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Après avoir travaillé avec des champions tels que Florent Manaudou ou Léon Marchand, des clubs tels que le Stade Brestois ou l'OGC Nice, Thomas Sammut préparateur mental vient apporter son expérience et son expertise au sein de l'Équipe de France Féminine de Football.

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Sport
Transcription
00:00Est-ce qu'un préparateur mental se connaît parfaitement ?
00:12C'est une très bonne question.
00:14Viens, suis-moi.
00:15Thomas Samuth, 51 ans bientôt et préparateur mental depuis environ 18 années.
00:23J'ai travaillé avec beaucoup d'athlètes qui sont pour certains devenus des grands
00:27champions comme Florent Manaudou, Camille Lacour, Frédéric Bousquet, Fabien Gillot,
00:32plus récemment Léon Marchand.
00:34C'est dur de résumer 13 ans comme ça mais Thomas c'est quelqu'un de bienveillant
00:43et qui aide à te comprendre toi-même je pense.
00:47Je ne sais pas si c'est une bonne définition mais il permet de débloquer des choses et
00:51de prendre plus de plaisir et ça c'est quand même un truc qu'on veut tous quand on commence
00:56le sport donc il est là pour nous le rappeler.
00:59C'est quelqu'un d'important dans ma carrière mais c'est aussi quelqu'un d'important
01:01du miennement pour moi donc je suis content qu'il puisse travailler avec d'autres et
01:05mettre ses services à disposition.
01:07Et puis aussi Mathieu Fèvre qui est double champion du monde de ski, médaillé olympique
01:14également.
01:15J'ai travaillé aussi dans des sports collectifs notamment avec le Water Polo de Marseille
01:20où on est parvenu à être les premiers clubs champions d'Europe.
01:24Aussi avec l'OGC Nice 2015-2019 avec l'équipe première où on finit troisième du championnat
01:32et puis aussi récemment avec le Stade Brestois pendant deux ans et demi où là également
01:38on a fini troisième du championnat.
01:40Est-ce que l'effet coupe d'Europe du Stade Brestois c'est l'effet Thomas Hennuth ?
01:45Absolument pas.
01:46Mais vraiment absolument pas.
01:48Moi je m'inscris toujours dans un collectif, dans une équipe, dans un staff technique
01:53et je ne crois pas en la personne providentielle qui arrive avec une baguette magique et qui
01:57règle tous les problèmes.
01:59Je n'y crois pas.
02:00Je préfère travailler de manière terraine et en profondeur.
02:03C'est la première fois que j'entre dans les vestiaires de l'équipe de France Féminine.
02:11On est bien Clairefontaine quand même.
02:13Je prends mes marques petit à petit et puis les journées sont longues mais en même temps
02:16on passe très vite.
02:17Alors Sandy par exemple.
02:23Moi je n'ai connu que celle qui est avec moi mais c'est la méthode pour le plaisir
02:29je pense.
02:30Il y en a certainement d'autres et je pense que chaque séance est différente avec chaque
02:36sportif parce qu'on a des blocages et des pensées différentes.
02:39Paradoxalement dans le sport on a tendance à ne pas libérer les personnalités même
02:50si on est tous différents et uniques et là on le sait, moi j'enfonce une porte
02:54ouverte mais à quel moment dans notre parcours on nous encourage vraiment à être cette
02:58personne unique.
02:59Rarement au contraire on veut nous aiguiller, il y a beaucoup d'injonctions qu'on entend
03:04depuis tout petit en disant tu dois être cette personne ou tu dois te comporter comme
03:07ça, il faut que tu fasses ça comme si on voulait nous amener dans un moule un peu idéalisé
03:13mais en fait qui nous enferme dans un cocon qui ne nous convient pas et ces grands champions
03:20en fait se sont libérés d'un carcan et se sont pleinement réalisés avec vraiment une
03:25personnalité quand même assez marquée, assez différente.
03:29On est dans une société qui avance tellement vite, on a créé quelque chose qui nous dépasse
03:33aujourd'hui donc on court souvent après le temps et l'idée c'est de se remettre au
03:37cœur de notre projet, de notre process et d'avoir davantage les mains libres pour
03:43envisager ce qu'on a envie de faire et prendre le temps de se poser la question mais qu'est-ce
03:50que je veux, quelle sportive accompli j'ai envie d'être, d'incarner et prendre le temps
03:58de tracer la voie pour le devenir.
