Mathieu Bock-Côté propose un décryptage de l’actualité des deux côtés de l’Atlantique dans #FaceABockCote
Catégorie
🗞
NewsTranscription
00:00Quasiment 19h sur CNews, merci d'être avec nous pour Face à Mathieu Bocoté, cher Mathieu, bonsoir.
00:06Bonsoir.
00:07Bonsoir Arthur de Vatrigan.
00:08Bonsoir Eliott.
00:08A la une de l'incorrect ce mois-ci, silence, on viole la rançon du vivre ensemble, l'enquête interdite, une enquête également inédite, vous lui dire un mot avant qu'on passe au journal Arthur.
00:22Eh bien nous avons enquêté sur les violences sexuelles qui sont de 122 000 en France, sachant que 2% des femmes portent plainte, ça vous laisse imaginer l'état, du nombre de victimes chaque jour en France et on a essayé de savoir et de comprendre pourquoi et quels étaient les profils des agresseurs.
00:39Eh bien écoutez ce serait intéressant de vous inviter également pour en parler.
00:44Avec plaisir.
00:45Cette enquête, vous dites une enquête interdite parce que c'est vrai qu'il y a une omerta sur ce sujet et puis alors la transition est difficile mais on va saluer également Olivier de Kerenfleck, présentateur de CNews, journaliste chez nous, qui participe aussi, qui est présent dans votre journal ce mois-ci.
01:04On lui consacre les pages portrait du début parce qu'Olivier a une très belle histoire, une histoire rare dans le milieu de la presse et donc on voulait la faire découvrir parce que tout le monde connaît Olivier sur les plateaux de cette chaîne mais tout le monde ne connaît pas son histoire et donc c'est intéressant.
01:18Et j'invite les téléspectateurs à lire ce portrait et c'est vrai que tout le monde le connaît à travers l'écran et je salue Olivier Kerenfleck parce que c'est un confrère formidable.
01:29C'est un plaisir de partager mes week-ends avec lui.
01:33Je rappelle qu'il fait punchline et également son position politique.
01:36Vous le retrouverez à 22h ce soir.
01:37Le point sur l'information c'est avec Isabelle Piboulot.
01:39Chère Isabelle, bonsoir.
01:41Bonsoir Eliott, bonsoir à tous.
01:42A la une de l'actualité, nous éliminerons le ramas et ramènerons nos otages.
01:47Déclaration de Benyamin Netanyahou quelques heures après la libération d'Eli Charabi, Ouad Benhami et Or Levi.
01:54Physiquement éprouvés, ces trois otages israéliens ont été relâchés ce matin contre 183 prisonniers palestiniens.
02:01La première phase de l'accord de cesser le feu à Gaza doit s'achever le 1er mars.
02:05Le premier ministre israélien a annoncé l'envoi de négociateurs à Doha, au Qatar.
02:10Une vie innocente a été arrachée à la vie et à l'amour des siens.
02:15Réaction du ministre de l'Intérieur sur X à la mort de la jeune Louise.
02:19Une messe en hommage à la collégienne s'est tenue à Épinay-sur-Orge alors qu'une enquête pour meurtre sur mineurs est en cours.
02:25Le corps de Louise, 11 ans, a été retrouvé la nuit dernière dans un bois à Longjumeau.
02:29Un couple a été placé en garde à vue.
02:32Et puis plusieurs centaines de personnes ont fait leur adieu au petit Émile, disparu en 2023.
02:37Vive émotion à Saint-Maximin-la-Sainte-Baume, dans le Var, où se sont tenues les obsèques ce matin.
02:42A la basilique Sainte-Marie-Madeleine, l'office religieux a réuni la famille du garçon,
02:47400 invités et des dizaines d'anonymes avant l'inhumation dans l'intimité.
02:52Émile est mort à l'âge de 2 ans et demi dans des circonstances encore inconnues.
02:57A la une de face à Mathieu Boqueté, François Bayrou veut rouvrir le débat sur l'identité nationale.
03:05Qu'est-ce qu'être français entoile de fond la question de l'immigration et du droit du sol ?
03:10Alors plutôt que des débats sur des questions qui font consensus chez les français,
03:14mais qui déchirent la classe politique, à quand l'action ?
03:17Mieux les mots, mieux les actes.
03:19On en parle dans un instant avec Mathieu Boqueté.
03:22Au programme également, nous parlerons de ces chefs qui ont prenait la fin de l'argent magique,
03:26de l'Etat obèse, qui intervient sur tout mais ne règle rien.
03:30Ce fouet là, scandé par l'argentin Milei, traverse l'Atlantique.
03:33On les appelle les libertariens.
03:35Qu'est-ce donc que ce courant ? Mathieu Boqueté nous dit tout dans cette émission.
03:39Enfin, vous recevez, cher Mathieu, ce samedi à Olivier Seban,
03:42auteur du roman « Maintenant que l'hiver »,
03:44dans lequel le pays est plongé dans un froid polaire, sous un régime totalitaire.
03:49Et ça rime en plus.
03:50On en parle dans cette émission, bien évidemment.
03:53François Bayrou, Mathieu Boqueté, cette semaine,
03:56a donc relancé ce qu'on appelle le débat sur l'identité nationale.
04:02Et d'ailleurs, il a réagi à l'instant sur cette question.
04:05Il promet qu'il n'y aura pas de conflits au sein du gouvernement.
04:09À l'intérieur du gouvernement, il n'y aura pas de conflits sur la question de l'identité nationale.
04:13À gauche, plusieurs y voient une radicalisation du Premier ministre.
04:16D'autres se demandent si la France est vraiment encore à l'heure du débat sur son identité.
04:21Et tel sera le sujet de votre premier édito, Mathieu.
04:24Disons tout de suite que s'il n'y a pas de conflits,
04:26ce sera un débat étouffé et un débat empêché.
04:30Parce qu'entre Mme Pannier-Runacher et M. Retailleau,
04:33il y a incompatibilité de vision sur cette question.
04:36Donc déjà, si on annonce que le débat n'en sera pas un, ça cause problème.
04:40Cela dit, c'est intéressant de voir cette annonce de François Bayrou
04:44qui veut élargir le débat sur le droit du sol,
04:48et plus largement, on a parlé de la submersion cette semaine,
04:51à la question de l'identité.
04:53Mais je ne peux m'empêcher de voir dans cela
04:56quelque chose comme un remake de 2007-2008.
05:00Vous vous souvenez, cette séquence, quand Nicolas Sarkozy est élu,
05:04il organise, notamment il confie l'organisation du débat à Éric Besson.
05:08Et l'idée à l'époque, rappelez-vous, Éric Besson dit à ce moment-là,
05:12la France est un conglomérat de peuples et ainsi de suite.
05:16Donc c'est une époque très particulière,
05:18où plutôt que d'agir lorsqu'il était encore possible d'agir,
05:22on décide de débattre.
05:24Et j'ai l'impression que c'est une tendance
05:26de plus en plus fréquente chez nos politiques.
05:28Plutôt que d'action, ils organisent des grands débats.
05:31Plutôt que d'agir, ils décident d'organiser des conventions.
05:35Ils ne cessent de vouloir débattre,
05:37mais ils n'ont rien à proposer directement.
05:40Ce qui peut être assez embêtant.
05:42C'est une exaspération que plusieurs confesseront, je crois.
05:45Ensuite, c'est un gouvernement qui nous parle maintenant
05:48du sentiment de submersion.
05:49On en a beaucoup parlé ces derniers jours.
05:51Qui fait suite au sentiment d'insécurité.
05:54Qui fait suite au sentiment de perte de souveraineté.
05:58Qui fait suite probablement au sentiment d'insalubrité
06:01quand on se promène à Paris.
06:03Et qui fait probablement suite au sentiment de laideur publique
06:07lorsqu'on regarde l'architecture contemporaine.
