• il y a 2 mois
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Emmanuel Razavi, grand reporter et spécialiste du Moyen-Orient, répond aux questions de Dimitri Pavlenko. Il couvre notamment l'actualité iranienne pour Paris Match.

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Transcription
00:007h-9h, Europe 1 Matin, il est 7h12 sur Europe 1, Dimitri Pavlenko, vous recevez ce matin le grand reporter et spécialiste du Moyen-Orient, Emmanuel Razavi.
00:10Bonjour Emmanuel Razavi.
00:12Bonjour Dimitri, merci de me recevoir.
00:15Mais bienvenue sur Europe 1, Emmanuel, votre dernier livre, la face cachée des Mollahs, le livre noir de la République islamique d'Iran s'est paru cette année aux éditions du CERN.
00:25Vous allez nous en parler, la pluie de missiles balistiques tirés mardi soir par Téhéran sur Israël change quelque peu la donne régionale.
00:32Une confrontation directe entre les deux puissances n'est plus à exclure avec le risque d'un embrasement de tout le Moyen-Orient.
00:38Alors l'Iran, Emmanuel Razavi, dans quel état est le régime à la tête du pays ?
00:43Parce que quand on regarde le mouvement Femmes, Vies, Libertés depuis deux ans, les coups durs portés à ses alliés du Hamas et du Hezbollah,
00:50depuis l'état déplorable de l'économie iranienne, c'est un régime qui est très affaibli en ce moment, Emmanuel ?
00:55Écoutez Dimitri, c'est un régime que l'on peut dire, je crois, fracturé.
01:00D'abord, vous l'avez rappelé, il y a un certain nombre de crises à l'intérieur du pays.
01:05Vous avez d'abord la crise économique, vous avez un Iranien sur deux qui vit en dessous du seuil de pauvreté.
01:11Vous avez deux tiers du territoire qui n'a quasiment plus accès à l'eau potable.
01:17Et puis, au sein même du bureau du guide suprême iranien Ali Ramenei,
01:23il y a des dissensions, des fractures extrêmement fortes aussi entre les différentes tendances.
01:30Il y en a deux principalement.
01:32Vous avez ce qu'on appelle les conservateurs qui sont des partisans, et j'insiste là-dessus, du djihad global
01:38qui pensent que le moment de l'affrontement avec l'Occident est arrivé.
01:44Je parle de djihad global parce que ça figure dans la constitution de la république islamique d'Iran,
01:49donc ce n'est pas du tout une vue de l'esprit, c'est une réalité.
01:51Et puis, face à eux, il y a ce qu'on appelle les réformateurs plus pragmatiques,
01:57mais qui sont des voyous, qui sont aussi des islamistes,
01:59qui tiennent tout le trafic de drogue, ce que je raconte dans mon livre en Iran et au Moyen-Orient,
02:04qui considèrent qu'une guerre, un affrontement avec Israël serait dramatique,
02:11fatal à la république islamique d'Iran.
02:13Je dirais que, globalement, pour répondre à votre question,
02:16on est en train de découvrir que la république islamique,
02:18contrairement à ce qui a été raconté depuis 45 ans,
02:21c'est un château de cartes,
02:23un château de cartes qui menace en permanence,
02:25qui aboie, qui menace le terrorisme,
02:27qui prend des otages.
02:28Vous savez qu'on a des Français qui sont otages d'Etat en Iran,
02:32mais ça reste quelque chose d'assez fragile,
02:35avec, vous l'avez rappelé, une contestation populaire.
02:37Il y a un chiffre qui est intéressant à retenir.
02:40L'année passée, le régime a fait faire une étude,
02:43par les services de renseignement de sa milice civile,
02:47sur la façon dont les Iraniens, la population iranienne,
02:52voyait le régime.
02:5471% selon cette étude qui vient de l'intérieur,
02:5671% des Iraniens ne veulent plus de ce régime.
03:02Alors, ça pose une question quand même très importante,
03:04par rapport à ce qui s'est passé mardi,
03:06ces tirs de missiles balistiques visant Israël.
03:08Ça paraît un geste totalement suicidaire,
03:11puisqu'il va y avoir une riposte israélienne.
03:14Est-ce que le régime a les moyens de la guerre
03:17qu'il est peut-être sur le point de déclencher, selon vous, Emmanuel Razavi ?