04:01Les sportives ou les sportifs ont tendance un peu à se limiter, non pas par eux-mêmes
04:06mais plus par rapport au conditionnement, aussi bien de notre culture à la française
04:12qu'aussi bien du milieu du sport et moi ce que j'aime c'est justement trouver les petites
04:19recettes pour explorer en fait tout le potentiel de chaque athlète et moi c'est ce qui me
04:26fascine en fait, c'est de se rendre compte qu'on a un potentiel complètement illimité
04:31et souvent on ne s'en rend pas compte.
04:34Une fois qu'on prend conscience du potentiel qu'on a et surtout du chemin qu'on a tout
04:41intérêt à emprunter pour obtenir de la haute performance, là on ouvre des portes
04:47et on peut le voir au travers d'un Florent Manoudou par exemple, je parle de lui parce
04:52que c'est le plus connu et qui a fait quelque chose encore d'historique avec 4 médailles
04:58sur 4 olympiades d'affilée, ça ne s'est jamais fait ou un Léon Marchand qui il y
05:03a 4 ans et demi voulait arrêter son sport parce qu'il s'y prenait d'une mauvaise
05:08manière pour atteindre la haute performance puis aujourd'hui qui bat des records du
05:12monde mais ça peut être avec des sportifs qui sont moins reconnus, qui n'auront pas
05:16forcément de médailles internationales mais faire un travail aussi puissant et aussi
05:22fort qu'eux, après ils ne seront jamais autant médiatisés mais moi je prends beaucoup
05:26de plaisir, pas forcément à travailler avec ceux qui ont le potentiel d'aller très très
05:31haut mais aussi ceux qui se donnent les moyens à leur niveau d'accéder à leur richesse
05:37intérieure et puis même à ce moment-là on peut avoir des super résultats.
05:40Je me vois plus comme un accompagnateur vers la performance qui juste pose des questions
05:49pour que la personne puisse puiser en elle des ressources à me soupçonner et surtout
05:55avoir des réponses en elle parce que je pars du principe où toutes les réponses on les
06:00a en nous, maintenant des fois on a besoin d'une personne qui nous aiguille pour avoir
06:05accès à ce potentiel puis à ses réponses aussi.
06:09C'est vraiment contribuer en tout cas à leur épanouissement personnel donc je me
06:12focalise avant tout sur l'individu plutôt que sur le résultat.
06:17Je cherche à connaître la personne, comment elle se comporte, ce qu'elle veut en fait,
06:26ce qu'elle veut atteindre comme objectif, qu'est-ce qui l'en empêche pour avoir accès
06:30à son plein potentiel et puis de là on trace tout un itinéraire, un point A jusqu'au
06:36point B, le point B étant l'objectif vraiment global, final que le sportif veut atteindre.
06:42J'ai beaucoup d'informations qui me parviennent à l'esprit ne serait-ce que par une observation.
06:56C'est hyper important.
06:57Je me concentre énormément sur le regard, le regard en dislant, on peut mentir aussi
07:05au niveau du regard malgré nous, on peut être dans le déni aussi au niveau du regard
07:09et puis il y a des fois où quand la personne est en phase avec elle-même, le regard en
07:15dislant et il se dégage quelque chose vraiment de particulier et là je me dis c'est bon,
07:19il peut se passer quelque chose.
07:26J'ai une très grande part d'intuition, j'aime bien me brancher à la personne, ressentir
07:36en fait ce qu'elle me dit pour prendre les mots que je vais considérer clés sur lesquels
07:42on va amorcer un début d'accompagnement.
07:46Les sportifs de niveau ont exactement les mêmes craintes que monsieur, madame, tout
07:57le monde quand on est face à un projet, à un objectif à atteindre, c'est ni plus ni
08:04moins que la peur de ne pas être à la hauteur, la peur de l'échec, le regard des autres
08:11en cas d'échec, c'est ça et puis c'est aussi des freins qu'on a malgré nous encore
08:18une fois par notre formatage qui nous limite donc en gros c'est vrai que j'ai quasiment
08:24zéro surprise sur ça, par contre la manière de dénouer tout ça, de déverrouiller les
08:30freins c'est propre à chacun.
