• il y a 7 mois
Lien social, solidarité, vie de quartier, sécurité… Chacun en a l’intuition plus ou moins consciente : les commerces de proximité apportent à la ville bien plus que leurs biens et services marchands. Pour identifier et quantifier ces effets sociaux et environnementaux positifs, Paris Commerces a donc lancé une étude avec Datactivist, dont la première phase a été publiée en avril 2024. L’occasion pour Emmanuelle Hoss, directrice générale de la SEM Paris Commerces, d’échanger avec Thierry Véron, président de la Fédération des associations de commerçants et artisans parisiens (Facap).

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Transcription
00:00 Retrouvez le débat de Smart Impact avec Veolia.
00:06 Smart Impact, le débat RSE, les effets du commerce sur la ville, bien plus que de simples acteurs économiques,
00:18 il participe aussi activement à la vie sociale d'un territoire.
00:21 Et ces effets non marchands sont difficiles à quantifier.
00:24 C'est donc l'objectif derrière l'étude publiée en avril de la SEM Paris Commerce,
00:27 spécialiste du commerce et de la revitalisation des centres-villes.
00:30 Emmanuelle Hosse, directrice générale de la SEM Paris Commerce, nous accompagne.
00:33 Bonjour Emmanuelle.
00:34 Bonjour.
00:35 Merci beaucoup d'être avec nous.
00:36 Thierry Véran nous accompagne également, président de la Fédération des associations de commerçants et artisans parisiens, la FACAP.
00:42 Il nous accompagne également. Bonjour Thierry.
00:44 Bonjour Eva.
00:45 Merci beaucoup d'être avec nous.
00:46 Emmanuelle Hosse, pourquoi cette étude et pourquoi maintenant ?
00:49 Alors cette étude, d'abord c'est la première phase de l'étude.
00:53 Elle part un peu du constat qu'en gros on a un mot pour parler du commerce
00:59 qui va recouvrir des réalités économiques extrêmement différentes.
01:02 On va parler de commerce pour une grande enseigne internationale
01:05 et de commerce pour une petite librairie de quartier.
01:07 Et donc on se rend compte, et chacun vous le savez, je le sais,
01:13 on sait bien qu'en fait pourtant un commerce, un artisan apporte beaucoup à la ville
01:19 en termes de liens sociaux, en termes de sécurité, en termes de bien-être.
01:24 Et aujourd'hui ce n'est pas évalué.
01:28 Ce n'est pas suffisamment mesuré.
01:30 En fait ce n'est pas mesuré et donc ce n'est pas valorisé et donc ce n'est pas pris en compte.
01:35 Donc l'idée de cette étude, de cette thèse, qui est quand même pilotée aussi par l'école des mines et Dat'Activist,
01:40 c'est vraiment d'arriver à déjà les montrer, les mettre en valeur, les expliciter
01:47 et ensuite arriver à créer de nouveaux indicateurs qui nous permettront de penser mieux la valeur et le prix.
01:54 On va un peu rentrer dans le détail de l'étude.
01:57 Thierry Véran, comment vous décririez cette valeur sociale justement des commerçants ?
02:03 En fait cette valeur sociale pour les commerçants c'est quelque chose qui est effectivement un peu inconnu.
02:10 Mais aujourd'hui il faut être face à la réalité.
02:14 On voit beaucoup de changements de commerce.
02:17 On est aussi dans une phase de transition.
02:20 Les commerces changent et il faut intégrer aussi d'autres paramètres pour quantifier et prévoir tout cela.
02:32 Les commerçants, petits commerces de proximité, c'est de la valeur sûre pour un quartier.
02:40 Pourquoi ?
02:41 Parce qu'on a d'un côté le côté sécurité comme vous le disiez, mais il y a aussi le côté cadre de vie.
02:50 On connaît ces commerçants.
02:52 Vous savez que quand on va chez H&M, par exemple, je ne devrais pas le noter,
02:55 mais dans les grandes chaînes vous avez des articles que vous venez d'acheter et puis après vous repartez,
03:02 vous ne connaissez personne.
03:04 Alors que vous allez chez votre boulanger, vous allez chez votre libraire, ils vous connaissent à force.
03:09 C'est le lien social, le petit commerce.
03:13 On en a besoin.