06:10Alors de ce gouvernement qui ne parle que de sentiment,
06:12je dirais qu'il a une doctrine.
06:14C'est le sentimentalisme.
06:15Le sentimentalisme est la doctrine des gouvernements
06:18qui rabattent sur le niveau de l'impression et du sentiment
06:21que nous savons être vrai.
06:22Par ailleurs, on en a parlé un peu cette semaine,
06:25il y a eu un grand moment de bascule
06:27autour de la question du grand remplacement.
06:29Ce concept dont on parle si souvent.
06:31Pendant des années, c'était un concept qui était diabolisé.
06:33On le sait, il devient Renaud Camus.
06:35Et ce concept, on a dit, alors c'est faux.
06:37A l'origine, pour Renaud Camus, ça consiste à dire
06:40le peuple historique d'un pays est submergé
06:42par une population nouvelle
06:43en l'espace d'une, deux ou trois générations.
06:45Et ce peuple devient minoritaire chez lui.
06:47Et cette théorie, comme on dit,
06:49a été réinterprétée par la gauche
06:51qui a voulu y voir une théorie d'origine néo-nazie
06:54où des conspirateurs chercheraient à noyer
06:57les populations blanches d'Occident
06:59de manière tout à fait consciente et malveillante.
07:02Ça, c'était la version de gauche spécialiste
07:05en sciences politiques de plateau du service public.
07:08Et là, qu'est-ce qu'on voit?
07:09Jean-Luc Mélenchon se réapproprie cette formule.
07:12Il se la réapproprie de manière convaincante,
07:14dans son esprit, de manière conquérante.
07:16Le grand remplacement pour lui, qu'est-ce que c'est?
07:19C'est une étape qui permet la créolisation de la France.
07:21Qu'est-ce que la créolisation de la France?
07:23C'est cette conquête du peuple historique français
07:26par des populations nouvelles
07:28qui fixeront de nouvelles normes culturelles.
07:30Et au tome de ça, il appelle ça la Nouvelle France.
07:33Alors, devant cela, j'y reviens.
07:35François Bayrou a dit sentiments de submersion,
07:37sentiments de submersion, faisons un grand débat.
07:40Comment ne pas avoir l'impression que, très souvent,
07:42les hommes politiques qui comprennent
07:44l'exaspération des Français,
07:46qui comprennent que le déni ne fonctionne plus,
07:48qui comprennent l'exaspération totale
07:50devant l'impuissance publique,
07:52ils se réfugient dans les mots.
07:53Donc, la classe politique offre des mots,
07:55notamment aux Français de droite.
07:57Je note, et je le dis de manière un peu sévère,
07:59que l'homme de droite en France s'achète avec des mots.
08:02Donc, on lui dit sentiments de submersion,
08:04mais il dit, oh là là, ça commence à bouger dans le pays.
08:06Alors que s'il s'agissait simplement de nous offrir
08:09les mots, les mots et les mots, bien, on serait dans une chanson.
08:12Donc, de ce point de vue, c'est...
08:14nous sommes devant une forme de fausse piste, en quelque sorte.
08:17C'est un grand débat pour savoir ce que nous savons,
08:20alors que nous savons pourtant ce que nous devrions faire.
08:23Vous êtes plutôt Dalida, Mathieu Bocoté.
08:25Ça peut arriver.
08:26Vous dites que ce débat nous conduit sur une fausse piste.
08:29Que faut-il faire, alors, Mathieu Bocoté ?
08:31Mais nous le savons, et c'est agir.
08:33Dès lors qu'on se tourne vers la majorité des Français.
08:35Je ne parle pas ici de la majorité de la classe politique.
08:38C'est une classe politique qui, aujourd'hui,
08:40est en état d'effondrement mental, politique, psychique,
08:44avec des compétences très limitées.
08:46Mais nous savons, globalement, ce que veulent les Français.
08:48Ils veulent une action.
08:50Et une action qui est à peu près de la...
08:52Je listerai quelques mesures.
08:53Ou plutôt que de parler d'identité nationale,
08:55on pourrait agir pour restaurer l'identité nationale
08:58et le peuple français.
08:59Donc, je vais y aller avec une série de mesures
09:01que pourrait prendre un gouvernement
09:03décidé à lutter contre la réalité de la submersion.
09:06Premier élément, la suspension du droit d'asile.
09:08Tout simplement, nous sommes dans des périodes historiques
09:10où, exceptionnellement, très, très, très exceptionnellement,
09:13le droit d'asile est devenu une filière migratoire
09:15à part entière qui participe activement
09:17à la submersion du pays.
09:19Ensuite, le renvoi immédiat des illégaux chez eux.
09:23Et rétablir, de ce point de vue,
09:25le délit d'un séjour clandestin.
09:27Si vous n'avez pas le droit d'être en France,
09:29c'est un délit et vous devez repartir.
09:31Tout simplement.
09:32Il faut en finir avec cette idée
09:34qu'on a le droit de s'installer dans la maison
09:36d'un homme ou d'une femme ou d'un pays
09:38sans en avoir la permission de s'y installer et d'en profiter
09:40et d'ensuite traiter les gens de racistes
09:42sans avoir la possession de son bien et de sa maison.
09:44Dans le même état d'esprit, il y a cette idée,
09:46et ça, c'est porté par plusieurs pays méditerranéens,
09:49de faire un blocus naval dans la Méditerranée
09:52pour empêcher, justement, les nombreux navires
09:55ou, d'une manière ou d'une autre, les embarcations
09:57de faire le débarquement en France
09:59des clandestins qui se présentent
10:01comme des migrants en quête d'un pays de cocagne nouveau,
10:04d'un pays refuge.
10:05Il faut prendre des moyens pour faire en sorte
10:07que ceux qui arrivent repartent.
10:08On appelle ça le refoulement.
10:10Ceux qui veulent venir en France doivent suivre
10:12les chemins réguliers fixés par nos pays
10:15pour dire si on peut entrer ou non dans un pays.
10:18Il faut évidemment, dans les circonstances présentes,
10:19abonner le regroupement familial
10:21et abonner le droit du sol.
10:22Marine Le Pen propose un référendum sur la question.
10:24Je suis curieux de savoir ce que diront les autres
10:27qui proposent des référendums en France.
10:28Il faut établir la préférence nationale.
10:31La préférence nationale, qui ne consiste pas
10:33à pratiquer le racisme ou la xénophobie,
10:35ça consiste simplement à marquer une distinction
10:37entre celui qui est membre d'une nation
10:38et celui qui ne l'est pas.
10:39Et la préférence européenne, parce qu'il faut se rappeler
10:41que, par ailleurs, il existe une telle chose
10:43qu'une communauté de civilisation.
10:45On peut et on doit, je crois, et longtemps,
10:47j'étais réservé par rapport à cela,
10:48mais je confesse changer d'idée,
10:49établir des statistiques, que l'on dit « ethniques »,
10:52pour avoir un portrait plus fin
10:54de la question de l'immigration aujourd'hui
10:56sur une, deux, trois générations,
10:58parce que sinon, on est dans le déni permanent.
11:01Il faut évidemment dénoncer les accords de 68 avec l'Algérie.
11:04On en parle de plus en plus.
11:05Le temps est venu de permettre à l'Algérie
11:08d'être pleinement algérienne
11:10pour permettre à la France d'être pleinement française.
11:12Cette espèce de mouvement contre-colonial
11:15qui est imposé avec une élite politique algérienne
11:18plus insultante que jamais dans le droit de la France,
11:20cela peut et cela doit cesser.
11:22Il faut réaffirmer le primat du droit national
11:24sur le droit européen.
11:25Il faut sortir des différentes conventions droits de l'homiste
11:28qui, aujourd'hui, sont instrumentalisées
11:30par des juristes militants
11:32pour neutraliser la souveraineté nationale.
