• il y a 7 mois
Alain Aspect, Physicien français explique comment il est devenu Prix Nobel grâce à sa passion. Au Festival des Vocations, il intervient à l’occasion d’une conférence pour mettre en avant et initier le public aux métiers manuels, car durant ses années de recherche il a fait appel à des artisans à de nombreuses reprises pour modéliser ses études. Il témoigne “pour obtenir le meilleur de ces artisans, il faut connaître leur activité ! J’ai toujours été très proches des personnes qui ont réalisé les composants de mon expérience” affirme-t-il à Fabrice Marion durant la journée emploi de France Bleu Provence.

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Transcription
00:00 Avec Alain Aspé dans cette journée emploi prix Nobel de physique 2022, vous êtes ici dans ce festival des vocations.
00:10 D'abord un premier mot, comment on devient prix Nobel ?
00:13 Il faut essentiellement de la chance, mais évidemment avant que cette chance finisse par donner le prix, il faut avoir une vie de passion, d'acharnement.
00:26 J'avais un sujet qui me passionnait, contre vents et marées, j'ai creusé un problème qui m'intéressait à une époque où peu de gens étaient intéressés.
00:36 Progressivement j'ai trouvé des résultats qui ont intéressé les physiciens.
00:42 Ensuite deuxième coup de chance, des gens différents de moi se sont aperçus que les découvertes que j'avais faites pouvaient donner lieu à des technologies.
00:52 Et donc troisième coup de chance, à un moment donné le prix Nobel s'est aperçu que les travaux que j'avais fait et les applications technologiques qui existent actuellement, ça valait peut-être la peine d'être récompensé.
01:05 Comme je dis parfois, il faut que les planètes s'alignent.
01:08 Alors les planètes sont bien alignées, en plus elles sont alignées ici jusqu'au Buissem à Marseille pour parler dans le festival des vocations.
01:15 Vous le spécialiste du quantique de l'infiniment petit, vous êtes venu faire l'éloge des métiers manuels, pourquoi ?
01:21 Eh bien parce que l'expérience que j'ai faite et qui m'a valu le prix Nobel, c'est d'abord une expérience où il y a énormément d'éléments technologiques et une partie non négligeable de ces éléments technologiques,
01:36 je les ai construits moi-même ou je les ai conçus et fait construire par l'atelier de mécanique de mon institut.
01:46 Et quand on veut pouvoir obtenir le meilleur de ces ouvriers, de ces fraiseurs, de ces tourneurs, il faut connaître leur métier, on peut leur parler, on leur montre qu'on comprend.
01:59 Je n'avais pas leur adresse, je n'aurais pas pu le réaliser moi-même, je n'avais pas leur habileté, mais je comprenais leur difficulté, je leur parlais et donc j'ai toujours été très proche des gens qui ont réalisé les composants de mon expérience.
02:15 Et moi-même ensuite, quand vous avez ces composants, eh bien il faut mettre tout ensemble et parfois ça demande une certaine habileté.
02:23 Et je dois dire que j'ai été assez aidé par le fait que quand j'étais petit, je passais des heures et des heures à jouer au mécano.
02:31 Probablement que les jeunes générations ne savent pas ce qu'est le mécano, mais on construisait des objets et je passais des heures et des heures au mécano.
02:39 Avant d'être pris Nobel, alors l'objectif d'une vie, ça pourrait être de dire je veux être soudeur, mécano, chaudronnier, plombier ?
02:46 Absolument, à une condition, c'est qu'on aime ce qu'on fait, qu'on soit heureux quand on a réussi à surmonter un problème un petit peu plus difficile que d'habitude, qu'on a su aller au-delà de la routine.
03:02 Et je dois vous dire qu'il n'y a pas très longtemps, chez moi, un plombier m'a trouvé une solution pour déplacer un radiateur.
03:12 Eh bien, je pense qu'il est à droit. Mais ce qui était le plus formidable, c'est qu'il s'est éloigné des solutions traditionnelles du plombier pour résoudre le problème particulier que j'avais.
03:24 Donc oui, on peut être parfaitement heureux à condition de savoir de temps en temps sortir de sa routine.
03:30 Vous êtes ici dans votre univers, derrière nous on a des couturières, on a aussi l'AFPA qui propose notamment de la soudure, simulateur de soudure en réalité virtuelle et ensuite véritable soudure.
03:42 Vous vous sentez bien, c'est votre univers ?
03:44 Je me sens tout à fait bien, d'autant plus que certes je ne sais pas faire la soudure électrique, mais par contre tenir un fer à souder pour faire des soudures électriques, ça je sais faire.
03:53 Et j'ai même fait, lors d'un séjour en Afrique, j'ai même appris à souder l'inox pour faire des bijoux.
04:03 Un dernier conseil à des jeunes, il y en a beaucoup qui circulent dans ce festival d'évocation qui dure trois jours au Mucem à Marseille.
04:10 Ils ne savent pas trop comment s'orienter à l'école, ils ne sont pas très bons en maths. C'est quoi le conseil d'un prix Nobel pour eux ?
04:17 Alors d'abord, je me permets de vous reprendre sur le "ils ne sont pas très bons en maths".
04:24 Je pense qu'il y a un blocage psychologique vis-à-vis des maths et il ne faut absolument pas se dire "moi je ne suis pas bon en maths".
04:32 Il faut accepter quand même de faire un effort pour essayer de comprendre un petit peu les maths, parce que les maths c'est quand même une sorte de langage qui est utile pour les techniques.
04:44 Mais ensuite le conseil c'est de chercher un métier qui va les intéresser.
04:52 Et je pense que dans le domaine des métiers où on met la main à la pâte, comme on dit, où on touche la matière, où on tord la matière, où on donne des formes à la matière,
05:03 je pense qu'on a l'immense plaisir de voir à la fin ce qu'on a réalisé.
05:09 L'éloge du geste professionnel avec vous, la réalisation concrète de la fin de journée.
05:14 Moi quand je regarde les photos de l'expérience que j'ai montées, ce n'est pas du virtuel, c'est du réel.
05:22 Et je connais les centaines d'heures que j'ai passées à monter des éléments, des enceintes à vide.
05:28 Et je pense que ce plaisir de voir un objet matériel au bout de ses efforts, je pense que beaucoup de métiers peuvent le ressentir.
05:41 Merci beaucoup Alain Aspé pour promouvoir ces métiers manuels, pour promouvoir tous les métiers finalement, tous les métiers qui touchent à la matière. C'est important.
05:49 Je peux ajouter quelque chose. Je pense qu'aujourd'hui, où on a des craintes, parfois pas complètement injustifiées, sur le rôle de l'intelligence artificielle
06:01 et le fait que l'intelligence artificielle va peut-être faire disparaître un certain nombre de métiers,
06:07 et bien je pense que les métiers manuels où il faut mettre la main à la pâte, ça, l'intelligence artificielle n'y arrivera pas.
06:15 On aura toujours besoin du plombier qui vient réparer votre lavabo.
06:18 On aura toujours besoin du plombier.
06:20 Merci beaucoup Alain Aspé. Donc Prix Nobel de physique 2022, on est ravis de vous avoir accueilli dans cette journée en place sur France Bleu Provence.
06:28 Merci.

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