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Véronique Jacquier s’exprime sur l’accord de 1968 et sur ce que cela révèle sur la France : «Cette non-remise en cause de l'accord illustre une nouvelle forme de faiblesse et de défaite française».

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Transcription
00:00On peut donc renégocier un traité international.
00:03On a le droit quand même d'avoir une main mise sur sa politique étrangère.
00:07On peut le faire en fonction de la nature du traité.
00:10Donc on peut très bien dire, nous on a envie de renégocier quelque chose
00:14qui traite de la libre circulation des personnes
00:17et qui influe sur notre politique migratoire.
00:20On a le droit de le faire, on peut le faire.
00:23Mais selon notre constitution, seul le président de la République
00:27peut signer, ratifier et dénoncer un traité international.
00:32Donc seul Bruno Rotailleau ne peut rien faire.
00:34En revanche, Emmanuel Macron peut tout faire.
00:38Il peut remettre en cause cet accord d'un autre âge,
00:40ne serait-ce que pour juguler, bien entendu, la pression migratoire dans notre pays
00:45et ne serait-ce aussi, bien entendu, de le faire comme mesure de rétorsion
00:49après l'emprisonnement de Boilel Sansalle.
00:51Alors dernier point pour bien comprendre à quel point
00:54c'est un traitement de faveur et c'est un régime de faveur aussi
00:59dont bénéficient tous les Algériens.
01:00Et bien non seulement il y a cet accord de 1968,
01:04toujours en vigueur dans notre pays,
01:06mais il y a aussi un échange de lettres qui date de 2007
01:10entre Bernard Kouchner, qui était ministre des Affaires étrangères de l'époque,
01:14et son homologue algérien,
01:16pour faire en sorte que les titulaires de passeports diplomatiques algériens,
01:20donc c'est-à-dire toute la nomenclature algérienne,
01:23n'ait pas besoin de venir en France pour se faire soigner
01:26ou pour gérer leurs affaires financières.
01:28Voilà où on en est.
01:29Est-ce que Bruno Rotaillot n'essaye pas finalement de se servir du levier des visas
01:32pour tenter de juguler toutes les persémissivités justement liées à cet accord ?
01:37Alors c'est vrai que c'est un levier qui est intéressant et qui est important.
01:40Pourquoi ? Parce qu'on se rend compte que c'est à géométrie variable
01:43cette délivrance des visas.
01:44Il y en avait par exemple 210 000 en 2012,
01:47413 000 cinq ans plus tard.
01:50C'est presque deux fois plus.
01:52Donc on se rend compte qu'on peut jouer en appliquant des règles plus restrictives.
01:56Mais là encore, c'est ubuesque,
01:58parce qu'on va toujours se heurter à l'accord de 1968.
02:03Car si un consulat refuse un visa à un ressortissant algérien,
02:08eh bien ce ressortissant peut tout simplement se retourner
02:10vers un autre pays européen pour avoir le fameux visa Schengen.
02:14Et hop, il arrive ainsi en France,
02:17et il s'établit chez nous sans que nous ayons notre mot à dire.
02:20Donc là encore, on marche sur la tête.
02:22Un mot aussi quand même des visas consulaires qui sont nécessaires à l'exécution,
02:25vous savez, des fameuses OQTF.
02:27L'Algérie n'en délivre que 7%.
02:30Or, quand Gérald Darmanin était ministre de l'Intérieur,
02:33deux nouveaux consulats français ont été ouverts.
02:36Bon, ça pourquoi pas ?
02:37Mais ils ont été ouverts sans contrepartie.
02:40L'Algérie compte 20 consulats, la France seulement 3 en Algérie.
02:45Donc on se rend compte qu'il y a des leviers pour changer la donne
02:49par rapport à l'accord de 1968.
02:51Il y a des leviers aussi pour montrer à l'Algérie
02:54que la France veut agir pour la libération de Boëllel-Sensal.
02:57On peut faire quelque chose.
02:59Il y a des leviers, mais en fait,
03:00il n'y a pas de volonté politique de les utiliser.
03:04Pourquoi ? Eh bien, sans doute parce qu'il ne s'agit pas que d'une affaire
03:07de politique internationale, de politique étrangère entre deux pays.
03:12Il s'agit tout bonnement d'une affaire de politique intérieure.
03:15On a peur, disons les choses, de la réaction de centaines,
03:19de milliers d'Algériens sur le sol français.
03:22Voilà pourquoi cette non remise en cause de cet accord
03:25illustre, selon moi, une nouvelle forme de faiblesse et de défaite française.

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