François Bougon, journaliste à Mediapart, s'est questionné sur la manière dont la guerre de l'opium a traversé le cinéma.
La guerre de l’opium a été l’un des épisodes fondateurs du nationalisme. Comment le Parti communiste chinois l’a-t-il mise en scène dans son roman national ? Illustration en quatre films, des années 1940 jusqu’à 1997, lors de la rétrocession de Hong Kong à la Chine.
Enregistré le 12 avril 2024, dans le cadre de la thématique Portrait de Hong Kong au Forum des images
Infos : https://www.forumdesimages.fr/les-programmes/toutes-les-rencontres/cours-comment-la-guerre-de-lopium-a-traverse-le-cinema-par-francois-bougon
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La guerre de l’opium a été l’un des épisodes fondateurs du nationalisme. Comment le Parti communiste chinois l’a-t-il mise en scène dans son roman national ? Illustration en quatre films, des années 1940 jusqu’à 1997, lors de la rétrocession de Hong Kong à la Chine.
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00:00:00 Merci beaucoup. Je voudrais remercier Laurence Brio et Muriel Dreyfus du Forum des images
00:00:13 de m'avoir invité à donner cette conférence, ce cours de cinéma. Je ne suis pas très
00:00:19 à l'aise avec le terme de cours de cinéma parce que je ne suis ni spécialiste du cinéma
00:00:24 ni historien. Je m'intéresse à la Chine, c'est un peu l'art je me dirais. J'écris
00:00:33 une petite histoire aux éditions Taïandier sur Hong Kong et je m'intéresse aussi en
00:00:39 particulier à l'idéologie que produit le parti communiste chinois et notamment dans
00:00:44 le domaine du cinéma. Je voudrais juste faire avant de commencer cette conférence rendre
00:00:50 hommage aux Hongkongais et Hongkongaises qui à l'heure actuelle subissent le joug d'un
00:00:57 régime qu'on peut considérer comme dictatorial et qui pour certains, en raison d'avoir défendu
00:01:03 leurs idées, se trouvent en prison ou dans l'attente de procès. Voilà, je voudrais
00:01:08 leur rendre hommage. Alors j'ai eu peur tout à l'heure parce qu'il n'y avait personne
00:01:19 dans la salle et ça m'a fait penser à, je ne sais pas si vous avez vu ce film de
00:01:23 Tsai Ming-Liang qui s'appelle "Goodbye Dragon Inn". Il y a une ou deux personnes dans une
00:01:30 vaste salle comme ça avec des fauteuils rouges. Je me suis dit que j'allais subir le même
00:01:34 sort mais heureusement que vous êtes là, merci à vous. Et d'ailleurs dans ce film,
00:01:39 c'est un hommage à un film de King Hu, cinéaste continental qui est allé ensuite à Hong
00:01:48 Kong. Et le film qui est projeté, c'est la dernière séance dans un cinéma de Taipei
00:01:55 et le film qui est projeté est justement "Dragon Inn" de King Hu. Voilà pour la petite
00:02:00 histoire. Alors je vais vous raconter, je ne suis pas sûr de faire un cours de cinéma,
00:02:04 je vais vous raconter beaucoup d'anecdotes je pense. Quand Lawrence et Muriel sont venus
00:02:12 me voir puisque j'avais écrit ce petit livre, j'ai trouvé intéressant d'essayer
00:02:17 de voir comment un des actes fondateurs de Hong Kong, la guerre de l'opium, avait été
00:02:22 traité non pas par le cinéma occidental, il y a un film qui, j'en parlais tout à
00:02:27 l'heure, un film désastreux qui s'appelle "Taipan" qui a été fait en 86, qui est
00:02:31 un summum de l'orientalisme le plus dégoulinant, mais c'était plutôt d'essayer de voir
00:02:37 comment le cinéma chinois, que ce soit en Chine continentale ou voire à Hong Kong,
00:02:44 avait traité cet élément important qui avait été la guerre de Hong Kong. Alors
00:02:50 je ne sais pas si vous êtes tous, alors j'imagine que vous connaissez tous l'histoire
00:02:55 chinoise, que vous êtes tous des grands spécialistes de cette histoire, mais je vais peut-être
00:03:00 pour ceux qui ne la connaissent pas revenir juste sans entrer dans les détails sur ce
00:03:04 qu'a été cette guerre de l'opium. Alors ce qu'on peut dire c'est qu'en Occident
00:03:09 et aussi en Chine de toute façon elle marque un tournant. Alors elle marque un tournant
00:03:13 pourquoi ? Parce que jusqu'à présent en Europe, l'empire chinois, l'empire des
00:03:18 Qing, donc l'empire Manchu, était vu comme un empire très puissant, invincible. Donc
00:03:22 à partir du début du 19e siècle s'impose l'idée, et en grande partie promue par ceux
00:03:30 qui veulent une guerre avec la Chine, que l'empire des Qing est sur le déclin, sans
00:03:35 avenir, en retard, bref, que la Chine a raté le train de la modernisation. Cette histoire
00:03:42 d'opium est intéressante parce que dès 1929, l'empereur Yongchang avait interdit
00:03:50 le commerce de l'opium. Mais ni lui, ni ses successeurs ont été en mesure de faire appliquer
00:03:56 cette mesure d'interdiction. Alors il y avait un commerce, il était simple, c'était
00:04:02 l'opium venait de l'Inde et il devait passer par le port de Canton. Et c'était le seul
00:04:11 port, le seul lieu autorisé aux étrangers pour faire du commerce. Au début du 19e siècle,
00:04:25 la situation ne fait qu'empirer. Au départ, pour revenir dans l'histoire, l'opium est
00:04:32 utilisé par les empereurs, par l'élite chinoise, comme un aphrodisiaque. Et puis progressivement,
00:04:38 cela se propage à toute la société et tout le monde se met à fumer de l'opium et ça
00:04:43 devient un drame national. Et ça devient aussi un drame pour le budget chinois puisque
00:04:49 les Chinois achètent de l'opium avec de l'argent et l'argent commence à fuir de Chine et il
00:04:55 y a de l'inflation. Donc un problème économique majeur et puis aussi un problème sanitaire.
00:05:00 L'empereur qui lui-même aimait l'opium, enfin l'empereur qui doit faire face à la guerre
00:05:06 de l'opium, se pose des questions et il reçoit un certain nombre de mémoires de tout l'empire,
00:05:13 des mémoires des fonctionnaires pour lui dire à quel point ça devient un problème
00:05:18 très très important. Ce qui se passait, c'est que les Occidentaux, en particulier les Britanniques
00:05:26 et puis après les Américains, achetaient du thé en contrepartie et ils ont trouvé
00:05:30 que vendre de l'opium leur permettait d'avoir une balance qui était en leur faveur. En
00:05:36 1838, c'est un personnage important, un officiel impérial qui s'appelle Lin Zexu envoie un
00:05:42 mémoire à l'empereur Tao Kuang pour l'alerter des dangers de l'opium. Il était gouverneur
00:05:49 des deux provinces du Hubei et du Hunan et en fait le mémoire attire l'attention de
00:05:55 l'empereur parce qu'il est extrêmement précis. Il recommande d'appliquer une politique très
00:06:02 très ferme, une politique qu'il a déjà commencé à appliquer là où il était gouverneur,
00:06:06 pour éradiquer l'usage de l'opium et il recommande de l'utiliser dans le Guangdong là où arrive
00:06:12 l'opium. Ce mémoire très précis montre que Lin Zexu maîtrise le sujet et ça, ça
00:06:18 intéresse l'empereur qui le convoque à Pékin, qui le reçoit à plusieurs reprises,
00:06:23 ils s'entretiennent et l'empereur décide que c'est l'homme de la situation. Donc il
00:06:29 l'envoie à Canton avec tous les grades nécessaires et le soutien pour mettre fin au commerce
00:06:35 de l'opium. Jusqu'à présent, le commerce de l'opium, jusqu'en 1834, c'était le monopole
00:06:43 de la compagnie des Indes orientales et en 1834, à la suite de pressions, de lobbying
00:06:50 des marchands d'opium et notamment de Jardine et Matheson qui sont deux écossais qui ont
00:06:55 fait fortune dans ce commerce, la Grande-Bretagne, le royaume a mis fin au monopole de l'opium
00:07:02 qui désormais n'est plus entre les mains de la compagnie orientale des Indes mais peut
00:07:06 être librement fait par des marchands. Et donc, des marchands et aussi non seulement
00:07:13 les britanniques mais les américains s'y mettent aussi. Alors les américains, ce qui
00:07:16 est intéressant c'est qu'ils ne vendent pas de l'opium d'Inde mais le font venir
00:07:20 d'Europe, de Smirne, de Turquie. Quand Lin Zexu arrive en mars 1839, il arrive à Canton,
00:07:28 il n'est pas très au courant des affaires du monde, il n'est pas un diplomate, il est
00:07:33 comme tous les gens de l'empire des Qing, il connait très très peu le monde extérieur.
