Sophie Bauer, Présidente du Syndicat des Médecins Libéraux. Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles de France a annoncé son souhait de conserver le paiement d'une somme par les patients qui n'ont pas honoré leur rendez-vous. Mais comment mettre en place la « taxe lapin » ?
Regardez L'invité pour tout comprendre avec Yves Calvi du 03 février 2025.
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00:00Yves Calvi et Agnès Bonfillon, RTL Soir.
00:04Il est 18h43, la taxe Lapin, nous vous en parlions il y a quelques mois.
00:08Il s'agit d'une pénalité financière, si vous ne vous présentez pas sans prévenir.
00:12Rendez-vous chez le médecin. Bonsoir Sophie Bauer.
00:14Bonsoir Yves Calvi.
00:16Vous présentez le syndicat des médecins libéraux. Merci beaucoup de nous rejoindre sur RTL.
00:19Cette taxe Lapin est bel et bien conservée dans le nouveau projet de financement de la Sécurité sociale,
00:24mais repoussée s'y nédier.
00:26Tout se fera par décret, autrement dit, on n'est pas beaucoup plus avancé.
00:29Que pense-t-on ce soir chez les médecins libéraux ?
00:32Écoutez, nous nous pensons que c'est quand même une avancée,
00:36parce que malheureusement, nous avons à peu près tout essayé
00:39pour que les patients nous préviennent quand ils ne veulent pas venir.
00:43Et nous nous retrouvons avec systématiquement des rendez-vous non honorés.
00:48Pour vous donner un exemple, aujourd'hui, sur une vingtaine de rendez-vous de consultation,
00:51j'en ai deux qui n'ont pas été honorés.
00:53Et on en est tous là.
00:55Pardonnez-moi, sans coup de fil, sans excuses, sans moindre signe ?
00:59Exactement, sans coup de fil, sans excuses, sans rien.
01:03Et ça fait quand même par an à peu près 27 millions de consultations perdues en France entière.
01:09Donc c'est l'activité de plein temps de 4000 médecins qui est perdue comme ça,
01:13tout simplement parce que les gens ne daignent pas prévenir qu'ils n'auront pas leur rendez-vous.
01:18Donc c'est absolument insupportable.
01:20Ce sont des patients habituels ou des patients qui se disent
01:24« Tiens, je vais trouver un médecin et je prends rendez-vous,
01:26bon ben là je ne peux pas y aller, ce n'est pas grave, de toute façon il ne me verra plus ? »
01:30On a un peu des deux.
01:32Alors c'est vrai que c'est plus souvent des patients qu'on voit pour la première fois.
01:36On pense que ces patients doivent se mettre sur plusieurs listes d'attente de médecins
01:40et puis probablement ne daignent pas se retirer des listes d'attente lorsqu'ils ont un rendez-vous.
01:46On voit ça aussi dans le cadre du SAS maintenant,
01:48donc c'est un phénomène nouveau et qui prend de l'ampleur,
01:51c'est-à-dire que les gens demandent un rendez-vous de consultation dans les 48 heures
01:55puis finalement quand ils parviennent à en avoir un autre plus près,
01:59ils n'annulent pas celui qu'ils ont obtenu par l'intermédiaire du service d'accès aux soins.
02:05Mais ça c'est via les plateformes quand vous nous parlez du SAS ?
02:07Le service SAS c'est quoi très exactement ?
02:09Le service d'accès aux soins en fait c'est via le 15, c'est régulé.
02:16Donc le SAS est régulé et donc c'est des rendez-vous qu'on donne dans les 48 heures
02:23et quand les gens ne viennent pas, ça n'incite pas les médecins évidemment
02:26à se mettre sur cette plateforme pour encourager le système.
02:29Donc on a jusqu'à un quart des rendez-vous par l'intermédiaire du SAS qui sont perdus
02:34et tout ça amplifie encore le phénomène qu'on constatait déjà avant
02:38et qui je vous dis dans les derniers chiffres qu'on avait
02:42était aux alentours quand même de 28 millions de consultations perdues par an
02:46alors qu'on a un problème d'accès aux soins.
02:48Donc il faut régler ce problème.
02:50Avez-vous envisagé de faire laisser un numéro de carte bleue
02:54lors de la prise de rendez-vous pour éventuellement,
02:56si ce n'est en tout cas faire payer directement le tarif habituel,
03:02au minimum retenir un peu d'argent ?
03:05Alors normalement pour le moment la loi ne nous permet pas de retenir de l'argent
03:09si nous ne voyons pas le patient.
03:11Donc c'est pour ça qu'il nous faut une loi
03:14et le code de déontologie ne le permet pas non plus.
03:17C'est pour ça qu'il nous faut un outil législatif.
03:20Mais comment l'envisagez-vous cet outil ?
03:22Est-ce que vous avez une idée de ce qui serait le meilleur dispositif possible ?
03:28Soit il y a une retenue par l'intermédiaire de la caisse d'assurance maladie
03:34et un reversement après de ces fonds aux médecins
03:39soit effectivement ça serait par une empreinte de carte bleue
03:43mais ça éliminerait du dispositif les gens qui n'ont pas de carte bleue
03:48donc ça ne serait pas tout à fait juste.
03:50Alors ce que font nos confrères et confsœurs en Belgique,
03:53ils font carrément payer l'ensemble de la consultation d'avance,
03:56ils ont le droit de le faire ou du moins la moitié de la consultation
03:59et eux comme par hasard n'ont plus le lapin.
04:01Donc c'est quand même de ce modèle-là qu'on souhaite s'inspirer.
