Xerfi Canal a reçu Guillaume Biot Paquerot, professeur associé à Burgundy School of Business et Vice-président de l’Association Information et Management (AIM), pour parler des technologies latentes.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
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00:00Bonjour Guillaume Biopacro.
00:10Bonjour Jean-Philippe Denis.
00:11Guillaume Biopacro, vous êtes professeur associé à Burgundy School of Business.
00:14Tout à fait.
00:15Vous êtes vice-président de l'AIM, l'Association Information et Management,
00:18qui est l'association académique de référence dans le domaine des systèmes d'information.
00:21Tout à fait.
00:21Inversion du domaine de l'adoption, les technologies latentes.
00:26Article que vous avez publié dans Management and Data Science,
00:29avec Marc Bidan, Université de Nantes, habitué de ce plateau,
00:33Mathieu-Claude Chaboud, Burgundy School of Business,
00:37et Franck Meylens, Burgundy School of Business.
00:39Tout à fait.
00:40Alors, qu'est-ce qu'il faut entendre par ces fameuses technologies latentes
00:44et en quoi elles constituent une inversion du domaine de l'adoption ?
00:48C'était quoi le modèle ?
00:49S'il y a une inversion, c'est qu'il y avait un modèle de l'adoption.
00:52Tout à fait.
00:53Le modèle de l'adoption, on le retrouve dans la littérature
00:57des systèmes d'information de façon très classique,
01:01où on va mettre à disposition un bien, un service
01:07qui aura été validé en amont par un producteur quelconque
01:13à destination d'utilisateurs ou clients.
01:16Alors, on a des cas particuliers sur ce qu'on appelle les biens club, notamment,
01:21où il va falloir qu'on ait un grand nombre d'utilisateurs potentiels
01:23pour que la solution se développe.
01:25Il y a une littérature en économie qui s'est développée dans les années 70 et 80
01:29sur ces questions-là et qu'on retrouve dans la téléphonie mobile,
01:32qu'on retrouve dans les paiements par carte bancaire,
01:34qu'on retrouve sur ce genre de choses.
01:36Ou avoir une puce pour payer par carte bancaire n'est pas très utile
01:41si on n'a pas les récepteurs au niveau des commerçants.
01:44Et avoir un récepteur sans client titulaire d'une puce pose des soucis.
01:49L'inversion des modèles d'adoption passe dans un autre domaine
01:53sur lequel les coûts de développement, finalement, vont être marginaux
01:58pour des producteurs et notamment dans le domaine du digital.
02:03On le retrouve pour des opérateurs comme Microsoft, Meta,
02:07où le coût du codage et du développement est totalement marginal.
02:14La distribution des produits l'est tout autant.
02:17On a une immédiateté dans la distribution à l'échelle planétaire
02:21et on va pouvoir envisager beaucoup de développement, beaucoup d'interactions
02:28et on va s'appuyer sur les utilisateurs pour enrichir ces utilisations,
02:34voire trouver de nouvelles affordances.
02:36Et ça, c'est absolument fascinant.
02:38C'est ça qui est fascinant, c'est-à-dire que pour faire simple,
02:40les technologies d'attente, c'est-à-dire qu'elles sont là
02:42et petit à petit, sans même que les producteurs en aient parfaitement conscience,
02:46ce sont les utilisateurs qui vont progressivement s'en saisir
02:49et qui vont les institutionnaliser.
02:51C'est un peu ça l'idée.
02:52Tout à fait.
02:53Et on le voit sur les mises à jour régulières de produits de travail collaboratif.
03:00On l'a vu notamment autour de ces éléments-là.
03:02On le voit dans des applications de télémédecine
03:06qui vont utiliser des éléments soit tirés de plateformes existantes,
03:11de KeepZoom, Teams, Microsoft, et ainsi de suite,
03:15soit de développement inhérent à des usages internes
03:19qui seront détournés petit à petit et généralisés par la suite,
03:23par les opérateurs qui communiqueront justement sur ces nouveaux usages.
03:27En discutant ensemble, en préparant cette interview,
03:29vous disiez est-ce que là, quelque part,
03:30on n'est pas dans une technologie d'attente sur la valorisation scientifique ?
03:34On l'est clairement.
03:35C'est-à-dire qu'on va contribuer à ce qu'on appelait il y a très longtemps,
03:38dans ma jeunesse, de la littérature grise,
03:40si ce n'est que c'est de la littérature et c'est du digital.
03:44Donc, une forme entre deux, finalement.
03:48Je pense qu'on a ici le rôle de griot.
03:51En fait, on va permettre le passage de l'information entre plusieurs mondes.
03:57Et ces technologies d'attente sont une forme, finalement, d'artefacts,
04:02également, entre plusieurs mondes,
04:05poussées par des utilisateurs plutôt que d'être poussées par des producteurs.
04:10Absolument.
04:11Avec, à retenir, donc, ce lien effet de club technologie d'attente.
04:15Tout à fait.
04:16À retenir.
04:17Et il y a une citation que j'aime bien de Claes,
04:20qui s'intéresse à l'œuvre de Burroughs,
04:22et qui me semble être assez représentative de ce genre de choses,
04:25c'est « Je ne suis pas l'auteur de mon désir,
04:28mais ce désir n'est que l'affiction de quelqu'un d'autre. »
04:30Et on le retrouve assez bien, je pense, sur ces communautés, finalement,
04:33qui interagissent dans l'émergence de ces nouveaux services.
04:36Absolument passionnant.
04:37Donc, extension et inversion du domaine de l'adoption,
04:42les technologies latentes.
04:44Donc, pensez toujours à ça.
04:46Regardez ces fameux signaux faibles.
04:48Oui.
04:48Alors, pour bien comprendre ces signaux faibles,
04:50regardons ce que les gens adoptent et comment ils l'adoptent.
04:53Et quels usages sont faits, effectivement, autour de ces nouvelles technologies ?
04:57Sortons d'un schéma où le producteur aurait un grand plan,
05:00où il aurait tout anticipé.
05:01Ça ne se passe pas comme c'était prévu.
05:03Pas totalement.
05:03Merci à vous.
05:04Merci Jean-Philippe.