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🇬🇦 "C'est la première fois en 56 ans que les Gabonais se réveillent avec un autre nom à la tête de leur pays qu'un Bongo Ondimba. C'est exceptionnel".

Pour Brut, Laurence Ndong, présidente de "Debout peuple libre" et ancienne porte-parole de Jean Ping -candidat malheureux à la présidentielle de 2016- analyse le coup d'État au Gabon.

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Transcription
00:00Chaque peuple a son seuil de tolérance.
00:02On pense souvent que le peuple est pacifique
00:04et les Gabonais ont eu cette réputation
00:06d'être un peuple pacifique et parfois même pacifiste.
00:09On a pensé qu'on pouvait piétiner,
00:11écraser à chaque fois.
00:12Ils volent les élections, le peuple manifeste.
00:14On tue, ça se calme.
00:15On aura beau étouffer un peuple,
00:17tout ou tard, il finira par réclamer sa liberté
00:22et se battre pour l'obtenir.
00:23Donc ça fait des années que les Gabonais se battent
00:25et il fallait à un moment que ce combat aboutisse.
00:28Et il l'a abouti par l'armée qui a pris conscience
00:32et qui a décidé cette fois de prendre ses responsabilités
00:35et de se mettre du côté du peuple et de la nation
00:38pour éviter encore un bain de sang
00:40et pour ne plus soutenir un régime
00:42qui en réalité accable tout le pays.
00:44Est-ce que vous réalisez qu'aujourd'hui,
00:46c'est la première fois en 56 ans
00:48que les Gabonais se réveillent avec un autre nom
00:50à la tête de leur pays qu'un bongo ondimba ?
00:53C'est exceptionnel.
00:54Quels sont aujourd'hui concrètement
00:56les éléments qui ont motivé ce coup d'État ?
00:58Le Gabon était aux mains d'une seule famille,
01:01la famille bongo ondimba, depuis 56 ans.
01:04La population ne vit pas conformément
01:07au niveau de revenu du pays.
01:09Et donc il y a une oligarchie qui s'est accaparée
01:12la richesse du pays.
01:13Le niveau de vie des populations s'est tellement dégradé
01:17que les populations ont jeté leur vatou
01:20dans l'élection présidentielle de 2023
01:22en se disant, nous allons voter massivement
01:25contre ce régime en espérant qu'il ne tripotera pas
01:29l'élection et qu'il ne se proclamera pas vainqueur
01:32comme ça a été les autres fois.
01:34Il y avait un climat de lourdeur, de pesanteur
01:37qui était tel que le pays était au bord de l'implosion.
01:40Et donc l'élection a eu lieu le 26 août 2023.
01:43Une élection à partir de laquelle
01:45le pays a été coupé du monde.
01:47La veille du vote, le vendredi 25,
01:49les frontières ont été fermées.
01:50Un couvre-feu a été décrété.
01:52Et le jour même du vote, Internet a été coupé.
01:55Donc rien de cela n'augurait une bonne ambiance.
01:58Et quand on est dans la transparence,
02:00dans des élections libres et transparentes,
02:01on ne se coupe pas à ce point du reste du monde.
02:04Et donc la situation devenait insoutenable.
02:07Et donc plutôt que d'avoir des manifestations réprimées,
02:10l'armée a choisi cette fois de se mettre du côté
02:13du peuple et de la nation en déposant le régime
02:17qui était en place depuis 56 ans.
02:20Et on a d'ailleurs vu les liesses populaires
02:22dans toute la ville depuis hier.
02:24On a beau être fondamentalement contre les coups d'État,
02:28mais ce coup d'État-là, les Gabonais le considèrent
02:31comme un acte de salubrité publique
02:33parce qu'il a évité un bain de sang
02:35et il permet surtout aux Gabonais de souffler.
02:38Et chose particulière qu'on a vue
02:40dans ce qui s'est passé au Gabon,
02:42c'est que ce n'est pas un seul corps d'armée
02:44qui a perpétré, qui a déposé le régime Bongo.
02:48On a vu à la télé l'ensemble des corps d'armée
02:51qui se sont mis ensemble pour dire
02:53trop, c'est trop, le régime Ali Bongo a assez fait.
02:56Ali Bongo, pour son deuxième septennat,
02:59n'a même pas dirigé le pays.
03:01En 2018, il a été victime d'un AVC.
03:03Le mandat a commencé en 2016.
03:05De 2016 à 2018, la crise postélectorale
03:07ne s'était pas arrêtée.
03:09Il y avait des grèves en permanence, etc.
03:11En 2018, il fait un AVC, il disparaît.
03:13Et lui-même avoue, en 2023,
03:15que pendant 5 ans, il n'a pas dirigé le pays.
03:17Donc, qui dirigeait le pays ?
03:19Qui prenait les décisions ?
