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Éric de Riedmatten reçoit un invité dans #LHebdoDeLEco pour approfondir un sujet économique…

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00:00On va vous parler d'une belle réussite française, un fabricant de biscuits qui vient de gagner
00:05un énorme contrat avec les Américains, mais ça tombe au moment où les taxes Trump arrivent.
00:10Alors on en parle avec Alexis de Gallembert, merci d'être avec nous, spécialiste des
00:15sablés du Poitou et votre entreprise c'est la fabrique Cookies, et donc vous remportez
00:20ce contrat gigantesque avec les Américains, ça fait combien de conteneurs que vous allez
00:24envoyer ?
00:25Alors pour la première commande c'est 11 conteneurs.
00:2711 de biscuits ?
00:2812 de biscuits, de broyés du Poitou très précisément oui.
00:30D'accord, et donc ça représente plusieurs millions de biscuits ?
00:33Ça représente grosso modo entre 7 et 8 millions de broyés je crois.
00:36Ah oui, et alors précisons que c'est dans vos ateliers, dans vos usines, qu'ils sont
00:41fabriqués 100% français ?
00:42Oui, l'usine est située au nord de New York, donc dans l'aide de Sèvres, et effectivement
00:46on se fournit en beurre dans le Poitou, tous nos ingrédients sont locaux.
00:51Mais comment remporte-t-on un tel contrat avec les Américains ?
00:54Alors c'était une longue histoire parce que ce n'est pas simple, ça a été assez
00:57long, surtout que les Américains demandent à ce qu'on se mette à nu d'un point de
01:00vue qualité, traçabilité, règles et normes, ce qui est normal, et voilà, ça fait 13
01:06ou 14 mois qu'on travaille dessus, que l'équipe travaille dessus, et on a reçu la première
01:10commande il y a maintenant une petite dizaine de jours, donc on a bien célébré ça.
01:13Et donc ces biscuits vont prendre le chemin du Havre, où ils vont être chargés dans
01:17un cargo, partir par la mer, donc il ne faut pas qu'ils prennent l'eau.
01:20Il ne faut pas qu'ils prennent l'eau, normalement ça devrait aller.
01:23Mais ça arrive au moment où la guerre commerciale démarre, alors ça tombe mal quand même.
01:26Ça tombe mal, alors on verra ce que ça donne, moi je reste quand même assez optimiste,
01:31c'est ma nature, et je pense que si on n'est pas optimiste, on a du mal à investir et
01:35à se projeter.
01:36Si jamais des taxes arrivent, ce qui n'est pour le moment pas d'actualité, mais si
01:40jamais des taxes arrivent, ce qui se passera c'est que le broyer sera plus cher pour le
01:45client américain, et que comme le prix n'a pas une élasticité infinie, forcément,
01:50on devrait faire des volumes un peu plus faibles, donc j'imagine qu'à terme les
01:53commandes devraient être plus faibles si Trump...
01:55Ça c'est embêtant, alors d'un côté il y aura une inflation aux Etats-Unis, parce
01:58que les prix vont monter, mais ou bien vous renoncerez à vos marges, et donc ça risque
02:02de baisser aussi vos revenus.
02:03On ne renoncera pas à nos marges, donc voilà, le prix en rayon aux Etats-Unis augmentera,
02:10et on vendra en revanche probablement moins de broyers.
02:13Ah mince, donc c'est un impact qui n'est pas négligeable, mais alors comment fait-on
02:17pour s'organiser et fabriquer comme ça 7 600 000 biscuits ? Ça ne se fait pas du
02:22jour au lendemain ?
02:23Non, ça ne se fait pas du jour au lendemain, heureusement on l'a vu venir, ça fait 13
02:26mois qu'on travaille dessus, donc on a monté des équipes supplémentaires, on a anticipé
02:32en faisant des stocks pour réussir à livrer nos clients historiques, qui continuent aussi
02:35à nous commander, et on a passé l'usine depuis quelques jours au 3-8, donc le 3-8
02:41concrètement, c'est-à-dire qu'on a une équipe du matin, une équipe de l'après-midi et
02:43une équipe de la nuit, donc l'usine ne s'arrête jamais, elle s'arrête pour le moment le
02:48week-end, on en profite pour faire la maintenance et le nettoyage, mais l'usine ne s'arrête
02:51jamais, on produit en flux tendu tout le temps.
02:53On arrive à gagner sa vie avec le biscuit ?
02:54On arrive à très bien gagner sa vie avec le biscuit, c'est un marché à forte marge
02:58brute, l'enjeu c'est de dépasser son point mort, donc c'est d'arriver à amortir ses
03:03frais fixes, à partir du moment où vous y arrivez, généralement c'est des entreprises
03:06qui sont très rentables, mais l'enjeu est de réussir à amortir les frais fixes.
03:09Vous avez dû investir dans de nouveaux outils pour la production ?
03:12J'ai investi dans une nouvelle machine, une étudeuse automatique qui remplit les paquets
03:16automatiquement, c'est un investissement à 350 000 euros, on a fait cet investissement
03:20il y a maintenant 4 ou 5 mois, et surtout là, comme on est en train de saturer l'outil
03:25avec d'autres commandes, puisque je suis aussi en train de discuter avec le Japon,
03:30j'anticipe et je suis en train de préparer un investissement à 2,5 millions d'euros
03:34pour créer une nouvelle ligne de production dans cette usine.
