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00:00On revient sur les conditions dans lesquelles François Bayrou a été nommé à Madignon.
00:04On a beaucoup raconté le bras de fer qu'il a opposé au Président de la République.
00:08Certains décrivent aujourd'hui le chef de l'État comme isolé,
00:11comme ayant un peu perdu la main sur son deuxième mandat.
00:15Si vous deviez le conseiller, le Président de la République,
00:18qu'est-ce que vous lui diriez aujourd'hui pour justement tenter peut-être de reprendre un peu la main sur ce quinquennat ?
00:24Alors d'abord je me garderais bien d'être le conseiller d'Emmanuel Macron.
00:27Je pense que ses conseillers ont beaucoup de difficultés à le conseiller
00:30parce que c'est quelqu'un qui décide par lui-même en fonction,
00:34sans le voir gouverner, de ses propres intuitions.
00:37Donc je crois qu'il ne reprendra pas la main.
00:41Voilà, je pense qu'il ne reprendra pas la main.
00:44Tout ce qu'il peut faire, c'est le mieux possible,
00:46exercer les prérogatives qui sont les siennes dans la situation actuelle.
00:51Vous savez, par exemple, on paye aujourd'hui le fait que,
00:55le Nouveau Front Populaire étant arrivé en tête en nombre de sièges,
00:58il n'ait pas nommé tout de suite après les élections un candidat venu de la rang,
01:05qui aurait fait un gouvernement renversé par l'Assemblée sans doute très très vite,
01:11mais qui aurait levé cette hypothèque.
01:13On ne peut pas l'avoir fait maintenant.
01:15On est toujours en face de cette critique d'illégitimité.
01:20L'illégitimité qui se pose pour tous les gouvernements qui se succèdent,
01:24puisqu'ils n'ont pas la légitimité des urnes, ils n'ont pas de mandat,
01:27ils ne peuvent pas continuer de se comporter comme des gouvernements comme les autres.
01:32La légitimité, il faut la construire avec l'opinion.
01:36C'est difficile et c'est plus long, plus compliqué que la légitimité du vote.
01:43Même celle-ci ne dure pas très longtemps face aux épreuves que les gouvernements rencontrent
01:50dans la situation actuelle de notre société et du monde.
01:53Mais je crois qu'aujourd'hui il faut qu'ils laissent le gouvernement gouverner,
01:59que la question elle est entre les mains du gouvernement, de l'Assemblée,
02:03d'un président qui ne doit pas gêner l'action gouvernementale en rien,
02:11même pas par ses déclarations.
02:13Et quand certains estiment qu'il doit partir, qu'il doit quitter l'Elysée,
02:17qu'est-ce que vous en pensez ?
02:18Je pense qu'il ne partira que sous la pression.
02:21Et que s'il partait sous la pression, ça en serait fini de la fonction présidentielle dans la Vème République.
02:29En fait, tout bout à bout et ça en couronnement, ce serait la fin de la Vème République.
02:35Ce serait exactement ce qui s'est passé au début de la IIIème République.
02:38Vous savez, les lois constitutionnelles de la IIIème République donnaient des pouvoirs considérables
02:42au président de la République, y compris le pouvoir de dissoudre.
02:44Et puis il y a eu le 16 mai 1877, qui arrive au terme d'une crise institutionnelle,
02:52parce qu'il y a un président de la République de droite, le maréchal de MacMahon,
02:56et puis une chambre qui est élue très à gauche.
03:00Et on connaît le mot de Gambetta, le président doit se soumettre ou se démettre,
03:04et ça finit par la défaite du président.
03:07Et après, il n'y a plus eu de président de la République qui puisse faire autre chose
03:11qu'inaugurer les chrysanthèmes pendant toute la IIIème République.
03:14Il ne faudrait pas que ça arrive.
03:18Maintenant, la pression peut devenir très très forte.
03:21Si le toboggan ministériel s'engage, comme il s'est engagé sous la IVème, on est au même...
03:27Est-ce que François Bayrou peut être le dernier Premier ministre d'Emmanuel Macron ?
03:29Est-ce que la chute éventuelle de François Bayrou peut entraîner le président ?
03:31Tout est possible.
03:33Mais honnêtement, je ne le souhaite pas.
03:35Ça n'est pas une solution.
03:37Je sais bien que beaucoup de gens veulent mettre les institutions de la Vème République par terre.
03:40Mais pour quoi faire ? Pour revenir à la IVème, à la IIIème ?
03:43Pour revenir à toutes les républiques qui ont fini dans le désastre et dans le drame ?
03:48Dans la situation actuelle, il faut préserver ces institutions.
03:52Mais cela peut arriver.
03:54La pression peut devenir très forte, parce qu'il n'est pas exclu que ce gouvernement,
03:58et puis même d'autres qui suivraient, soient engagés sur ce toboggan.
04:02Sur ce toboggan, on est déjà, en deux ans, à une moyenne qui est celle de la IVème République.
04:07La IVème République, c'est un gouvernement en moyenne de six mois, quand on fait le compte.
04:10Et là, on en est au IVème gouvernement en deux ans.