:52économique extrêmement intéressante et très sérieuse,
11:54si en 1981,
11:56on avait donné aux smicards
11:58la possibilité de faire
12:00de la retraite complémentaire,
12:02en grosso modo en disant
12:04qu'il y a une partie classique
12:06de solidarité,
12:08et dans le même taux de cotisation,
12:10parce que, bien entendu, un smicard ne peut pas
12:12cotiser plus, mais dans le même taux
12:14de cotisation, il y a une partie qui irait
12:16dans la capitalisation, on estime aujourd'hui
12:18que la retraite de ceux qui sont au smic
12:20serait de 300 euros de plus
12:22par mois.
12:24Dernier mot, Gauthier.
12:26Deux premiers ministres
12:28ont été infichus de présenter un budget
12:30avec des économies. On a même voulu
12:32augmenter les impôts avec Michel Barnier. Tout à l'heure,
12:34Laurent Wauquiez disait sur Europe 1 que c'est pour ça qu'il avait
12:36refusé Bercy et que c'était une erreur de vouloir
12:38augmenter les impôts. On n'est pas capables de
12:40trouver une économie. Alors, il n'y a pas que le modèle social.
12:42On peut aussi supprimer le haut commissariat au plan, par exemple.
12:44Voilà, ça c'est vrai.
12:46Mais ce que vous dites, c'est qu'on ne doit pas
12:48le mettre au même moment.
12:50Ce serait une erreur grave de dire
12:52on va financer l'effort de défense de la France
12:54par la réduction des impôts.
12:56Vous avez raison, sur le modèle social, sur le CESE, je pense qu'on peut lever l'ARCOM,
12:58on peut le mettre à tout moment.
13:0050 millions pour l'aviation française.
13:02Allons, allons, allons.
13:04Le seul coût des intérêts de la dette
13:06en 2027,
13:08le seul coût des intérêts de la dette
13:10en 2027, ce sera 75 milliards.
13:12Donc, il va falloir supprimer beaucoup d'agences de l'État
13:14si on veut arriver déjà
13:16à s'enlever ce coût-là.
13:18Mais l'heure est grave, Hervé Morin. Il faut se réarmer.
13:20Il faut qu'on arrive à un accord avec nos partenaires européens.
13:22Bien sûr, mais je vous rappelle
13:24que cette construction,
13:26que cette construction,
13:28c'est un autre horizon que l'horizon ukrainien.
13:30C'est un horizon...
13:32On mélange les deux.
13:34Il y a l'horizon qui est de renforcer autant que possible
13:36la sécurité des Ukrainiens,
13:38de faire en sorte que ce ne soit pas retombe pour eux,
13:40que ce ne soit pas une capitulation en race campagne,
13:42qu'il puisse y avoir un accord de paix
13:44qui donne des garanties de sécurité.
13:46Ça, c'est l'immédiat.
13:48Mais je vous rappelle que ça se fait
13:50à Riad, sans les Européens.
13:52Vous l'aurez observé.
13:54Et de l'autre, il y a enfin
13:56des Européens qui se réveillent et qui décident
13:58d'assurer par eux-mêmes leur sécurité.
14:00Et ça, c'est un objectif à 10 ou 15 ans.

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