00:07:38 Il pense qu'il va arriver à contrôler ces barbares étrangers comme il les appelle,
00:07:45 comme d'habitude, c'est à dire soit en les matant par la force, soit en les amadouant
00:07:51 par l'argent. Mais rien ne va se passer comme il l'espérait et en fait c'est là où le
00:07:58 tournant s'amorce, un empire est en train de s'effondrer et un autre émerge, l'empire
00:08:05 britannique. Et donc il en résulte cette guerre de l'opium, je ne vais pas rentrer
00:08:09 dans les détails mais il s'achève après plusieurs défaites chinoises par le traité
00:08:15 de Nankin signé en 1842 et la Chine est obligée de verser une forte indemnité, d'ouvrir
00:08:21 cinq ports, dont Shanghai, et de céder Hong Kong aux britanniques. Alors à Shanghai,
00:08:31 les étrangers vont imposer leur présence, notamment via les concessions internationales
00:08:36 au fil du temps. Il y aura une deuxième guerre de l'opium en 1860 parce que les britanniques
00:08:42 plus les occidentaux, notamment les français, les russes, considèrent que les chinois n'ont
00:08:47 pas respecté leurs engagements du premier traité. Et donc cet épisode historique sera
00:09:00 repris dans les années 1920 par le parti nationaliste, le Kuomintang, qui s'empare
00:09:08 de cette période. Ce qui est assez intéressant c'est qu'à l'époque même, cette guerre
00:09:14 de l'opium était vue comme un des événements parmi d'autres, notamment à la fois des
00:09:20 révoltes intérieures, notamment au Xinjiang, les révoltes musulmanes, la révolte des
00:09:24 Taiping, la révolte des boxers. Donc c'était à la fois vu comme un des éléments de la
00:09:29 défaite de l'empire, mais ce n'était pas vu comme un élément essentiel. Il faut attendre
00:09:34 les années 1920 pour voir cette guerre de l'opium, cet épisode historique, pris par
00:09:41 le Kuomintang, le parti nationaliste, comme un élément essentiel du récit national que
00:09:47 le parti nationaliste commence à propager. Sun Yat-sen est le premier à parler de traités
00:09:55 inégales, donc les traités de Nankin, c'est-à-dire des traités imposés par la force et qui
00:10:00 obligent la Chine à à la fois ouvrir ses ports, à verser des indemnités et à céder
00:10:05 une partie de son territoire. Hong Kong n'est pas encore, il faudra alors, on verra après
00:10:11 tout à l'heure avec les films, mais il faudra attendre les années 1980 pour voir Hong Kong
00:10:15 prendre une place importante dans ce récit. Mais pour l'instant, ce qui est plus important
00:10:18 dans le récit, c'est plutôt ce que les nationalistes, Sun Yat-sen et plus tard Chiang Kai-shek
00:10:25 appellent l'humiliation nationale, c'est-à-dire le fait d'avoir que la Chine, qui était toute
00:10:31 puissante jusqu'alors, ça c'est le récit, a chuté face à un autre empire qui était
00:10:36 l'empire britannique. Et donc le parti nationaliste s'empare de cet épisode, les livres d'école
00:10:44 l'intègrent, intègrent ce roman national, donc c'est le suivant, les impérialistes
00:10:50 étrangers ont humilié la Chine, l'ont mise à genoux et en coups préglés, tout cela
00:10:54 grâce à la nullité d'une dynastie qui n'est même pas Han, elle est Manchou, et aujourd'hui
00:10:59 est venu le temps de la revanche. Ce roman national prend la guerre de l'opium comme
00:11:04 point de départ d'un siècle d'humiliation qui convient de laver. Alors il y a un excellent
00:11:09 livre d'une historienne américaine qui s'appelle Julia Lovell qui a écrit un livre qui a été
00:11:14 traduit en français sur la guerre de l'opium que je vous conseille et elle cite dans ce
00:11:17 livre un livre d'école de 1931. Alors je vous cite les quelques lignes. « La guerre
00:11:24 de l'opium est intimement liée au destin national de la Chine moderne. Finalement,
00:11:29 les étrangers purent réaliser leur vieux rêve de piller la Chine. Nous poussons des
00:11:34 soupirs de rage en y repensant aujourd'hui. Ce livre sonne comme un avertissement pour
00:11:42 vous tous et une incitation à éprouver la mère détestation de notre ennemi commun.
00:11:47 » Alors cette utilisation de la guerre de l'opium permet de cultiver un nationalisme
00:11:52 assez facile pour rallier les Chinois autour du parti du Kuomintang. Et ce qui est intéressant
00:11:59 c'est qu'en 2003, Chiang Kai-shek publie son livre manifeste qui s'appelle « Destin
00:12:05 de la Chine » et dans ce livre il explique que pour lui la guerre de l'opium est la
00:12:12 première humiliation nationale du pays aux effets néfastes illimités qui coupa les
00:12:17 forces vives de l'État et menaça les chances de survie de notre peuple. « Se libérer
00:12:22 de l'esclavage des traités inégaux, écrit-il, est l'objectif principal de la révolution
00:12:27 nationale chinoise. » Alors il faut remarquer que sa femme Song Mei-ling qui avait grandi
00:12:32 aux États-Unis, qui parlait parfaitement américain, qui était son ambassadrice,
00:12:36 se garde bien et recommande lorsqu'on traduit le livre en anglais, on demande d'enlever
00:12:44 ces passages qui sont plutôt critiques et même attaquent les alliés américains et
00:12:49 britanniques dont Chiang Kai-shek a besoin pour mener sa guerre à la fois contre les
00:12:53 japonais mais aussi contre les communistes. Alors on peut s'étonner, c'est intéressant,
00:12:59 là je cite un autre livre de Victor Luzon qui est un sinologue qui a écrit le grand
00:13:04 récit chinois chez Taï-Hondié et lui pointe le paradoxe suivant, c'est en effet au moment
00:13:11 où se déploie ce discours que la République de Chine profite de l'espace diplomatique
00:13:16 pour faire avancer ses... pour recouvrir une partie de sa souveraineté. C'est au même
00:13:24 moment une grande partie des pays occidentaux qui avaient ouvert des concessions se retirent
00:13:31 de Chine et la Chine reconquiert son autonomie douanière en 1929. Donc en fait c'est un
00:13:38 des paradoxes, c'est-à-dire que vous avez un discours très nationaliste allant sur
00:13:42 cette humiliation nationale mais dans le même temps la Chine quand même sur le plan diplomatique
00:13:46 recouvre une part de souveraineté. Et donc comme je vous le disais, dans ce récit national,
00:13:51 la Hong Kong ne joue pas encore un rôle crucial. 1943 c'est une année intéressante, parce
00:13:56 que là on va arriver sur les films que je vais vous présenter. 1943 donc c'est la même
00:14:03 année où sort un film, le premier du cours de ce soir. C'est un film qui est réalisé
00:14:09 par les japonais sur la guerre de l'opium. Il y a eu deux films en 1943 sur la guerre
00:14:15 de l'opium. Alors le premier c'est celui-là, c'est le film japonais et l'autre c'est un
00:14:19 film chinois produit, coproduit par les japonais. Alors là ce qu'il faut comprendre c'est
00:14:28 qu'on est donc en 1943, deux ans à peu près après l'attaque de Pearl Harbor, la conquête
00:14:35 de Hong Kong par les japonais. Les japonais ont fini complètement d'envahir Shanghai
00:14:41 et les concessions internationales qui jusqu'en 1941 étaient encore aux mains des français
00:14:47 et des autres pays sont désormais sous le contrôle des japonais et les occidentaux
00:14:53 ne sont plus épargnés. Dans le domaine du cinéma, ce qu'il faut souligner c'est que
00:14:58 jusqu'à présent vous aviez plusieurs points importants de diffusion du cinéma, notamment
00:15:03 sous le contrôle des japonais, notamment en Manchurie où les japonais avaient mis en
00:15:08 place un gouvernement fantoche avec le dernier empereur Pui, je ne sais pas si vous vous
00:15:13 souvenez si vous l'avez vu le film de Bertolucci, le dernier empereur de 87. Donc il crée cet
00:15:20 empire Manchukuo, l'empire Manchu et il crée aussi une société de production de cinéma
00:15:28 qui s'appelle la Man-ei et avec cette société de production de cinéma il commence à produire
00:15:35 un certain nombre de films. Alors ces films, on reviendra dessus, mais notamment le film
00:15:39 de 1943, ces films sont destinés à la fois à un public japonais mais aussi à un public
00:15:47 pan-asiatique, notamment dans le projet qu'ont les japonais de créer une sphère de coprospérité
00:15:54 de la grande Asie orientale. Donc il leur faut aussi des films qui correspondent à ce public.
00:15:59 Aïn Senso, ce film de 1943, Aïn Senso ça veut dire la guerre de l'opium tout simplement
00:16:07 en japonais. Alors pourquoi les japonais s'intéressent-ils à la guerre de l'opium ? Alors pour eux,
00:16:15 c'est tout simplement, il convient de promouvoir cette idéologie du pan-asiatisme, l'Asie
00:16:22 est aux asiatiques, de faire oublier leur propre impérialisme et de dénoncer l'impérialisme
00:16:27 des occidentaux et en l'occurrence l'impérialisme britannique et donc on remonte à cette humiliation
00:16:32 nationale de 1839-1842 et donc ils produisent tout simplement ce film en 1942. Alors pourquoi
00:16:39 1942-43 ? C'est le centenaire de la signature du traité de Nankin, donc un certain nombre
00:16:44 de manifestations sont organisées par les japonais dans les zones qu'ils contrôlent
00:16:49 et notamment à la fois en Manchourie mais aussi à Shanghai et dans une autre ville,
00:16:55 il y a un autre gouvernement fantoche qui est gouverné par Wang Qingwei qui est un ancien
00:17:01 responsable du parti nationaliste qui s'est allié avec les japonais, le Pétain chinois
00:17:07 et donc dans ces zones là sont organisées à la fois des manifestations contre les britanniques
00:17:12 pour commémorer le centenaire de ce traité inégal et sont produits des films et notamment
00:17:18 ce film de la guerre de l'opium. Alors je dois vous avouer que ça a été très compliqué
00:17:24 de trouver un extrait, j'ai réussi quand même à le trouver grâce à un frère jumeau
00:17:28 qui parle japonais et qui a réussi à trouver en cherchant bien longtemps. Je vous préviens
00:17:34 que la qualité n'est pas forcément excellente, c'est juste un petit extrait, c'est juste
00:17:41 à la fin et après je vous explique à la fois ce dont il est question et ce que le
00:17:46 personnage, alors le personnage qu'on voit dans l'extrait c'est Lin Shi, quand on a été
00:17:52 bombardé par les canonnières britanniques et il s'adresse aux anglais. Voilà juste
00:17:59 pour le premier extrait.
00:18:01 [extrait]
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00:18:21 [extrait]
00:18:23 (musique de l'Œil des Morts)
00:18:30 (musique de l'Œil des Morts)
00:18:37 (musique de l'Œil des Morts)
00:18:43 (musique de l'Œil des Morts)
00:18:50 (musique de l'Œil des Morts)
00:18:56 Alors, qu'est-ce qu'il dit ?
