Deux ans après son incarcération en Iran, le Français Olivier Grondeau, explique qu'il est "vraiment fatigué". Sa mère Thérèse Grondeau et son ami Tristan Bultiauw relaient sa parole, ce lundi, dans la matinale de France Inter. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-7h50/l-invite-de-7h50-du-lundi-13-janvier-2025-6316276
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00:00Il y a un troisième prisonnier français en Iran dont les antennes de Radio France
00:06ont révélé ce matin le nom et la voix.
00:09Il s'appelle Olivier Grondot, il est incarcéré à la prison d'Evine, à Téhéran.
00:14Sa famille et ses amis se taisent depuis maintenant deux ans et trois mois.
00:19Ils ont décidé de briser le silence.
00:22Thérèse Grondot, bonjour.
00:24Vous êtes la maman d'Olivier, soyez la bienvenue.
00:28Tristan Bultio, bonjour.
00:30Bonjour.
00:31Vous avez 29 ans, vous êtes un bon copain d'Olivier et vous parlez au nom de tous les
00:35amis d'Olivier qui se sont soudés autour de Thérèse et d'Alain, ses parents.
00:40Alain est en coulisses ce matin.
00:42Qui a pris la décision de sortir du secret, de révéler le nom de famille d'Olivier
00:48et de parler aux médias ?
00:49C'est Olivier qui a décidé.
00:51C'est lui.
00:52Et donc, nous l'accompagnons.
00:54Pourquoi il a décidé ça Tristan ?
00:55Il a décidé.
00:56Thérèse, allez-y.
00:57Oui.
00:58Il a décidé.
00:59Il y a eu en fait trois temps.
01:01Il y a eu un premier temps qui était le temps diplomatique pendant lequel on a laissé faire.
01:05Rien ne s'est passé.
01:07Après, il y a eu le temps d'Olivier, de réflexion.
01:10Voilà.
01:11Et puis maintenant, c'est le temps des médias.
01:13Et quand il est arrivé à deux ans de détention, il a dit maintenant, on y va.
01:18Donc on a commencé à préparer, les amis ont préparé et nous aussi, petit à petit,
01:22on s'est préparé à ça.
01:23Tristan ?
01:24Pour lui, c'est une grosse prise de risque, beaucoup de stress.
01:27Il avait très peur de revenir à l'isolement qu'il a très mal vécu en début d'incarcération.
01:31Il en est encore traumatisé.
01:33Mais le désespoir et sa santé déclinant chaque jour, il a pris sur lui de prendre
01:40cette décision de médiatiser son cas, à l'instar des autres otages et des autres
01:44familles d'otages.
01:45Et donc pour lui, comme il le dit dans son témoignage, l'espoir, ça me nuise.
01:51Mais tant qu'il y a de l'espoir, il y a aussi de l'espoir.
01:53Je vous propose d'écouter un extrait du témoignage d'Olivier qui a été enregistré
01:58depuis sa cellule par téléphone.
02:01Vous allez entendre qu'il cite les noms des deux autres otages que l'on connaît déjà.
02:07C'est quoi le retour ? C'est un vieux rêve qui ne suffit plus à donner du sens à cette
02:13veille épuisante.
02:14Je suis vraiment très fatigué.
02:16Vous, qui avez le pouvoir d'influer sur cette affaire, entendez cette vérité.
02:21Les forces de Cécile, les forces de Jacques, les forces d'Olivier s'épuisent dans cet
02:27état d'épuisement.
02:28Il m'est devenu très clair que ma responsabilité, c'est qu'un récit survive.
02:33Vous, votre responsabilité, elle est engagée dans la survie de trois êtres humains.
02:38Qu'est-ce que vous ressentez Thérèse Grondot quand vous entendez la voix d'Olivier ?
02:44Il a 34 ans.
02:46Oui, c'est dur.
02:51C'est dur et on aimerait bien voir la fin de ce cauchemar.
02:57On va raconter l'histoire d'Olivier.
03:00Olivier, il est rentré en Iran avec un touriste, un visa de tourisme.
03:04Il voyageait.
03:05Olivier, c'est un grand voyageur.
03:08Oui, il a fait 90 pays.
03:10Moi, je me rappelle, quand je l'ai connu, c'était au tout début.
03:14Il voulait vraiment parcourir le monde et c'était très important pour lui que ce soit à pied,
03:18que ce soit en stop, parce qu'il voulait rencontrer les gens, parce qu'il voulait rencontrer les lieux.
03:22Il voulait éprouver sous la semelle les chemins qui déroulaient.
03:25Et du coup, pour nous, c'est vraiment une source d'inspiration.
03:29Il nous a vraiment appris qu'on pouvait décider de la vie en ses propres termes.
03:33Et pour nous, c'est vraiment une insulte à ce qu'il est que de l'obliger à vivre.
03:38Que de l'enfermer.
03:39C'est ça, tout à fait.
03:40Et puis, Olivier, c'est quelqu'un qui a une vie intérieure extrêmement riche, Thérèse.
03:47C'est un fou de littérature.
03:50C'est un fou de poésie.
03:52Vous m'avez raconté que quand il était en garde à vue, il faut savoir qu'Olivier,
03:56quand il a été arrêté le 12 octobre 2022, il a vécu 72 jours de garde à vue.
04:0472 jours.
04:05En France, c'est 72 heures.
04:07Pendant lesquelles on n'a eu absolument aucune nouvelle.
04:11Puisque les Iraniens n'ont pas contacté l'ambassade contre toutes les obligations internationales, etc.
04:18Ils ont normalement une heure pour prévenir l'ambassade.
04:21C'est au bout de cinq semaines, de dix semaines pardon, qu'ils ont contacté l'ambassade.
