• il y a 8 mois
Le projet de loi d'orientation sur l'agriculture est présenté en conseil des ministres ce mercredi : Pascal Lavergne député Renaissance de Gironde, ingénieur agronome, éleveur et rapporteur du texte est l'invité de 6h20. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-6h20/l-invite-de-6h20-du-mercredi-03-avril-2024-4281345

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00:00 6h21, cela fait plus d'un an que les agriculteurs l'attendent, le projet de loi agricole, plusieurs fois repoussé,
00:05 va enfin être présenté ce matin au Conseil des ministres.
00:08 Le gouvernement l'a d'ailleurs retravaillé pour prendre en compte la colère qui s'est exprimée lors des manifestations paysannes au début de l'année.
00:14 Et je reçois ce matin le rapporteur de ce texte. Bonjour Pascal Lavernier.
00:18 Bonjour.
00:18 Vous êtes député Renaissance de la Gironde et éleveur bovin.
00:22 La revendication numéro un des agriculteurs, c'est de mieux gagner leur vie.
00:25 Est-ce qu'ils vont être mieux rémunérés grâce à ce projet de loi ?
00:28 Alors écoutez, ce projet de loi, il n'avait pas pour objectif effectivement de parler de la rémunération en elle-même.
00:35 Ce sera étudié évidemment, mais dans le cadre, on va dire, d'une autre loi ou potentiellement de modification de loi existante,
00:43 en l'occurrence EGalim dont on a beaucoup parlé pendant la crise agricole.
00:47 Mais ce texte-là, il a pour vocation à donner un cadre, à donner une vision pour l'agriculture
00:53 et à voir comment on forme de nouvelles générations pour devenir agriculteur dans un contexte de changement climatique notamment.
01:01 Et alors, je vais quand même revenir sur la deuxième revendication avant d'apporter justement cette vision de l'agriculture et la crise des vocations.
01:08 Les agriculteurs, on les a beaucoup entendus réclamer une simplification des normes, simplification administrative,
01:13 qu'ils disent trop nombreuses, trop lourdes ces normes. Est-ce que là, vous estimez y répondre avec ce texte ?
01:18 Alors, il y a déjà des réponses qui ont été apportées par le gouvernement par la voie réglementaire.
01:22 Un certain nombre de réponses ne peuvent pas être apportées par voie réglementaire.
01:26 Elles seront effectivement dans ce projet de loi.
01:27 Alors, il y a quoi par exemple ?
01:29 Écoutez, il y a notamment les mesures par rapport à l'échelle des peines quand on arrache une haie,
01:34 où en fait, on pouvait finalement être mis en prison comme si on avait tué quelqu'un.
01:38 J'exagère un petit peu, mais c'était un petit peu ça.
01:40 Mais il y a déjà des paysans qui sont allés en prison pour avoir arraché une haie ?
01:44 Ah ben oui, pour avoir arraché en fait 20 mètres de haie, on pouvait écouper...
01:48 On pouvait, mais est-ce que ça a déjà eu lieu ?
01:51 Évidemment, mais à un moment donné, on ne peut pas avoir une loi ou une échelle des peines
01:59 qui est comprise comme étant trop forte.
02:02 Ça contribue à décourager et à véhiculer une ambiance délétère pour les agriculteurs
02:10 en les montrant du doigt de façon systématique.
02:13 D'accord, donc des peines plus faibles si on taille une haie en dehors des périodes autorisées.
02:16 Entre autres, évidemment, mais il y a plein d'autres choses en termes de simplification.
02:20 Vous savez que pour monter par exemple un projet pour faire du poulet,
02:23 je veux dire d'ailleurs au passage que 50% du poulet que nous mangeons en France,
02:28 nous ne le produisons pas.
02:30 Tout simplement parce que nous avons des règles de production
02:34 qui sont aujourd'hui beaucoup plus contraignantes,
02:36 qui font que 1) nous savons produire du poulet mais qui est beaucoup plus cher
02:40 que ce que le consommateur est capable d'acheter,
02:43 et les conditions de production aujourd'hui pour pouvoir produire du poulet
02:47 que le consommateur achète, nous ne sommes plus capables de les mettre en œuvre dans notre pays.
02:51 Et donc ce texte a changé quoi ?
02:53 Il faut également simplifier sans doute.
02:54 Alors on ne va pas revenir sur le bien-être animal,
02:57 on ne va pas revenir sur les règles du respect de l'environnement ou du voisinage.
03:03 Néanmoins, il faut faire en sorte que quand quelqu'un a un projet d'un poulailler
03:08 qui coûte extrêmement cher, que la procédure ne dure pas 10 ans,
03:12 qu'à un moment donné les recours qui peuvent être intentés en direction du porteur de projet,
03:20 ils cessent pour qu'enfin on dise oui ou on dise non.