00:18:58 Alors, il dit "Messieurs de l'Empire britannique,
00:19:01 quel que soit le prétexte que vous puissiez inventer pour cette bataille,
00:19:05 une histoire correcte ne manquera pas de mettre en évidence vos méfaits et vos relations,
00:19:09 et vous devrez certainement un jour retourner les graines du mal ainsi semées de vos propres mains,
00:19:14 sûrement de vos propres mains."
00:19:16 Alors, on comprend l'objectif, donc, d'énoncer l'impérialisme occidental,
00:19:21 faire passer aussi le message de la solidarité entre les peuples asiatiques,
00:19:25 et tout simplement, donc, justifier le propre impérialisme japonais.
00:19:29 Il s'inscrit dans ce que les Japonais appellent la politique nationale du film,
00:19:34 "Kokusaku eiga", qui a été décidé en 1933,
00:19:38 un plan pour produire des films de propagande.
00:19:41 Mais, alors, un spécialiste du cinéma japonais, le professeur David Desserre,
00:19:47 le qualifie de "spectacle fascinant de contradictions et d'ambivalence".
00:19:51 Alors, pourquoi ?
00:19:53 Il est censé dénoncer l'impérialisme anglo-saxon,
00:19:56 mais il emprunte énormément à Hollywood.
00:19:59 Le scénario est inspiré d'un film muet de Griffith de 1921,
00:20:04 "Les deux orphelines", "Orphans of the Storm".
00:20:07 C'est un film qui se passe au moment de la Révolution française,
00:20:10 avec notamment un dernier plan, qui sera repris dans le film japonais,
00:20:16 d'une jeune femme qui est sur le point de se faire guillotiner,
00:20:20 se faire tuer, et qui est sauvée à la dernière minute.
00:20:23 Et dans le film japonais, c'est exactement repris, c'est exactement les mêmes plans.
00:20:28 Des plans sont empruntés à d'autres films américains,
00:20:31 notamment "Les trois lanciers du Bengale", de Henry Hathaway, de 1934,
00:20:35 et même "L'incendie de Chicago", de Henry King, un film de 1937.
00:20:39 Tous les acteurs sont japonais,
00:20:42 mais le film ressemble aussi à un film de Hollywood par son orientalisme.
00:20:46 Il n'y a aucun acteur chinois, aucun acteur britannique ou étranger.
00:20:51 Et donc, dans sa manière de décrire le canton du 19e siècle, c'est très orientaliste.
00:20:57 La maison de production s'appelle Toho, elle existe toujours,
00:21:02 et elle se fera connaître dans les années 1970,
00:21:05 pour avoir produit la série des films de Godzilla.
00:21:09 Le réalisateur appartient à une dynastie d'acteurs et de réalisateurs japonais.
00:21:15 Son père s'appelle Masahiro Makino,
00:21:18 il a à son actif plus de 260 films,
00:21:21 notamment des films de samouraïs et de yakuza qu'il fera après la guerre.
00:21:26 Mais de 1942 à 1945, il réalise pas moins de 12 films, dont "La guerre de l'opium".
00:21:32 Son père, Shozo Makino, c'était le fils d'une propriétaire d'un théâtre à Kyoto,
00:21:38 et il est considéré par ailleurs comme le père du cinéma japonais.
00:21:43 Un autre point intéressant,
00:21:46 c'est qu'il a fait appel à Akira Kurosawa pour réécrire le scénario.
00:21:57 On trouve aussi la jeune Setsuko Ara,
00:22:00 je ne sais pas si parmi vous il y a des spécialistes ou en tout cas des amateurs du cinéma japonais,
00:22:05 c'est la grande actrice de l'après-guerre et notamment des films d'Ozu.
00:22:09 Elle tournera même dans un film de propagande
00:22:15 coréalisé avec un réalisateur pro-nazi, Arnold Frank, la fille du samouraï,
00:22:19 qui devait sceller l'amitié entre le Japon de Hirohito et l'Allemagne de Hitler,
00:22:25 ce qui lui vaudra d'ailleurs un voyage à Berlin pour rencontrer Goebbels.
00:22:30 Et donc, sous couvert de dénoncer l'impérialisme occidental,
00:22:35 les Japonais empruntent quand même à Hollywood.
00:22:39 Ils rivalisent aussi à Hollywood pour la première fois,
00:22:42 grâce à cette courte période jusqu'à leur défaite,
00:22:45 ils réussissent quand même à imposer une sorte de marché unique du film.
00:22:50 À la fois, le Japonais est coproduit par le Japonais,
00:22:54 et ils essayent de promouvoir, ce que je vous disais,
00:22:58 ces films dans la sphère de coprospérité de la Grande-Asie orientale.
00:23:04 En Chine, ça se traduit notamment par des films
00:23:08 qui veulent promouvoir l'amitié entre la Chine et le Japon,
00:23:12 mais aussi par des films de romance,
00:23:16 qui sont souvent des romances entre un Japonais et une jeune Chinoise,
00:23:22 qui à la fin est généralement plutôt rétive
00:23:26 et finalement succombe au "charme" du Japonais.
00:23:32 Mais bien sûr, ce sont des films qui ne sont pas du tout bien reçus en Chine,
00:23:38 qui sont vus comme les films des nouveaux conquérants,
00:23:42 des nouveaux maîtres japonais.
00:23:45 Ce qui est intéressant, c'est de voir à quel point,
00:23:50 malgré tout, puisqu'on parle de films de propagande,
00:23:53 le spectateur, l'audience, et notamment l'audience chinoise,
00:23:57 reste maître de ce qu'elle voit et de ce qu'elle ressent.
00:24:01 Le deuxième film dont je vais vous parler,
00:24:05 c'est aussi un film de 1943, il ne s'appelle pas "La guerre de l'opium",
00:24:09 il s'appelle en chinois "Wan shou yu fang",
00:24:12 on pourrait le traduire par "Gloire pour l'éternité", "Renommée éternelle",
00:24:16 en anglais il a été traduit par "Eternity".
00:24:20 C'est toujours un film réalisé pour le centenaire du traité de Nankin.
00:24:26 La particularité, c'est qu'il est coproduit par les chinois et les japonais,
00:24:31 avec un casting entièrement chinois.
00:24:38 Vous avez un couple de britanniques qui est propriétaire d'une fumerie d'opium,
00:24:44 qui sont des chinois, donc rimés,
00:24:46 on pourrait appeler une sorte d'appropriation culturelle avant leur.
00:24:50 Là aussi on pourrait le qualifier de film de propagande,
00:24:54 mais ça ne résume pas vraiment ce qu'il est,
00:24:58 et comme le film précédent, il est rempli d'ambivalence et d'ambiguïté.
00:25:04 Le contexte est le suivant,
00:25:08 les japonais ont envahi complètement Shanghai,
00:25:11 des studios ont été détruits pendant quelque temps,
00:25:14 entre 1937 et 1941, c'est ce qu'on appelle.
00:25:17 Je vous recommande le cours de cinéma d'Anne Carland du 10 mai,
00:25:23 j'imagine qu'elle parlera de cette période,
00:25:26 qu'on a parlé de l'île orpheline Kutao en chinois,
00:25:30 cette période bien particulière où les artistes chinois,
00:25:34 les réalisateurs, réalisateurs, les acteurs, les actrices chinoises,
00:25:38 ont profité de ce moment bien particulier,
00:25:41 pour continuer à travailler dans les concessions internationales.
00:25:45 Mais à partir de 1941, il y a une période de transition,
00:25:50 certains partent, certains partent soit dans les zones communistes,
00:25:55 d'autres dans les zones nationalistes, et certains décident de rester.
00:25:59 Parmi eux, il y a un producteur qui est très important,
00:26:03 qui s'appelle Chang Sheng Kun,
00:26:06 Chang Sheng Kun il est intéressant parce qu'il se met,
00:26:10 il avait une maison de production assez importante,
00:26:13 il se met à collaborer avec un autre producteur japonais,
00:26:17 qui s'appelle Kawakita Nagamasa,
00:26:20 qui est un producteur qui, avant la guerre au Japon,
00:26:24 est connu pour avoir exporté des films, notamment des films européens,
00:26:27 donc il connaît très bien le cinéma européen.
00:26:30 Il a fait des études en Chine, il a fait des études en Allemagne.
00:26:33 C'est le fils, ce qui est intéressant, c'est que c'est le fils d'un militaire chinois,
00:26:37 qui s'est rendu auprès d'un militaire japonais,
00:26:41 qui après la guerre russo-japonaise de 1905,
00:26:45 se rend en Chine et conseille le gouvernement impérial Qing,
00:26:49 pour essayer de faire en sorte que l'armée chinoise soit plus forte.
00:26:52 Il sera assassiné, on ne saura jamais vraiment pourquoi il a été assassiné,
00:26:56 selon certaines versions, il a été assassiné par les propres japonais,
00:27:00 qui s'inquiétaient du fait qu'un japonais conseille le gouvernement chinois.
00:27:04 C'est une déversion qui circule.
00:27:08 Son fils a commencé à étudier à Pékin,
00:27:12 mais dans un moment bien particulier après 1919,
00:27:16 où le sentiment anti-japonais était extrêmement fort.
00:27:19 Donc il part en Allemagne, il apprend l'allemand,
00:27:22 et c'est là où il découvre le cinéma.
00:27:25 Et quand il retourne au Japon, il décide de continuer à travailler,
00:27:29 de faire venir notamment, de produire à la fois des films japonais,
00:27:32 mais aussi de diffuser les films européens au Japon.
00:27:36 Il va s'adapter à la nouvelle donne, et puis quand les militaires japonais
00:27:40 arrivent à Shanghai et décident de créer une société de production,
00:27:45 il décide de rassembler toutes les sociétés de production
00:27:49 qui jusqu'à présent travaillaient à Shanghai,
00:27:52 et il lui propose de venir s'occuper de cette société de production.
