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00:00On va revenir bien entendu sur cette affaire Grégory qui, mine de rien, malheureusement a passionné les français parce qu'on ne sait toujours pas le fin mot de cette affaire et c'est vrai que ça fait maintenant 40 ans.
00:09Merci d'être là. Vous allez répondre aux questions que se posent certainement les téléspectateurs sur cette affaire devant leur écran, même ceux qui n'ont pas connu cette affaire à l'époque et qui se disent
00:19« C'est vrai qu'on m'a toujours parlé de l'affaire du petit Grégory, mais comment se fait-il qu'on ait jamais élucidé cette affaire ? » Bonsoir Tiffany, bonsoir.
00:26Bonsoir.
00:27Cinq questions de l'État. Déjà, est-ce que vous voulez revenir sur l'affaire, vous voulez réexpliquer l'affaire ? Ou bien on le fait, on le fait nous.
00:32Oui, peut-être rapidement. C'est effectivement un très triste anniversaire puisque ça fait 40 ans que ce petit garçon de 4 ans était retrouvé mort dans la Vologne et qu'aujourd'hui, il n'y a toujours pas de décision de justice
00:43qui permet d'établir ce qui s'est réellement passé, c'est-à-dire ce qui s'est passé dans les dernières heures de vie de cet enfant et qui est le ou les coupables qui sont responsables dans cette affaire.
00:52On a tout entendu sur cette affaire donc. Première question, l'État peut-il être responsable des dysfonctionnements de la justice ? Est-ce que la famille peut se retourner contre l'État pour dire « voilà, on n'a jamais élucidé le meurtre de mon fils » ?
01:05Alors avez-vous connaissance de cas où, en raison de dysfonctionnements de la justice, l'État a été condamné ?
01:11Non.
01:12À votre avis ?
01:13Non, pas condamné, mais il n'y a pas Omar Haddad ? Il n'y a pas une histoire avec Omar Haddad où ils ont fait marche arrière ?
01:20Quand il y a des dysfonctionnements, en réalité, effectivement, l'État peut être condamné et c'est ce qui a été le cas dans l'affaire Grégory.
01:27À de nombreuses reprises, il y a eu des condamnations pour différentes personnes, à la fois des personnes qui ont été mises en cause dans cette affaire.
01:35Je pense par exemple à Muriel Boll qui avait été entendue quand elle était mineure, qui a eu des dommages d'intérêt du fait des dysfonctionnements et des erreurs qui ont pu être commises dans le cadre de la procédure.
01:44Vous avez évidemment les parents aussi de Grégory Villemin qui ont été indemnisés.
01:4935 000 euros, c'est ça ?
01:50Oui, exactement.
01:51Vous avez vu, j'aurais pu regarder, c'était sur ma fiche. 35 000 euros chacun des parents de Grégory pour dysfonctionnement de la justice.
01:58Oui, alors vous avez eux qui ont été indemnisés, vous avez aussi la femme de Bernard Laroche et les enfants qui ont été indemnisés puisque, vous le savez, Jean-Marie Villemin, le père de Grégory, a tué Bernard Laroche, qu'il soupçonnait d'être le coupable.
02:10C'est ça.
02:11Et l'État a été jugé responsable puisqu'il y avait des menaces qui avaient été proférées et on a considéré que l'État n'avait pas pris en compte ces menaces et n'avait pas assuré la protection, ce qui avait abouti à ce meurtre.
02:24Et c'est arrivé dans d'autres affaires. Je pense à cette femme qui avait déposé sept plaintes contre son ex-compagnon et qui a été brûlée à l'acide.
02:31De la même manière, l'État a été condamné en disant vous n'avez pas tenu compte des menaces qui ont été mises.
02:36En quoi l'affaire Grégory a fait évoluer la justice ?
02:41Est-ce que vous savez le nombre de dysfonctionnements qu'il y a eu dans cette triste affaire ?
02:45Il y a eu des dysfonctionnements médiatiques aussi.
02:48Moi, j'ai des réponses. Je ne peux pas répondre. Mais vous ?
02:53Depuis le départ. Entre les enquêteurs, polices, gendarmes, rien n'a été depuis le départ. Le juge, rien.
02:58Plusieurs centaines, oui.
02:59Alors, vous avez pointé effectivement un certain nombre de problèmes. Alors, quand vous dites depuis le départ, déjà, c'est la scène de crime.
03:04Effectivement, ça, c'est quelque chose qui a énormément évolué. On parle maintenant du gel des scènes de crime.
03:10Puisqu'en fait, si vous voyez les images de l'époque, ce qui est fou, c'est qu'on voit sept enfants, les enquêteurs, mais n'importe qui, venir sur la scène de crime.
03:17Aujourd'hui, c'est impossible. La scène est gelée. Il y a le procureur, le directeur d'enquête, le médecin légiste et avec des tenues habilitées.