11:34Il faut fermer les mosquées radicales, cela va de soi.
11:37Il faut cesser le financement des associations
11:39immigrationnistes et autres groupes militants,
11:41quels qu'ils soient.
11:42Vous voulez militer à temps plein dans votre vie, très bien,
11:44mais pas avec l'argent public.
11:45La gauche, aujourd'hui, n'a plus de parti au sens fort,
11:47sauf la France insoumise,
11:48mais elle contrôle le réseau associatif
11:50publiquement subventionné
11:51qui lui permet d'occuper l'espace public en permanence.
11:54Il faudrait limiter l'immigration de travail,
11:56certains emplois très spécialisés,
11:58et ne plus considérer que c'est une autre filière
12:00qui permet de faire vivre des secteurs
12:02qui, fondamentalement, ont besoin d'immigration de travail
12:04pour avoir des travailleurs,
12:05ce qu'on appelle en anglais du « cheap labour »,
12:07des travailleurs à bas coût
12:08qui permettent à des secteurs économiques
12:10de survivre sans jamais se moderniser.
12:12Et si on veut aller plus loin,
12:13on pourrait aussi, de manière tout à fait positive,
12:15redonner à l'école l'importance de l'histoire nationale,
12:18de la littérature,
12:19on pourrait faire tout un programme
12:20de mise en valeur du patrimoine du pays,
12:22mais ce qui est certain,
12:23c'est que plutôt que d'organiser
12:24le 3 millionième débat sur l'identité,
12:27on pourrait agir pour l'identité.
12:29Vaste programme.
12:31On semble très loin de toutes ces propositions.
12:34Laurent Nouniez, cette semaine,
12:36vous souhaitez en parler
12:37parce qu'il a refusé de faire le lien
12:39entre immigration et insécurité.
12:42Comment y est-il parvenu, Mathieu Bocoté ?
12:45Ça, c'est du génie.
12:46À ce niveau, c'est jésuitique, comme qu'il dirait.
12:48Alors, je cite, il dit
12:51« Je ne fais pas de lien entre immigration et sécurité.
12:53Je lutte contre les délinquants. »
12:54Point final. Très bien.
12:55On comprend.
12:57Mais ensuite, il dit
12:58« Je ne fais pas de lien entre la délinquance et l'immigration.
13:00Mes 36 % des mises en cause dans l'agglomération parisienne
13:03sont des ressources étrangères.
13:05Un cambriolage sur deux étrangers.
13:0740 % des violences sexuelles étrangères.
13:098 cas sur 10 de vols à la tire étrangers. »
13:11Je ne sais pas c'est quoi si ce n'est pas un lien,
13:13mais qu'on me l'explique.
13:14Il se peut que j'ai le cerveau qui tombe en panne
13:16lorsque je regarde ce que dit Laurent Nouniez,
13:18mais il nous explique très clairement.
13:19Il y a un lien, mais je refuse de le nommer.
13:21Et là, c'est la dernière ruse du pouvoir.
13:24Il présente les faits parce que ce n'est plus possible de le nier.
13:26Il présente une réalité.
13:28Et au moment où il dit « Non, mais ça ne m'engage pas.
13:30Je refuse de faire un lien.
13:31Je refuse de m'engager à commenter ce que je vois.
13:34Mais ce n'est pas surprenant.
13:35L'institutionnalisation du mensonge est au cœur du régime diversitaire
13:38et de tous les régimes idéocratiques.
13:40C'est-à-dire, plus le dogme est contredit par le réel,
13:43plus le dogme se radicalise.
13:45Et je ne peux m'empêcher de faire un lien entre ça
13:47et la volonté de contrôler toujours davantage l'information
13:50dans la vie publique.
13:51On pourrait nous vouloir contrôler X.
13:53Un député macroniste, je crois,
13:55a réussi à lancer une enquête sur X contre le réseau social.
14:00Le parquet de Paris, suite à une plainte d'un député macroniste,
14:03ont s'inquiété des algorithmes.
14:04Donc, il y a le DSA.
14:05Il y a la multiplication des délits d'opinion.
14:07Il y a la volonté de contrôler les réseaux sociaux.
14:09Il faut empêcher l'information de circuler,
14:11sans quoi le régime serait fragilisé.
14:13Il fallait autrefois empêcher l'Ouest de parler à l'Est,
14:16parce que sinon l'Est serait tombé.
14:18On appelait ça le mur de Berlin.
14:19On appelle ça aujourd'hui le mur de l'information.
14:22Arthur de Vatrigan, sur l'identité nationale,
14:25encore un débat, encore des mots, rien que des mots.
14:29Il n'y a pas si longtemps, les identités étaient le point de départ.
14:34C'est-à-dire, c'est à partir de quoi l'action politique allait se produire
14:38pour transformer justement la diversité ou les diversités en un commun.
14:42On appelait ça l'assimilation.
14:44Le gros mot, l'assimilation à une culture, à des moeurs,
14:47à une langue, à une histoire, bref, à une nation.
14:49Et aujourd'hui, non seulement les identités sont le point d'arrivée,
14:52mais en plus, on demande aux politiques qu'ils protègent
14:56et même fassent valoir le droit des identités telles qu'elles sont.
15:00Donc si vous voulez, la loi devient esclave des droits.
15:03On l'a vu avec l'influenceur algérien.
15:05Un tribunal administratif annule son OQTF et condamne l'État.
15:08Les Français ont payé 1200 euros.
15:10Donc la souveraineté illimitée des droits individuels
15:13prime sur la souveraineté de la nation.
15:17Et donc la loi, finalement, permet de mener une vie sans loi.
15:21Ça, c'est le constat.
15:23Donc après avoir rêvé du monde diversitaire,
15:25on se rend compte que ça ne marche pas.
15:27Tu m'étonnes.
15:28La prétention moderne a cru qu'aucune civilisation
15:33n'a réussi à faire dans l'histoire,
15:35c'est-à-dire une colloque des opposés,
15:37où, par exemple, l'équipe A embrasserait les burqas
15:39sous un drapeau arc-en-ciel,
15:41avec les applaudissements du président Tebboune.
15:43Forcément, ça vire au massacre,
15:45comme l'a avoué Laurent Nunez sans faire de lien.
15:47On le voit tous les jours.
15:49La raison, elle est simple, c'est que l'assimilation,
15:51ce n'est pas une idée, en fait.
15:52Ça n'a jamais été une idée ni une idéologie.
15:54C'est une nécessité anthropologique.
15:56Parce que l'homme est un animal social et politique
15:58qui a besoin de s'assimiler à des modèles communs.
16:01Donc, non seulement on a abandonné le modèle commun,
16:03mais en plus, on a éduqué à la haine du modèle commun.
16:07L'exemple de l'Algérie nous montre tous les jours.
16:09Et donc, comme on dit, il n'y a plus de modèle commun,
16:11on va vivre ensemble.
16:13Sauf qu'encore une fois, un peuple ne vit pas ensemble,
16:15il agit ensemble.
16:16Et qu'est-ce qu'on voit aujourd'hui ?
16:17On a des peuples qui agissent contre un peuple,
16:20le peuple millénaire chez lui.
16:22Alors aujourd'hui, on murmure en se pinçant le nez
16:24que la submersion migrateur peut arriver
16:26et que finalement, le droit du sol,
16:27ce n'est peut-être pas une si bonne idée.
16:29Donc forcément, quand on passe du droit du sang,
16:31qui je rappelle est un territoire qu'on hérite
16:34et dont nous sommes donc les débiteurs,
16:36à une vague idée qu'on refile vite fait,
16:39qui s'appelle le droit du sol,
16:41on accélère la dépossession et surtout,
16:43on la planifie et puis même, on va l'organiser techniquement.
16:45Mais supprimer le droit du sol, je le rappelle,
16:48ça n'interdit pas d'épouser la France.