00:27:55 Au départ, il hésite, il n'a pas envie de le faire,
00:27:58 il est plutôt pro-chinois, mais malgré tout il reste japonais.
00:28:01 Et donc il accepte finalement, selon ses explications post-guerre,
00:28:06 lui il dit que si ça n'avait pas été lui, ça aurait été quelqu'un de plus dur,
00:28:10 envers notamment les Chinois, donc lui il dit qu'il accepte,
00:28:14 à la condition qu'il puisse avoir la liberté de produire les films qu'il veut,
00:28:20 et donc de ne pas dépendre complètement de la censure militaire.
00:28:24 Et donc il fonde cette maison de production à Shanghai,
00:28:28 il gagne l'estime du milieu cinématographique chinois,
00:28:33 qui reste quand même fondamentalement anti-japonais,
00:28:36 en produisant des films dits "patriotiques",
00:28:38 qui sont malgré tout acceptés par les Japonais,
00:28:41 mais que le public chinois voit comme des films patriotiques.
00:28:44 Il y en a en particulier un qui s'appelle "Mulan rejoint l'armée",
00:28:48 alors "Mulan", vous connaissez l'histoire,
00:28:51 vous avez vu la propagation culturelle de Walt Disney,
00:28:54 donc c'est cette jeune femme qui se fait passer pour un homme,
00:28:58 pour pouvoir aller combattre pour l'Empire,
00:29:01 et donc c'est Tang Shankun, le producteur chinois qui le produit,
00:29:06 et à l'époque c'est vu quand même par l'audience chinoise,
00:29:10 les Chinois qui vont voir le film comme étant un film patriotique,
00:29:14 et notamment, alors tous les cynisans qui sont dans la salle
00:29:20 connaissent très bien cette expression,
00:29:23 c'est "Tiego fangqing", c'est utiliser le passé pour se moquer du présent,
00:29:27 ou alors "Tiego yuqing", utiliser le passé pour essayer d'illustrer le présent.
00:29:31 Et en fait, vous allez avoir beaucoup de productions de films historiques,
00:29:36 de films à costume,
00:29:38 et qui sont vues par un public chinois comme une sorte de fierté,
00:29:43 puisqu'on montre des périodes historiques de l'Empire chinois.
00:29:48 Et donc l'autre film historique à costume qui va faire sensation,
00:29:53 c'est celui dont je vous ai parlé, "Gloire pour l'éternité".
00:29:57 Alors "Gloire pour l'éternité",
00:30:00 Wang Shui et Oufang, il est vraiment centré sur la figure de Lin Zexu.
00:30:05 C'est un film vraiment à gros budget à l'époque,
00:30:09 il y a aussi beaucoup de vedettes,
00:30:11 et il y a notamment une vedette qui est très intéressante,
00:30:15 qui à l'époque était présentée comme une actrice chinoise,
00:30:20 sous le nom suivant Li Xianglan.
00:30:23 "Xianglan" ça veut dire "orchidée parfumée" en chinois.
00:30:26 Mais en fait elle est japonaise,
00:30:28 elle s'appelle de son vrai nom Yamaguchi Yoshiko.
00:30:31 Son père est un cynisant, prof de chinois,
00:30:34 qui est parti en Chine, en Manchurie, en 1906,
00:30:38 et qui travaille pour la société de chemin de fer qui était détenue par les japonais.
00:30:43 Elle a vécu là-bas, elle a grandi en Manchurie,
00:30:47 elle a appris le chinois, elle parle couramment le chinois,
00:30:50 elle a été adoptée aussi, alors c'est des histoires un peu particulières.
00:30:54 Son père, ses parents l'ont confiée à des familles chinoises,
00:30:57 donc elle est allée aussi à Pékin.
00:31:00 Et cette Li Xianglan va devenir une des vedettes
00:31:05 de la société de production de Manchurie,
00:31:09 Man'e du Manchoukwa dont je vous parlais tout à l'heure.
00:31:13 Elle présente l'avantage pour les japonais
00:31:17 d'être une figure chinoise,
00:31:21 mais qui est complètement aux mains des japonais.
00:31:26 Elle écrira, c'est un personnage très intéressant,
00:31:32 qui après la guerre, je vous raconterai son histoire tout à l'heure,
00:31:36 elle écrira ses mémoires, et dans ses mémoires,
00:31:39 elle a toujours voulu dire qu'elle n'était pas chinoise,
00:31:43 qu'elle était japonaise, et que les japonais lui ont toujours dit
00:31:47 « Non, tu ne peux pas le dire, il ne faut pas le dire, tu ne peux pas le dire ».
00:31:50 Elle le dira juste à la fin de la guerre, parce qu'elle était poursuivie,
00:31:54 et qu'elle a frôlé la peine de mort,
00:31:58 sa seule voie de survie c'est d'avoir dit qu'elle était japonaise.
00:32:02 Elle fait ses premiers pas à la Man A,
00:32:07 et c'est vraiment avec le film « Gloire pour l'éternité »
00:32:11 dont on va voir un extrait, qu'elle va devenir une star,
00:32:15 et notamment pour une raison bien précise,
00:32:18 elle ne tient pas le rôle principal,
00:32:21 elle joue le rôle d'une jeune fille qui vend des bonbons
00:32:25 dans la fumerie d'opium détenue par le couple diabolique de Britannique,
00:32:29 et elle devient une star avec ce film.
00:32:34 Il faut dire qu'elle avait tourné un film deux ou trois ans auparavant
00:32:39 qui s'appelait « Nuit de Chine »,
00:32:42 et qui avait été vu par les chinois comme un film profondément...
00:32:46 qui avait vraiment ulcéré le public chinois,
00:32:49 parce que c'était une histoire de romance entre un japonais et une jeune femme chinoise,
00:32:53 et le japonais se permettait de la frapper, de la gifler,
00:32:57 et donc ça avait vraiment ulcéré le public chinois,
00:33:00 elle était détestée pour ça,
00:33:03 et en fait ce film de 1943 va lui permettre de retrouver du crédit auprès du public chinois,
00:33:10 et de devenir une star, parce qu'elle va chanter deux chansons,
00:33:14 qui sont très connues, qui deviennent des classiques.
00:33:18 La première, c'est la chanson de la vente de bonbons,
00:33:21 juste pour vous expliquer avant de l'écouter,
00:33:24 je traduirai les paroles après si vous voulez.
00:33:27 Donc elle joue le rôle d'une jeune fille qui vend ses bonbons,
00:33:30 et voilà, là encore, la qualité n'est pas extraordinaire,
00:33:33 je l'ai retrouvée sur un site chinois.
00:33:36 Donc c'est l'extrait numéro deux.
00:33:40 La vente de bonbons
00:33:44 La vente de bonbons
00:33:49 La vente de bonbons
00:33:55 La vente de bonbons
00:34:00 La vente de bonbons
00:34:05 La vente de bonbons
00:34:10 La vente de bonbons
00:34:15 La vente de bonbons
00:34:20 La vente de bonbons
00:34:25 La vente de bonbons
00:34:30 La vente de bonbons
00:34:37 La vente de bonbons
00:34:44 La vente de bonbons
00:34:53 La vente de bonbons
00:34:58 La vente de bonbons
00:35:08 La vente de bonbons
00:35:17 La vente de bonbons
00:35:22 La vente de bonbons
00:35:29 Alors, les paroles en français.
00:35:42 Cendrier somptueux, fumée par fumée,
00:35:45 gracieuse pipe, bulle de fumée jaune,
00:35:48 combien de bons moments ont été perdus,
00:35:51 combien d'apparences ont été modifiées,
00:35:54 les dents sont comme laquées, les bouches deviennent carrées,
00:35:57 les doux sont comme des arcs, les épaules sont relevées,
00:36:00 les larmes et la mort vont couler à tout moment.
00:36:03 Tu éteins vite les lumières de l'extase,
00:36:06 tu poses vite le pistolet à suicide,
00:36:09 tu te dis à toi-même, on vend des bonbons, vendre des bonbons.
00:36:12 La deuxième est plus sur...
00:36:15 La deuxième, c'est "arrêter de fumer".
00:36:18 Elle joue un personnage qui pousse
00:36:21 les fumeurs d'opium à arrêter de fumer.
00:36:24 Plutôt un personnage positif.
00:36:27 Le film devient,
00:36:30 est vu en tout cas,
00:36:33 comme un film anti-japonais.
00:36:36 Il est vu comme une résistance,
00:36:39 notamment à travers la figure de Lin Zexu.
00:36:42 Et notamment sur un certain nombre de situations,
00:36:45 les spectateurs chinois vont voir un écho
00:36:48 avec leur situation actuelle,
00:36:51 puisqu'en plus il y avait un trafic d'opium
00:36:54 qui était largement toléré
00:36:57 et même alimenté par les Japonais.
00:37:00 Donc ils ont vu dans ce film
00:37:03 une critique très forte des Japonais.
00:37:06 Le prochain extrait,
00:37:09 c'est intéressant,
00:37:12 on voit une jeune femme,
00:37:15 l'héroïne qui va mourir dans le film
00:37:18 et qui se lève contre les Britanniques.
00:37:21 Je traduis tout de suite ce qu'elle dit.
00:37:24 "Nous allons mettre toutes nos forces
00:37:27 pour aider les officiers et les soldats
00:37:30 de la guerre britannique."
00:37:33 Avec les trois caractères "pinning to end",
00:37:36 donc vaincre les troupes britanniques.
00:37:39 On le reverra dans un autre film de 1959.
00:37:42 Quelqu'un lui dit "des soldats britanniques
00:37:45 arrivent, très bien, maintenant qu'ils sont là,
00:37:48 tendons-leur une embuscade".
00:37:51 On va regarder, car il y a aussi des échos
00:37:54 avec les films suivants.
00:37:57 "Aidez les soldats britanniques,
00:38:00 détruisez nos soldats."
00:38:03 "Aidez les soldats britanniques, détruisez nos soldats."