03:23 Est-ce que simplifier ça veut dire moins de contraintes environnementales ?
03:25 C'est ce que vous reproche la Confédération Paysanne notamment, de sacrifier l'écologie.
03:28 On peut reprocher plein de choses mais je crois que depuis très longtemps
03:32 les agriculteurs ont compris le message que la société leur envoie
03:37 et la nécessité de respecter l'environnement et la biodiversité.
03:41 Tout simplement parce que c'est quand même le milieu dans lequel ils vivent de façon permanente
03:44 qu'ils observent et qu'ils voient évoluer.
03:46 Effectivement, les pratiques qu'on a eues pendant un certain nombre d'années
03:49 et qui sont d'ailleurs encore en cours à d'autres endroits de la planète,
03:52 et d'autres endroits de la planète où on déforeste et où on a des pratiques
03:56 en matière de fertilisation des sols extrêmement néfastes pour la structure des sols,
04:02 il y a bien longtemps qu'on a changé nos pratiques pour être beaucoup plus respectueux de nos sols
04:06 et on continuera à le faire.
04:07 Pascal Lavergnel, intitulé de ce projet de loi "A changer",
04:10 vous avez ajouté le terme de "souveraineté" dans le texte.
04:13 Souveraineté en matière agricole, ça veut dire quoi exactement ?
04:16 Écoutez, c'est la capacité finalement d'un peuple, la souveraineté agricole,
04:19 si on reprend une définition mondiale, la capacité d'un peuple à définir sa politique agricole
04:26 pour pouvoir se nourrir.
04:28 Là, ce que l'on souhaite, c'est définir une politique agricole
04:31 qui permettra de produire ce que nous sommes en capacité de consommer dans notre pays.
04:37 Ça veut dire ne dépendre d'aucun autre pays pour se nourrir ?
04:39 Et pas ne dépendre d'aucun autre pays, mais c'est de faire en sorte d'en dépendre le moins possible.
04:43 Aujourd'hui, nous sommes très dépendants, je l'ai dit, par rapport aux poulets.
04:46 Il faut que l'on puisse effectivement reconquérir cette forme de souveraineté
04:51 et nous le sommes également en matière de protéines végétales.
04:55 Vous savez qu'on fait consommer beaucoup de soja OGM qui vient du Brésil notamment
05:00 et aujourd'hui, il faut qu'on renforce encore une fois de plus le plan protéines qui a déjà été mis en place.
05:06 Mais au-delà des mots, le fait d'inscrire, de marquer cette souveraineté en matière agricole, ça changerait quoi ?
05:11 Je vous donne un exemple, il y a eu récemment une rivière quasiment à sec dans les Pyrénées-Orientales
05:15 avec une bataille autour du débit.
05:17 Est-ce qu'on maintient le débit, même faible, pour conserver la biodiversité, les poissons notamment qui y sont ?
05:22 Ou est-ce qu'on le réduit pour donner plus d'eau à l'irrigation ?
05:24 Est-ce que le fait de consacrer cette souveraineté donne plus de poids aux agriculteurs ?
05:28 Non, écoutez, c'est pas comme ça qu'il faut envisager la chose.
05:33 Évidemment que le partage de l'eau, il est nécessaire, puisque les plantes, elles poussent avec de l'eau, ça tout le monde le sait.
05:40 Si on veut effectivement continuer à avoir une agriculture qui soit en capacité de nourrir les Français,
05:46 il faut évidemment qu'on puisse partager l'eau.
05:48 Partager, ça veut pas dire mettre les rivières à sec, ça veut peut-être dire les stocker de l'eau au moment où elles tombent en abondance
05:55 pour pouvoir maintenir le débit des tiages sur une rivière.
05:58 Vous savez, moi je suis dans une vallée, qui s'appelle la vallée du Drô, ça fait 30 ans qu'on fait ça.
06:01 On stocke 15 millions de mètres cubes d'eau et on la restitue au milieu naturel pendant l'été.
06:06 Pour deux usages, d'abord l'usage agricole, enfin d'abord, y'a pas de priorité, l'usage agricole,
06:12 et maintenir un débit des tiages pour que la biodiversité puisse continuer à exister.
06:16 Jamais nous n'avons eu dans cette vallée une biodiversité aussi importante que depuis qu'on a pratiqué ainsi.
06:21 Pascal Lavergne, merci, on n'a pas eu le temps d'évoquer le volet sur le renouvellement des générations.
06:29 On l'a évoqué dans un reportage qu'on a déjà diffusé ce matin sur France Inter.
06:32 Je rappelle que vous êtes député Renaissance de la Gironde et éleveur bovin.
06:36 Quant à ce projet de loi, le calendrier c'est mai à l'Assemblée et juin au Sénat, c'est ça ?
06:40 Oui, absolument, c'est ça.
06:42 Merci beaucoup Pascal Lavergne.
06:43 Merci.

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