03:21Le pays n'a fait que sombrer, sombrer, sombrer.
03:23Et toute la population a été victime
03:25de cette malgouvernance.
03:27Les militaires y compris.
03:28Est-ce que la succession de coups d'État
03:30en Afrique de l'Ouest a pu motiver
03:32cette révolte au Gabon ?
03:33Partout où l'on a des coups d'État en ce moment,
03:35c'est le non-respect de la volonté des peuples.
03:37Le non-respect de la liberté
03:39et de la souveraineté des peuples.
03:41En 2016, l'élection au Gabon
03:43a été entachée de tellement de fraudes.
03:45Cette fraude a été largement documentée
03:47par la mission d'observation des élections
03:49de l'Union Européenne.
03:51C'est passé sous silence.
03:53Et là, Ali Bongo s'apprêtait à perpétrer
03:55un troisième coup d'État électoral.
03:57Et là encore, tout le monde se serait tué.
03:59Mais ceux qui se taisent devant les coups d'État
04:01électoraux, les coups d'État institutionnels
04:03et les coups d'État constitutionnels
04:05sont les premiers
04:07à s'élever
04:09contre les coups d'État militaires.
04:11Mais un coup d'État reste un coup d'État.
04:13Et surtout que dans le cas du Gabon,
04:15ce coup d'État est salutaire.
04:17Il est salutaire parce qu'il a empêché
04:19à un despote, à un dictateur
04:21de violer encore une fois
04:23la volonté du peuple et de s'installer
04:25au pouvoir de manière indue.
04:27Et donc, on doit être cohérent.
04:29Si on est contre les coups d'État,
04:31on est contre tous les coups d'État.
04:33Maintenant, il faut dire que
04:35il faut que les choses aillent dans le bon sens.
04:37Que l'armée ne s'éternise pas au pouvoir.
04:39Au Gabon, ils se sont appelés
04:41Comité pour la transition
04:43et la restauration des institutions.
04:45Oui, nos institutions ont besoin d'être restaurées
04:47parce qu'elles étaient taillées sur mesure
04:49pour le maintien de la dictature.
04:51Donc, les bongos ont été déposés
04:53et le Gabon doit continuer d'exister.
04:55Et avec
04:57la volonté des Gabonais
04:59pour le bien des Gabonais.
05:01Donc, la communauté internationale qui a laissé
05:03les bongos faire, qui sait-tu,
05:05ne vienne pas entraver ce processus
05:07que les Gabonais considèrent pour le moment
05:09comme étant salutaire pour eux.
05:11Brice Oliguengema, qui est donc proclamé
05:13nouvel homme fort du Gabon, après le putsch,
05:15on le sait, il était proche de Omar Bongo.
05:17Puis, il a été écarté par Ali Bongo.
05:19Son retour pourrait être considéré
05:21comme une vengeance ?
05:23Comme ça pourrait ne pas. Je ne peux pas parler au nom de
05:25Brice Oliguengema parce que, personnellement,
05:27je ne le connais pas.
05:29Mais, il faut
05:31lui accorder le bénéfice du doute.
05:33Parce que, jusqu'à avant-hier,
05:35personne ne pensait qu'Oliguengema
05:37pouvait déposer Ali Bongo
05:39et refuser d'ouvrir le feu
05:41sur des Gabonais. Il a été désigné
05:43président du comité
05:45de transition à partir d'une réunion
05:47de l'ensemble des généraux, de tout corps
05:49confondu. Donc, que cette armée
05:51se soit mise aux côtés du peuple, pour l'instant,
05:53c'est ce que nous saluons.
05:55Et nous voulons leur accorder le bénéfice
05:57du doute parce qu'ils ont déjà fait ce à quoi nous ne nous
05:59attendions pas. Et ils peuvent encore
06:01nous surprendre agréablement
06:03en permettant au pays, véritablement,
06:05de retrouver des institutions fortes.
06:17Alors, c'est toute la question qui se pose aujourd'hui.
06:19Il faut voir que ces élections ont eu lieu
06:21dans quel contexte ? Il y a eu tellement
06:23d'irrégularités que
06:25cette élection,
06:27oui, elle s'est terminée, mais elle était
06:29très irrégulière. Et au comble de tout,
06:31Ali Bongo se proclame vainqueur
06:33en inversant les résultats. Donc,
06:35Ali Bongo vole l'élection
06:37au candidat de l'opposition
06:39et les militaires déposent
06:41Ali Bongo. Et en déposant
06:43Ali Bongo, les militaires ont dissous
06:45toutes les institutions.
06:47Donc, qui va proclamer l'élection
06:49présidentielle ? Devant qui
06:51le candidat élu va-t-il
06:53prêter serment ? Donc, il y a
06:55besoin de réorganiser tout ça
06:57pour que le pays
06:59soit remis sur de bons rails.

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