00:38:06 "Aidez les soldats britanniques, détruisez nos soldats."
00:38:09 "Aidez les soldats britanniques, détruisez nos soldats."
00:38:12 "Aidez les soldats britanniques, détruisez nos soldats."
00:38:15 "Aide les soldats britanniques, détruisez nos soldats."
00:38:18 "Aide les soldats britanniques, détruisez nos soldats."
00:38:21 "Aide les soldats britanniques, détruisez nos soldats."
00:38:24 "Aide les soldats britanniques, détruise nos soldats."
00:38:27 "Aide les soldats britanniques, détruise nos soldats."
00:38:30 "Aide les soldats britanniques, détruisez nos soldats."
00:38:33 "Aide les soldats britanniques, détruisez nos soldats."
00:38:36 "Aide les soldats britanniques, détruisez nos soldats."
00:38:39 "Aide les soldats britanniques, détruisez nos soldats."
00:38:42 "Aide les soldats britanniques, détruise nos soldats."
00:38:45 "Aide les soldats britanniques, détruise nos soldats."
00:38:48 "Aide les soldats britanniques, détruise nos soldats."
00:38:51 "Aide les soldats britanniques, détruise nos soldats."
00:38:54 "Aide les soldats britanniques, détruise nos soldats."
00:38:57 "Aide les soldats britanniques, détruise nos soldats."
00:39:00 "Aide les soldats britanniques, détruise nos soldats."
00:39:03 "Aide les soldats britanniques, détruise nos soldats."
00:39:06 "Aide les soldats britanniques, détruise nos soldats."
00:39:09 Là, c'est la mort de l'héroïne.
00:39:12 Si on en croit les témoignages de l'époque et des témoignages ultérieurs,
00:39:16 le film a été projeté dans les zones occupées par les Japonais,
00:39:20 mais aussi dans celles contrôlées par les nationalistes
00:39:23 et celles tenues par les communistes.
00:39:26 C'était dans leur bastion à Yénan, un peu plus haut.
00:39:29 Dans son autobiographie, "Li Xianglan", Yamaguchi Yoshiko raconte
00:39:33 que quand elle passe après la guerre, elle devient une femme politique.
00:39:37 Elle va militer pour le rapprochement notamment avec la Chine,
00:39:40 mais aussi la Corée du Nord.
00:39:42 Donc, elle se rend en Corée du Nord.
00:39:44 Et là, il y a Kim Il-sung qui tient absolument à la rencontrer.
00:39:47 Elle explique qu'il la traite comme deux bons amis.
00:39:51 Il lui explique pourquoi. Il a vu son film.
00:39:54 Il faut expliquer qu'il était combattu dans une unité anti-japonaise,
00:40:01 mais de l'armée chinoise, dans la province du Qilin, dans le Nord.
00:40:06 Parlons des réalisateurs, parce que c'est intéressant.
00:40:11 Il y a cinq réalisateurs en tout, et ce sont parmi les meilleurs,
00:40:16 il y a le producteur Chang Cheng-kun, il y a aussi Tu Shilin.
00:40:22 Je ne sais pas si vous avez vu le film de Tu Shilin,
00:40:25 qui après va partir à Hong Kong.
00:40:28 La plupart vont partir à Hong Kong après la guerre.
00:40:31 Tu Shilin avait "Mariage retardé" dimanche dernier,
00:40:34 qui est une très belle comédie, avec un acteur chinois qui s'appelle Han Fei.
00:40:39 Il y a aussi Pu Wan-song, qui était aussi un réalisateur,
00:40:43 qui était assez connu à Shanghai,
00:40:46 Ma Sihui Bang et Yang Xiaojong.
00:40:49 On peut voir l'influence de Tu Shilin,
00:40:52 qui parle beaucoup dans l'attention,
00:40:56 on l'a vu dans le film qui a été projeté dimanche,
00:40:59 dans l'attention portée aux personnages féminins,
00:41:03 et en particulier cette combattante martyr.
00:41:06 Après la défaite des Japonais,
00:41:09 la plupart de ces réalisateurs, tous les réalisateurs,
00:41:13 vont être dénoncés pour collaboration.
00:41:16 Alors, ont-ils été vraiment des traîtres ?
00:41:19 Ou alors ont-ils servi la cause du cinéma chinois ?
00:41:22 En tout cas, quelqu'un comme Chang Sheng-kun,
00:41:25 a été à la fois arrêté par les Japonais,
00:41:28 puis par le Kuomintang, il avait des contacts avec les nationalistes,
00:41:32 mais il est quand même parti.
00:41:35 Après à Hong Kong, certains étaient sur des listes noires.
00:41:39 Et une fois qu'ils seront à Hong Kong,
00:41:42 Chang Sheng-kun, Pu Wan-song et les autres,
00:41:45 Zhou Shilin aussi, vont permettre au cinéma en mandarin,
00:41:49 à Hong Kong, de devenir important.
00:41:52 C'est un cinéma qui était destiné,
00:41:55 pas simplement au public de Hong Kong,
00:41:58 mais aussi à toute la diaspora de l'Asie du Sud-Est,
00:42:01 une diaspora qui parlait mandarin,
00:42:04 donc c'est des films en mandarin,
00:42:07 et non pas des films en cantonais.
00:42:10 Et ce qui est intéressant, c'est qu'après la guerre,
00:42:13 Yamaguchi Yoshiko va retrouver des gens,
00:42:17 Chang Sheng-kun, mais aussi le producteur japonais,
00:42:21 pour filmer sur des productions qui seront faites à Hong Kong après la guerre.
00:42:26 Donc je trouve que c'est assez intéressant.
00:42:30 Pour terminer cette partie sur ce film,
00:42:33 je voulais aussi faire un petit clin d'œil à Chang Ai-lin,
00:42:37 et notamment le film de ce soir, Love in the Fallen City d'An Hui,
00:42:41 qui est une adaptation du film de la romancière Chang Ai-lin,
00:42:45 qui a vécu aussi à Shanghai.
00:42:48 Et Chang Ai-lin, j'ai retrouvé une critique qu'elle a faite du film de Gloire éternelle,
00:42:55 en juin 1943, elle fait une critique pour une revue anglaise.
00:42:59 Elle souligne qu'aucun film chinois n'avait abordé cette période historique douloureuse,
00:43:04 même si remarque-t-elle l'usage de l'opium,
00:43:07 et encore d'actualité, au moment où elle écrit.
00:43:10 Elle juge que malgré les contraintes imposées par la guerre,
00:43:13 le résultat est impressionnant.
00:43:15 Elle compare l'héroïne morte en martyr à Jeanne d'Arc,
00:43:18 et elle conclut de la manière suivante,
00:43:21 "Le film fournit un splendide arrière-plan de la Chine du siècle dernier,
00:43:25 la partie honteuse que la Chine d'aujourd'hui, avec sa conscience de soi plumure,
00:43:28 ne tient plus à laisser dans l'ombre."
00:43:30 On va passer au film suivant, qui lui est vraiment dans une autre époque.
00:43:35 On reste alors peut-être dans les films de propagande,
00:43:38 mais on est dans la propagande de cette période,
00:43:43 que certains, comme le cinéologue Jérémy Barmé, parlent de "haut-maoïsme".
00:43:48 On est en 1959,
00:43:51 et là, le film devait s'appeler "La guerre de l'opium",
00:43:56 mais il va finalement s'appeler "Lin Zesu",
00:43:58 donc il est aussi centré sur la figure de Lin Zesu.
00:44:02 Ce qui est intéressant de remarquer,
00:44:06 c'est que le discours dont je vous parlais,
00:44:08 le récit national centré sur l'humiliation, sur la guerre de l'opium,
00:44:12 a été repris par les communistes, par le Parti communiste.
00:44:16 Mao Zedong en fait un élément important de l'histoire chinoise.
00:44:22 Pour lui, c'est la première révolte du peuple chinois.
00:44:27 Ce qui est intéressant,
00:44:31 c'est que le film "Lin Zesu" de 1959
00:44:37 illustre parfaitement la vision mise en avant de Mao
00:44:44 sur la guerre de l'opium.
00:44:48 On a aussi un autre élément qui est important,
00:44:52 et qui est une des caractéristiques,
00:44:54 et je vous en parlais tout à l'heure,
00:44:56 quand je vous parlais du "Tiegu" ou "Tiegu Fangting",
00:44:58 c'est-à-dire d'utiliser le passé pour se moquer du présent,
00:45:04 ou pour illustrer le présent.
00:45:06 Ça va être une des caractéristiques de cette période maoïste jusqu'en 1966.
00:45:10 Et Mao va mener, à partir de 1949 jusqu'à la révolution culturelle,
00:45:17 ce qu'on pourrait appeler aujourd'hui des batailles culturelles.
00:45:21 Il va énormément utiliser le passé pour régler ses comptes politiques.
00:45:28 Et donc il n'est plus du tout question pour des réalisateurs
00:45:32 de se frayer un chemin comme à l'époque japonaise,
00:45:35 au milieu des contraintes politiques.
00:45:37 Là, tout est politique.
00:45:39 Et en l'occurrence, ce film "Lin Zesu"
00:45:43 est réalisé par le réalisateur, un réalisateur qui s'appelle Chang Chun-li,
00:45:47 qui lui aussi a commencé sa carrière à Shanghai.
00:45:51 Lui, il est resté à Shanghai pendant la guerre.
00:45:54 Il a réalisé un très beau film juste avant la victoire des communistes,
00:46:02 un film qui s'appelle "Corbeau et Moineau".
00:46:05 En chinois, c'est "Wuya yu matue",
00:46:08 qui est une vision très sombre de la fin du pouvoir nationaliste
00:46:12 et de l'arrivée des communistes.
00:46:14 Il a changé la fin, juste quand il a su que les communistes changeaient,
00:46:18 enfin arrivaient, et allaient être vainqueurs.
00:46:20 Et donc il a aussi ce sens, il sait s'adapter d'une certaine manière.
00:46:24 Alors je ne dirais pas que c'est un opportuniste,
00:46:26 mais en tout cas, il sait comment faire.
