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Dans son édito du 08/02/2024, Paul Sugy revient sur la récession sexuelle qui touche la France.

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Transcription
00:00 Déjà Romain, vous avez raison d'abord d'être prudent en privilégiant la justice médiatique à celle des prétoires.
00:04 Le mouvement #MeToo a montré aussi les dangers de cette façon de se rendre justice de manière expéditive.
00:09 Quand un témoignage vaut une preuve, une indignation collective devient une sentence et qu'un article de presse remplace le verdict.
00:14 Ce que l'on peut dire en revanche, sans présumer des faits mais sans risque non plus de se tromper,
00:18 c'est que ces accusations sont un clou de plus dans le cercueil des années d'insouciance postérieure à mai 68.
00:24 On voit que les enfants de cette nouvelle vague, de cet âge dehors de la psychanalyse aussi,
00:28 se réveillent avec la gueule de bois d'un long rêve où la dissolution des mœurs,
00:31 la quête effrénée de jouissance, était un peu aux élites bourgeoises et cultivées comme un nouveau Nirvana.
00:36 Les années où Libé pouvait s'enrougir, publier le récit insoutenable dans ses détails,
00:40 des ébats qu'un auteur affirmait avoir entretenu avec des fillettes de 5 ans.
00:43 Cet âge dehors donc a vécu, les derniers nostalgiques se cachent de l'être, ceux qui l'ont été s'en mordent les doigts.
00:49 Et le bon sens retrouve un peu ses droits, même si cette désillusion révèle chez d'anciennes victimes
00:53 la conscience d'avoir été odieusement abusé. Mais ce retour à la raison est plutôt une bonne chose.
00:58 Aujourd'hui, on a même l'impression que c'est tout l'inverse.
01:02 Une étude de l'IFOP a montré cette semaine que les jeunes ont de moins en moins de rapports sexuels.
01:07 Bah oui, j'ai même entendu parler de récession sexuelle, c'est l'expression médiatique consacrée.
01:12 Voilà, alors c'est une expression qui est quand même un peu curieuse, voire maladroite,
01:15 puisqu'elle semble suggérer qu'il faudrait s'en alarmer comme on se catastrophe lorsqu'il y a une récession économique.
01:19 Après tout, faire l'amour, c'est déjà pas un droit, mais c'est encore moins un devoir.
01:22 Et surtout, ce qu'on voit, c'est que si un quart des 18-24 ans n'a pas fait de galipette au cours de la dernière année,
01:27 c'est parce que les jeunes sont aussi plus regardants sur leurs partenaires.
01:30 Ils sont moins enclins peut-être qu'avant à pouvoir coucher n'importe comment avec n'importe qui.
01:34 Alors, Paul, vous n'allez pas nous faire la morale.
01:38 Vous ne pensez pas qu'il y a aussi une peur désormais qui inhibe la sexualité ?
01:43 Si, Romain, et vous avez raison, c'est aussi ça et surtout ça qui est en jeu,
01:46 c'est qu'il y a sans doute quelque chose de triste dans le passage d'un excès à l'autre.
01:49 La mise en accusation revancharde des hommes, tous les hommes, à la faveur du mouvement #MeToo,
01:54 fait peser aujourd'hui sur le commerce amoureux tous les risques.
01:56 Dans les campus universitaires, on se demande parfois
01:59 s'il faudrait faire coucher par écrit le consentement de son partenaire avant de commencer une étreinte.
02:04 La poésie y perd ce que la sécurité juridique y gagne.
02:07 Et au fond, si hier l'insouciance coupable d'une jeunesse sexuellement débridée
02:11 a fait oublier à tort que l'emprise et le viol peuvent parfois se déguiser sous les traits du romantisme,
02:16 aujourd'hui, il ne faudrait plus voir dans l'homme amoureux qu'un port en puissance.
02:20 Et entre ces deux faces d'une même pauvreté, au fond, il n'a jamais été aussi urgent
02:24 de redonner toute sa place à la décence commune qui nous fait aujourd'hui cruellement défaut.
02:28 [Musique]
02:32 [SILENCE]

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