03:25Parce que les protections, vous vous doutez bien que s'ils laissent des empreintes sur le site, forcément, ça perturbe le cours de l'enquête.
03:31C'est ce qui s'est passé là-bas. Il y a eu une inexistence, comme vous le dites, de la protection des scènes de crime. C'était en 84. Et forcément, ça...
03:37Mais là, c'était ce que l'on a retrouvé dans l'eau. Et quand on le voyait, on ne savait pas s'il était encore vivant ou mort.
03:41Donc, il fallait bien aller le voir pour le retourner, voir. Il était pied et poing lié, malheureusement, le petit Grégory.
03:46Mais on ne savait pas s'il était mort ou pas au moment où on était là-dedans. Tout le monde a été obligé de piétiner la scène, en fait.
03:50J'étais sur place à ce moment-là, parce que j'étais jeune journaliste. Donc, c'était une des premières affaires que j'ai subies.
03:55Et ce que vous dites, justement, est très parlant. C'est tout le monde, y compris les journalistes.
03:58Bien sûr, bien sûr.
03:59Vous vous rappeliez la difficulté, tout à l'heure, qui a été ce rôle entre la justice et l'information, où on a vu qu'il y avait un certain nombre de difficultés
04:07qui ont été posées dans cette affaire et qui ont amené aussi des interrogations de la part des magistrats par rapport aux prises de parole
04:14qui ont été celles du juge d'instruction et aux dossiers qui ont pu être communiqués entre les avocats, les magistrats et la presse.
04:19Et ce qui a permis de mettre en place notamment des cours dans l'école de magistrature pour dire qu'il y a plusieurs valeurs que vous devez concilier
04:26qui sont à la fois le droit, effectivement, d'information, la présomption d'innocence et le respect de la protection de l'enquête.
04:33Ensuite, vous avez ce qui a aussi été un dysfonctionnement, c'est l'autopsie.
04:36C'est ça.
04:37Puisque vous avez une difficulté à l'époque. Les méthodes liées à l'autopsie ne sont pas les mêmes.
04:41Et ce qui a été fait à ce moment-là ne permet pas de dire déjà l'heure exacte du décès, ce qui est extrêmement problématique
04:48pour vérifier l'emploi du temps des différents protagonistes qui étaient mis en cause.
04:52Et les causes réelles, c'est-à-dire est-ce que c'est réellement une noyade ?
04:55Est-ce qu'il y a eu de l'insuline qui a entraîné le décès de cet enfant ?
04:59Alors qu'aujourd'hui, vous auriez un scanner complet des mesures et des recherches qui seraient faites sur les organes.
05:05Aujourd'hui, vous pensez qu'on aurait pu élucider l'affaire ou pas ?
05:10Alors, c'est toujours difficile à dire parce que si on devait comparer à une affaire, en tout cas récente,
05:16qui présente certaines similitudes, je pense à celle du petit Emile.
05:21Emile, exactement. Je pense à la même chose, oui.
05:23Où on a des logiciels maintenant qui existent et qui sont mis en place.
05:27Je pense notamment à Nakrim qui recueille tous les indices.
05:31Et pour autant, on n'a pas encore de réponse sur ce crime.
05:34L'affaire du petit Emile, ça fait plus d'un an. C'était en septembre 2023.
05:38Et c'est vrai qu'il n'y a toujours pas de nouvelles.
05:41Alors, ça a rebondi encore il y a quelques jours parce qu'on a vu qu'il y avait une ADN qui était inconnue sur les vêtements du petit Emile.
05:51Et on attend de savoir ce qui va se passer.
05:53On n'a pas de certitude.
05:54Exactement, on n'a pas de certitude.
05:55À un moment, on était persuadé que c'était un animal.
05:58Absolument.
05:59Sauf que pour l'Emile, il n'y a pratiquement aucun indice.
06:02On a retrouvé un corps en décomposition des os.
06:04Alors que là, il y avait tous les éléments pour trouver.
06:06On a l'enregistrement sonore du corbeau qu'on soupçonne d'avoir tué.
06:09On a des lettres manuscrites du corbeau.
06:11Mais les lettres ont été prises par des dizaines de personnes.
06:13On ne pouvait plus trouver d'empreintes.
06:15Tout a été souillé dès le départ.
06:17Alors que tout était là pour trouver le meurtrier.
06:19Et en fait, non, ça a été gâché.
06:21On a dit aussi que le petit juge était trop seul et qu'il avait été écrasé par la pression.
06:25Ça, c'est juste.
06:26Ça, effectivement, c'est un point qui a été soulevé.
06:29Le juge qui est en charge de cette affaire a 32 ans.
06:32Au moment des faits, il est très seul.
06:34Je ne sais pas si ça vous rappelle un autre grand fiasco judiciaire.
06:36Outreau.
06:37Exactement.
06:38Vous avez un jeune juge qui est le juge Burgot qui est seul face à ce procès d'ampleur.