03:20Non, très clairement.
03:22En fait, ce qu'il a fait, c'est que le régime n'avait plus le choix,
03:26parce que le Hezbollah...
03:28Il faut rappeler à vos auditeurs une chose,
03:30si je puis me permettre,
03:31c'est que le Hezbollah, c'est pas un proxy comme les autres,
03:34c'est la réplique du corps des gardiens de la Révolution,
03:38de la Révolution islamique.
03:40Pardonnez-moi Emmanuel, juste ce « proxy » en français,
03:42on dirait « mandataire, représentant, fondé de pouvoir ».
03:45Oui, vous avez raison.
03:46En général, les proxys sont des mandataires,
03:48qui sont très proches de la République islamique d'Iran,
03:51mais qui sont composés très souvent à la fois d'une branche militaire,
03:53mais aussi d'une branche politique,
03:55ce qui est le cas du Hezbollah.
03:57Et donc, il commençait à y avoir des dissensions,
03:59comment dire, très marquées,
04:02entre ce qu'il reste de la tête du Hezbollah,
04:05parce que son état-major a été en partie décapité,
04:07et l'Iran, le Hezbollah, reprochant à l'Iran de ne pas le soutenir.
04:11Maintenant, il y a une réalité.
04:13L'armée iranienne, elle est composée de 400 000 hommes environ,
04:17vous avez les Pasdaran, les fameux gardiens de la Révolution,
04:21qui comptent environ 180 000 hommes,
04:23alors avec, pareil, des forces de réserve,
04:25c'est comme en Occident, il y a des réserves pour cette armée,
04:28cette armée bisque que forment les Pasdaran.
04:30Mais la réalité, c'est que si l'armée iranienne, elle est parfaitement entraînée,
04:34c'est plutôt une armée qui est composée de soldats bien formés,
04:38d'officiers extrêmement bien formés,
04:40son matériel est un matériel vieillissant,
04:42qu'il s'agisse des chars ou des avions.
04:44Ce qu'il faut comprendre aujourd'hui,
04:46c'est que l'Iran, si la République islamique est amenée à rentrer en guerre contre Israël,
04:51aura pour point fort ses missiles,
04:54elle est dotée de plusieurs missiles,
04:56qui sont en capacité, on l'a vu il y a deux jours,
04:58de frapper, de toucher Israël.
05:03Et puis, il y a ces fameux proxys,
05:07qui peuvent agir depuis des pays frontaliers.
05:09Les outils du Yémen, le Hezbollah, le Hamas, etc.
05:13Le H2 aussi en Irak.
05:15Oui, des pays frontaliers comme la Syrie par exemple,
05:19qui peuvent aussi agir.
05:21Mais il y aura aussi, très probablement, le terrorisme.
05:25Parce que vous le savez, la République islamique d'Iran,
05:27elle détient une force qui s'appelle la force Al-Qods,
05:31qui est la force en charge des opérations extérieures
05:35du corps des guerriens de la Révolution,
05:37qui est spécialisée à la fois dans le terrorisme,
05:39dans la guerre asymétrique,
05:41et dans la cyberguerre.
05:43C'est ce qu'il faut craindre.
05:45Comme la République islamique n'est pas en état
05:47de poursuivre un conflit sur le long terme
05:51face à Israël et ses alliés,
05:53il y aura un recours très probablement à la guerre asymétrique,
05:55à l'utilisation de cette force Al-Qods,
05:57et au terrorisme dont elle est spécialiste.
06:01Absolument terrifiant et en même temps passionnant.
06:03Merci beaucoup Emmanuel Razavi.
06:05On vous lira dans votre livre,
06:07La face cachée des Mollahs,
06:09le livre noir de la République islamique d'Iran,
06:11où vous développez cet aspect peu connu
06:13du régime des Mollahs, à savoir le trafic de drogue,
06:15le fait aussi que les gardiens de la Révolution
06:17contrôlent 70% de l'économie iranienne.
06:19On sait peu de choses sur ce qui se passe en Iran,
06:21et on en apprend beaucoup dans votre livre.
06:23Merci beaucoup Emmanuel Razavi.
06:26Bonne journée à vous.
06:28Merci Dimitri

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