03:15 Nous, ce qu'on voit aussi au niveau de la fédération des associations de commerçants,
03:19 et surtout je suis aussi président d'une association de commerçants dans le 14ème sur l'avenue du Général Leclerc,
03:24 on se rend compte que quand on nous demande quelque chose sur une information, sur un tel type de commerce,
03:31 on sait où aller.
03:33 Et ça qui est important, c'est qu'on a complètement réseauté tout le maillage du commerce
03:39 et on sait chez qui il faut aller pour avoir telle information.
03:43 Et ça c'est très important pour le riverain aussi.
03:46 Donc on est tous dans la même barque, entre guillemets, et on doit faire avancer les choses tous ensemble.
03:51 L'idée de cette étude, Emmanuelle Hosse, c'est donc de montrer que cette valeur-là est tout aussi importante finalement que la valeur marchande
03:57 et que l'échange n'est pas strictement financier.
04:00 Et ça embrasse assez large.
04:03 On peut aller effectivement à la sécurité, bien-être, liens sociaux, mais on peut même aller encore un peu plus loin
04:08 en se disant que par exemple un petit commerce ou un artisan, ce qui va être gagné, il va être réinvesti sur le territoire.
04:15 Ce qui ne va pas forcément être le cas des grandes enseignes.
04:18 On peut même penser aux personnes âgées.
04:20 On voit bien que finalement il y a un suivi, on l'a vu pendant le premier épisode de canicule,
04:25 à quel point finalement les commerçants étaient mobilisés pour une sorte de vigilance, pour savoir ce qu'il en était.
04:34 On l'a vu pendant le Covid, avec cette notion de commerce essentiel.
04:39 Et on s'est rendu compte par exemple, on a bien vu aussi, alors moi je parle plus pour Paris bien sûr,
04:44 mais on a vu les Parisiens plébisciter les librairies, mais comme commerce essentiel,
04:49 c'est-à-dire essentiel à une vie en société.
04:53 Donc sauf que tout ça n'est pas objectivé.
04:56 Donc l'objectif de cette étude, et c'est une première, c'est de montrer en fait.
05:02 Montrer pour ensuite prendre en compte.
05:06 L'idée c'est vraiment d'arriver, aujourd'hui c'est comme si le prix et la valeur étaient déconnectés.
05:12 Et on n'intègre pas dans le bien commun le positif ou même le négatif.
05:17 C'est-à-dire qu'on peut imaginer par exemple que quand une entreprise utilise pour livrer des biens nos rues et nos poubelles,
05:26 elle utilise en fait le fruit de l'impôt.
05:29 Donc ça, moi je ne m'intéresse pas aux externalités négatives, puisque je m'intéresse vraiment à ce qu'apporte la proximité.
05:35 C'est aussi l'originalité de cette étude, c'est presque la première fois qu'on ne s'intéresse pas aux effets négatifs du commerce de proximité.
05:42 Exactement.
05:43 Quel type de commerçant, vous parliez des librairies, a été interrogé dans cette étude ?
05:48 Ce n'est pas que des commerçants d'alimentaires ?
05:50 Non, c'est tout azimuts.
05:52 Je pense qu'on a tous une anecdote, on sait très bien de quoi on parle.
05:58 Je disais en rentaine que par exemple quand vous achetez un bien, l'agent immobilier va en général vous parler des écoles et des commerces.
06:06 Donc en fait, le premier sujet c'est de récupérer l'info.
06:11 L'éventail est très large et bien sûr ça concerne les petites structures.
06:16 Au début, il y a beaucoup d'anecdotiques et beaucoup de données qui sont très localisées.
06:24 Mais petit à petit, l'idée c'est justement de monter, de ramener toute cette donnée pour ensuite créer des indicateurs qui soient plus généralisables.
06:36 C'est intéressant. Vous, elle va vous servir à quoi cette étude ? Comment vous regardez ça ?
06:40 Je pense que c'est un complément important.
06:44 Quand on fait des études de marketing ou de commerce, on apprend aussi que si on veut ouvrir une boutique quelque part, on fait une étude de marché.
06:56 Et dans l'étude de marché, évidemment, vous allez sur place, vous y allez même plusieurs fois, même voir plusieurs fois dans des horaires différents.
07:04 Parce que justement, il faut se imprégner du terrain et du local.