06:42Et donc, la question de la collégialité s'est posée très rapidement après l'affaire de Grégory.
06:47Où M. Badinter a dit qu'il faudrait peut-être réfléchir à mettre en place la collégialité pour que les juges se challenge.
06:53Et c'est revenu après l'affaire d'Outreau.
06:56Ça a été voté.
06:58Mais pour autant, malheureusement, faute de moyens.
07:00Aujourd'hui, les juges d'instruction sont encore seuls.
07:03Il y a un autre domaine qui a énormément changé.
07:06C'est le changement des auditions des mineurs.
07:08Aussi, parce que la difficulté que vous aviez, c'est que Bernard Laroche a été mis en cause notamment par le témoignage de sa belle-sœur
07:15qui, au moment des faits, est mineure.
07:17Et elle est ensuite revenue sur son témoignage.
07:20Il a été dit qu'elle avait subi notamment des pressions parce qu'elle a été remise dans sa famille après son audition.
07:28C'était assez dingue parce que c'est une mineure et qu'elle met en cause un membre de sa famille.
07:32Et son audition a été déclarée par la suite anticonstitutionnelle parce qu'elle avait été faite alors qu'on ne l'a pas informée de son droit de se taire.
07:42Sachez-le, si un jour vous êtes placé en garde à vue, le premier de vos droits est le droit de se taire.
07:47Et elle n'était pas assistée d'un avocat.
07:49Il y a des affaires qui ont fait évoluer la justice.
07:52Vous nous en parliez ce soir pour nos téléspectateurs.
07:55Il y a notamment l'affaire Fourniret.
07:57Oui, je pense que malheureusement, ces affaires dramatiques ont fait évoluer.
08:01Celle du petit Grégory a fait évoluer tous ces éléments et notamment des moyens considérables sur la police scientifique qui ont évolué.
08:08Sur l'affaire Fourniret que vous avez eue, il y a eu la loi Perben qui est passée après en 2004
08:15pour mettre en place le fichier des délinquants sexuels.
08:18Fichier qui permet, je le rappelle, quand un délinquant est condamné, qu'on garde ses empreintes.
08:23Ce qui permet de pouvoir plus facilement l'identifier par la suite.
08:27Il y a d'autres affaires. Vous avez dit l'affaire Tremont et Cahiers.
08:30Ils avaient été arrêtés coup sur coup pour avoir violé des jeunes femmes.
08:35C'était cette affaire. Il y a aussi parlé de l'affaire Dacrouze en 2009.
08:40C'est ça ?
08:41Oui, tout à fait.
08:43Souvent, ces affaires visent des personnes qui ont été jugées pour des crimes sexuels.
08:49On a renforcé la loi sur la récidive.
08:52Ce que ça montre, c'est des personnes qui ont été condamnées et qui ont récidivé.
08:55Vous avez des mesures sur la récidive qui ont été mises en place.
08:58Vous avez des mesures introduisant la dangerosité.
09:01Au moment de la lever d'écrou avant de laisser sortir quelqu'un,
09:04monsieur le juge d'application des peines, vous devez vous assurer qu'il ne présente plus une dangerosité.
09:09A défaut, la personne peut être encore retenue en sûreté.
09:13Et le dernier point aussi sur ces dernières affaires, sur les viols, c'était
09:17si jamais la personne passe à l'acte, dans son suivi socio-judiciaire,
09:23si elle ne prend pas le traitement par exemple qu'elle était censée prendre,
09:26elle peut retourner en prison.
09:29Très bien. Merci. Merci beaucoup Tiffane Auzière d'avoir été avec nous.
09:33Vous avez des questions ?
09:34Oui, j'ai entendu ce matin à la radio, ma sœur Europe 1, Pascal Praud dire
09:37qu'on ne sait pas qui a tué le petit Grégory,
09:40mais en fait on le sait parce qu'il y a des suspicions, de fort doute, voire des certitudes,
09:44mais on ne peut pas le dire à cause d'un flou juridique. Qu'est-ce que ça veut dire en fait ?
09:47Je pense que ce que vous dites, c'est le drame absolu dans cette affaire
09:51parce qu'on ne sait pas, mais on pense qu'on sait ou on croit qu'on sait
09:54ou certains savent et ne disent pas.
09:56Et c'est toute la difficulté, c'est que quand la justice n'est pas rendue,
09:59elle laisse sa place à la vengeance.
10:01On l'a vu, il y a eu un meurtre qui a été commis, à la calomnie, à la rumeur.
10:05Et on a eu la même chose avec Outreau sur les suites de l'affaire Outreau,
10:08sur ces rumeurs qui ont continué à se propager.
10:11Et là en tout cas, judiciairement parlant,
10:14c'est impossible de dire qui a tué malheureusement ce petit Grégory
10:18et j'espère qu'un jour justice lui sera rendue à lui et à ses parents.

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