00:46:29 Le film dont je vous parle, "Lin Zesu 59",
00:46:33 c'est un film important parce que c'est un des dix films,
00:46:36 en tout cas c'est un des films principaux qui sont réalisés
00:46:39 pour le dixième anniversaire de la République populaire de Chine.
00:46:44 Donc il doit s'inscrire dans la vision historique du nouveau régime.
00:46:49 Comme je vous le disais, les communistes ont repris cette vision
00:46:53 du tournant historique de la guerre de l'opium,
00:46:55 le début des cent ans d'humiliation.
00:46:57 La différence, c'est que les cent ans d'humiliation
00:47:01 se sont achevés par la victoire du Parti communiste.
00:47:05 Et c'est grâce au Parti communiste que le peuple chinois a pu se lever,
00:47:08 comme le dit Mao quand il proclame la fondation
00:47:11 de la République populaire de Chine sur la place Tiananmen
00:47:14 le 1er octobre 1949.
00:47:16 Et donc, la nouvelle Chine, Lin Zesu,
00:47:21 c'est aussi un fonctionnaire qui pourrait correspondre
00:47:24 à cette nouvelle Chine, ce fonctionnaire intraitable
00:47:26 qui combat les impérialistes,
00:47:29 qui ne veut pas se faire imposer sa loi par les étrangers,
00:47:33 et qui ne permet pas que le pays soit dépecé.
00:47:38 Par ailleurs, dans les œuvres,
00:47:41 qu'elles soient littéraires, cinématographiques de l'époque,
00:47:44 il y a un principe qui est mis en avant
00:47:47 lorsqu'il s'agit d'histoire,
00:47:49 et c'est le principe mis en avant par Mao Tse-tung,
00:47:52 « Le peuple est le peuple seul et la force motrice
00:47:55 de la création de l'histoire du monde ».
00:47:57 Et donc, cette phrase est tirée d'un rapport présenté par Mao
00:48:00 au 7e congrès du Parti communiste en avril 1945,
00:48:03 et elle est utilisée par Cheng Chun-li pour son film.
00:48:08 Et donc, on va passer le 1er extrait de ce film,
00:48:15 et ce qui est intéressant dans la vision de ce film
00:48:18 de propagande de Cheng Chun-li,
00:48:21 c'est que tout est basé sur le peuple,
00:48:24 Jianmin, sur la force du peuple,
00:48:27 et Lin Zexu ne peut mettre en œuvre sa politique
00:48:30 de lutte contre l'opium que grâce au peuple.
00:48:33 Il se nourrit des masses, et c'est grâce aux masses
00:48:36 qu'il va réussir à mener sa politique.
00:48:39 Là, je vais vous passer un extrait.
00:48:43 Après, je vous traduirai,
00:48:46 parce que le dialogue est assez savoureux.
00:48:50 Je pose le contexte.
00:48:53 Les marchands britanniques d'opium ne peuvent plus quitter Canton.
00:48:59 Normalement, ils doivent rester, ils sont confinés.
00:49:02 Mais l'un d'entre eux, qui s'appelle Lancelot Daunt,
00:49:06 qui était un des grands marchands d'opium,
00:49:09 essaie de s'enfuir, en tout cas dans le film,
00:49:12 avec la complicité d'un officiel chinois et des agents des douanes.
00:49:18 Là, on va voir la traque des masses,
00:49:23 notamment d'une héroïne.
00:49:26 Je vous laisse regarder, je traduis ensuite.
00:49:29 Extrait numéro 4.
00:49:33 - C'est bon. - C'est bon.
00:49:35 (Musique)
00:49:39 (...)
00:49:43 (...)
00:50:09 (...)
00:50:34 Ce qui est intéressant dans le film,
00:50:37 c'est qu'on voit trois types de personnages.
00:50:41 Il y a les héros, ils sont toujours dans la lumière.
00:50:45 Il y a les traîtres et les étrangers, les méchants étrangers.
00:50:50 Il se fait capturer, les fonctionnaires des douanes leur disent de partir.
00:50:59 Ce sont des fonctionnaires, mais ils rentrent dans le bateau.
00:51:03 Le marchand d'opium, c'est quelque chose que je n'ai pas réussi à comprendre.
00:51:08 Il dit d'abord "Wu Shou Wai Guo Jian", "Je suis étranger".
00:51:12 L'héroïne lui répond en lui mettant une claque.
00:51:16 Elle lui dit "Tu es étranger", sur un ton plus que sceptique.
00:51:20 Puis il lui dit "Je suis chinois".
00:51:23 Pour moi, c'est étrange. Je ne sais pas pourquoi il lui dit "Je suis chinois".
00:51:27 Ça la rend encore plus furieuse.
00:51:31 Ce qui est intéressant aussi, je voudrais juste vous parler du personnage qui est joué par l'étranger.
00:51:40 Il y avait très peu, même aucun acteur étranger ne jouait dans des films chinois.
00:51:47 Lui, c'est un américain. Il est né à Baltimore. Il s'appelle Gérald Tanbaum.
00:51:54 Il est venu en Chine en 1945.
00:51:57 Il travaillait d'abord pour l'armée à la radio.
00:52:01 Puis il est parti et il s'est engagé dans une association humanitaire
00:52:06 qui était dirigée par Madame Sun Yat-sen, son mailing.
00:52:10 Et puis quand les communistes ont gagné, il a décidé de rester sur place.
00:52:16 Il s'est engagé notamment dans du travail de propagande.
00:52:20 Il a essayé de continuer son travail humanitaire.
00:52:23 Et de manière assez étonnante, il a eu une carrière dans le cinéma.
00:52:29 Il avait fait de la radio avant. Il avait fait des fictions aux Etats-Unis.
00:52:36 Donc on trouvait qu'il avait à la fois une prestance et une voix.
00:52:40 Il est resté en Chine jusqu'en 1971.
00:52:45 Il s'est marié avec une actrice de Shanghai en 1971.
00:52:50 À la suite du rapprochement entre la Chine et les Etats-Unis,
00:52:54 il est reparti aux Etats-Unis où il a fini sa vie.
00:52:57 Mais il est resté fidèle au Parti communiste et à la Chine jusqu'à la fin de sa vie,
00:53:03 défendant la révolution culturelle notamment.
00:53:08 Il avait accepté de jouer dans ce film.
00:53:11 Alors ce n'était pas un rôle évident, puisque c'est un rôle de méchant.
00:53:15 Mais il avait dit « je veux bien jouer dans votre film le rôle de méchant,
00:53:19 mais je veux plus tard faire un rôle positif ».
00:53:22 En l'occurrence, le rôle de Norman Béthune, qui était un docteur canadien,
00:53:27 qui lui est un héros positif, qui s'était engagé auprès des communistes chinois
00:53:33 et qui est mort sur le front en 1939.
00:53:36 Chang Ching, Mme Mao, qui s'occupait des films au département de la propagande du Parti communiste,
00:53:44 refusait qu'on fasse un film sur Norman Béthune pendant quelque temps.
00:53:48 Finalement, ils ont réussi à le faire en 1964.
00:53:51 Et donc notre ami américain a fini par faire son film positif.
00:53:56 Il y a une dimension aussi personnelle dans ce film de Chang Ching-li, ce réalisateur.
00:54:04 C'est presque une dimension d'expiation.
00:54:08 Il doit se faire pardonner un certain nombre de choses.
00:54:12 Il a été pris, je vous parlais tout à l'heure, des batailles culturelles menées par Mao
00:54:17 et les premières campagnes de rectification qui ont concerné en particulier l'art.
00:54:22 Il est pris dans la première campagne qui est lancée par Mao.
00:54:26 Et en fait, c'est d'une certaine manière, entre guillemets, une balle perdue.
00:54:31 Il y a un film à costume qui s'appelle "La vie de Wushung" qui est fait par un autre réalisateur
00:54:37 et qui ne plaît pas du tout à Mao et qui est violemment critiqué.
00:54:42 Et un autre film qu'il avait fait précédemment avait été sorti en même temps et pris également dans la campagne.
00:54:50 Et donc Chang Ching-li est obligé de se repentir.
00:54:55 Il écrit une autocritique dans un des principaux journaux de Shanghai qui s'appelle le "Wenhui Bao"
00:55:03 qui était un journal destiné plutôt au milieu intellectuel.
00:55:07 Il écrit une autocritique. Il dit "je dois me réformer profondément".
00:55:13 Et en fait, ce film, c'est aussi une manière pour lui de se réformer.
00:55:17 Il a étudié les écrits de Mao.
00:55:24 Lorsqu'il y a eu le mouvement des "Sangfleurs" qui avait été un mouvement où Mao avait invité
00:55:30 notamment les milieux intellectuels à critiquer le Parti communiste, il y avait des déviations, des déviances, etc.
00:55:36 Et puis après, tous ceux qui avaient été critiqués ont été soit emprisonnés, soit ont été dégradés et considérés comme droitiers.
00:55:45 Lui s'est bien gardé de participer au mouvement des "Sangfleurs".
00:55:50 Non seulement il s'est bien gardé de participer au mouvement des "Sangfleurs", mais en plus il a écrit aussi des articles
00:55:54 pour dénoncer ses anciens collègues, ceux qui avaient participé aux "Sangfleurs".
00:56:00 Et donc, le film pour lequel il devait expier, c'était un film qui s'appelait "Marie et Femme",
00:56:08 qui était son premier film depuis la fondation de la République populaire de Chine.
00:56:12 Il mettait en scène un couple de fonctionnaires du Parti communiste.
00:56:18 L'homme était un jeune Shangaïen intellectuel qui avait rejoint les zones libérées par les communistes
00:56:26 et qui s'était marié à la campagne avec une jeune paysanne qui était une héroïne modèle.
00:56:32 Et une fois la fondation de la République populaire de Chine en 1949, le couple retourne à Shangaï.
00:56:39 Et là, malheureusement, l'homme est repris par son esprit petit-bourgeois, la trompe, etc.