08:32Alors ça c'est ma chambre, j'adore les chambres rangées, ça c'est à mon image, je peux être
08:39un peu bordélique, par contre quand je travaille avec les sportives, les joueuses, les grands
08:47champions, tout est carré dans ma tête, j'ai quasiment tout en tête même si je prends
08:51des notes mais ça reste quasiment en vie en fait, même des années après la fin des
08:57carrières de certains grands champions, c'est dans un coin de ma tête.
09:03Moi je suis multi-tâche, multi-fonction, dans mon premier métier qui était entraîneur,
09:09j'étais passionné pour le mental, pour la communication interpersonnelle, début 2000
09:14donc il n'y avait pas grand chose qui existait dans le domaine de la préparation mentale
09:18et je me suis formé vraiment à des techniques plutôt anglo-saxonnes de la communication,
09:22ça m'a ouvert tellement les yeux et ça m'a renforcé en fait dans l'idée que c'était
09:26vraiment mon domaine de prédilection et petit à petit je me suis concentré sur ce métier
09:32qui en est devenu un d'ailleurs.
09:33Et c'est la difficulté qui nous renforce toujours, c'est toujours dans la difficulté que vous
09:38allez vous renforcer.
09:39J'ai été sportif mais pas un grand champion, maintenant je pense qu'il faut aussi connaître
09:44un peu le goût de l'effort, savoir un peu ce qu'ils ressentent aussi au quotidien quand
09:49ils doivent aller chercher toujours plus pour performer, ça pour moi c'est basique.
09:56Après ce n'est pas forcément les grands champions qui vont comprendre les sportifs
10:03de haut niveau.
10:04J'ai envie de dire écoute, bienveillance, empathie, égo, équilibré, humilité, même
10:15ça je le dirais en premier lieu.
10:17Je ne suis jamais allé au premier étage, moi je reste au rez-de-chaussée, au ras
10:22des pâquerettes, ça c'est plus mon niveau.
10:24Humilité.
10:25Toujours humilité.
10:26Le propre de ce métier c'est la confidentialité, il y a des choses bien sûr qu'on se dit,
10:33même moi, que je peux dire aussi avec par exemple les joueuses, et qui resteront évidemment
10:40qu'entre nous.
10:41Après il y a des choses sur lesquelles bien sûr que je peux en parler au coach à partir
10:47du moment où j'ai l'accord des joueuses, et souvent c'est même utile aussi que j'en
10:52parle au coach, mais si j'ai l'agrément des joueuses, il n'y a aucun problème, c'est
10:58qu'elles sentent aussi que c'est utile pour elles que j'en parle aux entraîneurs et pas
11:03qu'au coach principal.
11:04C'est un métier qui repose sur la confiance, et ça peut demander du temps effectivement,
11:10après je suis honnête, j'ai l'honneur d'être honnête, j'ai l'honneur d'être honnête
11:14et ça peut demander du temps effectivement, après je suis honnête, sincère, avec les
11:20joueuses ou les sportifs que j'encadre, la confiance peut vite venir.
11:24En tout cas c'est de cette manière que je vois mon métier.
11:32Moi je suis préparateur mental, je m'occupe de la performance de l'individu, et par contre
11:40quand il y a des blessures d'enfance, ça dépasse mes compétences, donc je préfère
11:48m'entourer aussi d'un psychologue, moi j'ai toujours travaillé avec des psychologues,
11:53parce que c'est complémentaire, et puis on offre aussi plus de performance à l'accompagnement
12:02avec d'être entouré par des spécialistes de son domaine.
12:10On ne triche pas dans la préparation mentale, parce qu'il y a le résultat, il y a le chronomètre,
12:23ou pour d'autres sports, il y a la performance physique, donc on voit très bien quand c'est
12:30chronométrique, le résultat chronométrique parle de lui-même, et puis après avec des
12:38joueurs que j'ai accompagnés, ça se sent surtout par rapport au retour du joueur et
12:44aussi du staff technique.
12:46Alors ça c'est la première fois qu'en arrivant devant la porte de ma chambre, il y avait cette
12:53attention-là, avec quand même des grands noms du football français.
12:59Mais il y en a un que tout le monde connaît, qui vient d'entrer, l'unique, Lionel Letizy.