04:29Donc nous, on a été prévenus en même temps.
04:31Vous m'avez raconté que sur les murs de sa cellule, il a écrit des poèmes de Nerval.
04:37Oui.
04:39Donc, Olivier et les mots, c'est une grande histoire d'amour.
04:45Oui, tout à fait.
04:47Sans les livres, sans la poésie qu'il écrit en prison, il serait devenu fou.
04:53Il nous le dit quand on l'a au téléphone.
04:56Sans les mots, son esprit ne tiendrait pas.
05:00C'est un grand poète.
05:01Il est aussi passionné de poésie persane.
05:03Parce que l'Iran, c'est un pays qu'il aimait beaucoup.
05:05Il n'y était pas par hasard.
05:06Il est sur la route de l'Inde, son deuxième pays de cœur.
05:12Et puis, Olivier, c'est un ex-champion de Scrabble.
05:15Oui.
05:16Alors Thérèse, qui a appris à jouer au Scrabble à Olivier ?
05:19En fait, il a appris avec nous.
05:22Moi, je jouais avec ma maman.
05:24Et il a appris avec nous.
05:26Comme ça, tout de suite.
05:27Il a tout de suite enclenché le jeu des adultes.
05:30Et il a adoré ça.
05:32Il a demandé à faire partie d'un club.
05:34Et c'était lancé.
05:35Alors là, il y a une pétition que nous mettons en ligne.
05:37Sur le site de France Inter.
05:39Sur le site de La Matinale.
05:40Une pétition qui appelle à l'aide.
05:42Qui demande la libération urgente des trois otages français.
05:47Il y a Cécile Koller.
05:48Il y a Jacques Paris.
05:49Et on l'entend dans le message d'Olivier.
05:52Il parle d'eux.
05:53Il lit son sort à eux.
05:55Comment ça se passe en coulisses entre les trois familles de ces trois français retenus à Teheran ?
06:02Mais en fait, on est en contact.
06:04On est en contact.
06:06On s'est vu la semaine dernière.
06:08Même avec les familles des ex-otages.
06:11Ah bon ?
06:12Oui.
06:13De ceux qui sont déjà rentrés ?
06:14Oui.
06:15Parce qu'en fait, les familles savent très bien.
06:17Et les ex-otages aussi.
06:19Quelque part, ils sont encore là-bas.
06:21Donc il y a des français.
06:22Ils savent ce qu'ils vivent.
06:24Et donc, ils sont complètement avec eux.
06:26Donc Louis Arnault, par exemple, qui a été libéré au mois de juin.
06:29Benjamin Brière aussi.
06:30C'est ça.
06:31Voilà.
06:32Vous vous parlez souvent.
06:33Et eux, ils s'impliquent dans le soutien d'Olivier, de Jacques et de Cécile.
06:39Tristan ?
06:40Oui, tout à fait.
06:41Ils nous aident beaucoup.
06:42J'étais encore au téléphone avec Louis hier.
06:44Il m'a encouragé pour notre passage média.
06:47Il était très content qu'on arrive à déclencher tout ça.
06:50Et on vous remercie aussi de nous accueillir.
06:52Quand est-ce que vous avez senti que l'état d'Olivier commençait à basculer ?
06:58Parce qu'il le dit dans son message.
07:00Je m'épuise.
07:01Je suis à bout de force.
07:02Thérèse ?
07:03En fait, c'est un peu en dansie.
07:06Par moments, ça va très bien.
07:08Autant que ça peut aller très bien.
07:11Et puis après, ça va moins bien.
07:13On le sent nettement.
07:14Et puis là, maintenant, ça va moins bien vraiment.
07:17Ça va moins bien psychologiquement ?
07:19Ça va moins bien physiquement ?
07:20Psychologiquement.
07:21C'est vrai ?
07:22Oui.
07:23Pour moi, c'est l'été dernier où ça a basculé.
07:25L'été dernier, c'était très très dur.
07:27Le moral et l'injustice qu'il subissait.
07:30Parce qu'Olivier, c'est quelqu'un qui a un grand sens de la justice.
07:33Pour lui, c'était inconcevable que c'était un malentendu.
07:37Il était tellement innocent qu'il s'est dit
07:39« C'est un malentendu, je vais me faire libérer ».
07:41D'ailleurs, il a refusé de signer les faux aveux.
07:43Et d'ailleurs, on l'a menacé, on l'a intimidé, on l'a bousculé.
07:47Pour ça, il a refusé de signer.
07:49Il s'est dit innocent de tout ce qu'on lui reproche.
07:52Il a été condamné à 5 ans pour complot contre la République islamique.
07:56C'est ça ?
07:57Oui, c'est complètement ridicule.
07:58Le dossier est vide.
07:59Il était à son auberge de jeunesse et il s'est fait kidnapper au milieu de son quotidien.
08:02Il préparait un voyage pour ses parents.
08:04Bien sûr, il était inquiet.
08:05Des troubles à la capitale, à l'époque.
08:08Il s'apprêtait du coup à...
08:10Il se posait la question de partir du pays.
08:12Et la police ne lui a pas laissé le temps.
08:15Il s'est fait cueillir dans sa chambre.
08:16Il est en train de se raser.
08:17Alors, tout le monde peut signer cette pétition.
08:19Elle est sur le site de France Inter.
08:21Thérèse, qu'est-ce que vous attendez aujourd'hui ?
08:24Qu'est-ce que vous attendez des autorités françaises aujourd'hui ?
08:27Mon Dieu, la libération.
08:29Sa libération.
08:31Merci à tous les deux.
08:33Et merci Sonia De Villers.
08:35Il est 7h58.