07:08 Et donc à partir de ce moment-là, ça c'est des choses qui ne se valorisent pas financièrement.
07:12 Mais c'est très important parce que vous pouvez acquérir un local avec un bailleur très sympa qui vous fait un tarif très intéressant.
07:22 Mais pour le coup, votre boutique ne fonctionnera pas parce qu'il n'y a pas la clientèle qui correspond.
07:28 Donc ça, c'est un point très important.
07:31 Après, je pense qu'il faut la développer, il faut l'analyser, la mettre en pratique sur le terrain.
07:39 Et tout ça, c'est des points qui vont se voir au fil de l'eau et faire avancer les choses.
07:45 C'est un plan révolutionnaire.
07:47 Ces indicateurs non marchands finalement, c'est comme quand on loue un appartement, on a la taille, la surface, etc.
07:54 Mais on n'a pas le petit gardien qui est en bas qui vient nous chercher le colis, les commerces de proximité.
07:58 Tout ça, ce n'est pas calculé finalement dans la valeur d'un appartement.
08:01 On sait très bien tous à quel point c'est important.
08:04 Et j'aimerais dire, c'est révolutionnaire, oui, peut-être au sens primaire, mais c'est politique au sens de la vie de la cité.
08:10 Mais qui vous cherchez à interpeller justement avec ça ?
08:15 Qu'est-ce qui produit du bien commun ?
08:17 On pourrait imaginer, en fait, si on arrive, parce qu'encore une fois, c'est la première phase,
08:22 mais si on arrive à créer des indicateurs, on pourrait tout à fait imaginer que les pouvoirs publics,
08:28 donc quels qu'ils soient, mais pourquoi pas déjà même au niveau législatif,
08:32 qu'aujourd'hui, par exemple la comptabilité, aujourd'hui, on va travailler sur une comptabilité qui date de 1945,
08:39 qui a peu évolué, qui ne prend pas en compte la mondialisation.
08:42 On pourrait imaginer que cette façon de calculer les choses soit revue à la lueur de, justement, du bien commun.
08:54 C'est-à-dire que quand on dépense de l'argent, par exemple pour la sécurité, même pour la propreté,
08:59 qu'est-ce qui se passerait si tout d'un coup on disait « Ah mais attendez, en fait, on a des acteurs sur le terrain qui le font déjà, en fait. »
09:07 Ça va même plus loin.
09:08 C'est-à-dire qu'en fait on veut aussi montrer ce qui existe déjà.
09:12 Oui, c'est ça.
09:14 Oui, parce que c'est des commerçants que vous avez interrogés sur leur pratique, finalement.
09:20 Et la clientèle, et chacun d'entre nous, encore une fois, a une anecdote, a un commerçant.
09:25 C'est très bien que ça va être très divers, mais en fait c'est l'apport de la singularité,
09:32 l'apport même de la rencontre, du fait que le commerçant va vous reconnaître, que vous allez le reconnaître.
09:38 Ça n'a rien à voir avec l'uniformisation qui nous est offerte par les grandes enseignes.
09:43 C'est vraiment de la vie ensemble. C'est quoi vivre ensemble ? Et donc regardons ce qui se passe.
09:49 Comment répondent ces commerçants à votre étude sur cette valeur sociale ?
09:54 Qu'est-ce qu'on met dedans ? Je vous ai entendu parler de sécurité, des fois, d'être en charge de la sécurité, finalement, d'un quartier aussi.
10:01 Si on devait résumer, qu'est-ce qu'on y met dans cette valeur sociale ?
10:05 Il y a 18 externalités positives. Déjà le mot "externalité", c'est un beau mot, parce que ça participe tellement de la nature du petit commerce.
10:13 Mais on va dire qu'il y a 18 items qui ont été identifiés.
10:17 Les grands items, il y a bien sûr autour du lien social, beaucoup, mais là ça va être extrêmement divers.
10:23 Ça va être des personnes sans domicile ou personnes âgées, y compris les enfants, une sorte de veille collective.
10:32 Il y a l'attractivité d'une ville, parce qu'on voit bien justement que le commerce participe de l'âme de Paris.
10:39 Il va y avoir les sujets environnementaux, il va y avoir peut-être même la sécurité, l'espace public, l'entretien de l'espace public.