00:56:46 Donc c'était cette histoire et en fait il a été violemment critiqué pour cette histoire.
00:56:51 Donc le film de 1959, c'est aussi pour lui une manière d'expier.
00:56:57 Il a réussi, il a fait partie petit à petit, grâce à ses autocritiques,
00:57:02 à sa non-participation au mouvement des "Sangfleurs" et puis après il est reçu.
00:57:06 Quand Mao passe à Shangaï en 1957, Mao organise une petite rencontre avec les cinéastes.
00:57:12 Il fait partie de ce petit groupe de cinéastes qui ont l'honneur de rencontrer Mao.
00:57:17 Donc en fait il est en cours, il réalise enfin son rêve.
00:57:24 Il rentre même au Parti communiste avec son acteur fétiche, Zhao Dan.
00:57:30 Et donc ce film de 1959, c'est un peu l'apogée pour lui.
00:57:37 Alors tout à l'heure je vous parlais des masses et de Mao en particulier, de ce film en fait de Lin Zexu.
00:57:49 Cheng Chun-li a expliqué avoir lu les écrits de Mao sur la guerre de l'opium pour faire son film.
00:58:01 Et notamment il y a deux articles de Mao qui sont consacrés à cette période.
00:58:06 "Réformons notre étude" et "La révolution chinoise et le Parti communiste chinois".
00:58:10 Et on peut lire notamment "Au cours des cent dernières années, la nation chinoise qui a tant souffert du désastre
00:58:15 a été honorée par les sacrifices et les luttes de ces personnalités exceptionnelles
00:58:19 qui ont cherché la vérité sur la manière de sauver la nation et le peuple".
00:58:24 Alors les masses c'est important, le peuple c'est important et on va le voir dans le film.
00:58:28 C'est l'extrait suivant, l'extrait numéro 5.
00:58:31 Alors vous verrez, on verra après pour un film de 97 et les différences entre celui-ci et celui de 97.
00:58:39 Extrait numéro 5.
00:58:42 [Musique]
00:58:44 [Musique]
00:59:12 [Musique]
00:59:38 [Musique]
01:00:07 [Musique]
01:00:21 [Musique]
01:00:22 [Musique]
01:00:30 [Musique]
01:00:59 [Musique]
01:01:26 [Musique]
01:01:29 Donc ça c'est la mise en scène d'un épisode qu'on retrouvera dans un autre film de 97.
01:01:37 C'est la destruction des plus de 20 000 caisses d'opium décidées par Lin Zexu, le 3 juin 1839.
01:01:44 Alors on voit bien l'importance des masses, il faut filmer les gens.
01:01:49 Quand Lin Zexu arrive, Lin Taizhen, ils arrivent, ils se tournent vers lui, on a l'impression de voir Mao.
01:01:56 Alors le film participe aussi d'un moment particulier de l'histoire chinoise qui est le grand bond en avant.
01:02:02 Le grand bond en avant, c'est un mouvement qui a été lancé par Mao Tse-tung à partir de 58.
01:02:06 Il s'agissait de dépasser les pays occidentaux, il fallait aller beaucoup plus, il fallait produire, il fallait faire plein plein de choses.
01:02:15 Et dans le secteur du cinéma, ça s'est traduit concrètement par le nombre de films.
01:02:21 En 57, le pays avait produit 50 films, en 58 plus de 130.
01:02:26 Donc sur le tournage même, cette énergie et cette espèce de mobilisation politique se ressentait.
01:02:36 Il y a une des actrices, Qin Yi, qui joue l'héroïne, elle se souvient dans ses mémoires,
01:02:43 elle dit que sur le tournage, tout le monde jouait de manière ultra-gauchiste, qu'il y avait un petit saut.
01:02:49 Elle dit aussi que notre ami Gérald Tannenbaum, l'acteur américain, faisait comme...
01:02:55 Il faut dire qu'il vivait un peu une vie particulière.
01:02:59 Il était dans un des meilleurs hôtels de Pékin où il y avait les experts étrangers, l'hôtel de l'amitié.
01:03:05 Il bénéficiait d'un salaire de 100 yuan, qui était un salaire assez confortable, et plus une prime de 6 yuan pour ses transports.
01:03:11 Mais pour ce film, il mange avec les acteurs chinois, il fait tout comme les acteurs chinois, etc.
01:03:16 Donc elle le remarque.
01:03:18 Autre élément, dans la première version, et c'est là pour montrer à la fois l'enjeu politique de ce film,
01:03:26 qui était supervisé par Chuan Lai.
01:03:30 La première version, qui n'a pas plu à Chuan Lai, on voyait Lin Zeshu,
01:03:37 qui finit par se faire démettre par l'empereur, qui partait et envoyait la chute de Guangzhou, la chute de Canton.
01:03:45 Mais finalement, Chuan Lai impose une sorte de happy end Maoiste, je dirais, et c'est celle que l'on va voir.
01:03:52 Extrait numéro 7.
01:03:54 Extrait numéro 8.
01:03:57 Extrait numéro 9.
01:04:00 Extrait numéro 10.
01:04:28 Extrait numéro 11.
01:04:31 Extrait numéro 12.
01:04:33 Extrait numéro 13.
01:04:59 Extrait numéro 14.
01:05:01 Extrait numéro 15.
01:05:04 Extrait numéro 16.
01:05:06 Extrait numéro 17.
01:05:09 Extrait numéro 18.
01:05:12 Extrait numéro 19.
01:05:15 Extrait numéro 20.
01:05:17 Extrait numéro 21.
01:05:19 Extrait numéro 22.
01:05:22 Extrait numéro 23.
01:05:25 Extrait numéro 24.
01:05:27 Extrait numéro 25.
01:05:30 Extrait numéro 26.
01:05:33 Extrait numéro 27.
01:05:35 Extrait numéro 28.
01:05:37 Extrait numéro 29.
01:06:05 Alors oui, j'avais oublié cet extrait.
01:06:07 En fait, c'est le moment où Lin Zexu est démis de ses fonctions.
01:06:11 Donc là, le peuple va le voir, les masses viennent le voir et lui disent « Lin Zexu, vous ne pouvez pas partir, ce n'est pas possible ».
01:06:18 Et là, la femme lui dit « on ne peut pas laisser ces diables d'étrangers rentrer dans la ville de Canton ».
01:06:28 Et là, il dit « oui, vous avez raison, il faut qu'on soit courageux ensemble, il faut qu'on se batte tous ensemble, etc. ».
01:06:34 Et en fait, ce que souligne aussi cette partie-là, c'est l'alliance à la fois du peuple et de Lin Zexu.
01:06:41 Donc le prochain extrait, là c'est vraiment le « Happy End Maoïste ».
01:06:49 Voilà, on va passer tout de suite sur cet extrait.
01:06:54 [Musique]
01:06:59 [Musique]
01:07:25 [Musique]
01:07:34 [Musique]
01:08:03 [Musique]
01:08:25 [Musique]
01:08:38 [Musique]
01:09:01 On peut dire quand même que là, c'est le « Shut up » de la propagande maoïste.
01:09:06 En gros, on ne finit pas sur une défaite, on finit sur une victoire.
01:09:12 Et il arrive à faire de ce qui était une défaite une victoire.
01:09:16 Il prend un épisode particulier qui est la bataille de San Yuan Li où les paysans chinois ont mis la pâtée aux Britanniques, soi-disant.
01:09:25 Et donc on finit avec une voix-off qui explique que les colonialistes étrangers ont voulu endormir les Chinois avec l'opium, etc.
01:09:38 Mais ils n'ont fait que les réveiller et que ça a été le début de la guerre contre l'impérialisme et la société semi-féodale, etc.
01:09:45 Donc en fait, on est vraiment dans le film de propagande, mais en tout cas très très bien fait, avec beaucoup de budget à l'époque.
01:09:53 Alors, ce qu'on peut dire, c'est que malgré tout, même si Chiang Chun-li participe de cette propagande,
01:10:03 ça ne va pas l'empêcher en 1966 d'être emporté par la révolution culturelle.
01:10:08 En fait, comme son acteur fétiche Zhao Dan, il commence déjà à avoir des problèmes en 1964.
01:10:14 Parce qu'en fait, de fait, la révolution culturelle a commencé au sein des milieux culturels dès 1964, deux ans auparavant, sous l'égide de Madame Mao.
01:10:27 Il commence à avoir des problèmes. En fait, on lui demande de faire un film adapté d'une pièce nord-coréenne.
01:10:36 Et en fait, c'est cette adaptation qui va lui causer des problèmes.
01:10:43 Chiang Chun-li le voit et lui dit qu'il faut absolument qu'il aille voir Madame Mao.
01:10:48 Donc il a une rencontre avec Madame Mao qui ne se passe pas bien du tout.
01:10:52 Elle lui dit en gros qu'elle lui reproche de ne pas être du côté du prolétariat et que son film lui donne des frissons.
01:11:00 Et donc ça marque pour lui le début de la fin.
01:11:06 Au début de la révolution culturelle, les gardes rouges vont lui reprocher tous ses films.
01:11:14 En fait, tous ses films vont être attaqués.
01:11:16 Même le Lin Zexu que nous venons de voir est dénoncé comme un film de droite.
01:11:22 On lui reproche d'avoir mis en scène l'alliance des masses sous l'égide d'un fonctionnaire féodal.
01:11:32 Notamment dans l'extrait, on voit à un moment donné, le peuple demande à Lin Zexu de trouver une voie,
01:11:39 de trouver comment faire, etc. Et les gardes rouges vont lui reprocher.
01:11:44 Donc ils disent que c'est, comme les expressions de l'époque, une herbe vénéneuse, du Cao, et un modèle noir, Hei Yang Pan.
01:11:53 On lui reproche aussi d'avoir diffamé les masses populaires en ignorant la lutte des classes.
01:11:59 Donc il va être emprisonné en 1967.
01:12:02 On ressort en plus tous ses vieux dossiers, notamment sa période de Shanghai, quand il était avec les nationalistes.