16:50La France s'offre à quiconque
16:52la désire au plus profond de son âme.
16:54Encore faut-il la regarder avec des yeux d'enfant,
16:57ceux qui rêvent encore de singes en hiver,
16:59de bouvines et de bateaux ivres,
17:01parce qu'on va le rappeler,
17:03parce que personne n'arrive à le définir,
17:05que la France, ce sont tous ceux
17:06qui n'ont jamais baissé les yeux
17:08pour les mieux conquérir le ciel.
17:10Ce sont les chants des saints
17:12qui s'envolent au-delà des nuages
17:14avec la vitesse inconcorde.
17:15C'est le génie des hommes qui élèvent l'âme
17:17et célèbrent la beauté,
17:19celle du geste simple,
17:21de notre langue sublime,
17:22de nos poètes immortels.
17:23La France, c'est la courtoisie d'un roi
17:25qui se découvre devant les femmes de chambre.
17:27C'est le ballet des garçons en gilet noir
17:29avec un poireau vinaigrette dans la main.
17:31Mais c'est aussi ce souci universel de la pensée
17:33qui s'enracine dans les âges médiévaux.
17:35C'est ce délicieux pas de côté
17:37d'irrévérence d'un Houellebecq ou d'un Gainsbourg.
17:39C'est aussi la finesse poétique et moqueuse d'un Sempé.
17:42C'est le nez cassé de Belmondo.
17:43Ce sont les traits parfaits de Delon.
17:45Et c'est Brigitte Bardot pour ceux qui doutent encore
17:47de l'existence de Dieu.
17:48La majorité des Français revendiquent
17:50aujourd'hui leur identité.
17:52Toutes les études le montrent.
17:53C'est-à-dire leur caractéristique singulière
17:56déposée par l'histoire.
17:58Ils la défendront avec ou sans leur représentant.
18:01Dans cette liste, vous auriez pu rajouter l'incorrect.
18:03C'est aussi l'incorrect.
18:05Je ne suis pas encore prétentieux que ça.
18:06Ça arrivera bientôt.
18:07Je le fais pour vous.
18:09Parlons des libertariens.
18:10Pour votre second édito, Mathieu Bocoté,
18:12c'est une tendance idéologique
18:14qu'on entend de plus en plus souvent parler.
18:16Les libertariens, le terme même, est assez rare en France.
18:20Pourtant, de cette tendance, vous le disiez,
18:22on en parle de plus en plus.
18:24Comment le décoder, le comprendre?
18:26Je note que c'est une tendance à ce point méconnue
18:29que pendant longtemps, en France, on parlait des libertaires.
18:32Or, ce n'est pas du tout la même chose.
18:34Le courant libertarien est un courant d'origine américaine,
18:38peut-on dire.
18:39Certains verront une forme de fondamentalisme
18:40du libéralisme classique.
18:41Mais allons de là des étiquettes.
18:43Le courant libertarien, on en parle beaucoup en ce moment
18:45parce que plusieurs s'en revendiquent.
18:47Il y a Milley en Argentine.
18:49Il y a Musk et toute la mouvance de la droite techno-libertarienne
18:52aux États-Unis dont on parle beaucoup.
18:54L'AFD en Allemagne se réclame de la pensée libertarienne.
18:56Il faut le noter.
18:57Nigel Farage au Royaume-Uni s'en réclame aussi.
19:01Qu'est-ce que c'est?
19:03En un mot, c'est une doctrine qui propose
19:05de sortir fondamentalement de l'étatisme,
19:08du social-étatisme tel qu'on l'a connu,
19:11de renouer avec une société qui traite l'État non plus
19:15comme la solution mais le problème
19:17en restaurant la liberté individuelle,
19:19en rétrécissant le rôle de l'État
19:21parce que l'État est accusé justement
19:23non pas d'assurer la prospérité d'une société
19:27mais de l'encrouter, de l'encrasser bureaucratiquement.
19:30Je donne quelques exemples.
19:31Il y a deux tendances à la pensée libertarienne.
19:33Il y en a beaucoup d'autres.
19:34Il y en a globalement deux.
19:36Une forme de libertarianisme urbain,
19:38un individualisme intégral
19:40qui se présente souvent comme un minarchisme.
19:42Minarchisme, c'est l'anarchie plus un État tout à fait minimal
19:45pour assurer le respect des contraintes de la propriété.
19:47C'est un libertarianisme qui était à la mode
19:49intellectuellement dans les années 90 aux États-Unis.
19:51Il y a une autre tendance libertarienne
19:53qui est probablement la plus efficace politiquement
19:57en ce moment.
19:58C'est ce qu'on appelle le paléolibertarianisme.
20:00Les paléolibertariens, ce sont des libertariens populistes
20:03qui conjuguent leur doctrine, donc moins d'État,
20:06avec un certain nationalisme,
20:08une certaine identité et un conservatisme,
20:10une défense des valeurs traditionnelles.
20:12Et c'est le libertarianisme qui prend politiquement aujourd'hui.
20:15Et pourquoi?
20:16Parce que partout, on voit qu'il y a une faillite de l'État social.
20:19Partout, l'État social crée des problèmes
20:21qu'il prétend ensuite régler, mais ça ne fonctionne pas.
20:23Partout, il y a une crise des finances publiques.
20:25L'État prend toujours de plus en plus d'argent.
20:27Il s'endette toujours davantage
20:29et il règle de moins en moins de problèmes.
20:31Partout, il y a une forme d'obésité bureaucratique
20:33telle des appareils publics
20:36que l'appareil public, en fait, est devenu
20:38une force de paralysie dans nos sociétés.
20:41Il y a un délire dans l'ingénierie sociale
20:43où l'État s'est permis, par exemple,
20:45de vouloir créer un sexe nouveau au-delà de l'homme et de la femme.
20:47Il a fallu que l'État s'y mette
20:49pour décider de créer l'au-delà de l'homme et de la femme,
20:51que l'État décide de fabriquer l'homme nouveau
20:53sous la figure aujourd'hui de l'identité fluide et trans.
20:56Il y a l'exaspération légitime du commun immortel
20:58devant une caste d'ingénieurs sociaux
21:00et de technocrates coupés des réalités.
21:02Il y a l'engourdissement d'une société
21:04sous le poids de la cistana.
21:06Il y a la censure partout.
21:08Il y a la politisation de l'intime.
21:10Donc, plusieurs se disent,
21:12est-ce que l'État est vraiment la solution
21:14ou l'État n'est-il pas le problème?
21:16Afouéra ou non?
21:18Oh, Toto, ne me regardez pas, si vous me permettez.
21:20Bien sûr. Nous sommes tous appelés à devenir libertariens.
21:23Bien sûr que non. Je ne le suis pas moi-même,
21:25je le précise, mais quand même un peu.
21:27C'est-à-dire, je pense qu'on doit intégrer
21:29une part libertarienne dans notre réflexion
21:31sans être libertariens complètement.
21:33Qu'est-ce que ça nous permet de faire?
21:35Ça nous permet justement de sortir de l'étatisme obligatoire
21:37où l'État est la réponse à tout.
21:39Il ne faut que demander si l'État n'est pas de temps en temps
21:41le problème, si la technocratie n'est pas le problème,
21:43si la bureaucratie n'est pas le problème.
21:45Et là, la question qu'on peut se poser, c'est
21:47est-ce que c'est possible en France?
21:49Mais la France, oui, c'est un pays où l'État joue un très grand rôle,
21:51mais c'est aussi un pays qui a connu la révolte fiscale.
21:53C'est un pays qui se révolte contre les normes bruxelloises.
21:55C'est un pays qui en a assez de la technostructure européenne.
21:57C'est un pays qui valorise l'artisan,
21:59qui valorise la responsabilité individuelle,
22:01qui valorise l'enracinement.