04:04On a à peu près tout essayé.
04:06On a fait le rappel du patient la veille, on a fait les SMS,
04:12on a vraiment essayé à peu près tout.
04:15Il se trouve quand même qu'il y a à peu près 10% de consultations
04:20qui se retrouvent comme ça perdues alors qu'on en a besoin pour des patients.
04:26Donc il faut qu'on trouve un système.
04:28Ce matin sur RTL, la ministre déléguée aux comptes publics, Amélie de Montchalin,
04:31assurait que la mesure pourrait profiter au budget de l'État,
04:34rétro-pédalage dans la foulée au ministère de la Santé.
04:36L'objectif n'est pas de récupérer de l'argent, mais de responsabiliser le patient.
04:40Alors on comprend très bien le propos, mais enfin in fine,
04:42c'est quand même la question de l'argent et de l'argent qu'on récupère ou qu'on ne récupère pas,
04:46que ce soit pour le patient ou pour le médecin qui est en cause, non ?
04:50Alors c'est vraiment responsabiliser le patient.
04:53Parce qu'encore une fois, on a toutes essayé d'autres.
04:55Donc comme on voit que ça, ça a fonctionné en budget,
04:57qu'on se dit que logiquement ça devrait fonctionner chez nous.
05:02En principe, lorsqu'on est à peu près bien élevé, M. Calvi,
05:06quand on n'honore pas un rendez-vous, on prévient, c'est la moindre des choses,
05:10on le décale, mais au moins on fait en sorte qu'il puisse être utilisé par quelqu'un d'autre.
05:14Or ce n'est pas le cas.
05:15Nous voyons bien qu'il y a une grande partie de la population qui traite cela,
05:20passez-moi l'expression, par-dessus la jambe.
05:22Donc ils n'en ont rien à faire, entre guillemets.
05:25Et ce sont des rendez-vous qui sont perdus, alors perdus pour les médecins.
05:29Donc nous, effectivement, ça nous fait une perte dans notre activité.
05:32Et c'est pour ça que ça ne serait pas une logique que ce soit les médecins
05:35qui aient cette compensation financière.
05:37Mais c'est surtout et avant tout pour responsabiliser les patients
05:41qu'ils pensent à nous prévenir.
05:42Parce qu'on a des listes d'attente, on a des patients qui veulent être vus rapidement.
05:45On peut même utiliser ces plages quand on sait 2, 3, 4 heures à l'avance
05:49pour prendre en charge des urgences supplémentaires.
05:52Donc c'est vraiment un défaut de nos concitoyens
05:57que de considérer que ce n'est pas grave de ne pas prévenir et de ne pas venir.
06:01C'est une maladie française, d'après vous ?
06:03Ce manque de sérieux, justement, dans la prise de rendez-vous ?
06:07Mais ce qui est sûr, c'est que c'est une maladie qui est en aggravation
06:11et qui existe à peu près depuis une quinzaine d'années maintenant.
06:14Vous nous parliez justement du système mis en place chez nos voisins belges,
06:19payer une partie ou la consultation en intégralité en avance
06:25avant d'aller chez le médecin.
06:27Est-ce que, selon vous, ça pourrait s'appliquer très facilement chez nous ?
06:32Oui, tout à fait, ça pourrait s'appliquer.
06:35Ça pourrait être soit un prélèvement par l'intermédiaire de la caisse,
06:38soit un prélèvement par l'intermédiaire de la carte bleue.
06:40C'est-à-dire que quand les patients sont payés en intégral,
06:44ça pourrait être la caisse qui prélève et qui restitue après les zones ouverts du médecin.
06:52Le système qui fonctionne en Belgique, on ne voit pas pourquoi il ne fonctionnerait pas en France,
06:57à cela près que ça nécessite effectivement de changer la loi et le code de déontologie.
07:02Comment expliquez-vous que se laisser aller se soit imposé ces trente dernières années ?
07:08Je pense qu'il y a le sentiment d'instantanéité.
07:11On a besoin de la consultation tout de suite.
07:13Quand on ne l'a pas tout de suite, finalement on n'en a peut-être pas tant besoin de ça ce jour-là.
07:18On voudrait l'avoir plutôt un autre jour.
07:20Et donc on ne prévient pas, on ne vient pas.
07:23Je crois que ces sentiments d'instantanéité, de besoin immédiat, d'égoïsme aussi, j'ose le dire,
07:30parce que ne pas honorer son rendez-vous,
07:32mais ne pas prévenir pour qu'il soit pris par un autre patient, c'est extrêmement égoïste quand même.
07:37Donc des actes impulsifs, c'est ce que vous êtes en train de nous décrire, et indélicats bien entendu.
07:41Des actes impulsifs, égoïstes.
07:44Je pense qu'il y a quand même une certaine perte du savoir-vivre et de l'éducation.
07:50La taxe Lapin, ça fait un moment qu'on en parle, cette fois vous y croyez ou pas ?
07:55On voudrait bien y croire, parce qu'il y a des choses dans cette LFSS qui ne nous plaisent pas beaucoup.
08:02Donc disons que ça nous consolerait un tout petit peu d'un certain nombre de choses qui sont dans la LFSS et qui ne nous plaisent pas.
08:09Merci beaucoup Sophie Bauer, présidente du syndicat des médecins libéraux,
08:12d'avoir pris la parole aussi précisément sur l'antenne d'RTL ce soir.
08:16Il est 18h52.
08:18Dans un instant, un homme toujours ponctuel, il ne rate aucun rendez-vous et surtout pas avec l'humour.
08:23Marc-Antoine Lebray pour le Breaking News.