03:36Parce que le succès appelle le succès, et d'ailleurs l'Amérique vous commandera d'autres
03:40conteneurs, ce n'est pas un seul one-shot.
03:42Non, ce n'est pas un one-shot, c'est une commande qui devrait être entre 2 et 3 conteneurs
03:47par mois, suivant cette première commande assez exceptionnelle.
03:49Et ça s'appelle sablé du Poitou, donc on aimera bien en goûter.
03:52Broyé du Poitou, exactement.
03:53Et ça existe en France, la marque existe en France ?
03:55La marque existe en France, bien sûr, vous en trouvez un peu partout des broyés du Poitou,
03:59c'est un sablé breton en un peu meilleur évidemment.
04:01D'accord, oui c'est des broyés, mais quand on voit le coût de la production, le conditionnement,
04:06l'expédition, comment on arrive à s'y retrouver avec tout ça ?
04:09En bossant, en optimisant, en faisant des appels d'offres aussi nous sur nos appros.
04:15Et surtout, en ce moment, il y a une vraie tension sur les prix des matières premières.
04:20Malheureusement, l'inflation baisse, mais le chocolat explose et le beurre augmente
04:24très fortement.
04:25Donc c'est aussi en faisant passer les hausses à nos clients, en leur faisant comprendre
04:28qu'on n'a pas trop le choix.
04:29Alors vous êtes un ancien de la finance, vous avez renoncé à votre métier d'origine
04:33pour vous lancer dans la pâtisserie, en tout cas dans la gestion à haut niveau.
04:36Qu'est-ce qui vous a donné, quel a été le déclic ?
04:39Alors non, je me suis vraiment lancé à la base, pendant deux ans, j'étais en vente
04:42en train de faire des cookies dans mes boutiques, donc j'ai commencé par faire des cookies
04:44en boutique.
04:45Tout en étant financier ?
04:47De formation, j'ai travaillé 4 ans en finance effectivement, mais c'était il y a maintenant
04:50pas mal de temps.
04:51En fait, je suis un vrai gourmand et j'avais très envie d'entreprendre, donc c'est comme
04:55ça que j'ai décidé de troquer mon costume-cravate pour, à l'époque, un tablier.
04:59Bon finalement, je reviens un peu à mes premiers amours parce que l'entreprise grandissant
05:02beaucoup.
05:03En 13 ans, aujourd'hui j'ai 105 salariés, on va faire un peu plus de 16 millions et
05:07demi d'euros de chiffre d'affaires cette année, donc forcément, mon métier devient
05:10de plus en plus financier, même si je garde un attrait particulier pour la production
05:14et pour la gourmandise.
05:15Ça rapporte autant, voire plus ?
05:17Non, beaucoup moins, beaucoup moins, mais voilà, on ne fait pas forcément ça pour
05:23ça.
05:24Après, si l'entreprise fonctionne, à la terme, il y aura effectivement peut-être
05:27une carotte liée à la création d'un patrimoine, parce qu'on n'a pas forcément quand…
05:32Et ce qui se passe en France aujourd'hui, ça vous inquiète avec les problèmes économiques,
05:37le brouillard, les investissements qui baissent, le chômage qui augmente ?
05:40Oui, je ne vais pas vous mentir, oui, ça m'inquiète, je trouve qu'on n'est pas
05:44dans une belle situation, on manque peut-être un peu de courage politique, on reste dans
05:49une logique d'État-guichet qui subventionne beaucoup et voilà, je l'ai dit, je communique
05:56dessus, donc ce n'est pas un secret, mais je trouve qu'il y a des nids fiscales en
05:58particulier, touchant les entreprises, je parle de ce que je connais, voilà, dont
06:03on pourrait très bien se passer et j'ai tendance à dire que l'État devrait vraiment
06:08apprendre à faire des économies et pour le moment, forcer de constater que le budget
06:12de son fonctionnement continue d'augmenter d'année en année.
06:14Mais vous n'avez pas l'intention à jour de délocaliser pour avoir une main d'œuvre
06:17moins chère ?
06:18Surtout pas.
06:19Non, surtout pas ?
06:20Non, parce que je tiens mon beurre à haupet de poids touche à rente, non, on fait des
06:24très bons produits parce qu'on a une bonne agriculture, non, surtout pas.
06:27Au moins, vous montrez qu'on peut rester en France malgré tout, donc c'est vrai qu'il
06:31ne faut pas être découragé.
06:32Non, on a un super pays, on a un super pays aussi pour entreprendre, je pense qu'entreprendre
06:37en France, c'est une chance, il y a quand même des vraies aides de l'État pour ça,
06:42donc voilà, je pense qu'on a énormément d'atouts et je suis, je vous l'ai dit, je
06:46suis optimiste, je suis absolument persuadé qu'on va très bien s'en sortir, mais pour
06:49ça, il faut peut-être un tout petit peu plus de courage politique.
06:51Eh oui, tout n'est pas si mal en France, il faut le rappeler, c'est le plus beau pays
06:55du monde, c'est pour ça qu'il faut tout faire pour le relancer et le sauver.
06:58Merci en tout cas d'être venu nous parler de ces broyés du Poitou exportés vers les
07:04Etats-Unis en espérant qu'il n'y aura pas de taxes sur ces produits.
07:07Alexis de Gallembert, restez avec nous sur CNews.

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