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00:00Est-ce qu'il y a une conscience populaire de la crise des finances publiques où tout cela semble immatériel ou très lointain ?
00:05Alors, les Français entendent et constatent la dégradation du déficit.
00:13Ce sujet est quand même martelé assez souvent actuellement, les fameux 3 000 milliards de dettes.
00:20Pour autant, et donc ça les inquiète, ce qui les inquiète à court terme, c'est pas l'effondrement de nos finances publiques,
00:25c'est la potion amère qui va être appliquée, à savoir qui va devoir régler une partie de cette facture ou de cette ardoise.
00:34Vous vous souvenez, sous le gouvernement précédent, on parlait d'un effort de 60 milliards qui devait être réparti entre des coupes budgétaires
00:44et des impôts supplémentaires. Donc ça, c'est ce que les Français ont en tête, en disant où est-ce que ça va couper et qui va devoir mettre la main à la poche
00:51pour essayer de juguler quelque peu ces déficits. Sur un effondrement à long terme de notre système...
00:58Ou à moyen terme, ou à court terme.
01:00Même à moyen et à court terme, une majorité de Français ne s'inscrit pas dans ce schéma-là.
01:06Nous avons traversé deux crises de nature très différente ces dernières années qui ont brouillé énormément de repères macroéconomiques.
01:14La première, c'était la crise importée des États-Unis, si je puis dire, après les subprimes, donc la crise de la dette souveraine en 2008-2009.
01:21Voilà, et puis en 2010 derrière, où les finances publiques avaient déjà été puissamment mobilisées pour stabiliser le système bancaire.
01:31Et les Français s'étaient dit, on a traversé cette crise qui a été douloureuse, mais la puissance publique a pu mobiliser des milliards de manière massive.
01:41Et puis le deuxième moment où nous avons vécu ça, c'était à l'occasion de la crise de Covid et le fameux quoi qu'il en coûte.
01:48Et tout ça a installé dans l'opinion publique l'idée que des marges de manœuvre budgétaires pouvaient être dégagées de manière massive quand on en avait besoin.
02:00Derrière la crise Covid, nous avons eu la mise en place du bouclier tarifaire sur l'énergie, par exemple.
02:06Donc les Français se disent que c'est infini ?
02:08Que tous ceux qui disent que tout ça aura une fin ont pour l'instant été démentis.
02:15Et on a, vous vous souvenez, au moment de la crise de la dette souveraine, une ligne Maginot budgétaire qu'il fallait absolument défendre, c'était la note AAA de la France.
02:24Depuis, le pays a été plusieurs fois dégradé. Les Français regardent leurs chaussures, ils constatent que le sol ne s'est pas ouvert sous leurs pieds.
02:31Donc ils se disent que ça peut continuer en fait.
02:34Et d'aucuns ont une vision un peu plus stratégique encore en disant qu'il ne pourra jamais nous arriver ce qu'il est arrivé à la Grèce,
02:42parce que, comme on dit des grandes banques américaines, elles sont too big to fail.
02:46C'est-à-dire qu'on est trop gros pour chuter et donc la zone euro ne peut pas se permettre d'arriver dans cette situation-là.
02:53D'aucuns, plutôt dans les états-majors politiques, appliquent sans doute, vous savez, une fameuse phrase qui avait été prononcée par le ministre de l'économie américain de Nixon
03:07après que les Américains aient désindexé le dollar sur l'or, qu'il n'y avait plus d'état long or, et donc le dollar s'est mis à flotter, comme on dit dans le jargon.
03:18Donc ça avait déstabilisé toutes les économies occidentales et ce monsieur était venu rencontrer ses homologues européens et leur avait dit
03:25« le dollar c'est notre monnaie mais c'est devenu votre problème ».
03:28Et donc je pense qu'aujourd'hui un certain nombre de responsables politiques français se comportent de la même manière vis-à-vis de leur partenaire de la zone euro en disant
03:37« l'euro c'est notre monnaie mais c'est votre problème ».
03:39C'est-à-dire qu'on a un droit de tirage et tout ça s'installe dans l'imaginaire collectif.
03:44Bien sûr il y a de l'inquiétude quand on vous dit qu'il y a 3000 milliards de dettes, on se dit que ça peut mal finir, mais jusqu'à présent ça ne s'est jamais totalement matérialisé.