01:12:08 Et il va mourir en prison en 1969, des suites de violences et de torture.
01:12:15 Un autre réalisateur pour le dernier film de ce soir, sur la guerre de l'opium, c'est une autre période.
01:12:25 Xi Yeting, réalisateur qui a eu des problèmes au début de la révolution culturelle.
01:12:33 C'est un réalisateur assez connu, qui a fait beaucoup de films de propagande aussi dans les années 60.
01:12:41 Il a eu quelques problèmes au début de la révolution culturelle, mais il a su la traverser mieux que Zheng Chun-li.
01:12:50 Il est ressorti. Madame Mao lui confie des films, et notamment Le Détachement Rouge Féminin.
01:12:56 Je ne sais pas si certains d'entre vous l'ont vu, mais c'est un des opéras modèles qui sont adaptés au moment de la révolution culturelle.
01:13:06 Alors c'est 1997. Ce film, vous avez remarqué qu'à chaque fois c'était des dates bien particulières.
01:13:14 Le centenaire du traité de Nankin, les dix ans de la République populaire de Chine.
01:13:22 En 1997, c'est la rétrocession de Hong Kong. Donc on décide de faire ce film à l'occasion de la rétrocession de Hong Kong.
01:13:29 On confie ce film à Xi Yeting. Il organise un certain nombre de groupes, il regarde ce qui a été écrit, etc.
01:13:36 Et là c'est intéressant, on bascule dans une autre période. C'est pour ça que je trouve intéressant d'en parler ce soir.
01:13:43 On n'est plus dans la période du haut maoïsme, on n'est plus dans l'exaltation des masses.
01:13:49 On est plutôt dans un nouveau récit national. Parce que je parlais du récit national, on est dans un autre récit national.
01:13:57 On est huit ans après Tiananmen, le parti communiste chinois doit réinventer une légitimité.
01:14:05 Et dans un contexte d'ouverture au monde de post-socialisme et de post-capitalisme.
01:14:13 Ce film de Xi Yeting est intéressant parce que c'est un film que lui a produit en hypothéquant ses propriétés.
01:14:23 C'est à la fois un film qui s'inscrit dans la propagande du parti État, mais en même temps qui est aussi une aventure entrepreneuriale personnelle.
01:14:33 Ce qui est intéressant c'est qu'il annonce aussi, enfin en tout cas il confirme, ces nouveaux films de propagande
01:14:39 qui ne sont plus des films comme dans les années 60, mais qui sont des films de propagande, de nouveaux styles.
01:14:47 Ils sont désignés en chinois par une expression qui a été avancée à partir de 1987, c'est "Zhu Xuan Lu".
01:14:59 "Zhu Xuan Lu" c'est le leitmotiv d'une mélodie.
01:15:05 En gros, ce sont des films qui doivent représenter un leitmotiv de l'État-Parti.
01:15:13 C'est un peu l'ère du moment.
01:15:18 Et là on n'est plus sur la notion de peuple, on est plutôt sur la notion de "Min Zhu".
01:15:26 C'est difficile à donner la nuance.
01:15:30 On n'est plus vraiment dans la lutte des classes, mais plutôt dans une revendication nationale.
01:15:36 L'idée c'est de mettre en valeur un récit national qui soit plus simplement dans un récit d'humiliation,
01:15:45 mais qui est aussi dans un récit de grandeur nationale.
01:15:49 Et donc ce que je trouve intéressant dans ce film de 1997, c'est qu'il annonce une période suivante
01:15:55 où on sera beaucoup moins sur la désignation des étrangers, mais beaucoup plus dans l'exaltation et la mise en valeur d'une grandeur nationale.
01:16:03 Et pour moi c'est un film charnière parce que justement la figure de Lin Zexu n'est plus du tout la même que celle qui est représentée dans le film de 1959.
01:16:17 C'est un fonctionnaire qui se pose beaucoup plus de questions,
01:16:22 qui se rend compte qu'il faut étudier l'étranger, qu'il y a des choses aussi intéressantes à regarder à l'étranger,
01:16:34 que la Chine ne peut pas faire face, que la Chine est en retard sur le plan militaire.
01:16:42 Les personnages sont beaucoup plus complexes, notamment le personnage de celui qui remplace Lin Zexu.
01:16:50 Et donc c'est un film qui apparaît comme étant un moment charnière dans l'histoire de la Chine et l'histoire du cinéma de propagande chinois.
01:17:02 Je vous propose de voir l'extrait du film.
01:17:08 [Musique]
01:17:17 [Brouhaha]
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01:20:29 On voit bien qu'on est plus dans la démonstration de force par rapport au film précédent de Lin Zexu sur le même événement historique.
01:20:43 Une démonstration de force qui s'applique aussi au film. C'est un film qui a eu énormément de budget. La presse a souligné lors de la préparation du film à la fois le budget, le nombre de figurants, le temps que ça a pris.
01:20:57 Et donc cette ambition, on sent bien qu'on passe dans une autre époque. C'est-à-dire qu'on n'est plus simplement dans un discours sur l'humiliation, mais on est dans un discours sur la revendication, sur la puissance, sur la force.
01:21:07 On est un discours sur la revendication de faire un cinéma qui puisse à la fois être de propagande, mais aussi rapporter de l'argent et devenir une sorte de concurrent à Hollywood.
01:21:19 On va peut-être passer, et là c'est juste un extrait, peut-être les deux extraits si c'est possible de passer, de ne pas s'arrêter, mais de regarder les deux dans la suite.
01:21:28 Le suivant, c'est intéressant, c'est le seul moment où on parle vraiment de Hong Kong. Dans tous les films que je vous ai montrés ce soir, c'est le seul moment où on raconte le moment où les Britanniques organisent l'arrivée à Hong Kong.
01:21:45 Et puis le dernier, c'est le départ de Lin Zexi. Voilà. Il faut prendre les deux dans la foulée.
01:21:53 [Musique]
01:22:00 [Bruit de vent]
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01:23:04 [Bruit de feu]
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01:24:19 Le dernier extrait, je l'ai choisi parce que justement, il raconte un peu l'ambivalence de Lin Zexi par rapport à l'étranger.
01:24:24 C'est-à-dire qu'il y a cette idée que... Donc l'assistant avec lequel il parle, c'est le fils d'un marchand d'opium qui est allé à l'étranger,
01:24:34 qui a vécu avec des étrangers et qui lui avait parlé à la fois des costumes étrangers.
01:24:41 Donc j'ai dit c'est moche, c'est très très moche, mais en même temps c'est plus pratique quand on bouge.
01:24:46 Et puis il lui avait parlé aussi des couverts. Et il dit que ces "Minsu", ces "Minsula", il ne faut pas les mépriser, il ne faut pas les sous-estimer.
01:24:53 Et ce que je trouve intéressant, c'est que ça annonce aussi un changement en Chine, c'est-à-dire qu'on passe d'un discours,
01:25:02 le discours de l'humiliation, on passe à plus une réflexion, en tout cas qui va s'affirmer jusqu'en 2008, sur qu'est-ce que c'est être un grand pays en fait.
01:25:11 C'est quoi, qu'est-ce que ça veut dire être un grand pays, qu'est-ce que ça implique en termes d'éducation.
01:25:17 On voit quand il passe et il dit que l'avenir c'est justement d'éduquer en termes aussi militaires, il y a beaucoup ça aussi dans le film.
01:25:24 J'étais beaucoup beaucoup trop long, on va finir avec une bande-annonce.
01:25:29 Et c'est juste pour vous montrer le dernier état pour moi des films de propagande "chinois".
01:25:35 Et c'est un clin d'œil aussi au festival parce que vous avez un, ça a été fait par...
01:25:41 Et là on n'est plus du tout, et c'est pour ça mon hypothèse, je pose une hypothèse, je pense qu'on n'aura plus pour l'instant de films sur la guerre de l'opium,
01:25:50 mais on aura des films plutôt sur des victoires.
01:25:53 On n'est plus tellement sur le récit sur l'humiliation, on est passé à autre chose, on est sur un récit sur l'affirmation nationale et la revendication de la grandeur.
01:26:01 Et aujourd'hui on est plutôt sur des films historiques qui racontent des victoires et en l'occurrence aussi des guerres, la guerre de Corée contre les américains.
01:26:12 Et le dernier, c'est une bande-annonce que je vais vous passer parce que c'est vraiment le dernier état des films de propagande chinois
01:26:17 et qui correspond tout à fait à ce qu'avait annoncé ce film de 97, c'est-à-dire des films hollywoodiens grand budget avec en l'occurrence Chen Kaige
01:26:28 qui est un des réalisateurs de la cinquième génération et deux réalisateurs de Hong Kong, Tsui Hark et Dante Lam.
01:26:37 Et donc ils ont repris un épisode historique qui est la guerre de Corée, la bataille du lac Changjin. Et voilà, juste on va finir comme ça.
01:26:47 Cette guerre sera rapide.
01:26:51 Je crois que nous allons réussir.
01:27:10 Corée gagne!
01:27:12 C'est la première fois que nous nous rencontrons face à l'armée américaine.
01:27:23 Tu ne peux pas mourir ici!
01:27:33 Continuez à attaquer!
01:27:36 C'est la dernière fois que nous nous rencontrons face à l'armée américaine.
01:27:39 Lâchez-moi!
01:27:49 Tu ne peux pas les laisser passer.
01:27:53 Laissez-les rester ici.
01:27:55 Tu es mort!
01:27:58 Je suis venu te chercher.
01:28:04 Je suis venu te chercher.
01:28:06 Tu n'as jamais joué au combat.
01:28:09 Tu vas le faire.
01:28:12 Tu vas y arriver.
01:28:33 Je vous recommande aussi un autre film.
01:28:35 C'est un autre réalisateur de la cinquième génération, Chang Yimou, qui lui a réalisé un film qui en anglais s'appelle "Le sniper" qui est aussi sur la guerre de Corée.
01:28:42 Je vous remercie beaucoup pour votre écoute attentive.
01:28:44 Merci beaucoup.
01:28:46 (Applaudissements)