22:03De ce point de vue, la France n'est peut-être pas aussi étrangère
22:05qu'on le croit, à la meilleure part
22:07de la philosophie libertarienne.
22:09Je me tourne vers vous, Arthur de Vatrigan.
22:11Est-ce qu'on sort en France comme en Argentine
22:13la tronçonneuse pour les coupes budgétaires?
22:15Est-ce qu'on devient libertariens?
22:17Non, mais comme Mathieu, je ne suis pas libertarien.
22:19Et comme il ne sait pas encore
22:21extrêmement ce qu'il est, on va lui dire.
22:23En fait, vous êtes un poste libéral.
22:25Évidemment, parce qu'il y a
22:27la philosophie libertarienne
22:29qui vient des Etats-Unis, mais on a aussi
22:31une autre philosophie qui prend
22:33du pouvoir aux Etats-Unis, qui sont
22:35les postes libéraux, et dont l'incarnation politique
22:37est le vice-président américain, J. Devence.
22:39Comment on peut résumer son positionnement?
22:41Contrairement aux républicains américains,
22:43il n'est pas libertarien
22:45puisqu'il est conservateur, et contrairement
22:47aux démocrates américains, il n'est pas
22:49étatiste puisqu'il s'approche plus du solidarisme,
22:51si vous voulez. Donc ça se traduit comment?
22:53Le sujet n'est pas que économique,
22:55il est aussi culturel, il est aussi éducatif,
22:57il est aussi moral. Par exemple,
22:59sur l'économie, voilà ce qu'il disait il n'y a pas si longtemps.
23:01« Mes opinions sur les politiques publiques
23:03et sur ce à quoi devrait ressembler un État
23:05optimal correspondent assez bien
23:07à l'enseignement social de l'Église catholique. »
23:09C'est quand même assez loin des libertariens.
23:11Donc, si vous voulez, il rejette le capitalisme sauvage,
23:13il défend la dignité
23:15du travail et de la personne humaine.
23:17Et sur le culturel, il dénonce
23:19et, pour le coup, prend la tronçonneuse
23:21pour découper toutes les vaches sacrées des progressistes,
23:23de droite comme de gauche,
23:25le libre mouvement des personnes liées à l'immigration,
23:27de masse, la mondialisation effrénée,
23:29l'autodéfendement, le règne de l'individu, bref, tout ça.
23:31Et il défend le mot que Mathieu a cité,
23:33l'enracinement, et on ajoutera également
23:35le bien commun. Et c'est en quoi il est révolutionnaire,
23:37et c'est en quoi peut-être
23:39c'est le plus adapté à la philosophie française,
23:41et c'est en quoi il nous enseigne sur ce qui s'est passé en France
23:43depuis 40 ans, à savoir que l'alternante
23:45de droite-gauche n'a été qu'un choix entre deux formes
23:47de progressisme. On revient dans un instant
23:49à la deuxième partie de Face à Mathieu Bocoté,
23:51votre invité, Olivier Seban.
23:53Maintenant que l'hiver, voilà son roman,
23:55il sera question du grand froid
23:57et des libertés qui sont restreintes,
23:59puisqu'on parlera de totalitarisme.
24:01A tout de suite.
24:0519h30 sur CNews, la suite
24:07de Face à Mathieu Bocoté, toujours avec Mathieu, bien sûr,
24:09et Arthur de Vatrigan, nous a rejoints sur le plateau
24:11Olivier Seban, merci d'être avec nous.
24:13Bonsoir Alain. Bonsoir, vous êtes écrivain,
24:15et vous avez écrit Maintenant que l'hiver.
24:17C'est votre nouveau roman.
24:19Mathieu Bocoté, pourquoi avoir
24:21invité Olivier Seban
24:23pour ce roman Maintenant que l'hiver ?
24:25Alors, il arrive que la littérature
24:27soit capable d'exprimer
24:29des tendances lourdes portées par le présent.
24:31En fait, la meilleure littérature dépasse
24:33toujours la meilleure sociologie.
24:35Et dans ce point de vue, dans ce livre,
24:37c'est une capacité de se projeter, en fait,
24:39sur certaines des tendances les plus inquiétantes
24:41de notre temps. Olivier Seban, bonsoir.
24:43Bonsoir, bonsoir Mathieu.
24:45Le titre Maintenant que l'hiver, alors je veux presque
24:47vous lancer sur le mode de l'intrigue, c'est-à-dire
24:49c'est un hiver qui se prolonge, c'est après une pandémie,
24:51c'est après un virus, c'est un monde
24:53où on s'inquiète, il y a des gens qui font du trafic
24:55de viande, c'est un monde où les voitures
24:57thermiques sont interdites, ça pourrait
24:59être notre monde demain, et à tel moment, c'est le monde
25:01de votre roman ? Oui, c'est le monde,
25:03c'est un monde qui est légèrement
25:05décalé avec le nôtre, qui a tous les défauts du nôtre,
25:07un peu amplifié,
25:09et en même temps, c'est un monde,
25:11c'est un monde, comment dirais-je,
25:13qui se...
25:15qui prolonge le nôtre,
25:17qui va un tout petit peu plus loin que le nôtre,
25:19mais qui
25:21dit tous nos défauts,
25:23qui dit une espèce de tentation
25:25totalitaire de la bienveillance,
25:27et surtout ça, et l'hiver
25:29caractérise quelque chose de l'ordre du deuil,
25:31de la perte, alors on sait pas si c'est
25:33un hiver qui va durer éternellement,
25:35mais en tout cas, c'est un hiver qui dit quelque chose
25:37d'une fin
25:39et du linceuil,
25:41de l'ordre du linceul.
25:43Alors c'est un monde où, c'est une des premières scènes,
25:45un de vos personnages a peur de se faire
25:47attraper avec une veste en peau
25:49de mouton, et ça ce n'est plus permis
25:51dans le monde qui est le nôtre, donc on devine,
25:53il est dominé par les écolos, les animalistes,
25:55et ainsi de suite, donc c'est un monde où finalement
25:57l'écologisme est devenu
25:59totalitaire. Oui, c'est-à-dire
26:01que voilà, on n'a plus le droit de manger
26:03de viande parce qu'on sait,
26:05selon une théorie aperçue que
26:07suite au Covid,
26:09ce que je ne donne pas dans le livre,
26:11c'était ce qui avait donné la maladie,
26:13donc on s'en est servi comme prétexte,
26:15et selon
26:17le prétexte de la bienveillance animale aussi,
26:19on interdit tout port de
26:21cuir, etc., tout ce qui peut rappeler
26:23la maltraitance animale.
26:25Et cette vision-là
26:27se confronte par ailleurs
26:29avec cette bienveillance qui se veut
26:31être morale, être bonne,
26:33se confond de l'autre côté à une
26:35violence sociale
26:37très poussée, c'est souvent le cas,
26:39c'est le cas de notre société actuellement, c'est-à-dire qu'on a
26:41d'un côté la bonne
26:43intention
26:45permanente, et de l'autre
26:47côté une violence
26:49sans nom qui s'exerce
26:51et qui est son opposé en fait.
26:53Alors je pense à différents romans, 1984
26:55d'Orwell,
26:57Le meilleur des mondes, on pourra en nommer quelques-uns,
26:59Küssler aussi avec
27:01Les héroïnes infinies, il y a toujours cette idée
27:03finalement de la plus grande vertu peut
27:05accoucher de la plus grande domination
27:07que la société idéale
27:09annonce la société
27:11policière. Est-ce qu'à certains égards
27:13vous reprenez
27:15cette tradition d'inquiétude en littérature ?
27:17Oui nécessairement, j'ai
27:19toujours pensé, c'est quelque chose qui mente,
27:21c'est que le
27:23loup se déguise en agneau,
27:25la question du bien quand
27:27elle est portée en politique d'une manière morale
27:29est toujours extrêmement dangereuse,
27:31elle est glissante, on le voit dans tous les totalitarismes.
