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Gérard Bertrand, viticulteur et négociant en vin, répond aux questions d'Alexandre Le Mer. Il est partenaire du Salon Wine Paris & Vinexpo Paris qui se déroule du 12 au 14 février à Paris Porte de Versailles.
Retrouvez "L'invité éco" sur : http://www.europe1.fr/emissions/linterview-eco

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Transcription
00:00 - Europe 1, il est 6h41. - C'est le grand rendez-vous annuel des professionnels des vins et spirituels internationales.
00:06 Wine Paris et Vines Expo Paris ouvrent ses portes aujourd'hui et jusqu'à mercredi,
00:11 c'est l'occasion de se pencher sur Europe 1, sur la santé de la filière.
00:14 - Avec votre invité, Alexandre Lemer, c'est Gérard Bertrand, viticulteur, entrepreneur et membre du comité de réflexion du salon.
00:20 - Bonjour Gérard Bertrand. - Bonjour.
00:23 - Vous êtes une figure emblématique du monde du vin, 1000 hectares de vignes, votre vignoble de cœur c'est le Languedoc.
00:29 Alors vous avez des dizaines de domaines, votre vin on le trouve dans le monde entier.
00:34 Je rappelle que vous avez même été sacré meilleur vigneron du monde 2023 par la revue britannique The Drinks Business.
00:40 C'est un rendez-vous important ce salon qui s'ouvre aujourd'hui, c'est le monde entier qui vient faire ses courses en quelque sorte.
00:47 - Oui tout à fait, c'est un rendez-vous qui existe même depuis 3 ans puisqu'à l'origine c'était à Bordeaux mais c'était au mois de juin.
00:54 Là c'est le timing qui est parfait parce que faire revenir tous les importateurs et distributeurs de la planète au mois de février,
01:01 c'est la période où on achète des vins, c'est le nouveau millésime qu'on présente.
01:06 Donc c'est une très bonne chose pour le dynamisme du vin français et on en a besoin.
01:12 - Vous en avez besoin parce que les revenus des vignerons sont en baisse Gérard Bertrand ?
01:17 - On en a besoin parce qu'en fait il y a eu l'avant et l'après Covid,
01:20 aujourd'hui les choses sont plus compliquées parce que la situation géopolitique est plus compliquée,
01:26 aussi parce qu'il y a le retour de l'inflation, des taux d'intérêt,
01:29 donc partout dans le monde les distributeurs font plus attention.
01:34 Donc ça exige d'être plus performant et c'est ce qui a été fait avec Vines Expo, avec le comité,
01:40 pour redonner à la France le rôle qu'elle mérite avec ce salon.
01:44 - On voit que l'heure aujourd'hui elle est aux campagnes d'arrachage des vignes,
01:48 c'est vrai en particulier dans le Bordelais où on parle de 8000 hectares qui pourraient être arrachés,
01:53 alors à la demande d'ailleurs des viticulteurs,
01:55 pour lutter à la fois contre une maladie de la vigne,
01:57 mais aussi à cause de la surproduction, sur fond de baisse chronique de la consommation,
02:02 ça c'est la réalité à laquelle est confronté le métier Gérard Bertrand ?
02:06 - Oui, en fait le métier est plus compliqué qu'avant parce qu'on a quand même eu une période facile
02:13 pendant une dizaine d'années,
02:15 là en fait il y a une concurrence accrue et aujourd'hui, la jeune génération en particulier,
02:20 certains se sont un peu détournés du vin pour aller boire des spiritueux, surtout des cocktails,
02:26 les cocktails on le vend en poupe,
02:28 donc en fait il y a toujours bien sûr, c'est quand même un marché immense,
02:32 le vin c'est 250 milliards de bouteilles,
02:34 donc il y a une baisse de consommation dans certains pays, pas partout,
02:39 et puis le marché chinois s'est contracté aussi,
02:42 le marché chinois c'était quand même un Eldorado pour beaucoup de vins,
02:46 Bordeaux en particulier,
02:48 donc aujourd'hui il faut faire face à cette crise qui est,
02:51 elle est un peu structurelle mais elle est surtout conjoncturelle,
02:54 donc je pense aussi que la filière vins française doit investir davantage en termes de moyens,
03:01 en termes de communication dans le monde,
03:03 pour faire connaître cet art de vivre en français,
03:06 et aussi la diversité des terroirs,
03:08 qui parfois est un avantage,
03:10 mais parfois aussi est plus complexe pour la promotion.