13:13Je pense que quand on arrive au niveau, les physiques se ressemblent quasiment tous, et
13:17on a tous les mêmes aptitudes plus ou moins, et je pense notamment dans le foot que le
13:23mental est une grande partie du résultat, parce que ça se joue sur quelques petits
13:29moments, on peut gagner d'un but, perdre d'un but, donc si on n'est pas lucide au bon moment,
13:35je suppose qu'il peut y avoir des grosses conséquences, donc prendre du plaisir, être un
13:41petit peu détaché par rapport au résultat, des choses comme ça, je pense que ça peut être
13:44très important.
13:45Sur la deuxième mi-temps, maintenant on va avoir un peu plus de densité, un peu plus
13:49de concentration, un peu plus d'agressivité, toujours, toujours, toujours.
13:53Ce que je note, c'est qu'il y a tout pour réussir, en toute honnêteté je découvre
13:59le football féminin, mais je ne me rendais pas compte à quel point c'était physique,
14:04technique, tactique aussi, et je prends beaucoup, vraiment beaucoup de plaisir à découvrir
14:09les joueuses de l'équipe de France, on fera tout pour qu'il y ait ce déclic, mais en
14:15tout cas, je pense que c'est un groupe qui peut avoir cette prise de conscience, qui
14:20peut aller chercher ce déclic pour décrocher ses premiers trophées.
14:32Le projet qu'on propose aux filles, c'est un projet commun, global avec le staff technique,
14:38et c'est pour ça qu'on se sent très à l'aise pour travailler avec Laurent, parce
14:43que lui, nous permet en fait de développer des idées, et conjointement, on arrive à
14:49un projet qui, je trouve, est très enrichissant, alors ce projet, évidemment, on l'a soumis
14:55aux filles, parce que sans l'aval des filles, on ne va pas aller très, très loin avec
15:00ce projet.
15:01On commence, donc tout est beau et tout est rose, en général, c'est les bonnes résolutions
15:05de la nouvelle saison.
15:08Donc voilà, moi j'ai hâte aussi d'être en compétition officielle, avec des matchs
15:13couperés, pour voir vraiment si le projet répond aux attentes, aux besoins des filles.
15:26Ma mission, c'est de travailler de manière individualisée, alors pas avec la totalité
15:30des filles, avec celles qui le souhaitent, et ça on peut le faire, et on a commencé
15:36à le faire tout au long de l'année, et pas que au rassemblement, il y a des filles
15:40aussi que je vais voir uniquement pendant le rassemblement, et puis voilà, après,
15:47on veut aussi mettre en place des choses, non seulement sur le plan individuel, pour
15:52que les filles arrivent à se libérer le plus possible, mais aussi sur le groupe en
15:58entier, pour que aussi le groupe arrive à se lâcher de manière vraiment concrète,
16:05et puis surtout dans le temps.
16:13On va faire des réunions en petits comités, en sous-groupes, de manière aussi collégiale,
16:19pour créer davantage d'affinités entre les postes, entre les relais, les personnes
16:25qui vont plus jouer ensemble selon la stratégie des coachs, donc voilà, ça va nécessiter
16:32aussi du temps, une meilleure compréhension en fait, on n'attend pas des filles qu'elles
16:36soient les meilleures amies du monde, on attend simplement d'elles qu'elles arrivent à
16:41se comprendre le plus possible, parce que nous, ce qu'on veut mettre en place, c'est
16:46une stratégie avec beaucoup d'options de jeu variées, et pour qu'elles se comprennent,
16:52c'est aussi avoir un temps de discussion, pour que la tactique se fasse de manière
16:59un peu plus naturelle.
17:01Tom, c'est toujours douce, toujours autour du plaisir, autour du bien-être, et je pense
17:05que, pas seulement quand on est sportif, mais dans tous les métiers du monde, on travaille
17:09mieux quand on est heureux, donc Tom apporte ça.
17:12Les déclics viennent en fait d'une prise de conscience à un moment, et moi c'est
17:17le meilleur moment en fait de l'accompagnement, quand je vois en fait dans les yeux quand
17:24ça percute, et qu'à ce moment-là je me dis « waouh, tout est possible », et en
17:31fait c'est une nouvelle carrière qui débute à ce moment-là, et ça c'est génial de
17:37suivre ça à ce moment-là.

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