27:33Quand vous interrogez le totalitarisme,
27:35il n'est jamais là pour vous dire
27:37on va faire du mal aux gens, on va les empêcher
27:39de penser, on va les contraindre,
27:41on va contraindre leur liberté. Non, c'est pour le plus
27:43grand bien en général que le mal
27:45se déguise toujours de cette forme-là
27:47et donc c'est cette approche-là
27:49que je veux
27:51dénoncer en quelque sorte.
27:53Vous l'avez dit, vous ne mentionnez
27:55pas la pandémie, la Covid,
27:57mais c'est quand même, je ne peux
27:59m'empêcher vous disant
28:01que vous avez vécu l'expérience
28:03Covid à la manière d'une grande
28:05répétition du totalitarisme
28:07de demain. Est-ce que je vous ai bien compris ?
28:09Oui, et je l'ai vécu
28:11d'une étrange manière. J'étais en train d'écrire un roman
28:13sur la peste, que je n'ai pas terminé, que je suis en train
28:15de reprendre, et donc dans une pandémie
28:17terrifiante. Et je me suis retrouvé
28:19à être en panne, à ne plus pouvoir écrire
28:21et à voir cette épidémie
28:23qui est arrivée. Et ce qui m'a le plus
28:25choqué, je crois, c'est qu'on a basculé
28:27d'une manière anthropologique,
28:29c'est-à-dire qu'on est arrivé à un point où on ne pouvait plus
28:31enterrer ces morts. Ça c'est quelque chose
28:33qui pour moi est un début
28:35de décivilisation. Et les mesures
28:37qui ont été prises aussi m'ont frappé,
28:39non pas parce que j'ai eu un jugement immédiatement
28:41idéologique ni quoi que ce soit, mais je me suis dit
28:43tiens, c'est étrange, on est en train de se conformer
28:45à un pays totalitaire comme la Chine
28:47pour mettre
28:49en place des mesures sanitaires.
28:51Il me semble que là,
28:53on n'a pas exercé ce qui est
28:55l'essence même de notre civilisation,
28:57l'essence même de notre réflexion. Pourquoi
28:59nous sommes une démocratie ? Pourquoi nous devons penser
29:01par nous-mêmes ? On a appliqué un modèle qui n'est
29:03pas le nôtre au nom du plus grand bien et de la
29:05protection de l'individu.
29:07Et ça, ça m'a alerté et ça m'a confondu.
29:09Et dans le roman, j'appelle ça la grande épidémie
29:11sous forme d'outrance parce que
29:13quand je comparais entre l'épidémie
29:15de peste à Marseille en 1720,
29:17qui était dévastatrice, et ce qu'on vivait
29:19qui était aussi terrible,
29:21je dois le dire, il y a eu énormément de morts, etc.
29:23Mais il y avait une espèce d'écart
29:25comme ça, quasi,
29:27très outrancier,
29:29qui m'a profondément choqué, en fait.
29:31Alors, vous avez évoqué, et ensuite je passe la parole
29:33à Arthur de Matrigan, vous évoquez le fait qu'il y a
29:35l'exemple chinois, plusieurs l'ont mentionné,
29:37c'est-à-dire s'inspirer de la Chine pour gérer
29:39une société en crise, c'était pas
29:41nécessairement l'inspiration de la meilleure.
29:43Mais pourtant, ce que la crise a révélé, c'est une très
29:45grande docilité de nos sociétés.
29:47Une très grande docilité. Est-ce que cette
29:49docilité qui s'est dévoilée au moment de la pandémie,
29:51vous la voyez encore aujourd'hui, dans une période
29:53qui se veut plus apaisée ?
29:55Ah bien sûr, et je pense qu'elle a toujours existé, qu'elle existe toujours.
29:57La docilité est, moi je pense
29:59qu'elle est accrue, elle est accentuée
30:01maintenant par une forme d'oubli
30:03de la culture, d'une perte
30:05de la culture, parce que dans
30:07le livre, l'hiver est aussi
30:09une métaphore de l'oubli de
30:11la littérature. Il y a une cathédrale
30:13qui est extrêmement présente, qui symbolise
30:15la transcendance et aussi un espèce de surmoi
30:17et quelque chose qui nous dépasse, qui dépasse
30:19notre monde narcissique. Et plus
30:21on est enfermé en nous-mêmes,
30:23c'est ce que disait Tocqueville au fond,
30:25la dérive démocratique, c'est ça, c'est à partir du
30:27moment où on juge
30:29le présent et soi-même
30:31à l'aune de la mesure de son propre nez, et non
30:33plus de sa culture, et non plus des morts qui nous
30:35ont précédés, là on tombe dans quelque chose
30:37de dangereux, et là on tombe dans une docilité.
30:39C'est-à-dire que chacun pense pour soi-même, chacun
30:41a sa propre opinion, mais personne n'est
30:43capable au fond de penser
30:45ensemble, ou d'entendre
30:47au moins des gens qui portent une parole, ce qu'on appelait
30:49intellectuelle, etc.
30:51Et la vocation par essence de l'art, par exemple.
30:53Arthur de Matrigan.
30:55L'un des personnages principaux de votre livre,
30:57c'est la ville.
30:59Une élite barricadée, une banlieue
31:01tenue par la mafia,
31:03et des migrants qui errent.
31:05Ça ressemble quand même furieusement à la France,
31:07parce qu'on pourrait devenir la France dans pas longtemps.
31:09Est-ce que c'est une parabole volontaire ? Comment vous l'avez pensé ?
31:11Ah oui, oui.
31:13Alors j'étais très surpris, parce que des gens m'ont dit
31:15alors on ne veut pas d'un monde comme ça.
31:17Mais si on se déplace un peu,
31:19qu'on va, je ne sais pas, dans certaines
31:21banlieues, dans certaines zones périphériques
31:23de Paris, on voit des gens
31:25qui dorment dans la rue, qui meurent
31:27dans la rue, qui dorment sur des matelas pourris,
31:29qui sont dans des conditions quasi...
31:31On a des conditions quasi dystopiques.
31:33Donc pour moi, c'était
31:35une manière de dire le réel, en fait.
31:37De faire un mix de choses que je voyais.
31:39Cette ville imaginaire,
31:41c'est le pays.
31:43Elle est, comment dire, divisée.
31:45J'ai repris l'idée du cloître.
31:47Mais cette fois, dévoyée. C'est-à-dire que c'est un monde
31:49où on n'a plus le droit de voyager.
31:51Le voyage, c'est quand même la connaissance.
31:53La connaissance voyage.
31:55Et donc ça,
31:57j'ai voulu le mettre
31:59dans le niveau où tout est
32:01parcellarisé, où tout est fermé.
32:03Et voilà, je pense
32:05que les gens qui m'ont parfois dit
32:07on n'aimerait pas vivre dans ce monde-là, ne connaissent pas
32:09les parties de notre
32:11propre pays, où on vit de cette manière-là,
32:13où on a une misère terrible, où on a effectivement des gens
32:15qui meurent dans la rue.
32:17Et
32:19on a un pays, par endroits,
32:21parfois, divisé.
32:23Vous nous dites, nous y sommes déjà, en quelque sorte.
32:25Nous y sommes pas complètement, mais nous y sommes
32:27un peu déjà. Quelque chose me frappe.
32:29Donc deux de vos personnages, qui sont assez
32:31importants, qui sont globalement
32:33des trafiquants de viande.
32:35C'est-à-dire, ils réussissent, ils font
32:37vivre encore ce qui
32:39est interdit.
32:41La viande à l'ancienne, pas la viande animale,
32:43pas la viande réinventée en laboratoire.