03:14 - Alors lorsqu'on parle de baisse de la consommation,
03:16 il ne faut jamais perdre de vue que c'est toujours une bonne nouvelle pour la santé publique,
03:20 naturellement, en tout cas vous les vignerons, les viticulteurs,
03:24 ça vous oblige à repenser votre métier,
03:26 de quelle façon ?
03:27 Est-ce que c'est moins de quantité, plus de qualité Gérard Bertrand ?
03:31 Je parle à quelqu'un, vous avez largement participé vous-même à la montée en gamme dans le Languedoc.
03:37 - Oui, alors en fait si vous voulez, je pense que la période où les gens buvaient beaucoup,
03:42 où le vin était un aliment, il y a 50 ans qu'elle est derrière nous.
03:45 Aujourd'hui, il y a tous les messages de prévention qui ont bien fonctionné,
03:49 aujourd'hui boire du vin c'est devenu le vin plaisir,
03:52 donc c'est plus le sujet.
03:54 Non, le sujet c'est qu'on a eu la progression pendant 30 ans,
03:59 parce qu'on a fait le développement des marchés partout sur la planète.
04:04 Aujourd'hui, maintenant, il faut travailler différemment,
04:07 et il faut un peu se réinventer,
04:09 et il faut aussi conquérir ce qu'on appelle l'avant et l'après, le repas,
04:13 puisque ce qu'on dit à des happy hour en particulier aux Etats-Unis,
04:17 les gens boivent de plus en plus de vin en dehors des repas,
04:21 donc ça veut dire des vins frais, ça veut dire peut-être aussi des rouges un peu plus légers.
04:25 - Moins alcoolisés ?
04:27 - Moins alcoolisés un peu, mais plus légers aussi, plus faciles à boire,
04:30 vous avez vu l'essor du rosé depuis 10 ans,
04:33 nous lançons des rouges frais par exemple,
04:35 parce qu'il faut aussi répondre à la demande du marché.
04:39 - La demande du marché, le vin bio également,
04:42 et là dans ce domaine vous êtes également un précurseur,
04:45 je crois que vous avez 17 châteaux qui sont cultivés en biodynamie,
04:49 les vins bio sont de plus en plus demandés, Gérard Bertrand ?
04:52 - Oui, la catégorie des vins bio aujourd'hui,
04:54 elle est vraiment installée dans tous les plus grands marchés du monde,
04:57 les gens sont beaucoup plus sensibles à ce qu'ils boivent, à ce qu'ils achètent,
05:00 il y a eu un peu de bio-bashing en particulier en France,
05:03 pour des raisons un peu obscures,
05:05 mais aujourd'hui le bio c'est une vraie catégorie,
05:07 et ça donne forcément pour ceux qui sont sensibles à l'environnement,
05:12 sensibles à la biodiversité,
05:14 une raison supplémentaire de faire un choix différent.
05:17 - Ce salon n'est pas que celui des professionnels du vin,
05:20 et vous l'avez évoqué il y a un instant,
05:22 c'est aussi le salon des spiritueux,
05:24 qui se portent beaucoup mieux que le vin,
05:26 le marché est en forte croissance,
05:28 il y a quelles raisons à votre avis, Gérard Bertrand ?
05:30 - Les raisons, il y en a deux essentielles,
05:32 la première c'est que des spirituels on en produit tous les jours,
05:35 alors qu'on ne vendent qu'une fois par an,
05:37 donc ça donne des marges qui sont beaucoup plus importantes,
05:40 et la deuxième c'est que la filière spirituelle est organisée
05:44 avec 5 compagnies dans le monde qui contrôlent 70 ou 80 % du secteur,
05:51 donc elles sont très puissantes financièrement,
05:54 et quand elles lancent des produits, elles les lancent mondialement,
05:57 et donc c'est très différent,
05:59 parce que les filières ne sont pas comparables.
06:02 - Il y a cette force de frappe marketing,
06:04 avec laquelle les vignerons ne peuvent pas rivaliser,
06:07 même si vous avez des moyens,
06:09 et ce salon en fait partie bien naturellement.
06:12 On rappelle que les spiritueux et le vin,
06:14 aussi bons soient-ils, s'apprécient avec modération,
06:17 et merci à vous Gérard Bertrand, viticulteur, entrepreneur,
06:20 à quelques heures donc de l'ouverture de ce salon,
06:23 Wine Paris, Evine Expo Paris, à la Porte de Versailles,
06:25 C'est ça et c'est jusqu'à mercredi. Merci.

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