10:48 C'est-à-dire qu'en fait le commerce, c'est dedans et dehors.
10:51 Donc c'est très divers. Le panel est large, les questions sont larges.
10:56 La seconde phase de l'étude, ça va être justement de resserrer un peu ça et d'arriver à dire
11:01 "Attendez, là, si on installe un commerce, on installe aussi tant de sécurité, tant de propreté, et ça, prenons-le en compte."
11:08 Est-ce que les commerces sont conscients de ces externalités négatives qu'ils créent ou de ces effets positifs ?
11:16 Oui, je pense qu'il y en a certainement qui le vivent sans s'en rendre compte.
11:20 Voilà, c'est de l'inconscient.
11:21 Oui, tout à fait. Il y a un gros sujet aussi qui est très important, c'est la communication.
11:25 Parce qu'un commerçant, vous allez chez votre boulanger, il va vous apprendre qu'il y a une animation.
11:30 Il y a tout cet environnement communicatif qui passe par le petit commerce de proximité,
11:40 que ce soit un boulanger, un boucher, un libraire, voire même la petite boutique de vêtements.
11:45 Parce qu'on peut avoir aussi des petites chaînes, des petites boutiques indépendantes.
11:51 Et ça, c'est quand même très important, parce qu'aujourd'hui, je dirais, il faut vraiment sensibiliser, je pense, de plus en plus les pouvoirs publics.
11:58 Parce qu'on est un petit peu le commerce oublié par rapport aux grandes chaînes.
12:05 Parce qu'une chaîne qui a un magasin dans un quartier ou sur une rue, si demain il doit fermer, il ferme et puis basta, terminé.
12:13 Alors que le petit commerce, où le commerçant a mis toutes ses économies dans son commerce,
12:20 demain il ne pourra pas fermer comme ça en disant "bon ben c'est bon".
12:24 Il va être obligé de faire le doron.
12:26 Donc là, pendant des années, on a subi des crises, donc on faisait le doron.
12:30 Mais là, le problème, c'est que depuis quelques années, on subit en crise.
12:34 C'est ce que j'allais vous dire Thierry Veyron, je ne vous ai pas posé la question.
12:36 Comment vont les commerces de proximité aujourd'hui, si on veut parler de Paris ?
12:40 Oui, tout à fait. Là pour Paris, c'est compliqué.
12:43 C'est compliqué.
12:44 Comme partout en France, on voit les soldes, comment ils se passent.
12:48 Le commerce, bon après c'est vrai qu'on est en phase de transition.
12:51 Mais il y a une partie du commerce qui marche mieux que d'autres.
12:54 L'habillement, ce n'est pas ça du tout.
12:57 Alors après, c'est vrai qu'on va dire "oui, mais il y a le digital, il y a la vente par internet".
13:05 D'accord, mais de toute façon, on ne pourra pas aller contre.
13:08 Il faut travailler avec eux.
13:09 Donc il faut absolument trouver des solutions pour avancer avec les GAFA pour ne pas les nommer.
13:17 Nous, on travaille, on a pris des partenariats avec l'un d'entre eux pour développer le digital.
13:22 Je ne vous dis pas lequel, mais ça se devine.
13:25 Mais c'est ça qui est important, c'est que plutôt que d'être à côté, il faut travailler ensemble.
13:30 Et les commerçants sont prêts à le faire.
13:32 Il y a des commerçants qui sont prêts à le faire et qui l'ont fait, qui ont déjà pratiqué.
13:35 Et qui nous donnent des retours positifs.
13:37 Emmanuel Hosse, donc en 10 secondes, la suite, donc deux autres phases, c'est ça de l'étude ?
13:42 Une autre phase, des indicateurs.
13:45 Et puis pourquoi pas, après, imaginer un nouveau mot, un nouveau statut.
13:50 En tout cas, différencier et calculer les choses différemment.
13:53 Merci beaucoup à tous les deux d'être venus dans Smart Impact aujourd'hui.
13:56 Thierry Véran, je rappelle, vous êtes le président de la Fédération des associations de commerçants et artisans parisiens.
14:00 Emmanuel Hosse, directrice générale de la SEM Paris Commerce.
14:03 Merci à tous les deux.
14:04 Merci de m'accueillir.
14:05 On termine comme chaque jour cette émission par la bonne idée du jour.

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