32:45Et une image
32:47me vient à l'esprit. En régime totalitaire,
32:49les dissidents sont toujours un peu des voyous.
32:51C'est-à-dire que le régime présente
32:53inévitablement ceux qui se permettent de penser librement,
32:55d'être les gardiens des anciens
32:57plaisirs, comme des voyous,
32:59comme des individus tout à fait dangereux.
33:01Il y a une parenté avec ce qu'on a vécu
33:03en Union soviétique, j'ai l'impression.
33:05Ah, totalement, oui. Et en général, d'ailleurs,
33:07en régime totalitaire, les voyous
33:09deviennent les dirigeants.
33:11C'est-à-dire qu'il peut très bien y avoir,
33:13d'ailleurs, on voit en Italie,
33:15pendant l'Italie fasciste,
33:17la mafia a été complètement étouffée
33:19à un moment donné.
33:21Et tout ce qui est de l'ordre d'une
33:23prohibition morale, là je parle
33:25pour la prohibition de la viande, génère
33:27nécessairement du trafic.
33:29Et la bonne intention
33:31finit toujours par dégénérer. J'avais écrit un roman
33:33sur la prohibition
33:35avant, et c'est toujours
33:37de la bonne intention
33:39de cette idée de l'ange qui fait la bête
33:41qu'on aboutit en général
33:43au pire. Alors oui, effectivement, c'est
33:45tout à fait ça. Et
33:47quand on parle de la... J'ai fait le rapport
33:49entre la chair, c'est-à-dire le trafic de viande
33:51et le trafic
33:53de migrants, c'est aussi parce que quand on dit
33:55on accueille
33:57les gens, mais ce n'est pas un accueil quand
33:59ce sont des mafias qui se chargent de prendre
34:01des gens, de les déplacer au risque
34:03et souvent de les laisser mourir en mer
34:05et de les amener ici, et les laisser mourir
34:07dans la rue, des gens polytraumatisés, des gens
34:09qui ont vécu des guerres, etc.
34:11Arriver ici, ça ne peut que générer de la violence,
34:13ça ne peut que générer du trafic.
34:15Donc, je me méfie
34:17terriblement de l'intention morale
34:19et de ce que Nietzsche appelait de la moraline, en fait.
34:21Alors, le nord-américain
34:23en moi parlera un instant. Votre livre m'a fait
34:25penser à un film des années 90 que j'avais
34:27beaucoup aimé, vous me le pardonnerez, Demolition Men.
34:29C'est avec Sylvester Stallone
34:31et Denzel Wesley Snipes, je crois.
34:33Et c'est le monde, je vous le présente.
34:35À la surface de la cité, un monde polissé,
34:37un monde aseptisé, un monde neutralisé,
34:39un monde où lorsqu'on dit aux jurons,
34:41on a un distributeur de contraventions automatiques
34:43qui s'en occupe. Et dans les sous-sols de la ville,
34:45on mange des burgers aux rats,
34:47on fait rouler de vieilles voitures
34:49et on a le plaisir de la vie dans ces excès,
34:51mais des excès qui ne sont plus que... qui
34:53autodétruisent. J'ai l'impression que l'inquiétude
34:55que vous exprimez dans ce livre,
34:57elle traverse notre monde depuis plusieurs décennies déjà.
34:59Oui, c'est ça,
35:01absolument. Et du coup,
35:03quand on prive les gens
35:05de certains de ces plaisirs,
35:07ça crée une nostalgie qui n'est pas forcément une nostalgie
35:09souhaitable,
35:11mais ça crée un regret
35:13d'un monde passé idéalisé.
35:15En fait, c'est un espèce de contre-coup
35:17qui est complètement artificiel.
35:19Et la couche, je vois ce film,
35:21la couche dont vous parlez, finalement,
35:23de ce monde polissé, c'est un monde aussi
35:25sans culture. C'est un monde
35:27qui a perdu toute capacité de penser contre
35:29soi-même. C'est un monde où simplement
35:31on applique des recettes, qui sont des recettes
35:33totalitaires, et on se conforme.
35:35C'est un monde de conformisme.
35:37De l'autre côté, on a un monde où
35:39on est effectivement dans une espèce de rébellion
35:41où on reprend tout ce qui
35:43a été interdit, et puis en haut, en surface,
35:45on a oublié ce qui faisait l'essentiel.
35:47Dans mon livre, la
35:49cathédrale qui est au centre de ce monde
35:51qui serait à peu près le monde ancien polissé,
35:53le monde muséifié,
35:55est là comme un espèce de rappel,
35:57un espèce de retour du refoulé, en fait.
35:59Arthur de Matriguin.
36:01Vous parlez de l'absence de culture,
36:03et Mathieu parlait de Demolition Man.
36:05Au passage, s'il peut m'expliquer, les coquillages seraient preneurs,
36:07je n'ai toujours pas compris au bout de 20 ans.
36:09Moi, ça m'a fait penser
36:11à aucun roman contemporain français.
36:13Par votre travail de la langue,
36:15par les descriptions magnifiques,
36:17on est très très loin de tout cela,
36:19et comment expliquer justement
36:21cette ovnie,
36:23par rapport au roman contemporain français
36:25qui se rapproche plus,
36:27pour le coup, votre monde, des McCarthy,
36:29des Faulkner, des romans américains,
36:31comment expliquer ce paradoxe ?
36:33Je ne sais pas,
36:35j'imagine que
36:37je m'estime comme un héritier,
36:39je pense que tout le monde doit avoir,
36:41on a tous une dette envers ceux qui sont passés avant nous,
36:43et pour la littérature,
36:45ma dette vient du XIXe siècle français,
36:47et tout ce qui est du tragique grec,
36:49et tout ce qui est du XIXe siècle français
36:51est passé par l'Amérique du Nord.
36:53Faulkner, pour moi,
36:55est un très grand tragédien,
36:57les sud-américains aussi ont repris ce roman-là,
36:59et je m'en sens l'héritier.
37:01Et un écrivain, par exemple,
37:03c'est quelqu'un qui a énormément lu,
37:05et qui choisit sa voie parmi les choses qu'il a lues,
37:07parmi l'héritage qu'il a reçu.
37:09Et il me semble qu'en France,
37:11en tout cas, on a tendance,
37:13dans certains romans,
37:15c'est la même chose finalement,
37:17il y a quelque chose d'assez narcissique,
37:19on se suffit à soi-même,
37:21et quand on est un écrivain, on est hanté.
37:23Et pour moi, être hanté,
37:25c'est reprendre ça.
37:27Et la matière première du roman, c'est la langue.
37:29Donc nous sommes des individus
37:31faits de langage,
37:33et le langage nous constitue,
37:35on peut le penser en psychanalyse,
37:37on peut le penser dans la littérature,
37:39qui est moi mon cheval de bataille,
37:41et sans la langue,
37:43sans le travail du langage,
37:45on ne dit rien de nouveau,
37:47parce que tout a été dit déjà en vérité.
37:49Mais sans la langue et le langage,
37:51on ne dégage pas quelque chose de nouveau.
37:53La poésie, finalement, crée de la métaphysique.
37:55Et pour moi, c'est essentiel.
37:57Et c'est vrai que je me retrouve assez peu
37:59dans les romans contemporains français.
38:01Je vois plus à l'étranger des romanciers
38:03qui ressembleraient à ce que je fais.
38:05Vous évoquez la figure d'un cathédrale,
38:07vous la présentez comme le symbole du monde ancien.
38:09Alors, à tort probablement, je l'ai interprétée autrement.
38:11Nous recevions la semaine dernière, ici, Jean Sevilla.
38:13Et Jean Sevilla qui rappelait
38:15que contre tous les totalitarismes,
38:17le libéralisme, la défense des droits de l'individu,
38:19des libertés bourgeoises, ne suffit jamais.
