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Michel Onfray, philosophe, revient sur le sondage qui indique que le pouvoir d’achat est la principale priorité des Français : «La France est pauvre, malheureuse et paupérisée».

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Transcription
00:00 Je crois qu'on découvre que notre société,
00:02 enfin que la France n'est pas raciste.
00:04 Et que même si ce souci d'immigration,
00:07 ce n'est pas être raciste, entendons-nous bien.
00:08 Mais que la France est pauvre et malheureuse,
00:11 du moins qu'elle est paupérisée.
00:13 Et que paupérisée, ça veut dire qu'il y a de plus en plus de pauvres
00:16 qui sont de plus en plus pauvres et de moins en moins de riches
00:18 qui sont de plus en plus riches.
00:21 Et ça, c'est ce que Marx analysait en disant que la production du capitalisme,
00:25 c'était ça, paupérisation.
00:26 Et nous en sommes là.
00:28 C'était fortune considérable entre les mains de peu de personnes.
00:31 Et puis de l'autre côté, une misère incroyable.
00:34 Et une classe moyenne qui s'appauvrit.
00:35 Et une classe moyenne, bien sûr.
00:36 Et qui est dans la précarité.
00:38 Vous savez, aujourd'hui, il y a un certain nombre de signes.
00:39 Vous savez, jadis, quand je dis jadis, c'était il y a une trentaine d'années,
00:41 Pierre Bourdieu avait fait un très beau livre, le sociologue,
00:44 un peu philosophe aussi d'ailleurs, qui s'appelait "La misère du monde".
00:47 Et c'était un livre d'analyse où il allait voir d'entretiens, d'interviews.
00:52 Il allait voir des infirmières, il allait voir des chauffeurs de train.
00:54 Il allait voir des petits commerçants, des policiers.
00:56 Et les gens racontaient leur misère au quotidien.
00:59 Il faudrait refaire une misère du monde aujourd'hui.
01:02 Et montrer quelles souffrances il y a.
01:05 Des souffrances nouvelles.
01:06 Un jeune prolétariat, des pauvres parmi les jeunes.
01:09 Les garçons, les filles.
01:10 Moi, je vois sous ma fenêtre passer des gamins en mobilette
01:12 qui livrent des pizzas à 23h.
01:15 Ou des jeunes filles qui sont caissières et qui me disent...
01:17 Moi, je fais mes courses et elles me disent "c'est quoi ça ?"
01:19 Elles ne connaissent pas le nom des légumes.
01:20 Elles me disent "mais fais pas la différence entre des haricots,
01:23 des fèves et des petits pois par exemple".
01:25 Et je suis obligé de lui expliquer.
01:27 Et cette jeune fille, probablement, fait des études de commerce,
01:30 peut-être de cinéma, j'en sais rien.
01:32 - Et ça, c'est le symptôme d'une société qui s'appauvrit.
01:34 - Oui.
01:34 C'est-à-dire qu'un étudiant se fait pour étudier,
01:36 c'est pas fait pour livrer des pizzas.
01:39 Pendant ce temps-là, ils ne peuvent pas travailler.
01:40 Ce sont les architectes de demain, les avocats de demain.
01:44 Donc il y a cette prolétarisation des jeunes.
01:47 Même éventuellement des prolétarisations sexuelles.
01:49 C'est-à-dire des jeunes filles qui, de temps en temps,
01:51 passent une soirée avec la personne qui dit "bon, j'oublierai les trois mois
01:54 que vous ne m'avez pas versé", etc.
01:55 Hélas, des prostitutions d'occasion, ça aussi, ça ne se dit pas,
01:58 mais c'est terrible.
02:00 Il y a des couples qui divorcent et qui n'ont pas les moyens,
02:03 tout seuls, de se payer un appartement,
02:06 et qui vont revivre chez leurs parents.
02:08 Il y a des gens qui travaillent et qui vivent dans leur voiture.
02:10 Voilà ce qu'est la France aujourd'hui.
02:12 Bien sûr, on voit des migrants dans des toiles de tentes,
02:16 sous les périphériques, c'est terrible comme image.
02:19 Mais il y a aussi une espèce de misère un peu discrète, silencieuse,
02:22 un peu honteuse pour les gens.
02:23 La France des oubliés.
02:24 C'est ça.
02:25 C'est ça, c'est terrible.
02:26 Sous-titrage Société Radio-Canada
02:29 [SILENCE]

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