38:21Que c'est toujours une transcendance
38:23qui permet de tenir tête au totalitarisme
38:25qui vient ou qui est déjà là.
38:27Solzhenitsyn n'était pas qu'un droit de l'homiste
38:29cousin idéologique
38:31des nouveaux philosophes.
38:33C'était un orthodoxe,
38:35c'était un patriote russe.
38:37Quand on fait l'histoire de la dissidence en Europe de l'Est,
38:39elle est marquée, justement, par cette transcendance
38:41sur laquelle il s'appuyait et qui nous porte.
38:43Alors, j'avais eu l'impression, mais vous me corrigerez,
38:45qu'elle se présente aussi dans la cathédrale
38:47comme le symbole d'une transcendance disponible
38:49pour des hommes qui voudraient renaître.
38:51Ah, totalement. C'est vraiment le symbole de la transcendance.
38:53De même par l'architecture de la cathédrale
38:55qui est dans l'évasion.
38:57Et c'est le contre-pied total
38:59de l'individualisme narcissique
39:01et de l'appauvrissement.
39:03C'est-à-dire qu'on ne peut pas
39:07penser que tout va émaner de soi.
39:09On est forcément pénétré
39:11d'une culture,
39:13d'une pensée et d'autres choses.
39:15La vocation de l'être humain, pour moi,
39:17ou de tout artiste et de tout être humain,
39:19c'est de se poser la question
39:21de la raison de son existence et de l'humanité.
39:23C'est de se poser la question du bien
39:25et du mal. C'est de se poser des questions
39:27fondamentales. Et j'ai l'impression que
39:29le totalitarisme, quand il arrive,
39:31réduit l'individu
39:33à ses besoins matériels,
39:35quand il lui procure, parce que ce n'est pas toujours le cas,
39:37et à une doxa.
39:39Et la doxa, ce n'est pas la transcendance.
39:41La doxa, ce n'est pas l'interrogation.
39:43Mais plus encore que la doxa, c'est la capacité
39:45à casser les ressorts moraux d'un homme.
39:47Je donne l'exemple, rappelez-vous, dans 1984.
39:49Un pays, on dit, est en guerre.
39:51Le pays A est en guerre avec le pays B.
39:53Là, le lendemain, on dit non, il n'est pas en guerre avec lui.
39:55Le surlendemain, il redevient en guerre avec lui.
39:57Et chaque fois, on dit à l'individu, tu dois croire
39:59au discours public, même si on dit
40:01une chose un jour, le contraire le lendemain,
40:03et le contraire le surnendemain, tu dois toujours
40:05être d'accord avec la doctrine publique,
40:07il deviendra un parias, en quoi tempéra le prix.
40:09Est-ce qu'on ne voit pas ça aussi dans le monde qui est le nôtre ?
40:11Bien sûr, ça s'appelle l'idéologie.
40:13L'idéologie, pour moi, c'est prendre un cheval,
40:15s'il ne rentre pas dans la remorque,
40:17on lui casse les pattes.
40:19Ça s'appelle l'idéologie. L'idéologie, c'est une croyance
40:21qui ne s'interroge pas, alors que
40:23le propre des grands monothéismes,
40:25le propre du christianisme,
40:27du judaïsme, notamment,
40:29c'est d'interroger.
40:31Un testament, par exemple, dans le christianisme,
40:33c'est un témoignage.
40:35Quand ça s'interroge dans le judaïsme, on ne cesse
40:37de questionner les textes.
40:39Donc, le totalitarisme
40:41fait en sorte
40:43que l'on applique un programme.
40:45Et un programme,
40:47ce n'est pas quelque chose d'humain.
40:49Nous ne sommes pas programmés, nous sommes là pour
40:51prendre des chemins de traverse, mais
40:53avec un héritage, avec ce qu'on pensait avant les morts,
40:55avec la civilisation,
40:57avec tout ce qu'on a pu recevoir.
40:59Ça, pour moi, ça fait partie, par exemple,
41:01de l'identité.
41:03– Justement, à l'image de cette cathédrale,
41:05c'est quand on lit votre livre qui est
41:07assez désespérant, mais en même temps
41:09très contemplatif, on a l'impression
41:11de lire un hommage à la beauté,
41:13à la beauté même déchue, comme cette cathédrale.
41:15Pensez-vous encore que la beauté puisse sauver
41:17le monde ? – Alors, je ne sais pas
41:19si la beauté peut sauver le monde. – Ou est-elle déjà sauvée
41:21le monde, d'ailleurs ? – Est-ce qu'elle a sauvé le monde ?
41:23Sans doute. En tout cas, elle est nécessaire.
41:25C'est un livre, c'est vrai, mélancolique et contemplatif.
41:27Et c'est peut-être la seule chose
41:29qui donne encore de l'espoir
41:31dans le roman. C'est d'abord la beauté,
41:33j'espère en tout cas, la beauté de la langue,
41:35la beauté du monde,
41:37et je pense que c'est
41:39ce qui nous élève. La cathédrale, dans sa beauté,
41:41ce sont des bâtiments qui sont
41:43d'une beauté folle.
41:45Et là, pour questionner.
41:47C'est-à-dire qu'en fait, c'est le questionnement mystique.
41:49Derrière la beauté, qui a-t-il ?
41:51On peut, si on est croyant, se dire
41:53Dieu, on peut
41:55se demander à quoi sert la beauté.
41:57Enfin, il y a quelque chose qui nous ramène à la fois
41:59dans notre petitesse et en même temps,
42:01qui nous élève un peu au-dessus de notre condition.
42:03Donc oui, elle est nécessaire. Elle ne sauvera pas le monde,
42:05ça c'est sûr, mais
42:07elle est nécessaire
42:09à notre civilisation, à la civilisation
42:11dans la manière dont on l'a
42:13construite, en tout cas, en Occident.
42:15Alors, il nous reste une minute environ.
42:17Question toute simple que je pose à tout écrivain.
42:19Vous avez le souci de la langue
42:21qui vous lie en effrappé. Il y a une maîtrise exceptionnelle,
42:23il y a une beauté de la langue.
42:25Vous vivez dans un monde qui dit aux gens, écrivant l'écriture inclusive,
42:27que vous inspire cette écriture inclusive ?
42:29Ça, c'est pas possible.
42:31C'est comme le Volapük,
42:33ou c'est comme toutes ces langues,
42:35le mot m'échappe. L'espéranto ?
42:37L'espéranto, tout.
42:39On va prendre ce qu'on appelle le point Godwin,
42:41mais la langue
42:43allemande a été nazifiée, c'est-à-dire simplifiée
42:45sans la complexité.
42:47La langue, on ne peut pas penser. C'est-à-dire que c'est même
42:49au-delà même de la beauté de la langue.
42:51C'est-à-dire que la langue crée de la pensée.
42:53Et à partir du moment où on la fragmente,
42:55on la casse et on la
42:57ressoute comme on le veut,
42:59on détruit la capacité de penser.
43:01On détruit la violence
43:03que peut porter la langue.
43:05On oblige et on enlève les outils
43:07à l'être humain de s'émanciper,
43:09de penser contre lui-même.
43:11Parce que ça aussi, c'est une chose qu'on a oubliée,
43:13c'est-à-dire que l'idéologie
43:15empêche de penser contre soi-même.
43:17Elle donne une programmatique et de terminer.
43:19Et ça, c'est...
43:21Au fond, je pense que profondément,
43:23c'est révolutionnaire, contrairement à ce qu'on peut imaginer.
43:25Un grand merci, Olivier Seban,
43:27d'être venu sur le plateau de face
43:29à Mathieu Bocoté pour votre roman
43:31Maintenant que l'hiver. Mathieu Bocoté,
43:33Arthur de Vatrigan, bonsoir.
43:35On se retrouve la semaine prochaine.
43:37Et dans un instant, c'est l'heure des proies.